Orion 23: La France organise le plus grand exercice militaire de son histoire en vue d’une guerre avec la Russie

Samedi, l’opération Orion 2023 (Orion 23) de l’armée française a débuté par le largage de centaines de parachutistes dans le Tarn, dans le sud de la France. Dimanche matin, un assaut amphibie a été simulé à Sète, sur la côte méditerranéenne.

Cette photo non datée fournie jeudi 5 janvier 2023 par l’armée française montre des chars AMX-10 RC [AP Photo/Jeremy Bessat/Armee de Terre]

Cette première étape d’Orion 2023, qui se poursuit jusqu’à la fin de la semaine, implique 7.000 soldats de France, des États-Unis, d’Italie, d’Espagne, de Belgique et du Royaume-Uni, qui font tous partie de l’alliance de l’OTAN qui mène la guerre contre la Russie en Ukraine. Au cours de cette semaine, pas moins de 2.300 véhicules militaires participeront aux jeux de guerre. Parmi eux: 40 avions de guerre, plus de 100 drones, 30 navires de guerre et le porte-avions Charles de Gaulle.

Selon le général Yves Métayer, qui a dirigé l’organisation de l’opération, «nous n’avons jamais fait un exercice de cette ampleur sur une période aussi longue». Un autre officier a déclaré à France3: «La quantité de moyens mis à disposition, le degré de synergie entre les différentes armées, c’est du jamais vu depuis que je suis dans l’armée».

Cependant, le statut des jeux de guerre de cette semaine comme étant les plus importants jamais organisés sur le sol français ne durera que quelques semaines. Une deuxième phase de l’opération Orion, impliquant plus de 12.000 soldats, doit commencer à la mi-avril dans la région de Champagne.

Dans la presse capitaliste, Orion 23 est explicitement reconnu comme faisant partie des préparatifs très avancés d’une guerre terrestre totale de l’OTAN contre la Russie. En effet, en fournissant des armes offensives à l’Ukraine, les puissances de l’OTAN sont déjà engagées dans une guerre de facto contre la Russie.

L’agence de presse publique France24 a rapporté que les jeux de guerre «devraient permettre à l’armée française de se préparer à un conflit de haute intensité contre un État ennemi de force égale. (…) Dans un contexte de bouleversement géopolitique mondial, le recours à la force n’est plus tabou, et la perspective d’un conflit majeur n’est plus de la science-fiction».

Si la guerre impérialiste sanglante de la France au Mali a permis à l’armée d’affiner son utilisation des chasseurs-bombardiers et des drones modernes, ses opérations au sol reposent sur des groupes de forces spéciales plus petits. Le général Vincent Desportes a déclaré à France24 qu’Orion 23 est essentiel pour «retrouver le savoir-faire en termes de gestion de grandes forces interarmées que nous avons perdu parce que pendant deux décennies nous nous sommes concentrés sur de petites opérations».

Le scénario fictif du jeu de guerre de cette semaine est largement rapporté dans les médias. Dans une référence à peine voilée à la Russie, une puissance hostile appelée «Mercure» a envahi un allié français appelé «Arnland». L’objectif de l’armée française est d’établir une tête de pont dans l’Arnland occupé et de commencer à repousser les forces de Mercure. Un tel scénario, qui se déroule dans le sud de l’Ukraine ou en Crimée occupée, constitue sans aucun doute un élément essentiel des plans de l’OTAN pour une confrontation directe avec la Russie.

Un autre objectif d’Orion 23 est également de se préparer à placer l’État français sur le pied de guerre. L’opération Orion a consisté à simuler une «guerre de l’information», où les deux parties luttent pour contrôler les reportages sur leurs actions. Cette opération s’inscrit dans le droit fil des efforts déployés par les puissances de l’OTAN pour empêcher le public de connaître le rôle joué par les milices néonazies ukrainiennes dans la guerre contre la Russie, et pour blanchir les crimes de guerre commis par les forces ukrainiennes.

Selon le site Internet du ministère français de la Défense, l’exercice impliquera également de nombreux ministères non militaires et «rassemblera les énergies des personnels civils et militaires qui travaillent à la cohésion de la nation française». En d’autres termes, la police et d’autres sections nominalement civiles de la machine étatique française se préparent également à des opérations de propagande et à une répression accrue des grèves et des manifestations, en cas de guerre totale.

L’opération Orion intervient en pleine explosion de la lutte des classes en France, alors que des millions de personnes défilent contre la réforme des retraites largement méprisée du président français Emmanuel Macron, qui la justifie en affirmant qu’«il n’y a plus d’argent».

Mais lorsqu’il s’agit de poursuivre les ambitions impérialistes de la classe dirigeante française et de ses alliés de l’OTAN, des centaines de milliards d’euros pleuvent comme de la petite monnaie. Orion 23, dont l’organisation a coûté 35 millions d’euros et qui implique des milliards d’euros d’équipements militaires, n’est qu’une partie d’un réarmement militaire français bien plus vaste. En janvier, Macron s’est engagé à dépenser 413 milliards d’euros pour l’armée française d’ici 2030 (contre moins de 300 milliards d’euros pour 2020-2025). Un amendement spécial adopté en octobre dernier a également ajouté 3 milliards d’euros au budget 2023 de l’armée.

Depuis le début du conflit, la France a dépensé environ 2 milliards d’euros en livraisons d’armes et autres aides à l’Ukraine. En janvier 2023, Macron a été le premier dirigeant de l’OTAN à s’engager à livrer des chars aux forces ukrainiennes, en promettant des dizaines de chars légers AMX-10 RCR. Cette année, la France achèvera la livraison de 30 obusiers autopropulsés à l’Ukraine, dont le coût unitaire s’élève à 7,5 millions d’euros. En outre, 2.000 soldats ukrainiens sont actuellement formés sur le sol français.

Tandis que des millions de personnes défilent contre la réforme des retraites largement méprisée de Macron et qu’une vaste opposition populaire à la poursuite de l’armement français de l’Ukraine contre la Russie s’approfondit, la préparation ouverte de l’armée française à la guerre avec la Russie avec les exercices Orion 23 soulève nécessairement la question: comment Macron est-il capable de verser aussi effrontément des centaines de milliards à l’armée et de préparer une guerre sanglante contre la Russie?

Le président n’a pu mener à bien sa politique que grâce au soutien des partis de la pseudo-gauche et des bureaucraties syndicales. Bien que nominalement opposé à la réforme des retraites de Macron, le chef de la France Insoumise de pseudo-gauche, Jean-Luc Mélenchon, et sa coalition NUPES (Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale) avec les sociaux-démocrates et les staliniens français affirment qu’il n’y a aucun lien entre le financement de la guerre et l’attaque de Macron contre la classe ouvrière.

Mélenchon et les syndicats appuient les livraisons d’armes de l’OTAN à l’Ukraine depuis le début de la guerre. Ils continuent de blanchir les efforts déployés par l’OTAN pendant des années pour provoquer Poutine dans son invasion réactionnaire de l’Ukraine, qui ont finalement réussi en février de l’année dernière.

Les mêmes forces soutiennent également les investissements massifs dans le réarmement français. Au début du mois, un rapport parlementaire corédigé par Anna Pic, membre du Parti socialiste (PS), et la coalition NUPES de Jean-Luc Mélenchon a appelé à un financement encore plus important des exercices pour préparer la France à «l’hypothèse d’un conflit majeur».

L’ampleur sans précédent d’Orion 23 doit être considérée comme un avertissement de l’état très avancé des préparatifs pour une guerre totale en Europe, et une autre escalade majeure de la guerre de l’OTAN contre la Russie qui menace de se transformer en une conflagration mondiale entre puissances nucléaires. Pour l’oligarchie financière qui dirige la France et les autres puissances de l’OTAN, les pertes et les coûts de la guerre doivent être supportés en grande majorité par la classe ouvrière. Les travailleurs et les jeunes qui s’opposent à la réduction des retraites, à l’austérité et aux autres attaques contre la classe ouvrière doivent donc également s’engager dans la lutte contre la guerre entre l’OTAN et la Russie.

(Article paru en anglais le 28 février 2023)

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