Vous êtes un travailleur de la construction de l’Ontario? Contactez le World Socialist Web Sitepour nous dire ce que vous pensez des contrats au rabais des syndicats et pour discuter de la création de comités des travailleurs de la base pour mener votre lutte.
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Les syndicats tentent de saborder la plus grande grève des travailleurs de la construction de l’Ontario en 20 ans. Plus de 43.000 travailleurs ont fait grève au début du mois pour obtenir des augmentations de salaire significatives dans un contexte d’inflation galopante et de rentabilité record pour les sociétés de développement immobilier et de construction.
Le syndicat qui représente le plus de travailleurs, le Labourers’ International Union of North America (LiUNA), a déjà imposé à la plupart de ses membres des conventions collectives assorties de reculs. Le LiUNA a intentionnellement dissimulé les détails des nouveaux contrats dans ce qui constitue la poursuite d’une stratégie délibérée visant à maintenir les travailleurs isolés et à liquider la grève à la première occasion. Les travailleurs forcés de voter sur des ententes de principe gardées secrètes par les syndicats et les patrons n’avaient aucun moyen de savoir à quoi ils s’engageaient.
Les quelques informations qui ont été révélées par les fuites des travailleurs de la base montrent des augmentations salariales totales d’environ 12 % ou moins réparties sur trois ans. Il s’agit en fait d’une sévère réduction de salaire si l’on considère que le coût de la vie augmente de 6,8 % annuellement.
Quinze mille charpentiers organisés sous l’égide du Carpenters’ District Council of Ontario sont toujours en grève et doivent voter sur un accord de principe ce vendredi 27 mai. Les charpentiers devraient rejeter de manière décisive l’accord de capitulation, qui contiendra sans aucun doute des augmentations de salaire inférieures à l’inflation et de nombreuses mauvaises surprises que les grévistes n’apprendront que longtemps après leur retour au travail.
La section 793 de l’International Union of Operating Engineers, qui représente les grutiers et les opérateurs d’équipement lourd, a mis fin à sa grève le 20 mai avec des augmentations de seulement 3 dollars par an au cours des trois prochaines années. Certains petits syndicats représentant les peintres et les tôliers sont toujours en négociation.
Tous les travailleurs de la construction, qu’ils soient actuellement en grève ou qu’ils aient récemment repris le travail, doivent être avertis: les dirigeants syndicaux vous ont découpés comme une tarte et vous ont vendus morceau par morceau aux associations d’employeurs, alors que vous auriez dû faire grève tous ensemble et refuser de signer jusqu’à ce que vous receviez tous une augmentation de salaire supérieure à l’inflation et des améliorations des conditions de travail.
Il n’est pas trop tard pour prendre le contrôle de ces grèves et obtenir les augmentations de salaire et les ajustements du coût de la vie dont vous avez besoin pour survivre à une inflation de 7 % et nourrir vos familles. Même les interruptions brèves et sporadiques de la construction dues à la grève ont eu un impact puissant dans toute la province.
Cependant, si vous voulez gagner, vous devez vous organiser en comités de la base complètement indépendants de la bureaucratie syndicale, composés des travailleurs les plus fiables et les plus fidèles à leurs principes. Vous devez être prêts à vous opposer à la conspiration des syndicats et des employeurs visant à vous paralyser et à vous diviser. Pour ce faire, vous devez vous organiser au-delà des différentes unités de négociation, sections locales et syndicats.
C’est tout le contraire de ce que les bureaucrates syndicaux ont fait tout au long de ces grèves.
Tout d’abord, les dirigeants des divers syndicats de la construction n’ont jamais remis en question la loi sur les relations de travail, qui limite la grève à une période de 45 jours se terminant le 15 juin. Après cette date, toute question encore en litige est automatiquement soumise à l’arbitrage, qui favorise toujours l’employeur. Essentiellement, les syndicats et les employeurs peuvent affamer les travailleurs pendant un mois et demi, en sachant qu’ils finiront par obtenir ce qu’ils veulent.
Deuxièmement, même si tous les travailleurs de la construction travaillent dans des conditions similaires et pour des salaires à peu près équivalents, ils ont été séparés les uns des autres selon des critères totalement arbitraires. Les équipes de reportage du WSWS ont visité un chantier de construction où les membres de la section locale 506 du LiUNA faisaient du piquetage alors que d’autres membres de la même section locale travaillaient à l’intérieur. En d’autres termes, la direction du syndicat a fait tout ce qu’elle pouvait pour que les employeurs soient le moins perturbés possible et que la grève soit la plus inefficace possible, y compris en envoyant ses propres membres franchir ses propres lignes de piquetage. Dans de nombreux cas, les travailleurs se sont vu refuser les indemnités de grève.
Troisièmement, la direction du syndicat a imposé aux membres de la base un black-out sur l’information. Les bureaucrates syndicaux ne divulguent qu’à la dernière seconde les détails des accords de capitulation conclus avec les employeurs, car ils savent comment les travailleurs vont réagir. Le plus souvent, les travailleurs de la base se voient montrer des «points saillants» sélectifs des contrats quelques minutes seulement avant d’être forcés de voter. Les médias sociaux sont remplis de questions et de commentaires de travailleurs demandant des détails sur tel ou tel contrat, sans réponse des responsables syndicaux. Les bureaucrates syndicaux passent beaucoup plus de temps à parler aux employeurs qu’à leurs propres membres.
Des comités de grève de la base doivent donc être mis en place de toute urgence pour présenter les revendications suivantes:
- Des augmentations de salaire de dix pour cent chaque année pour compenser les années de stagnation des salaires, ainsi que des ajustements garantis du coût de la vie;
- Tous les travailleurs de la construction en grève avec plein salaire. Personne ne travaille tant que toutes les revendications ne sont pas satisfaites;
- Pas de ratification d’ententes de principe tant que toutes les unités de négociation n’auront pas obtenu des augmentations de salaire supérieures à l’inflation;
- Répudier tous les contrats imposés de façon antidémocratique par les patrons syndicaux, les jugeant illégitimes parce qu’ils ne prévoient pas d’augmentations salariales adéquates;
- Des mises à jour quotidiennes approfondies sur les négociations entre le syndicat et l’employeur. Aucun accord secret;
Au moins une semaine entre la présentation de toute entente de principe et le vote de ratification, afin que les travailleurs aient le temps d’en étudier et d’en discuter tous les termes.
Les soi-disant dirigeants syndicaux ne sont rien d’autre que des bureaucrates privilégiés et bien payés qui n’ont rien en commun avec le travailleur moyen de la construction. Même ceux qui prétendent avoir «gravi les échelons» ont fait la paix avec la perspective pro-capitaliste des syndicats lorsqu’ils ont troqué le chantier pour la salle du conseil d’administration d’une entreprise. Ils ne considèrent pas les grévistes comme des collègues de travail dont les intérêts doivent être servis, mais comme une source de revenus de cotisations qui doit se taire et accepter sa place au bas de l’échelle.
Joseph S. Mancinelli, vice-président international du LiUNA et directeur régional du centre et de l’est du Canada, touche une rémunération annuelle totale de 402.224$. Il ne fait aucun doute que d’autres dirigeants syndicaux touchent des revenus similaires à six chiffres, ce qui les protège des difficultés que les travailleurs doivent endurer en raison de ces réductions de salaire en termes réels.
La détermination de la bureaucratie syndicale à saboter la grève sans répondre aux besoins des travailleurs découle de leur crainte qu’une véritable lutte pour des emplois sûrs et bien rémunérés puisse déclencher une explosion sociale dans des conditions où des millions de travailleurs en Ontario et dans tout le Canada ressentent les effets d’une inflation galopante, d’une pandémie mortelle qui dure depuis plus de deux ans et de la menace d’une guerre mondiale. Ils craignent comme la peste un mouvement de masse des travailleurs car il couperait court aux relations étroites des syndicats avec les partis politiques établis, qui sont tous responsables de l’imposition de l’austérité, des attaques contre les droits des travailleurs et des réductions des dépenses.
LiUNA, qui soutenait auparavant les libéraux, s’est déplacé loin à droite en jetant son soutien derrière le premier ministre Doug Ford et ses progressistes-conservateurs. Depuis son arrivée au pouvoir en 2018 avec une campagne populiste de droite calquée sur l’ex-président américain Trump à l’esprit fasciste, Ford a maintenu un bilan ininterrompu de réductions des dépenses sociales, de gel des salaires dans le secteur public et d’interventions antigrève. Les libéraux et le Nouveau Parti démocratique ne font pas mieux, ayant fait de même lorsque chacun était au pouvoir.
La réalité est que les travailleurs de la construction, comme les travailleurs de toutes les industries, ne trouveront aucune solution en soutenant l’un ou l’autre des partis établis. Tous les grands partis servent les intérêts des grands promoteurs comme PCL, EllisDon et Aecon, qui sacrifieront et ont sacrifié les emplois, les salaires et la vie des travailleurs pour leurs bilans financiers.
Les travailleurs de la construction qui cherchent un moyen de riposter doivent s’engager dans une lutte politique en créant des comités de la base pour unifier leurs grèves avec d’autres sections de la classe ouvrière qui sont également désireuses de riposter contre des décennies d’austérité capitaliste. Ces derniers mois, des grèves et des luttes courageuses ont été menées par les travailleurs du secteur public du Nouveau-Brunswick, les travailleurs du CP Rail, les opérateurs de signaux de la gare Union à Toronto et les travailleurs de la distribution de l’épicerie Metro en Ontario. Au cours des prochains mois, les enseignants et le personnel de soutien à l’éducation en Ontario, ainsi que les éducateurs et les travailleurs du secteur public en Colombie-Britannique, se prépareront à la grève. De l’autre côté de la frontière, aux États-Unis, 20.000 débardeurs se préparent à débrayer le 1er juillet, tandis que les grèves des fabricants de matériel agricole CNH dans l’Iowa et des travailleurs de la santé dans tout le pays sont déjà en cours.
Ce que toutes ces luttes requièrent avant tout, c’est une perspective socialiste et internationaliste pour les unifier et assurer la victoire. La lutte pour des salaires décents afin d’assurer un niveau de vie raisonnable, pour des lieux de travail sûrs afin de se protéger contre l’infection à la COVID-19 et prévenir les accidents du travail, et pour une retraite confortable, exige une attaque frontale contre l’emprise mortelle exercée par l’oligarchie financière capitaliste sur tous les aspects de la vie sociale et économique.
Il n’y a pas de temps à perdre! Contactez le World Socialist Web Site dès aujourd’hui pour obtenir de l’aide afin d’établir un comité de grève des travailleurs de la base sur votre lieu de travail.
(Article paru en anglais le 27 mai 2022)