En raison de l’impact combiné du variant hautement contagieux Omicron et du démantèlement de la plupart des mesures de santé publique, le Canada connaît aujourd’hui, et de loin, la plus grande vague d’infections de COVID-19 de son histoire.
Hier, l’Ontario et le Québec ont enregistré plus de 21.650 nouvelles infections, le Québec signalant 12.833 cas supplémentaires et l’Ontario 8.825. À l’échelle nationale, le nombre de cas actifs de COVID-19 s’élève à 175.000 ou plus, soit une augmentation d’environ 75% par rapport aux 103.000 cas signalés par le gouvernement fédéral il y a moins d’une semaine, le 23 décembre.
Aussi graves que soient les chiffres officiels des nouveaux cas de COVID, ils sont loin de donner une indication précise de l’étendue de la propagation du virus. En raison de la décision des gouvernements fédéral et provinciaux de laisser le virus se répandre, les capacités de dépistage dans tout le pays ont été dépassées. Les autorités sanitaires provinciales et locales exhortent désormais les gens à ne pas se soumettre à un test PCR officiel à moins qu’ils ne présentent des symptômes ou, dans certains cas, des symptômes graves.
Un médecin des urgences de la région de Toronto, commentant le fait que le nombre quotidien officiel de nouvelles infections en Ontario a oscillé autour de 10.000 ces derniers jours, a déclaré à CTV News: «Il est bloqué depuis un moment à 10.000 parce que c’est probablement le maximum que notre système peut gérer en termes de résultats positifs. C’est probablement plus proche de 100.000 si je devais deviner.»
Cette évaluation est étayée par la montée en flèche des taux de positivité des tests. Le Québec a signalé mardi que plus de 26% de tous les tests effectués dans la province au cours des 24 heures précédentes étaient positifs, soit plus de cinq fois le seuil de 5% au-delà duquel la pandémie est considérée comme hors de contrôle. D’autres provinces, dont l’Ontario et le Manitoba, ont des arriérés de tests se chiffrant en dizaines de milliers.
Les hospitalisations, qui accusent généralement un retard d’au moins deux semaines sur les taux d’infection, commencent également à augmenter. Près de 500 personnes sont actuellement traitées à l’hôpital pour la COVID-19 en Ontario, dont 187 en soins intensifs. Mardi, le Québec a enregistré 88 hospitalisations au cours des 24 heures précédentes, dont une augmentation de six patients en soins intensifs, pour atteindre 115.
Dans les conditions de ce désastre sanitaire croissant, la principale préoccupation des gouvernements et de leurs responsables de la santé publique est de savoir comment supprimer les quelques vestiges de protection de la santé publique afin de préserver les profits des sociétés. Ils suivent l’exemple du Center for Disease Control (CDC) américain, qui a pris lundi la décision scandaleuse de réduire de moitié la période d’isolement des personnes infectées par la COVID-19, la faisant passer de 10 à 5 jours seulement. Le CDC a ajouté que les personnes ayant reçu un vaccin de rappel n’auront pas besoin de s’isoler du tout, même si les données préliminaires indiquent que la dose de rappel ne confère qu’une protection de 75% contre une infection par l’Omicron et que cette protection s’estompe après seulement 10 semaines. Le fait que le CDC bafoue ouvertement les recommandations fondées sur la science a été mis en évidence par le fait que son annonce a été faite en réponse directe à l’appel lancé par les dirigeants des compagnies aériennes pour assouplir les règles de quarantaine afin que leurs activités puissent se poursuivre sans entrave.
Le ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé, a annoncé mardi que les travailleurs de la santé qui ont subi un test positif à la COVID-19 seront obligés de rester au travail s’ils ne présentent pas de symptômes, en vertu des nouvelles règles gouvernementales de «gestion» et «d’équilibre» du «risque». Dubé a déclaré qu’avec plus de 8.000 travailleurs de la santé déjà en arrêt de travail en raison d’une infection de COVID-19 ou d’un épuisement dû à la pandémie, la seule alternative aurait été de cesser de fournir des soins non urgents. Il a ajouté que le gouvernement provincial de la Coalition Avenir Québec, qui comme ses prédécesseurs est engagé dans une austérité implacable, présenterait bientôt des règles similaires afin que d’autres «travailleurs essentiels» infectés par la COVID puissent continuer à travailler.
Le médecin hygiéniste en chef de l’Ontario, Kieran Moore, bien connu pour avoir exigé plus tôt cet automne de «normaliser» les infections de COVID-19 dans les écoles, a déclaré qu’à la lumière de la décision du CDC de lundi, il présentera dans un jour ou deux des règles d’isolement révisées pour la province.
Le chœur qui réclame le quasi-abandon des exigences en matière d’isolement s’amplifie. Encouragés par les médias bourgeois, divers médecins et universitaires sont mis à contribution pour promouvoir ce qui est en fait la politique homicide «d’immunité collective», responsable de millions de décès prématurés dans le monde. Le Dr Sumon Chakrabarti, un médecin de Mississauga, a déclaré à CTV News: «Ce que cela montre, c’est que nous avons un virus bénin en ce moment, pour la plupart, surtout si l’on est vacciné, qui se propage dans la population et qui va causer beaucoup, et je le dis dans le bon sens, d’immunité... Je pense que c’est en fait, croyez-le ou non, une bonne nouvelle.»
Le Dr Raywat Deonandan, épidémiologiste basé à Ottawa, est d’accord avec cette affirmation: «Nous allons arriver à un point où les expositions sont si fréquentes que nous ne pourrons plus garder les gens à la maison s’ils sont asymptomatiques. Je ne dis pas qu’il faut ouvrir toutes grandes les portes. Je ne dis pas qu’il faut se méfier de tout. Je ne dis pas de tout laisser ouvert. Je dis qu’il faut réévaluer les protocoles d’isolement pour que la société continue de fonctionner.»
L’exigence de «maintenir la société en état de marche» est en réalité un plaidoyer pour que les profits continuent d’affluer à Bay Street et dans les entreprises canadiennes, sans tenir compte des pertes en vies humaines et du nombre de personnes handicapées par l’impact débilitant de la COVID longue. Cela revient à «ouvrir grand les portes» à l’infection et à saboter toute mesure de santé publique coordonnée pour contenir la pandémie.
Ce programme de guerre de classe sauvage d’infection et de mort massives est mené par le gouvernement libéral de Trudeau, qui a réduit ces derniers mois les aides financières déjà maigres accordées aux travailleurs en cas de pandémie afin de les forcer à retourner au travail. Le gouvernement Trudeau n’a pas appliqué une seule nouvelle politique de santé publique pour lutter contre la propagation rapide d’Omicron, si ce n’est quelques restrictions de voyage sans valeur adoptées après que le variant se soit déjà installé au niveau communautaire en Ontario, au Québec et dans d’autres parties du pays. Tout au long de la pandémie, ses priorités ont été de préserver la richesse des super-riches et les profits des grandes entreprises.
Même si la principale responsable de la santé publique du gouvernement Trudeau, la Dre Theresa Tam, a déclaré la semaine dernière que les hôpitaux seraient complètement submergés en quelques semaines si les contacts n’étaient pas réduits de manière substantielle, les gouvernements à tous les niveaux redoublent leur stratégie d’infection massive.
Pour la classe dirigeante, un élément essentiel au bon fonctionnement de la «société» est de s’assurer que les écoles restent ouvertes, ce qui permet aux parents d’être libérés de leurs responsabilités de garde d’enfants afin qu’ils restent disponibles pour le «marché du travail», c’est-à-dire pour pomper des profits pour les capitalistes. Le Québec a l’intention de rouvrir les écoles primaires comme prévu la semaine prochaine, et les écoles secondaires une semaine plus tard, le 10 janvier. L’Ontario devrait finaliser sa décision sur la réouverture des écoles plus tard cette semaine. Actuellement, il est prévu que les écoles ouvrent leurs portes le lundi 3 janvier pour un enseignement complet.
L’opposition à la réouverture des écoles prend de l’ampleur dans des conditions où le rôle central qu’elles jouent dans la transmission communautaire de la COVID-19 est largement compris. «En tant que lycéen du YRDBS (York Region District School Board), entièrement vacciné, je suis terrifié à l’idée de retourner le 3 janvier», a écrit un élève sur Twitter. «Pour la première fois, je veux vraiment apprendre en ligne si c’est ce qui me permettra de rester en sécurité».
En réponse à un groupe de médecins demandant que les écoles restent ouvertes, un enseignant a tweeté: «J’ai 25 enfants dans ma classe et je vois 40 enfants différents non masqués tous les jours lorsque je suis de service à la cantine dans deux classes différentes.» Un sondage Twitter réalisé par le biostatisticien Ryan Ingrund, qui s’est constitué un large public en raison de la fourniture de données sur les épidémies de COVID-19 dans les écoles, a révélé que seuls 21% des répondants sont favorables à la réouverture des écoles en Ontario.
La tâche la plus importante est maintenant d’armer cette colère et cette indignation généralisées face à la politique pandémique d’infection et de mort massive de l’élite dirigeante avec un programme politique clair visant à éliminer la COVID-19 à l’échelle mondiale. Ce qu’il faut, c’est un mouvement de masse mené par les travailleurs pour lutter en faveur d’une stratégie globale «Zéro COVID», comprenant des tests de masse, le dépistage des contacts, l’isolement de tous les cas infectés, la vaccination de masse et l’arrêt de toute production non essentielle et la fermeture des écoles, avec une compensation complète pour tous les travailleurs touchés, afin de stopper toute transmission communautaire.
(Article paru en anglais le 28 décembre 2021)