Le chef du Parti socialiste, Salvador Allende, remporta une courte majorité relative aux élections nationales chiliennes tenues le 4 septembre 1970, battant le candidat de droite Jorge Alessandri, qui avait été président de 1958 à 1964, et Radomiro Tomic du Parti chrétien-démocrate conservateur.
Après le dépouillement des voix, Allende, qui s'était présenté aux élections sous l’étiquette de la coalition de gauche de l'Unité populaire, a obtenu 36,6 pour cent des voix. Alessandri obtint 35 pour cent, suivi de Tomic avec 28 pour cent. Du fait qu’aucun candidat n'eut obtenu 50 pour cent des voix exprimées, l'élection fut décidée par le Congrès national chilien, qui dut choisir entre les deux candidats ayant obtenu le plus de voix, Allende et Alessandri.
Le vote du Congrès ne trancha en faveur d’Allende qu'après que l'Unité populaire, composée à la fois du Parti socialiste et le Parti communiste, ait fait des concessions majeures aux démocrates-chrétiens. Allende accepta de signer un «Statut des garanties constitutionnelles», promettant qu'il n'appliquerait aucune mesure qui porterait atteinte à la constitution chilienne. Ce serment engageait Allende à ne pas remettre en cause les relations de propriété capitalistes, trahissant et démoralisant ainsi les ouvriers et les paysans qui avaient voté pour lui.
Malgré l'engagement d'Allende à défendre la propriété chilienne et à saper la lutte révolutionnaire qui se profilait dans la classe ouvrière, la droite, soutenue par les États-Unis à travers la CIA, commença ses préparatifs pour renverser son gouvernement. En fait, la CIA avait payé entre 800.000 et 1 million de dollars en propagande anti-Allende avant même les élections, a révélé plus tard un comité sénatorial.
Quelques jours à peine avant la prestation de serment d'Allende en tant que président, le commandant en chef de l'armée, le général René Schneider, qui s'était opposé à un coup d'État militaire pour renverser le nouveau gouvernement, fut assassiné par des éléments de droite de l'armée soutenus par la CIA. Après l'échec de cette première tentative de coup d'État, la droite politique et la CIA commencèrent les préparatifs du coup d'État de 1973 qui renverserait le gouvernement, tuerait Allende et le remplacerait par la dictature brutale tristement célèbre du général Augusto Pinochet.
La victoire d'Allende aux élections peut être attribuée à ses appels à la nationalisation de toutes les entreprises étrangères et à l'hostilité généralisée à l'intervention impérialiste au Chili parmi la classe ouvrière. Mais son rôle politique était de freiner le développement d'une révolution socialiste au Chili. Allende a appelé à l'établissement d'une «paix sociale» qui signifiait, en fin de compte, la subordination des intérêts de la classe ouvrière aux capitalistes et aux propriétaires terriens.
Le soutien du Parti communiste chilien stalinien fut essentiel à l'élection d'Allende et à la mise au pas de l'opposition de la classe ouvrière. Non seulement les staliniens ont soutenu Allende comme la «voie chilienne vers le socialisme», mais ils ont aussi encouragé les illusions dans l'armée, qui était dominée par la droite et des fascistes comme Pinochet, comme «le peuple en uniforme».
(Article paru en anglais le 1er septembre 2020)