Samedi, le New York Times apublié un long exposé sur l'incapacité du gouvernement Trump à donner suite aux avertissements répétés, au sein du gouvernement fédéral, que les États-Unis faisaient face à une catastrophe imminente menaçant des centaines de milliers de vies.
Le Times fait remarquer: «Le bureau du Conseil national de sécurité chargé de suivre les pandémies a reçu des rapports des renseignements début janvier prédisant la propagation du virus aux États-Unis et, en l’espace de quelques semaines, soulevait des options telles que le confinement des Américains et le verrouillage de villes de la taille de Chicago. M. Trump a évité de telles mesures jusqu'en mars. »
Ces avertissements ont été répétés par les National Institutes of Health, les Centers for Disease Control and Prevention et même de hauts responsables de la Maison Blanche. Pourtant, malgré ces avertissements, l'administration Trump n'a pas pris les mesures les plus élémentaires pour contenir la pandémie. Le 2 mars, près de deux mois après que Trump a reçu les premiers avertissements que la pandémie frapperait les États-Unis, moins de 500 personnes avaient été testées pour le COVID-19 dans tout le pays. À ce moment-là, il s'était propagé sans contrôle depuis plus d'un mois.
En public, Trump a délibérément minimisé la gravité de la maladie, affirmant à tort que la pandémie n'était pas pire que la grippe. Il a fait valoir qu'elle disparaîtrait d'elle-même et a déclaré que la maladie était un «canular». Dimanche, Trump a retweeté un commentaire le pressant de licencier le Dr Anthony Fauci, son principal conseiller scientifique, qui a déclaré publiquement que le lancement de mesures plus tôt aurait sauvé des vies.
Clairement énervé par la révélation de l'incompétence de son administration, Trump, comme d'habitude, s'est déchaîné furieusement contre la presse lundi, insultant les journalistes dans une autre démonstration d’ignorance, de brutalité, d’arriération et d'auto-glorification. Comme d'habitude, Trump a passé la majeure partie de sa conférence de presse à se vanter et à nier toute responsabilité pour la catastrophe en train de déferler.
Si l’article du Times donne un compte rendu important de la réponse incompétente de l'administration Trump à la pandémie, il évite de montrer une partie importante du tableau. Il n'explique pas pourquoi la classe dirigeante dans son ensemble n'était pas préparée à faire face à la pandémie.
La désastreuse suite d'erreurs de Trump découle naturellement des politiques adoptées par l'ensemble de l'establishment politique et des administrations antérieures. Les administrations Bush et Obama avaient tout de même saccagé les capacités préventives de la santé publique, réduisant son financement année après année. Malgré les avertissements sur le danger d'une pandémie pendant au moins deux décennies, aucune mesure n'a été prise pour constituer les stocks d’équipements nécessaires.
Par ailleurs, de janvier à maintenant, aucune partie de l'establishment politique américain n'a sérieusement préconisé une augmentation importante des dépenses de santé publique et un vaste programme de tests, de quarantaines et de dépistages des contacts qui auraient pu arrêter la pandémie et sauver des dizaines de milliers de vies. Et pourtant, en seulement quelques semaines, les deux partis ont pu collaborer pour obtenir un renflouement de Wall Street et des grandes sociétés de milliards et de milliards de dollars, qui ont fait grimper le marché boursier, alors même que des millions de personnes perdaient leur emploi.
Le récit du Times n'explique pas non plus le fait que le bilan du Times et des autres grands médias ait été aussi minable que celui de Trump.
Malgré de nombreuses mises en garde à partir de début janvier dans les médias internationaux, le New York Times n'a consacré son premier éditorial au coronavirus que le 29 janvier. Le journal qui sert si souvent de relais aux «sources anonymes» au sein du l'appareil de renseignement n'a pas rapporté les «rapports des renseignements au début de janvier prédisant la propagation du virus aux États-Unis» comme une des «bombes» qu'il a si souvent affichées en gros titre.
Dans son éditorial du 29 janvier, le journal avertit que la «méfiance» envers les «institutions» - un mot que le journal utilise pour parler de lui-même et des agences de renseignement américaines - est le plus grand facteur de risque lié à la propagation du COVID-19. Il n'a appelé à aucune mesure d'urgence pour lutter contre la maladie, ni à une extension des capacités de test, de quarantaine et de dépistages des contacts.
Et puis, un silence général s’est installé pendant tout un mois, au cours duquel le New York Times n'a pas écrit un seul éditorial sur la pandémie. Ce n'est que le 29 février, alors qu'il y avait 63 cas documentés aux États-Unis et une transmission communautaire confirmée, que le comité de rédaction du Times aréexaminé la question.
Dans l'intervalle, qui couvre la conclusion des efforts avortés pour destituer Trump sur la base de fausses allégations de «collusion» avec la Russie, le Times aprésenté à ses lecteurs le plat habituel des allégations «d'ingérence russe» dans la société américaine, de propagande pro- guerre, d’hystérie #MeToo et de demandes d’extension du pouvoir des agences de renseignement américaines.
Au cours du mois de février, le marché boursier américain a continué d'atteindre de nouveaux sommets. Trump a clairement indiqué à plusieurs reprises que sa principale préoccupation face à la pandémie était son impact sur l'économie et en particulier sur les marchés boursiers. Il n'est pas difficile de supposer que des préoccupations similaires ont motivé le comité de rédaction du Times cherchant à minimiser les «mauvaises nouvelles».
En fait, lorsque son comité de rédaction est revenu sur le sujet le 3 mars, c'était avec une nouvelle optique: «Si le gouvernement fédéral ne parvient pas à contenir la propagation du coronavirus et que les perspectives économiques s'assombrissent, un tel stimulus de grande envergure pourrait bien devenir nécessaire. »
Alors que le Times était silencieux sur la pandémie de COVID-19, les politiciens démocrates et républicains préparaient un projet de loi de relance bipartite qui comprenait 450 milliards de dollars en renflouements d'entreprises et finançait les 5 mille milliards de dollars que la Réserve fédérale fournit à Wall Street et aux grandes entreprises.
Le silence du gouvernement Trump et du Parti démocrate contraste avec les nombreux avertissements du World Socialist Web Site.
Un article du 24 janvier (en anglais) de Benjamin Mateus notait que «des preuves ont émergé qu'une infection de personne à personne se produit» et que «des cas ont maintenant été confirmés en Thaïlande, au Japon, en Corée du Sud, à Taïwan, au Vietnam, à Singapour, en Arabie saoudite et États-Unis ».
Dans une perspective du 28 janvier intitulée «L'épidémie de coronavirus de Wuhan et la menace mondiale des maladies infectieuses», le WSWS notait: «L'épidémie a révélé l'énorme vulnérabilité de la société contemporaine aux nouvelles souches de maladies infectieuses, dangers pour lesquels aucun gouvernement capitaliste ne s’est adéquatement préparé. »
Le WSWS déclarait: « Alors que la situation en Chine est désastreuse, les pays dits avancés ne sont pas pour autant plus préparés que la Chine à faire face à une épidémie de l'ampleur qui se produit actuellement à Wuhan. »
La perspective poursuivait :
« Autrement dit, alors que les gouvernements du monde, en particulier les États-Unis, ont élaboré des plans méticuleux pour une guerre à grande échelle au cours du dernier quart de siècle, aucune ressource ni aucune prévoyance de ce type n’ont été consacrées à la lutte contre la série d’épidémies qui ont ravagé la planète sur la même période. Depuis 1996, il y a eu 67 épidémies à travers le monde, dont l'épidémie de la vache folle de 1996 à 2001, de grippe en 2009, de Zika en 2015-2016 et l'épidémie de VIH / sida qui a tué au moins 30 millions de personnes depuis sa première apparition en 1960.
Ces catastrophes sont à tout moment évitables. La science médicale a progressé au point où elle est capable d'identifier de nouveaux virus en quelques semaines et de développer des vaccins en quelques mois. Et pourtant, comme l'a fait remarquer la directrice générale de l'OMS, la Dr Margaret Chan en 2014 à propos de l'épidémie d'Ebola, ‘une industrie à but lucratif n'investit pas dans des produits destinés à des marchés qui ne peuvent pas payer…’ »
Les projets de profit mercenaire à court terme inhérents au capitalisme sont incapables d'allouer les ressources nécessaires pour prévenir et se préparer aux risques mondiaux ».
Au cours du mois suivant, dans la période de silence du comité de rédaction du New York Times, le World Socialist Web Site écrivait quatre déclarations majeures sur la pandémie en plus de la couverture quotidienne.
Dans «La pandémie de coronavirus: une catastrophe mondiale» le 11 février, le World Socialist Web Site a condamné les politiques nationalistes et xénophobes de l'administration Trump et les déclarations du secrétaire au Commerce Wilbur Ross selon lesquelles la pandémie «accélérerait le retour des emplois en Amérique du Nord». Il a averti: «Comme pour tout autre problème social, y compris les inégalités sociales toujours grandissantes, l'accélération du changement climatique et la menace accrue de la guerre, l'épidémie de coronavirus est un problème mondial qui nécessite une solution internationale.»
Le 27 février, le WSWS a publié une perspective intitulée «La pandémie de coronavirus et la nécessité d'une médecine socialisée mondiale». Alex Lantier y écrit: «Il est essentiel que le système de santé mondial puisse isoler les patients, limiter la vitesse de propagation de la maladie et consacrer les ressources nécessaires pour fournir des soins intensifs aux patients qui développent une pneumonie à la suite de l'infection.»
Le lendemain, le WSWS publiait une déclaration du Comité international de la Quatrième Internationale qui déclarait: «Le gouvernement américain n'est absolument pas préparé à une épidémie majeure. Aucun système n'est en place pour tester systématiquement la présence du virus.»
Elle concluait: «La classe ouvrière doit exiger que les gouvernements mettent à disposition les ressources nécessaires pour contenir la propagation de la maladie, traiter et soigner les personnes infectées et garantir les moyens de subsistance des centaines de millions de personnes qui seront affectées par les retombées économiques. »
Le World Socialist Web Site n’a pas les vastes ressources financières dont dispose le New York Times. Et pourtant, nous avons pu avertir le public de la catastrophe qui allait se produire.
La raison en est que le WSWS est motivé par une orientation politique entièrement à l’opposé du Times. La préoccupation de l'administration Trump et du New York Times, principal média du Parti démocrate, est la préservation des intérêts financiers et économiques de l'élite dirigeante. La préoccupation du WSWS est la défense de la classe ouvrière et de la grande masse de la population.
Tout comme ils n'ont pas averti le public des dangers posés par le coronavirus alors qu'il se propageait dans tout le pays, l'administration Trump et le New York Times cherchent une fois de plus à minimiser la pandémie pour créer un climat propice à un retour prématuré au travail. Le World Socialist Web Site se concentre sur une mise en garde contre de telles mesures, soutenant que la vie humaine doit l’emporter sur les profits de l'élite dirigeante.
Pendant plus de deux décennies, le World Socialist Web Site, publication du Comité international de la Quatrième Internationale, s'est révélé être un outil indispensable pour défendre les intérêts sociaux et politiques de la classe ouvrière.
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(Article paru en anglais le 14 avril 2020)