Aux États-Unis, les cas de coronavirus dépassent la centaine de milliers

Le nombre de cas de coronavirus officiellement confirmés aux États-Unis était vendredi supérieur à 102.000, tandis que le nombre de décès causés par COVID-19 a dépassé les 1.600. Il y eut plus de 16.500 nouveaux cas ce jour-là, plus que partout au monde, ainsi que près de 300 nouveaux décès. Le pays représente à lui seul plus d’un sixième de tous les cas de coronavirus dans le monde.

On emmène une personne sur une civière à l’United Memorial Medical Center de Houston, au Texas, après qu’elle a subi un test COVID-19 jeudi (AP Photo/David J. Phillip)

Le nombre de cas continue d’augmenter de façon exponentielle aux États-Unis. Actuellement il ne faut que quatre jours pour que le nombre de cas et de décès connus double, un taux actuellement plus rapide que la propagation mondiale du virus. Le nombre de cas à l’échelle internationale a atteint près de 600.000 et le nombre de décès dépasse désormais 27.000, un chiffre qui double tous les six jours. Pratiquement tous les pays ont maintenant signalé au moins un cas de la maladie.

Même ces chiffres sont une sous-estimation de l’ampleur réelle de la pandémie. Une étude récente sur l’épidémie de coronavirus à bord du navire de croisière Diamond Princess souligne le fait que plus d’un cas sur cinq de COVID-19 est infectieux sans présenter aucun symptôme. Cela signifie qu’une personne peut facilement et sans le savoir propager la maladie.

De telles études médicales expliquent pourquoi l’Organisation mondiale de la santé a insisté sur la nécessité de «tester, tester, tester» et de retrouver les contacts des cas confirmés. Alors que des pays comme la Chine, la Corée du Sud, Singapour et le Japon ont pris des mesures agressives dans ce sens, l’Administration Trump a attendu près de deux mois depuis l’identification du premier cas de coronavirus aux États-Unis pour mettre en place des tests de masse.

En conséquence, le nombre de cas aux États-Unis est devenu incontrôlable et les systèmes hospitaliers dans les régions les plus touchées risquent à tout moment de s’effondrer. À New York, l’épicentre national de la maladie avec plus de 25.000 cas, les hôpitaux atteignent rapidement leur capacité à traiter les patients les plus critiques. Même là, la municipalité déclare explicitement qu’«à moins de se trouver hospitalisé et qu’un diagnostic ait un impact sur vos soins, vous ne serez pas testé». Autrement dit, le taux d’hospitalisation est encore relativement faible mais avec un véritable dépistage et une recherche des contacts dans la ville et dans tout le pays, cela multiplierait probablement par dix le nombre de cas connus de COVID-19.

Il y a aussi de plus en plus de preuves que les chiffres des cas et des décès sont manipulés. Un article de Gizmodo rapporte qu’un adolescent, testé positif et récemment décédé ne figure pas dans le bilan officiel des décès. La raison étant que les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC) ont considéré que la cause du décès était un choc septique. Cependant, la septicémie n’est pas une maladie, mais une réaction excessive et potentiellement mortelle du système immunitaire à une infection, comme ici le COVID-19. Une enquête plus approfondie est nécessaire pour déterminer combien de cas similaires existent aux États-Unis et dans le monde.

Pour tenter de maîtriser la situation socialement explosive de la plus grande ville du pays, le gouverneur de New York, Andrew Cuomo, a demandé au gouvernement fédéral de lui fournir 30.000 respirateurs, l’équipement nécessaire pour maintenir en vie les patients les plus critiques lorsque les poumons sont touchés. Cuomo a fait cette demande après qu’il soit devenu de plus en plus évident que le COVID-19, qui contraste fortement avec la grippe saisonnière, peut nécessiter des semaines ou des mois d’assistance respiratoire pour que le patient se rétablisse correctement.

Ce à quoi le président Donald Trump lui a répondu froidement «je ne crois pas que vous ayez besoin de 40.000 ou 30.000 ventilateurs». Il a ensuite remis en question la gravité de la pandémie, déclarant: «Vous savez, vous allez parfois dans les grands hôpitaux, ils ont deux ventilateurs. Et maintenant, tout d’un coup, ils disent, est-ce qu’on peut commander 30.000 ventilateurs?»

Les commentaires criminels et malveillants de Trump ignorent la vaste expérience faite avec le virus en Chine ainsi que la lutte inlassable des médecins en Italie, en Espagne et en Iran. Ces pays ont actuellement au moins cinq fois plus de décès par habitant que les États-Unis et un nombre total des décès bien plus élevé. Dans ces trois pays, les ventilateurs sont la ressource la plus importante pour maintenir en vie les patients critiques. La pénurie de respirateurs en Italie est devenue si grave que les médecins sont maintenant obligés de prendre la décision tragique de sélectionner qui recevra leur aide ou pas. Sans nouvel équipement, New York sera bientôt dans la même situation.

La situation à Detroit approche elle aussi rapidement du point de non-retour. Le «Système de santé Henry Ford» avertit que, suite à une hausse des cas en zone métropolitaine, les patients «extrêmement malades» pourraient « ne pas être éligibles aux soins intensifs ou aux soins sous respirateur». On dit également aux patients d’informer l’hôpital à leur admission s’ils ont ou non un ordre de ne pas réanimer. Ceux «qui ont le plus de chance d’aller mieux sont notre première priorité».

L’accélération de la propagation du coronavirus a également obligé 25 États américains, 74 comtés, 14 villes et un territoire amérindien à émettre un ordre de rester chez soi. Cela touche au moins 228 millions de personnes au plan national. Toutes les entreprises non essentielles dans ces régions sont fermées. On n’autorise les gens à sortir de chez eux que pour faire des courses, consulter le médecin ou exercer d’autres activités jugées «nécessaires» par ces gouvernements. Tous les grands rassemblements sont interdits.

Le même processus a lieu au plan international. Tous les pays du monde ont mis en place une forme ou une autre de restriction des déplacements du à la pandémie. Une grande partie de la population européenne a reçu l’ordre de rester chez elle. Dans le même temps, les gouvernements en profitent pour militariser davantage leurs frontières. Les États-Unis prévoient de déployer 1.000 soldats à la frontière avec le Canada et d’accroître encore la présence militaire à la frontière avec le Mexique.

L’Organisation mondiale de la santé a vivement critiqué de telles mesures. Elle estime qu’elles ne sont pas suffisantes pour arrêter le virus et qu’elles nuisent à la collaboration internationale nécessaire pour l’arrêter. Le directeur général, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, a averti mercredi que si l’isolement pouvait «supprimer et arrêter la transmission» le virus risquait de «resurgir» si l’on ne faisait rien d’autre.

(Article paru d’abord en anglais 28 mars 2020)

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