La grève du 5 décembre contre la réforme des retraites de Macron s’annonce massive. Un an après le début du mouvement des «gilets jaunes», sur fond d’une vaste éruption internationale de la lutte des classes, de nombreuses sections de travailleurs dans les transports, les hôpitaux, l’énergie, et les ports, ainsi que des étudiants et des avocats, comptent se mobiliser. Cette grève jouit d’un soutien écrasant de deux-tiers de l’opinion, y compris de 74 pour cent des ouvriers et 70 pour cent des fonctionnaires.
Cette grève s’inscrit dans une vaste résurgence mondiale de la lutte des classes en 2019. Au Chili, au Liban, en Colombie, à Hong Kong, en Irak, en Algérie et ailleurs les travailleurs et les jeunes se mobilisent dans des mouvements impulsés par la colère contre les inégalités. 40.000 enseignants polonais ont mené la première grève nationale depuis la restauration stalinienne du capitalisme en 1989, et les travailleurs de General Motors américains ont lancé leur première grève majeure depuis plusieurs décennies.
Terrifiés par cette montée de la colère sociale et bousculés par les grèves sauvages des cheminots cette automne, les appareils syndicaux en France et leurs alliés politiques de pseudo gauche se sont résignés à appeler une grève pour éviter d’être débordés. A présent, les travailleurs s’engouffrent dans la brèche ainsi ouverte à contrecoeur par les syndicats.
Toutefois, les appareils syndicaux, qui ont été hostiles aux «gilets jaunes», ne cherchent pas à construire un mouvement contre Macron. Tout comme avant cette grève, ils freinent des quatre fers. Ainsi Laurent Escure de l'UNSA a mis en garde le patronat que «La colère est en train de s’enkyster dans certains secteurs», leur proposant «que des arbitrages soient rendus le plus vite possible» car «si c’est après le 5, on sera dans une zone de danger ».
Il est essentiel pour les travailleurs de prendre en main leurs propres luttes et de former leurs propres comités d’action, indépendants des syndicats et de leurs alliés politiques. Déjà dans des réunions ils scandent «la grève aux grévistes». Les travailleurs ont vu que les «gilets jaunes» se sont organisés indépendamment, sur les réseaux sociaux. Il est essentiel pour les travailleurs de se doter de comités d’action où ils pourront discuter et décider librement des actions à mener, et les relier aux luttes de jeunes et de travailleurs à l’international.
Il n’y a rien à négocier avec Macron, qui ne donnera que des miettes et des gaz lacrymogènes aux travailleurs. Il n’y aura pas de «réforme» d’un capitalisme mondialisé, géré par une élite de milliardaires. Un affrontement international révolutionnaire couve entre les travailleurs et l’aristocratie financière représentée en France par Macron. La seule solution progressiste aux problèmes internationaux d’inégalité, d’oppression sociale, et de répression militaro-policière qui mobilisent les travailleurs est l’expropriation de l’aristocratie financière.
Dans ce cadre international explosif, le «dialogue social» organisé par les syndicats n’offre rien aux travailleurs. Dans chaque pays les syndicats sont des coquilles vides, coupées des travailleurs et financées grâce au patronat et l’État, qui imposent depuis des décennies des reculs sociaux afin d’assurer la compétitivité de «leur» capitalisme sur le marché mondial. Les appareils syndicaux français ont été hostiles aux «gilets jaunes»; à présent ils cherchent un compromis pourri avec l’État et le patronat à faire avaler aux travailleurs.
Il est essentiel pour les travailleurs de rejeter les tentatives prévisibles des syndicats et de leurs alliés petit-bourgeois de pseudo-gauche, tels que le Nouveau parti anticapitaliste ou Lutte ouvrière, d’intervenir pour désorganiser, casser, et mettre fin aux luttes. Leurs actions, fondées sur l’autorité du «dialogue social», n’ont aucune légitimité démocratique.
Trois décennies après la dissolution par le régime stalinien de l’Union soviétique en 1991, les guerres impérialistes au Moyen Orient et la montée des inégalités ont fait voler en éclats les prétensions sociales de la classe capitaliste européenne. En France, après la collaboration nazie durant la Seconde Guerre mondiale, la bourgeoisie avait promis de réaliser «l’éviction des grandes féodalités économiques et financières» de la direction de l’économie. A présent, l’aristocratie financière va vers la dictature militaro-policière pour préserver ses fortunes et appauvrir les travailleurs.
L’OTAN instrumentalise depuis 2011 le terrorisme islamiste dans de sales guerres, menées par procuration en Libye et en Syrie. Mais sous couvert de «lutte antiterroriste», le PS a imposé en 2015 un état d’urgence qui a suspendu les droits démocratiques et a servi à réprimer violemment les manifestations contre la loi travail qui cassait le Code du travail. Malgré l’opposition de 70 pour cent des Français, il a ensuite imposé la loi travail sans vote parlementaire, grâce à l’antidémocratique article 49.3 de la constitution.
En 2017, Macron a fait voter illégitimement, à une Assemblée nationale élue par moins de la moitié des électeurs, des décrets visant à aller plus loin que la loi travail du PS. Il s’en est déjà servi pour faciliter les licenciements de masse et les baisses de salaires, priver des millions de chômeurs de leurs droits à l’assurance-chômage, et casser le statut des cheminots. Il a mené toutes ces politiques avec la complicité des syndicats, qui se sont pliés à l’état d’urgence et n’ont organisé que quelques «grèves perlées» impuissantes à la SNCF.
A présent Macron veut casser les divers régimes de retraites, qu’il veut remplacer par un système unique «par points», dont la valeur monétaire serait arbitrairement déterminée par l’État. Les travailleurs opposés à cette réforme devront mener une lutte politique directe contre Macron et derrière lui les marchés financiers internationaux.
Face aux «gilets jaunes», Macron a réhabilité Pétain le qualifiant de «grand soldat», lavant ainsi les crimes génocidaires commis par le régime de Vichy et le fascisme européen. Cela a été le prélude à la violente répression des «gilets jaunes», que les alliés de pseudo gauche des appareils syndicaux comme le Nouveau parti anticapitaliste ont traité de «foire poujadiste», c’est-à-dire néofasciste.
Le mouvement des «gilets jaunes», bien qu’attirant une large sympathie, appelait à un éveil apolitique du «peuple» qui n’a pas mobilisé les masses de travailleurs. A présent, une nouvelle étape de la lutte des classes se prépare. La mobilisation de larges sections des travailleurs du secteur public rend possible un appel à la classe ouvrière dans son ensemble, sur une perspective de mener la lutte des classes qui fait éruption autour du monde.
Cette lutte devra s’organiser et se mener indépendamment des appareils syndicaux et de leurs alliés politiques. C’est pour cela que les travailleurs auront besoin de comités d’action dans les lieux de travail, les écoles et les quartiers populaires. Le Parti de l’égalité socialiste (PES) vise à lier cette montée de la lutte des classes à un mouvement internationaliste, socialiste et antiguerre de la classe ouvrière européenne et internationale, pour prendre le pouvoir et réorganiser la vie économique sur la base des besoins sociaux, pas des profits privés.