A deux semaines de la rentrée, le 3 septembre, des milliers d’étudiants n’ont pas été admissibles dans les universités à cause de la mise en place de la plateforme d’admission Parcoursup, dictée par la loi Orientation et réussite des étudiants (ORE) imposée de force face à l’opposition des étudiants. Selon les derniers chiffres, datant du 9 août, sur les 812.050 inscrits sur la plateforme, 66.400 sont toujours sans affectation.
Le fait que des milliers d’étudiants risquent d’être privés d’études supérieures souligne le caractère réactionnaire de la réforme ORE de Macron. La loi vise à rendre les universités publiques plus compétitives et à préparer leur privatisation. Elle donne aux universités publiques pour la première fois l’autonomie de sélectionner, et de rejeter, les candidats.
Avant la loi, pratiquement tous les étudiants souhaitant fréquenter une université publique pouvaient s'inscrire, dès qu'ils réussissaient au baccalauréat.
A présent, la loi oblige les universités à prendre en compte les notes au baccalauréat, la qualité du lycée où étudiait le postulant, et ses activités académiques et apprentissages. Cette loi favorise les couches plus privilégiées de la population qui ont accès à une éducation de meilleure qualité, à des voyages, des stages, et des opportunités culturelles, l’accès auxquels est refusé aux jeunes de classe ouvrière ou de familles plus modestes.
Macron estime que l’enseignement supérieur coûte trop cher et réduit l’accès à l’éducation sur le modèle de la société ploutocratique qu’il veut ériger contre les travailleurs. Ces trois dernières années, l’enseignement supérieur a absorbé chaque année entre 30.000 et 40.000 étudiants supplémentaires, une tendance qui devrait se poursuivre jusqu'en 2020. Les universités publiques ont donc besoin d’investissements publics substantiels pour répondre aux nouveaux besoins.
Sous prétexte d’améliorer l’enseignement supérieur, la nouvelle loi réduit fortement le nombre d’inscriptions, forçant les étudiants soit de s’inscrire dans les établissements privés ou carrément abandonner les étude pour ceux qui n’ont pas de quoi se les payer.
Après l’annonce de la réforme, les étudiants ont manifesté à travers de la France au printemps. Ils ont bloqué de nombreuses universités pour s’opposer à la loi et exiger son retrait. Face à la colère des étudiants, Macron a réagi par la répression, en envoyant la police casser les blocus.
En même temps, les syndicats d’étudiants et les partis politiques de pseudo-gauche tels que le NPA et le PCF ont isolé la lutte des étudiants. Ils ont bloqué la convergence des luttes des travailleurs et des étudiants en subordonnant les ouvriers grévistes aux accords qu’ils négociaient depuis l’intérieur des centrales syndicales avec Macron. Ainsi ils ont fait passer une première réforme de la SNCF et préparent davantage d’attaques sociales contre les travailleurs.
A présent, face à la colère et à l’inquiétude des étudiants, le gouvernement essaie de nier les chiffres concernant les étudiants sans affectations. Au micro de RTL lundi, Frédérique Vidal, le ministère de l'Enseignement Supérieur, a dit: "Il y a 16 000 jeunes qui sont en recherche active, et 50 000 que nous cherchons à contacter et qui pour le moment ne répondent pas à nos sollicitations."
Les 50.102 autres candidats sont «inactifs», selon le gouvernement. “On les considère comme inactifs puisqu'on sait que les jeunes peuvent avoir d'autres projets, s'être inscrits et ne plus être en recherche active", a tenté d'expliquer Vidal à RTL.
L’explication du gouvernement est en contradiction flagrante avec la réalité confrontée par les étudiants. Le magazine L’Express écrit, «Mais pour Guillaume Ouattara, étudiant-ingénieur à l'UTC de Compiègne, qui a décrypté l'algorithme de la plateforme, cette division entre candidats actifs et inactifs ne tient pas.»
Ouattara dit, «Pour être considéré comme actif, il faut avoir formulé des voeux lors de la procédure complémentaire ou avoir pris contact avec la commission rectorale. Or, certains ne savent même pas qu'ils peuvent contacter leur rectorat. Ou n'ont pas non plus trouvé de formations qui leur convenaient en procédure complémentaire. Pourtant, ils se connectent chaque jour pour voir si la situation a évolué.»
Le ministre a insisté que «Chaque année, nous connaissons cette déperdition. Nous demandons aux élèves de se manifester s'ils cherchent réellement une place dans l'enseignement supérieur. Nous leur avons envoyé différents messages sur la plateforme.»
Mais, Ouattara en doute. « Les élèves avec qui j'échange n'ont pas tous reçu de coup de fil ou de message», a dit le jeune igénieur. Selon lui, "il y a bien 66 000 étudiants en attente, et non 16 000 comme le dit le ministère."
Pour les bacheliers sans affectations, le gouvernement a annoncé une aide financière de 7 millions euros pour faciliter leur mobilité. Le montant est limité de 200 à 1000 euros par étudiant et par an. Selon Les Echos, «l’aide à la mobilité géographique d’un montant de 200 à 1,000 euros qui doit être versée en une seule fois au début de la rentrée universitaire concernant les bacheliers qui sont amenés à aller s’installer loin de leur domicile suite à une proposition d’inscription faite par le recteur.»
Ce montant dérisoire, qui ne compense pas du tout le prix de faire des études, est une insulte plutôt qu’une aide. Le fait que milliers des étudiants risquent de ne pas pouvoir financer leurs études est le résultat de la politique d’austérité menée par le gouvernement, qui favorise les riches en leur permettant d’accumuler des fortunes énormes au détriment des masses.
Depuis son arrivée au pouvoir, l’administration Macron agrandit les fortunes des plus riches, tout en foulant aux pieds l’opposition de la vaste majorité des Français à sa politique de casse des services publics, des statuts des cheminots et des fonctionnaires, et des salaires et de l’emploi via la loi travail.
L’aide financière de 7 millions d’euros proposée aux étudiants est inférieure à que ce qu’un milliardaire français gagne chaque jour. Grâce aux réformes de Macron, les treize personnes les plus riches de France se sont enrichies de 23,67 milliards d’euros depuis le début de 2018. L’homme le plus riche d’Europe et le quatrième homme le plus riche de la planète, Bernard Arnault, propriétaire du groupe de luxe LVMH, a pu augmenter sa fortune de 18 à 73,2 milliards d’euros entre 2008 et 2018. Elle s’établit ainsi à environ 4 millions d'années de SMIC.
Arnault a vu sa fortune s'accroître de 19,1 milliards d'euros en un an, soit plus de 52 millions d'euros par jour. Ceci signifie donc qu’il gagne en moins de quatre heures l’équivalent de la somme proposée pour aider la mobilité des étudiants.