Les frappes conjointes en Syrie samedi matin par les forces américaines, britanniques et françaises démasquent le rôle du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) et du Parti communiste français (PCF), qui soutiennent depuis longtemps les guerres au Moyen-Orient. Alors même que les travailleurs et les jeunes se mobilisent en lutte, ces organisations étranglent à tel point l’opposition populaire à la guerre que Macron s’est senti libre de frapper la Syrie. Ceci souligne la nécessité des travailleurs et des jeunes de lutter indépendamment de ces groupes petit-bourgeois de pseudo gauche.
Le prétexte fourni par les puissances impérialistes pour les frappes était que le régime syrien de Bachar al-Assad aurait utilisé des armes chimiques le 7 avril à Douma, ultime fief rebelle de la Ghouta orientale soutenu par l'impérialisme américain et européen. C’était un énième mensonge dans une longue liste d’inventions concoctées depuis 2011 par Washington, Londres et Paris afin de renverser le régime Assad en soutenant des milices islamistes. Sans fournir la moindre preuve, ces puissances ont lancé des frappes qui risquaient de provoquer un conflit ouvert avec la Russie.
Le NPA s’est associé sans réserves aux mensonges qui servaient à justifier les frappes en Syrie. Dans son communiqué samedi, il écrit, “Nous appelons à rejeter la sordide campagne visant à faire douter de la énième attaque chimique criminelle du régime sur des civils, hommes, femmes et enfants à Douma, attestée par tant d'informations venant de citoyens et services médicaux sur place.”
En même temps, conscient de la profonde opposition à la guerre et à un retour au service militaire dans la population, il s'oppose en paroles aux frappes contre la Syrie: “Mais nous condamnons sans aucune ambiguïté la nouvelle aventure militaire dirigée par Trump en Syrie, et la participation française à cette campagne de bombardements qui veut donner l’illusion que le peuple syrien va être maintenant mieux protégé.”
Ces lignes démasquent le NPA comme un instrument de la propagande de guerre impérialiste. Pour l’heure, les puissances occidentales n’ont pu ni vérifier ni donner un seul détail cohérent sur les accusations d’utilisation d'armes chimiques par Assad. Ils n’ont fourni aucune explication crédible pourquoi le régime Assad aurait lancé une attaque chimique, alors qu’il était sur le point de battre les milices islamistes financées par les États-Unis et leurs alliés. Mais Macron a quand même lancé des frappes contre la Syrie, un pays qui n’avait pas attaqué la France.
Sans preuves, les allégations de Washington et de Paris n’ont aucune crédibilité. Déjà, le journaliste Seymour Hersh a révélé que les attaques chimiques menées à Ghouta en 2013, qui ont servi de prétexte à des menaces de guerre par Washington et Paris contre la Syrie, étaient le fait de milices islamistes soutenues par la Turquie et le reste de l’Otan. A l’époque, face à l’opposition populaire et à la menace d’un conflit avec Moscou, Washington a dû reculer après l’échec du vote au Parlement britannique pour autoriser une guerre.
Les allégations sur les événements à Douma suivent de près une série de provocations mijotées contre la Russie dans l’affaire Skripal, à présent totalement discréditées. Londres, avec le soutien de Washington et de Paris, a accusé la Russie d’avoir empoisonné Sergueï et Julia Skripal pendant des semaines et renvoyé des dizaines de diplomates russes en poste en Grande Bretagne. Depuis, pourtant, il est ressorti que ni les services britanniques ni l’ONU ne peuvent démontrer que l’agent chimique qui aurait rendu malade les Skripal était d’origine russe.
Les critiques des frappes que formule le NPA sont hypocrites; elles ont comme but de protéger ce parti de la colère des Français, qui sont à 70 pour cent hostiles envers les frappes en Syrie selon les premiers sondages. Et les organisations auxquelles le NPA pousse les cheminots et les étudiants en lutte à s’associer ne font quant à elles aucun effort pour cacher leur enthousiasme pour l’agression de Macron, Trump et May contre la Syrie.
Contre Macron, le NPA appelle à une large alliance avec de nombreuses forces alliées du PS, dont Benoît Hamon et le PCF stalinien, qui ne cachent pas leur enthousiasme pour les frappes en Syrie.
Hamon, le candidat présidentiel du Parti socialiste en 2017, a déclaré sur France Inter qu’il fallait frapper la Syrie. "Je pense que ce crime ne doit pas rester impuni. Le crime de frapper sa propre population par des armes chimiques ne doit pas rester impuni (...) Je suis lassé de voir comment ce dictateur soutenu par beaucoup de pays autour, dont la Russie, continue à massacrer sa propre population, notamment en utilisant des armes chimiques," a dit Hamon.
Le PCF se refuse cyniquement à applaudir Trump et Macron comme le fait Hamon. Il insiste qu’il faudrait trouver un meilleur cadre légal dans lequel bombarder la Syrie, et insérer des frappes sanglantes de Trump, Macron et May dans une stratégie diplomatique plus crédible. Pierre Laurent, le secrétaire général du PCF, a dit que le soutien de son parti “dépend des conditions dans lesquelles est menée cette opération," en que la réalisation des frappes sans l’ONU, “c’est un problème.”
Selon Laurent, “Il faut bien sûr stopper l'utilisation de ces armes chimiques, elle aurait déjà dû l'être (...) L'enchevêtrement de l'action des différentes grandes puissances dans la région rend la situation extrêmement préoccupante. Il faut continuer de ne pas dissocier une éventuelle action militaire de l'effort politique pour stopper la guerre, car on ne résoudra pas cette situation uniquement par des actions de ce type.”
L’opposition du NPA, du PCF et Cie à ces frappes est frauduleuse. Elle vise à piéger les travailleurs et les jeunes en lutte contre Macron derrière une coalition de partis petit bourgeois, alliés de longue date avec le PS, qui soutiennent la guerre impérialiste. Mais non seulement ces partis posent une menace énorme de par leur indifférence au danger d’une guerre qui pourrait embraser le monde; leur soutien aux guerres impérialistes les rendent hostiles à toute lutte contre les mesures d’austérité de Macron.
Macron a réitéré à plusieurs reprises qu’il n’a aucune intention de revenir sur ses réformes. Derrière sa volonté de détruire les acquis sociaux, se trouve la nécessité pour l’impérialisme français de financer à un programme militaire de 300 milliards d’euros à l’horizon 2024, annoncée cette année à la conférence de sécurité à Munich. Pour trouver les sommes d’argent colossales que les stratèges de l’impérialisme français veulent fournir aux armées, la classe politique sait qu’il faut mener à bien les réformes de Macron. Et donc les appareils syndicaux négocient constamment avec lui.
Pour lutter contre l’austérité, par contre, il faut aussi lutter contre la guerre impérialiste, y compris ses défenseurs autour du NPA, qui représente des couches aisées et antimarxistes de la petite bourgeoisie.
Leur rôle constitue un avertissement qu’il n’y aura pas d’issue “réformiste” aux luttes des classe qui explosent contre Macron et les autres gouvernements de l’Otan. Poussée par la crise géopolitique produite par un quart de siècle de guerres impérialistes à travers le Moyen Orient et l’Eurasie depuis la dissolution stalinienne de l’URSS, l’élite dirigeante veut à tout prix restructurer drastiquement et de manière autoritaire les relations de classe, afin de permettre à la France participer pleinement au nouveau partage impérialiste du monde. Et les petit bourgeois du NPA veulent armer l’État français autant que possible pour qu’il puisse défendre leurs privilèges dans l’arène mondiale.
Le Parti de l’égalité socialiste (PES), la section française du Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI) s’oppose à tout l'escalade militaire et s’avance en tant que nouvelle direction politique dans la classe ouvrière. Le PES s’appuie sur la perspective du CIQI, qui donne la direction socialiste nécessaire à un mouvement international émergent de la classe ouvrière contre la guerre. Il avertit les travailleurs et les jeunes que les partisans de la guerre impérialiste chercheront inévitablement à étrangler leurs luttes, et que la seule issue progressiste est de construire un mouvement révolutionnaire visant la prise du pouvoir par la classe ouvrière à travers l’Europe.
Dans ce contexte-là, il faut souligner le soutien qu’apporte la bureaucratie syndicale depuis longtemps à la guerre en Syrie. Déjà en 2012, alors que les autorités américaines avouaient que leurs mandataires en Syrie étaient des islamistes liés à Al Qaïda, des syndicats proches du NPA et du PCF dont la CFT, FSU et Solidaires publiaient une déclaration intitulée “Les syndicats français aux côtés du peuple syrien.”
Dans cette déclaration, ils “condamnent avec force la guerre menée par le régime Assad contre le peuple syrien,” non pas la guerre impérialiste menée par procuration contre la Syrie. Ils exigent des puissances impérialistes qui interviennent en Syrie des “plans d’action afin d’aider les populations de façon directe.” C’est-à-dire qu’ils faisaient l’apologie de l’intervention impérialiste en Syrie, en la présentant sous un jour “humanitaire.”
Le soutien qu’ils apportent aux frappes euro-américaines en Syrie sont dans la continuité directe de cet engagement réactionnaire; c’est un signe que les travailleurs et les jeunes doivent impérativement prendre leur propres luttes en main et les ôter aux bureaucraties pro-impérialistes. Celles-ci ne feront qu’essayer de les étrangler et ainsi préparer de nouvelles escalades guerrières de l’impérialisme.