Le WSWS dénonce les frappes contre la Syrie menées tôt samedi matin par les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France. Les administrations de Donald Trump, d‘Emmanuel Macron et de Theresa May ont commis un crime de guerre qui pose l’immense danger de déclencher un conflit avec la Russie, qui dispose d’armes nucléaires.
Le prétexte de l’attaque est l’affirmation non étayée que les forces du président syrien Bachar al-Assad auraient utilisé des armes chimiques contre des milices rebelles soutenues par les Etats-Unis dans la ville de Douma. La Russie, qui a des troupes importantes en Syrie en soutien au gouvernement d’Assad dans sa guerre civile contre des milices majoritairement islamistes, a catégoriquement rejeté la propagande américaine et alliée. Elle a accusé les services secrets britanniques d’avoir fait pression sur les organisations rebelles syriennes pour qu‘elles fabriquent une vidéo censée montrer les victimes d‘une attaque à l’arme chimique.
Une équipe de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), ostensiblement indépendante, devait arriver à Douma pour inspecter le site présumé de l‘attaque ce week-end. L’ordre de Trump de lancer des frappes avait pour intention d’empêcher une telle inspection et une confirmation par l’OIAC que tout le prétexte d‘une attaque contre la Syrie n’était qu’un mensonge.
La base frauduleuse de l’agression est ressortie peu après l’annonce de Trump, lors d’une conférence de presse ultérieure tenue par son secrétaire à la Défense, le général Jim Mattis. Mattis n’a pu fournir aucun détail cohérent sur les accusations américaines. De plus, contredisant l’appel du président à une campagne prolongée contre la Syrie, le général a semblé indiquer qu’il n’y aurait plus d’action en dehors des frappes de missiles qui avaient déjà eu lieu.
Si c’est en effet le cas, la frappe lancée par Trump restera bien en-deçà du niveau d’action exigé par la classe politique et les médias américains.
Vu le vitriol lancé par Trump à destination d‘Assad, les partisans des frappes contre Assad s’attendaient sans aucun doute à ce que les frappes incluraient une tentative d’assassiner le président syrien.
Un article paru dans le quotidien allemand Die Welt donne une idée du caractère meurtrier de ce que les cercles de la classe dirigeante impérialiste entendent déchaîner contre la Syrie. Cet article déclare :« La guerre contre Assad devrait être guidée par un seul objectif et cette question: le régime Assad se laissera-t-il exterminer (auslöschen) par un tir de missile?“ En parlant d‘ « extermination » par rapport au président syrien, ce journal emploie un terme qu‘on associe à l‘extermination des Juifs par les nazis – et se sert d‘un langage qu‘on aurait pu trouver dans le Völkischer Beobachter d‘Hitler.
Loin d’assurer la destruction du régime d‘Assad, les frappes sur la Syrie semblent avoir eu un impact minime. L’armée russe déclare que les forces syriennes ont pu abattre la plupart des missiles lancés vers la Syrie, et qu’aucun de leurs personnels ou agents en Syrie n’a été touché. Bachar al-Assad se serait rendu à son bureau à pied samedi matin.
Pour l’heure, l’attaque a surtout montré la débâcle des intrigues de l’OTAN visant à renverser le régime syrien. On peut s’attendre à ce que, bientôt, de larges secteurs de la classe politique américaine accusent Trump d’avoir capitulé face à Poutine et exigent la préparation d’opérations encore plus vastes et plus meurtrières.
La propagande qu‘on avait concoctée pour justifier les frappes en Syrie visait à fournir le prétexte d‘une action militaire massive, non pas d‘une frappe ponctuelle avec des missiles de croisière.
Face à la perspective d‘une débâcle des forces islamistes soutenues par Washington pour renverser le gouvernement syrien, Washington et Londres avaient décidé une escalade de la guerre et on avait laissé le soin à la CIA, au MI6 et à leurs agents syriens de fabriquer le prétexte.
Vendredi, le ministère de la Défense russe a fourni l’explication la plus cohérente et la plus logique à ce jour sur l’incident survenu à Douma le 7 avril, que la presse occidentale avait proclamé unanimement être une attaque chimique contre des civils par le gouvernement Assad.
«Nous avons des preuves irréfutables qu’il s’agissait d’une nouvelle mise en scène d‘une attaque et les services spéciaux d’un État qui est à la pointe de la campagne contre la Russie ont contribué à l‘organiser», a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.
Le ministère russe de la Défense a projeté une vidéo d’interviews avec deux personnes, dont une étudiante en médecine travaillant dans le seul hôpital opérationnel de Douma. Selon ces témoins, après un barrage d’artillerie de l’armée syrienne qui a heurté un bâtiment, on traitait des personnes souffrant d’inhalation de fumée dans l’hôpital. Puis, des individus inconnus, qui se sont avérés être liés aux rebelles syriens «Casques blancs» (White Helmets) soutenus par la CIA, sont entrés dans l’hôpital en criant qu’il y avait eu une attaque chimique. Ils ont encouragé les victimes à s‘arroser avec de l’eau et ils les ont filmés.
Selon le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konashenkov, «Nous savons avec certitude qu’entre le 3 et le 6 avril, on a fortement poussé les prétendus casques blancs depuis Londres à accélérer la provocation qu’ils préparaient».
RT.com écrit: «Selon Konashenkov, le groupe, qui était la principale source des photos et des films de la prétendue attaque chimique a su que le groupe islamiste ‘L’armée de l’Islam’, qui contrôlait Douma à l’époque, planifiait une attaque d’artillerie à grande échelle contre Damas. Les Casques blancs ont reçu l’ordre d’organiser la provocation après les frappes de représailles des forces gouvernementales syriennes, que le bombardement allait certainement entraîner, a-t-il dit».
Malgré leurs dénonciations véhémentes des accusations russes, ni Washington ni Londres n’ont tenté de les réfuter. A la différence des déclarations catégoriques du gouvernement russe, étayées par des témoignages vidéo, Theresa May a seulement affirmé qu’il était «hautement probable» que la Syrie avait mené l’attaque. Mais même cela était plus précis que les déclarations du secrétaire à la Défense américain, Mattis, qui a avoué que les États-Unis «cherchaient toujours des preuves réelles».
En lançant l’attaque contre la Syrie, les États-Unis et leurs alliés ont montré que l’effondrement des prétextes pour leur guerre leur importait peu. Les causes de l’assaut sont bien plus profondes que les mensonges utilisés pour le justifier.
Ce qui se passe cadre parfaitement avec l’analyse de l’impérialisme faite par les grands marxistes du 20e siècle Lénine et Trotsky. L’impérialisme mondial entreprend une nouvelle division du monde. Londres et Paris veulent être reconnus comme des acteurs à part entière du nouveau partage du Moyen-Orient et de sa recolonisation; leurs sociétés pétrolières ne veulent pas être exclues du pillage.
Les gouvernements qui participent à cette nouvelle offensive sont tous en crise et n’ont aucune légitimité électorale. On peut mesurer le vaste fossé qui les sépare de leurs populations en observant qu’aucun d’eux n’a pu créer un large soutien à la guerre. Selon un sondage YouGov, seulement 22 pour cent de la population britannique est favorable à une attaque militaire contre la Syrie.
De plus, à Londres, Paris et Washington, on considère qu’une nouvelle campagne militaire majeure fournirait un prétexte idéal pour installer un régime policier, avec une censure de masse, pour renforcer leurs gouvernements en crise face à l’opposition populaire grandissante et à la montée des grèves dans la classe ouvrière.
Ce nouveau conflit ne s’arrêtera pas avec cette attaque contre la Syrie, pas plus que l’extension de la guerre ne s’est arrêtée avec l’invasion de l’Irak. On prépare une confrontation avec l’Iran, la Russie et finalement la Chine. La politique impérialiste acquiert un caractère toujours plus irresponsable et aberrant.
Jusqu’à présent, la classe dirigeante a pu compter sur l’absence de toute résistance organisée à la guerre. Mais l’opposition populaire à la guerre deviendra inévitablement active et convergera avec l’opposition croissante à l’austérité et à la destruction des droits démocratiques. Le «World Socialist Web Site» fournira la perspective et la direction socialistes nécessaires à un mouvement international émergent de la classe ouvrière contre la guerre.