Hier, le Conseil des ministres a examiné la Loi de programmation militaire (LPM) française pour 2019-2025, qui prévoit une large augmentation de l'effort de défense. Les dépenses militaires totales sur cette période seront au-delà de 300 milliards €, et le budget annuel augmentera plus de 35 pour cent pour s'établir à 44 milliards €. Ceci réaliserait l'engagement de Macron lors de sa campagne présidentielle, de porter l'effort de défense à 2 pour cent du Produit intérieur brut (PIB).
La ministre de la Défense, Florence Parly, a indiqué que cette augmentation se ferait dans le cadre du respect strict des règles budgétaires de l'Union européenne (UE). «Je suis consciente que les 2 pour cent pour la défense vont avec le 3 pour cent de Bruxelles», a déclaré Parly au Monde. C'est-à-dire que l'augmentation des budgets militaires correspondra mécaniquement à une réduction massive des dépenses sociales et du niveau de vie de la population.
Ceci démasque la politique européenne menée sous l'égide de Macron et du gouvernement de Grande Coalition que la bourgeoisie allemande tente d'assembler à Berlin. Les banques et l'armées mènent une offensive contre les travailleurs, pour financer la militarisation l'Europe sur leur dos. Elles veulent casser des droits sociaux acquis en lutte, suite à la révolution d'octobre 1917 et la fondation de l'Union soviétique et l'effondrement des régimes fascistes en Europe, afin de préparer le continent à de nouvelles guerres.
En France, elles projettent le sabotage du Code du travail par les ordonnances de Macron, l'imposition de salaires en-dessous du SMIC, les réductions d'emplois à PSA, la privatisation de la SNCF avec la suppression du statut de cheminot, et la fin de l'emploi à vie dans la fonction publique. Des coupes claires dans les retraites et la Sécu sont annoncées pour la fin du mandat. En même temps, Macron donne des cadeaux massifs aux riches en éliminant l'ISF, et gave l'armée de centaines de milliards d'euros.
L'augmentation des crédits militaires passera de 1,7 milliards € par an en 2018-2022 à 3 milliards € par an en 2023-2025. Ceci laisse entendre que le sabordage des retraites et des dépenses de santé pour la fin du mandat de Macron est voué en grande partie au financement de l'appareil militaire.
A travers l'Otan, les gouvernements déversent des centaines de milliards d'euros sur les armées, alors que Washington a déclaré que la Russie et la Chine, des puissances nucléaires, sont des cibles prioritaires plus importantes qu'Al Qaïda. Washington lance une augmentation de 180 milliards $ de son effort de défense, alors que l'Espagne veut faire doubler son budget militaire en le fixant à 18,47 milliards €.
La base de l'accord gouvernemental entre conservateurs et social-démocrates allemands prévoit des mesures d'austérité afin de financer une augmentation massive de 35 milliards € du budget militaire annuel allemand, pour faire de l'Allemagne la principale puissance militaire de l'UE.
La LPM française participe à cette course internationale aux armements qu'organisent toutes les puissances impérialistes en Amérique du Nord et en Europe. Selon la presse, elle prévoit une augmentation de 14 pour cent de la masse salariale pour les forces armées, avec 6.000 recrutements supplémentaires.
Les dépenses d'équipement doivent augmenter de 34 pour cent, avec une production accélérée de blindés Scorpion, de quatre sous marins Barracuda et de trois frégates multi-missions. Finalement, les dépenses dites «stratégiques», visant à maintenir à long terme la puissance militaire de l'Etat français, doivent également exploser.
Les nouveaux crédits alloués aux armes nucléaires s'élèveront à eux seuls à 17 milliards € au courant de cette période. Il y aura aussi d'énormes dépenses sur la cyber-guerre, la planification de nouvelles armes (porte-avions, chars, chasseurs) et la production d'un avion-ravitailleur, essentiel à toute capacité indépendante de mener des guerres. Actuellement, les armées françaises et européennes dépendent toujours d'avions-ravitailleurs américains dans leurs opérations.
Macron pourrait ensuite exiger des augmentations même plus massives de l'effort de défense dans les années à venir, car il a également répété le mois passé, lors d'un discours à la base navale à Toulon, qu'il veut imposer le service militaire universel en France. Le coût de la réintrodruction du service militaire et son extension aux femmes se chiffrerait dans les dizaines de milliards d'euros.
Cette politique militariste, menée de concert par toutes les grandes puissances de l'Otan, constitue un avertissement pour les travailleurs. Après le quart de siècle de guerres impérialistes qui a suivi la dissolution de l'Union soviétique par le régime stalinien, et qui ont ensanglanté le Moyen Orient et l'Afrique, le capitalisme mondial est à nouveau au bord d'une guerre majeure. Le conflit auquel les puissances de l'Otan se préparent serait un conflit mondial dévastateur, visant à maintenir la position mondiale hégémonique des puissances impérialistes.
Quand elle s'exprime plus franchement sur ses appétits, la presse impérialiste avoue que c'est ce que préparent les puissances de l'Otan. Ainsi, en janvier, l'influent magazine britannique The Economist écrivait: «Des transformations géopolitiques majeures et à long terme et la prolifération de nouvelles technologies minent la domination militaire extraordinaire dont ont joui l'Amérique et ses alliés. Des conflits à des échelles et des intensités jamais vues depuis la Deuxième Guerre mondiale sont à nouveau plausibles. Le monde n'est pas prêt.»
Ces lignes constituent un avertissement que l'humanité est au bord d'une nouvelle guerre mondiale. Elles jettent une lumière crue sur ce que font Berlin, Madrid, Paris et l'Administration Trump: ils s'arment pour des conflits à «des intensités jamais vues depuis la Deuxième Guerre mondiale.» C'est pour cela, aussi, que la Suède a repris sa publication annuelle d'un livre destiné à tous les citoyens suédois sur ce qu'il faudrait faire en cas de guerre nucléaire, et que le Kremlin a dit en novembre qu'il fallait préparer l'industrie russe à une mobilisation totale pour la guerre.
Pour les travailleurs en Europe, parmi lesquels l'opposition monte à la politique d'austérité salariale et sociale menée depuis le krach de 2008 et la crise économique, c'est aussi un avertissement sur le caractère des luttes à venir. En 2018, des grèves ont déjà éclatées parmi les métallos allemands et turcs, et les cheminots britanniques. En France, des grèves ont déjà éclaté dans les Ehpad et se préparent parmi les cheminots, face à la politique de casse sociale de Macron.
Il sera impossible de défendre les salaires et les acquis des travailleurs en Europe en dehors d'une lutte politique contre la guerre et le militarisme, où les principaux alliés des travailleurs français seront leurs frères et sœurs de classe dans les autres pays.