Mardi, le président américain Donald Trump a de nouveau menacé la Corée du Nord de destruction si elle ne capitulait pas complètement aux exigences de Washington. En déclarant que la guerre est non seulement une option mais serait imminente, il pousse sans relâche la péninsule coréenne, l'Asie et le monde vers un conflit calamiteux.
Lors d'une conférence de presse à la Maison Blanche avec le Premier ministre espagnol, Trump a prévenu: « Nous sommes totalement préparés à l'option [militaire]. Ce n'est pas une option préférée. Mais si nous la prenons, ce sera dévastateur. Je peux vous le dire. Dévastateur pour la Corée du Nord. C'est ce qu'on appelle l'option militaire. Si nous devons la choisir, nous le ferons. »
Alors qu'il proférait ces menaces belliqueuses, il n'a jamais expliqué quelle était «l'option préférée». Il a rejeté à maintes reprises les pourparlers avec la Corée du Nord. Ses tirades contre l'accord de dénucléarisation de 2015 avec l'Iran ont effectivement écarté un accord similaire avec Pyongyang.
On ne peut que conclure que Trump s'attend à ce que la Corée du Nord abandonne son arsenal nucléaire et se soumette à des inspections intrusives qui serviront de prélude à une infinité d'exigences supplémentaires de Washington. Bref, Pyongyang doit volontairement devenir un vassal de Washington.
En outre, même si la Pyongyang acceptait un tel avenir, rien ne dit que ceci empêcherait une guerre avec Washington. Le régime nord-coréen n'est que trop conscient du sort des dirigeants irakien et libyen, assassinés par Washington après qu'ils aient abandonné leurs supposées armes de destruction massive, réelles ou fictives, lors de guerres américaines qui ont dévasté leurs pays.
Même quand la Maison-Blanche évoque une sortie «diplomatique» ou «pacifique» de l'impasse avec la Corée du Nord, leurs propos sont toujours chargés de menaces. En Inde hier, le secrétaire à la Défense, James Mattis, a souligné que Washington veut une solution diplomatique. En même temps, il a déclaré que le soutien de l'armée pour «nos diplomates» ne ferait que «garder ceci dans le domaine diplomatique le plus longtemps possible».
Mattis lui-même a précisé que que Pyongyang doit bientôt céder. Lundi, Trump a brutalement averti le ministre nord-coréen des Affaires étrangères, Ri Yong-ho, que lui et le chef d'Etat, Kim Jong-un, « n'existeront plus longtemps ».
La seule conclusion que le régime à Pyongyang puisse tirer est qu'il doit s'attendre à une attaque imminente des États-Unis et agir en conséquence. Ri l'a dit lundi. Il a prévenu que les menaces de Trump signifiaient que Washington avait déclaré la guerre et que la Corée du Nord devait préparer une riposte militaire.
Trump resserre rapidement l'étau des sanctions économiques contre la Corée du Nord, en réalité un embargo total visant à faire effondrer l'économie du pays et à faire chuter le régime à Pyongyang. Le Trésor américain a annoncé hier de nouvelles interdictions visant huit banques nord-coréennes et 26 personnes, visant à étouffer l'accès de Pyongyang au système financier international.
Washington ne fait même plus semblant que les sanctions visent les programmes nucléaires et de missiles de la Corée du Nord, et non le pays et sa population. La semaine dernière, Trump a émis un décret général qui autorise le Trésor américain à couper du système financier américain tout pays ou entreprise qui commerce avec la Corée du Nord. Il cible en particulier à la Chine, qui est de loin le principal partenaire commercial de la Corée du Nord, et aussi Moscou, qui emploie des dizaines de milliers de Nord-Coréens en Russie.
En annonçant les dernières interdictions, le secrétaire du Trésor Steven Mnuchin a déclaré: «Nous visons les banques nord-coréennes et les facilitateurs financiers qui servent de représentants aux banques nord-coréennes à travers le monde». Mais en appliquant ces interdictions, Washington cible aussi les pays où fonctionnent ces entités : la Chine, la Russie, la Libye et les Émirats arabes unis. A présent, tous ces pays doivent craindre des sanctions américaines.
Ces sanctions américaines unilatérales, déjà été imposées contre plusieurs entreprises chinoises, démontrent qu'en menaçant Pyongyang, les États-Unis se préparent à une confrontation bien plus large avec la Chine, que Washington considère être l'obstacle principal à son hégémonie mondiale.
Le président du Comité des chefs d'état-major des États-Unis, le général Joseph Dunford, a déclaré au Congrès mardi que la Chine «constitue probablement la plus grande menace pour notre pays d'ici 2025». Il a cité la croissance et l'expansion militaire de la Chine, dont le budget de défense est toujours beaucoup plus faible que le budget américain.
Hier, la Chine a de nouveau appelé au calme sur la péninsule coréenne. Selon le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Lu Kang, Pékin espère que Washington et Pyongyang se rendront compte qu' «afficher aveuglément sa supériorité avec les mots pour fanfaronner, la provocation mutuelle ne feront qu'augmenter le risque d'un affrontement et réduire la marge de manoeuvre. ... Une guerre sur la péninsule coréenne n'aura pas de gagnants et sera encore pire pour la région et les pays de la région ».
Ces remarques faisaient écho à celles du ministre russe des Affaires étrangères, Sergei Lavrov dimanche. Il a dit que si les États-Unis ne se calmaient pas, «nous pourrions partir en vrille d'une façon très imprévisible et des dizaines, voire des centaines de milliers de citoyens innocents de la Corée du Sud, mais aussi de la Corée du Nord, bien sûr, et du Japon souffriront: la Russie et la Chine sont proches".
Face au danger de la guerre, la Russie et la Chine se préparent aussi. La semaine dernière, les armées russes et chinoises ont lancé des exercices conjoints de huit jours dans les eaux du Pacifique proches de la Corée du Nord. Cette semaine, la Russie lance un exercice majeur de l'armée de l'air dans l'Extrême-Orient russe, près de sa frontière nord-coréenne.
Par ses menaces et ses provocations constantes, l'administration Trump a délibérément créé une situation explosive en Asie du Nord-Est. En acculant la Corée du Nord diplomatique, Washington pousse le régime instable à Pyongyang à prendre des mesures désespérées que Washington exploiterait pour lancer une guerre criminelle d'anéantissement qui pourrait rapidement impliquer d'autres puissances nucléaires telles que la Chine et Russie.
(Article paru en anglais le 27 septembre 2017)