Six morts dans une attaque terroriste contre une mosquée de Québec

Six Canadiens musulmans, tous d'origine nord ou ouest-africaine, ont été tués et 19 autres blessés, dont 5 grièvement, par un tireur masqué qui a pris d'assaut un mosquée de la ville de Québec durant la prière dimanche soir.

Lundi après-midi, Alexandre Bissonnette, un étudiant de 27 ans de l'Université Laval, a répondu de six chefs d'accusation de meurtre au premier degré et de cinq chefs de tentative de meurtre lors d'une brève séance au tribunal.

Peu de temps après le massacre, Bissonnette a contacté la police et s'est ensuite rendu aux autorités sur un pont de Québec. Deux pistolets et un AK-47 ont été retrouvés dans sa voiture.

Initialement, la police a détenu une deuxième personne qui se trouvait à proximité du Centre culturel islamique de Québec, le lieu de la fusillade. Mais elle a admis plus tard qu'il s'agissait d'une erreur et elle croit maintenant que Bissonnette aurait agi seul.

L'attaque de dimanche était un crime haineux. La cible de l'attaque et le profil du présumé meurtrier laissent peu de doute qu'il s'agissait d'une attaque politique motivée par l'islamophobie et des positions d'extrême-droite.

Peu de temps après la publication de la photo de Bissonnette par les médias, le directeur d'un groupe de Québec consacré à l'aide aux réfugiés syriens a dit aux journalistes qu'il était connu du groupe pour ses positions anti-immigrantes. François Deschamps de «Bienvenue aux réfugiés» a affirmé que Bissonnette s'en prenait aussi régulièrement aux féministes dans les messages qu'il affichait en ligne.

Selon le quotidien montréalais La Presse, la page Facebook de Bissonnette, qui est maintenant désactivée, contenait des liens vers le Front national, le parti néofasciste français de Marine Le Pen.

Global News a rapporté que Bissonnette avait aussi «aimé» sur Facebook le président américain Donald Trump, les Forces de défense israéliennes et Christopher Hitchens, l'écrivain britannique devenu propagandiste l'invasion illégale de l'Irak par les États-Unis en 2003 et la frauduleuse «guerre contre le terrorisme» de Washington.

Des témoins on dit que lorsque Bissonnette a ouvert le feu sur eux, il a crié «Allahu Akbar» dans un fort accent franco-québécois.

Peu de temps après que les médias ont rapporté l'attaque, les autorités canadiennes, à commencer par le premier ministre du Canada Justin Trudeau et le premier ministre du Québec Philippe Couillard l'ont dénoncée comme un acte de terrorisme.

Les reportages des médias de la ville de Québec suggèrent que Bissonnette est un individu psychologiquement troublé. Même si cela est vrai, et c'est probable, la tuerie de masse de dimanche ne peut pas être dissociée de l'environnement politique et social toxique qui a été créé par les gouvernements et l'élite capitaliste d'Amérique du Nord à travers leurs guerres d'agression, leur assaut sur les droits démocratiques et leur promotion de la réaction, y compris l'intolérance envers les musulmans.

Depuis vendredi, les reportages du monde entier ont été dominés par les retombées du décret présidentiel, antidémocratique et ouvertement discriminatoire, de Donald Trump qui interdit aux réfugiés, aux visiteurs et aux résidents permanents américains provenant de sept pays à majorité musulmane d'entrer aux États-Unis. Tous ces pays – l'Iran, l'Irak, la Libye, la Somalie, le Soudan, la Syrie et le Yémen – sont la cible de l'agression américaine, que ce soit par des guerres de «changement de régime», des frappes de drone ou de sévères sanctions économiques.

Trump a systématiquement attisé les préjugés antimusulmans depuis qu'il a décidé de devenir le candidat présidentiel des républicains. Cela est illustré par la nomination de Stephen Bannon, ancien cadre de Goldman-Sachs qui a fait de Breitbart News une plate-forme pour le mouvement fascisant «alt-right», en tant que «stratège en chef».

Lundi, le porte-parole de la Maison-Blanche Sean Spicer s'est efforcé de condamner l'attaque de Québec «de la façon la plus dure possible». Mai sil n'a pas mentionné que la cible était une mosquée, ni que les victimes étaient musulmanes. Sans perdre un instant, Spicer a ensuite tenté d'utiliser les meurtres perpétrés par un sympathisant de l'extrême droite pour justifier la persécution des musulmans et des immigrants par l'administration Trump. «Ça nous rappelle terriblement, a dit Spicer, pourquoi nous devons demeurer vigilants et pourquoi le président agit de manière proactive et non réactive aux enjeux de sécurité nationale.»

Comme le Parti démocrate aux États-Unis, l'élite du Canada prétend être consternée par l'intolérance anti-musulmane de Trump. Mais depuis 2001, elle fait la promotion de la «guerre contre le terrorisme» et se joint aux deux partis de la grande entreprise américaine pour exploiter les atrocités commises par des terroristes islamiques – souvent grâce à des failles inexpliquées dans les services de renseignement – afin de légitimer le militarisme, la guerre et de vastes attaques contre les droits démocratiques, tout en attisant les préjugés antimusulmans.

Stephen Harper et ses conservateurs ont tenté de se faire réélire à l'automne 2015 en utilisant des appels vulgaires islamophobes, prétendant que le Canada était en guerre avec le «terrorisme islamique» et promettant de mettre sur pied une ligne téléphonique où les Canadiens auraient pu dénoncer les «pratiques culturelles barbares» de leurs voisins immigrants.

Il s'agissait de l'aboutissement d'une campagne d'un an durant laquelle l'élite dirigeante canadienne s'était mobilisée derrière le gouvernement conservateur Harper en utilisant le meurtre de deux membres des forces armées par des Canadiens psychologiquement troublés qui s'étaient convertis à l'islam afin d'encourager la réaction au pays et à l'étranger. Ce qui voulait dire entre autres d'élargir la participation du Canada dans la guerre des États-Unis en Irak et en Syrie – une guerre qui émerge directement des guerres désastreuses menées précédemment par Washington au Moyen-Orient et qui, comme elles, vise à renforcer l'hégémonie des États-Unis sur la plus importante région exportatrice de pétrole au monde. Cela voulait aussi dire la ratification, avec l'appui des libéraux, d'une loi accordant à l'appareil de sécurité nationale des pouvoirs d'État policier (C-51).

Pour ce qui est de Trudeau – le politicien qui est présenté par le New York Times et le Guardian britannique comme le modèle à suivre pour le libéralisme international – il courtise Trump avec assiduité depuis son élection en novembre dernier.

Le gouvernement libéral de Trudeau est en négociation avec les responsables de l’administration Trump afin d’étendre la participation déjà très vaste du Canada dans les offensives militaires-stratégiques des États-Unis au Moyen-Orient et contre la Russie et la Chine. Il a aussi signalé qu’il est prêt à jeter le Mexique aux loups et à appuyer Trump dans son sabordage de l’ALÉNA, en autant que la grande entreprise canadienne garde son accès privilégié aux marchés américains.

Hormis un tweet samedi dernier qui déclarait que les «Canadiens vont accueillir» les réfugiés, Trudeau s’est abstenu de critiquer les attaques contre les droits démocratiques de Trump et ses efforts pour militariser la frontière mexicaine, sans parler de ses politiques protectionnistes «Amérique d’abord» et ses plans pour augmenter massivement les dépenses militaires.

C’est parce que la classe dirigeante voit la défense de ses intérêts impérialistes comme quelque chose d’essentiel qu’elle désire que le Canada soit, comme le Globe and Mail l’a écrit récemment, «derrière les murs de Trump» – c’est-à-dire son partenaire dans la «Forteresse Amérique».

Les médias libéraux canadiens, comme ceux des États-Unis, ont systématiquement menti à propos des forces d’extrême-droite, incluant des terroristes islamistes, que Washington et ses alliés canadiens utilisent sur la scène mondiale.

Par exemple, combien de Canadiens savent que le personnel des Forces armées canadiennes ayant participé dans la guerre de changement de régime menée par l’OTAN en Libye se décrivait comme l’«armée de l’air d’Al-Qaïda»?

Même si la classe dirigeante canadienne dans son ensemble est complice dans la promotion de l’intolérance et de la réaction envers les musulmans, ce n’est pas simplement un hasard si la ville de Québec a été le lieu de la première attaque mortelle contre une mosquée au Canada.

Toutes les sections de l’establishment politique au Québec, incluant le parti de la pseudo-gauche Québec Solidaire, ont légitimé la campagne réactionnaire lancée par les tabloïds pour faire croire que les immigrants et les minorités religieuses menacent les valeurs québécoises.

Les musulmans ont été la principale cible de cette campagne.

En ce moment, le gouvernement libéral du Québec a un projet de loi déposé à l’Assemblée nationale qui interdirait aux femmes musulmanes portant un voile religieux qui couvre leur visage de recevoir des services publics, incluant l’éducation et des soins de santé, sauf en cas d’urgence.

Lorsqu’il a été au pouvoir pendant 18 mois de 2012 à 2014, le Parti québécois, un parti pro-souveraineté appuyé par les syndicats, a tenté de promulguer la Charte des valeurs québécoises sous laquelle les travailleurs du secteur public étaient menacés de congédiement s’ils portaient un hidjab musulman, un turban sikh, une kippa juive ou d’autres symboles religieux «ostentatoires». Soulignant le caractère chauvin de ce projet de loi, il y avait une exception pour les croix «discrètes».

Le nouveau chef du PQ, Jean-François Lisée, a suggéré que ça doit être illégal pour les femmes musulmanes de porter le niqab ou la burka en public parce qu’il pourrait y avoir un AK-47 caché dessous.

Quant au maire de droite de la Ville de Québec, Régis Labeaume, il a, tout au plus, émis des condamnations pour la forme, malgré les nombreux actes de vandalismes contre les quatre mosquées de la ville, tout en suggérant régulièrement que les réfugiés pourraient constituer un danger terroriste.

Au Québec et au Canada, tout comme partout dans le monde, la classe dirigeante fait la promotion du chauvinisme anti-immigrants afin de diviser la classe ouvrière.

Des masses de gens partout au Québec et au Canada sont dégoûtés par les événements horribles de dimanche. Trudeau, Couillard et tout l’establishment politique tentent de manipuler ces sentiments par des appels hypocrites à l’unité et à la solidarité. Ils visent à supprimer toute discussion des véritables causes de la tragédie survenue au Centre culturel islamique de Québec.

La société capitaliste en crise, toujours plus polarisée et militarisée, vomit la réaction.

La défense des droits démocratiques nécessite le développement d’un mouvement indépendant de la classe ouvrière contre la guerre et les inégalités sociales, basé sur un programme explicitement anticapitaliste et internationaliste.

 

 

 

 

 

 

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