A l’approche de la primaire présidentielle du Parti Socialiste (PS) les 22 et 29 janvier, 46 élus PS de Lyon et des communes de la métropole lyonnaise ont signé un manifeste le 17 janvier annonçant leur boycott des deux tours de la primaire. Ils soutiendront à la place l’ancien ministre de l’Economie, Emmanual Macron, qui présente une candidature indépendante.
Des élus dans d'autres départements, tels que Maine-et-Loire et le Pas-de-Calais, ont aussi signalé qu’ils soutiendraient Macron si le taux de participation à la primaire du PS n’est pas élevé.
La décision d’un nombre des membres du PS de ne pas soutenir le candidat de leur propre parti témoigne de la désintégration avancée du PS, qui anticipe une débâcle aux présidentielles. Le PS est profondément discrédité par l’héritage politique du président François Hollande : l’austérité, des mesures d'Etat policier et la guerre. La cote de popularité de Hollande s'établit à quatre pour cent dans les sondages ; c'est le président français le plus impopulaire de tous les temps.
Tout au long de leurs campagnes, les candidats du PS ont rendu hommage à l’administration de président Hollande ; tous ont signalé qu’ils continueraient la politique du gouvernement actuel.
Après une décennie d’austérité intense depuis la crise financière de 2008 et l’escalade des interventions impérialistes au Mali, en Libye et en Syrie, le PS est détesté par une large majorité de la population. Quel que soit le candidat qui gagne la primaire, selon les sondages, il obtiendra moins de voix que Macron, le candidat de la droite, François Fillon, et la dirigeante du Front National (FN), Marine Le-Pen.
Les candidatures de Benoit Hamon et Arnaud Montebourg – qui gagnent rapidement de terrain par rapport à Manuel Valls pour remporter la primaire – représentent le courant « frondeur » du PS. Au gouvernment et dans leurs campagnes, ils ont tièdement critiqué le programme de Hollande, pour donner une couverture « de gauche » à sa politique anti-ouvrière, anti-démocratique et pro-guerre.
Benoit Hamon, qui promet d’instituer un revenu universel et d’augmenter les dépenses publiques, représente la section du PS qui cherche à maintenir des liens avec la pseudo-gauche et de ranimer l’illusion que le PS peut représente rune alternative ‘à gauche’ en France. Il s’est déclaré prêt à discuter avec Jean-Luc Mélenchon, l’ex-dirigeant du Parti de Gauche (PG), s’il devient le candidat du PS.
Une fraction considérable du PS, qui rechigne à l’idée de se ranger derrière Hamon s’il devient le candidat du PS après la primaire, se prépare à appuyer Macron.
Selon les proches de Hollande, il envisagerait lui-même de soutenir Macron. « François Hollande va probablement soutenir Macron », a déclaré au JDD un de ses vieux amis, Dominique Villemot, un commentaire dont il s'est distancié quelques heures après.
Dans cette crise, des membres du PS essayent se positionner aux mieux pour la situation après l’élection présidentielle. Des sections larges du PS qui soutiennent Hollande se servent de la débâcle anticipée pour se ranger derrière Macron, un candidat qui jouit, en tant qu'ex-ministre de l'Economie sous Hollande, du soutien de larges sections de la bourgeoisie et les médias, qui font promotion de sa campagne comme alternative à Fillon et Le Pen.
Au mois d’avril dernier, alors que les manifestations contre la loi travail explosaient en France, Macron a lancé son mouvement électoral En Marche ! Il a mis en avant son « style » de jeune entrepreneur, pour donner un vernis de modernité aux attaques menées contre la classe ouvrière.
Macron, qui est favorable à l’Union Européenne (UE) et , s’oppose à la semaine de travail de 35 heures et appelle à l’augmentation des mesures de la sécurité avec la création de 10.000 fonctionnaires de police et de gendarmerie. Face à la crise de l’EU au Brexit, à la position agressive de Donald Trump par rapport à l’Europe et la croissance de l’eurosceptisme dans tout le continent, les milieux d’affaires cherchent un bon exécutant pour poursuivre le programme pro-austérité et pro-européen de Hollande et empêcher l’effondrement de l’UE.
Fillon et Le Pen critiquent l’UE depuis la droite et cherchent à établir des liens plus proches avec Moscou ; Macron semble donc être le seul candidat viable qu propose une stratégie de protéger les intérêts de la bourgeoisie française au sein de l’UE.
Macron n’est pas le premier dirigeant du PS à décider de créer un groupe semi-indépendant. En 2009 Jean-Luc Mélenchon a quitté le PS pour créer le PG, qu'il a arrimé à l'appareil politique et syndical des staliniens pour bénéficier d'une plate-forme électorale.
Ces tendances qui sortent du PS n’ont pas lancé des mouvements semi-indépendants parce qu’ils s’opposent au programme anti-ouvrière du PS ; elles sont tous hostiles à la classe ouvrière. Si Macron est plus explicitement hostile envers les travailleurs et favorables envers les intérêts de l'aristocratie financière, Mélenchon lui, a proclamé en 2014 la mort de la gauche et du socialisme et l'importance politique nulle de la classe ouvrière.
Face à la crise historique du PS, certains de ses membres cherchent à utiliser le mouvement de Macron comme nouvelle couverture pour continuer une politique militariste et austéritaire.
Le virage du PS vers Macron n’est pas simplement le résultat de la crise récente qui confronte le PS. La politique d'austérité et de guerre menée pendant des décennies après la dissolution stalinienne de l'URSS, et en particulier depuis le krach boursier de 2008, a discrédité les social-démocrates à travers l'Europe. Ils traversent tous la même crise—des social-démocrates grecs et espagnols, qui se sont effondrés suite à leur imposition de mesures d'austérité dictées par l'UE, aux social-démocrates allemands qui gouvernent avec les conservateurs et prônent l'austérité et la remilitarisation à Berlin.
C'est tout l'ensemble du projet d'un parti bourgeois « de gauche » pour défendre le capitalisme dans la période de l'après-guerre qui s'effondre. La crise du PS et le virage des grandes sections du parti vers Macron soulignent le fait que le PS est un parti pro-capitaliste et réactionnaire, qui n’a rien à offrir à la classe ouvrière.