Le fait qu'une femme musulmane française s’est fait verbaliser par la police sous le seul prétexte qu’elle était voilée constitue une attaque fondamentale contre la liberté de religion. Siam, ancienne hôtesse de l'air originaire de Toulouse, était en vacances sur Cannes avec sa famille et se trouvait sur une plage quand la police a reçu un appel critiquant le caractère « ostentatoire » de son voile.
Mathilde Cusin, une journaliste de France4 présente sur les lieux, a raconté la scène à NouvelObs : « j'ai vu trois policiers en train de regarder la plage. Deux d'entre eux avaient le doigt sur la gâchette de leur bombe lacrymo, sans doute du poivre. Puis je les ai vus traverser la plage vers une femme voilée, elle portait un simple hijab sur les cheveux ». Cette tenue est légale en France, mais les policiers municipaux ont sommé la jeune femme de quitter la plage, en citant un arrêté récent contre le port du burkini.
Selon le témoignage de Siam pour NouvelObs : « [Une policière] m’a dit : 'Vous êtes au courant qu’il y a un arrêté sur la ville de Cannes ?' J’ai dit que non, je ne savais pas exactement de quoi il en retournait, je n’avais pas trop suivi la polémique" ». La confrontation s'est envenimée ; selon Siam, « Mes enfants étaient en pleurs, témoins de mon humiliation, ainsi que ma famille ... Moi-même je n’ai pas pu m’empêcher de pleurer. Ils nous ont humiliées ».
Une foule hostile, que Cusin a qualifiée d' « assez violente », s'est attroupée autour de Siam, qui a commenté après : « La parole raciste s’est totalement libérée. J’étais abasourdie. J’ai entendu des choses que l’on ne m’avait jamais dites en face, comme ‘rentrez chez vous !’ ‘Madame, la loi c’est la loi, on en a marre de ces histoires’, ‘Ici on est catholiques !’ »
La famille de Siam et leurs proches ont répliqué: « Si ce sont les signes religieux ostentatoires qui sont visés, comme vous dites, pourquoi n’allez-vous pas chasser les croix ?" "On ne va pas faire la chasse aux croix", leur répond-on. "Allez sur la route, madame, on vous demande de quitter la plage." »
Siam conclut que c'est sa pratique de l'Islam qui pose problème, ce que sous-entend l’agent de police qui lui répond : « Dans le climat actuel, vous comprenez on est obligés de verbaliser ».
Siam a dit après: « Parce que des gens qui n’ont rien à voir avec ma religion tuent, je n’ai plus le droit d’aller à la plage ! Parce qu’ils commettent des attentats, on me prive de mes droits. On est en France, je peux tout de même circuler où je le souhaite ! C’est aberrant ... Aujourd’hui, on nous interdit la plage. Demain, la rue ? Après-demain, on nous interdira de pratiquer notre culte chez nous ?. Dans le pays des droits de l’homme, je ne vois pas de trace des principes de liberté, d’égalité et de fraternité. Je suis révoltée que cela puisse se passer en France. ».
Siam a ensuite dû quitter Cannes, selon Nouvel Obs : « ‘Mal à l’aise’, la personne qui les logeait leur a demandé de ne pas prolonger leur séjour à Cannes, comme prévu, un peu par ‘honte’ du scandale, aussi. »
Siam a saisi le Collectif contre l'islamophobie en France qui a médiatisé l'affaire : « Je me suis dit que l'on ne pouvait pas laisser passer ça dans notre pays. Le pire, c'est que je suis 'Française de souche' ! Mes parents sont français, mes grands-parents sont français... Quand on me dit 'rentre chez toi', ça me fait doucement rigoler, c'est vraiment du racisme pur et dur... ».
La persécution de Siam est ressortie de l'interdiction du port du burkini par plusieurs maires Les Républicains et PS après des mobilisations néofascistes en Corse, suite à une rixe contre une famille musulmane où une femme portait un burkini. Ces maires avaient pris des arrêtés interdisant le burkini, dans le contexte d'un acharnement médiatique contre cette tenue de bain.
Le directeur général des services de la ville de Cannes, Thierry Migoule, a déclaré à l'AFP : « Il ne s'agit pas d'interdire le port de signes religieux à la plage, mais les tenues ostentatoires qui font référence à une allégeance à des mouvements terroristes qui nous font la guerre ».
Sous couvert de la lutte antiterroriste et d'une prétendue défense de la laïcité et des droits des femmes, l'Etat mène des attaques sans précédent contre les droits des musulmans. De pareilles déclarations, ainsi que la décision de la police de verbaliser Siam, témoignent d'une volonté de criminaliser la pratique de l'Islam. Ce que laisse clairement entendre le propos de Migoule, c'est que le seule port du voile par une musulmane, en tant que signe visible de sa foi, peut être assimilée à une allégeance aux terrorisme islamiste.
C'est un mensonge politique répugnant. En fait, les attentats terroristes en France sont avant tout le produit de la politique étrangère de l'OTAN, y compris de l'Etat français, au Moyen Orient.
Paris et les autres capitales de l'OTAN soutiennent des milices islamistes qui combattent le régime d’Assad en prétendant qu'elles sont l'expression d'une révolte populaire et démocratique. Ces mêmes islamistes emploient les méthodes terroristes qu'ils ont apprises en Syrie une fois de retour en Europe ; ils profitent de l'impunité dont ils jouissent auprès des services de sécurité, en tant qu'instruments de la politique étrangère française, pour organiser leurs attentats sur le sol européen.
L'Etat réagit aux actes terroristes, qui impliquent toujours des individus connus des services de renseignement, en mettant les droits démocratiques en lambeaux et en imposant un état d'urgence.
Quelques jours après que Siam a été verbalisée, le Conseil d'Etat a décidé de suspendre l'arrêté des maires interdisant le burkini sur les plages publiques. Toutefois, les maires et Valls défient la décision du Conseil car ils veulent absolument mener à bien leur campagne antimusulmane. Valls a dit, « Cette ordonnance du Conseil d’Etat n’épuise pas le débat » Il a ajouté que « rester silencieux, comme par le passé, c’est un petit renoncement. Une démission de plus ».
De tels commentaires constituent un avertissement pour la classe ouvrière. La décision de Hollande d'imposer l'état d'urgence et sa proposition d'inscrire la déchéance dans la constitution, légitimisant ainsi une mesure qui a permis au régime de Vichy de lancer la Shoah, n'était ni une mesure antiterroriste, ni un hasard. Elle correspondait à une profonde crise de la démocratie française, provoquée par la montée de la guerre et de l'opposition sociale, notamment celle des travailleurs contre la loi travail du PS.
Au sein de la classe dirigeante en France, de puissantes forces considèrent la possibilité de réagir à cette crise en établissant un régime autoritaire qui mènerait une politique de persécution de communautés religieuses entières, voire de nettoyage ethnique.
Hollande a dû reculer une première fois quand il a tenté de légitimer la déchéance de nationalité, car l'opposition sociale parmi les travailleurs et les jeunes était trop forte pendant les manifestations contre la loi travail. A présent, en persécutant les femmes voilées, la classe dirigeante revient à la charge.