Le gouvernement français retire l’interdiction de manifestation contre le droit du travail

Des manifestations doivent avoir lieu dans toute la France aujourd’hui contre la Loi travail méprisée du gouvernement du Parti socialiste (PS), après que le PS a soudainement fait marche arrière sur ses menaces d’interdire la manifestation d’aujourd’hui à Paris. La décision sans précédent de menacer d’une telle interdiction indique l’état avancé des préparatifs de la répression étatique de l’opposition sociale dans la classe ouvrière. 

Après que le Premier ministre Manuel Valls et le président François Hollande ont menacé à plusieurs reprises la semaine dernière d’interdire de nouvelles manifestations, la préfecture de police de Paris a publié une brève déclaration, hier matin, déclarant que la manifestation à Paris serait interdite pour des raisons de sécurité. 

Il affirmait que les discussions avec les syndicats avaient échoué du fait que « les représentants des syndicats refusant catégoriquement la tenue d’un rassemblement statique et formulant ensuite des propositions alternatives d’itinéraires. » 

La déclaration se poursuivait : « Après examen attentif, ces propositions alternatives ne permettent en aucune façon de répondre à la nécessaire sécurité des personnes et des biens, ni aux exigences de mobilisation maximale des forces de police et des forces mobiles contre la menace terroriste qui se situe à un niveau élevé imposant des sollicitations exceptionnelles sur le territoire national. Dans ces conditions le Préfet de police considère qu’il n’a pas d’autre choix que d’interdire la tenue de la manifestation. » 

La signification de la position de la préfecture était claire. Comme le gouvernement n’a donné aucune indication qu’il croit que la menace terroriste des réseaux islamistes formés dans le cadre des guerres impérialistes de l’OTAN en Libye et en Syrie allait s’affaisser, la préfecture faisait valoir que les protestations sociales à Paris seraient interdites pour une période entière. Les droits démocratiques fondamentaux de grève et de protestation protégés par la Constitution devaient être annulés par quelques traits de plume dans la préfecture de Paris. 

La position avait manifestement le soutien de l’ensemble de la direction supérieure du gouvernement PS. Lors d’une conférence de presse, son porte-parole, Stéphane Le Foll, a critiqué les journalistes qui le questionnaient sur le rôle de Valls poussant à l’interdiction de la manifestation.

« Le petit jeu où vous laissez les gens penser que la décision a été prise au sein de l’exécutif par le Premier ministre falsifie la question », a déclaré Le Foll. « Les décisions sont prises de manière collective, et la préfecture de police tente de s’équilibrer entre le droit de manifester et les risques qui sont impliqués. » 

Néanmoins, alors que Le Foll parlait, les dirigeants de la Confédération générale du travail (CGT) stalinienne et Force ouvrière (FO) exigeaient une réunion d’urgence avec le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve. Lors de cette réunion, ils auraient mis en garde Cazeneuve que, même si la manifestation était interdite, il serait impossible d’empêcher des masses de gens d’apparaître pour protester et de se rassembler dans d’un grand nombre de petits rassemblements de protestation illégaux. En plus, il faudrait encore plus de policiers pour attaquer et disperser ces rassemblements que de maintenir de l’ordre d’une grande manifestation. 

Pendant que les représentants de la CGT et de FO parlaient à Cazeneuve, des pétitions en ligne ont circulé dans lesquelles les gens ont déclaré qu’ils iront défier toute interdiction et participer à la manifestation de demain. Une pétition publiée sur change.org a réuni près de 150 000 signatures au cours de la journée. 

À 12 h 45, après la réunion avec Cazeneuve, le Secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, et le leader de FO, Jean-Claude Mailly, ont tenu une rare conférence de presse conjointe avec d’autres responsables syndicaux. Contredisant directement la préfecture de police et Le Foll, ils ont annoncé que Cazeneuve avait autorisé une manifestation sur le tracé d’une route circulaire courte, départ et arrivée à Place de la Bastille, le long duquel les manifestants seraient autorisés à marcher. 

Bien que le but de cette décision visait clairement à isoler les manifestants et à mettre en place « une assemblée statique » que la préfecture avait initialement voulue, Martinez et Mailly ont salué cette décision comme « une victoire pour les syndicats et pour la démocratie. » 

Cazeneuve a donné une conférence de presse une heure plus tard pour confirmer que la marche circulaire ne serait pas interdite. Dans le même temps, il a menacé les manifestants en déclarant : « Aucun débordement, aucune violence, ne sera toléré. » 

Des commentateurs de presse ont bientôt commencé à spéculer quant à savoir si cette marche en arrière humiliante signifiait une perte de face pour Valls, après ses appels à l’interdiction des manifestations ont été désavouées par Hollande et Cazeneuve. En fait, la décision du Parti socialiste d’interdire la manifestation et son brusque renversement subséquent a exposé l’escalade de désespoir du parti face à la masse d’opposition de la classe ouvrière, et sa détermination à fouler aux pieds les droits démocratiques de base si cela lui permet d’imposer son programme d’attaques sociales. 

Cela a clarifié une fois de plus que l’état d’urgence imposé par le PS après les attentats terroristes du 13 novembre à Paris est dirigé non pas contre les terroristes, mais contre la classe ouvrière et ses droits démocratiques. Alors que le PS manœuvre pour imposer toujours plus ouvertement un régime antidémocratique, la force sociale qui est en train de devenir le principal défenseur de la circonscription sociale pour les droits démocratiques est la classe ouvrière. 

Cela expose également les partis pseudo-gauches tels que le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) et le Front de gauche (FdG) de Jean-Luc Mélenchon, qui ont appelé à voter Hollande dans les élections de 2012 et ont affirmé que les manifestations pourraient être organisées pour pousser le PS à adopter des politiques de gauche. En fait, le NPA et le FdG n’ont monté aucune action significative de protestation jusqu’à ce que le mécontentement des masses a éclaté parmi les jeunes et les travailleurs cette année contre la Loi travail du PS. Et le PS a répondu aux protestations non pas par un virage à gauche, mais en procédant à une répression de plus en plus brutale.

Alors que le PS a interdit les protestations des groupes de jeunes et les organisations musulmanes et palestiniennes contre l’attaque israélienne sur Gaza en 2014, la menace actuelle d’interdire une manifestation syndicale sur les questions sociales est sans précédent. 

Si l’interdiction avait été maintenue, ç’aurait été la première fois qu’une protestation syndicale a été interdite depuis que l’ancien préfet de Paris et collaborateur nazi, Maurice Papon, a interdit une manifestation contre la guerre d’Algérie appelée par le Parti communiste français (PCF) stalinien et la CGT le 8 février 1962. Ce jour-là, la police de Paris a attaqué les manifestants qui ont défié l’interdiction, conduisant à la mort de neuf manifestants à la station de métro Charonne. Des centaines de milliers de personnes sont venues assister à leurs funérailles dans l’une des grandes manifestations de l’opposition de masse à la guerre d’Algérie. 

Compte tenu de cette histoire, il est clair que l’annonce d’hier d’une interdiction de manifester par la préfecture de police, d’abord soutenue par le ministère de l’Intérieur, est une menace pour intensifier la répression déjà brutale du mouvement de protestation contre la Loi travail régressive du Parti socialiste qui continue depuis trois mois.

(Article paru d’abord en anglais le 23 juin 2016)

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