Des vidéos sont apparues montrant la police israélienne des frontières menaçant les Palestiniens du camp de réfugiés d’Aida de les gazer « jusqu’à ce qu’ils meurent. » La menace a été brandie en réponse à une manifestation de jeunes contre l’occupation et à des jets de pierres contre le mur de séparation.
Un policier y lit un message en arabe avec un haut-parleur pendant qu’une jeep israélienne descend la rue tirant des gaz lacrymogènes. « A la population du camp de réfugiés d’Aida, nous sommes les forces d’occupation. Vous lancez des pierres et nous vous tirerons des gaz jusqu’à ce que vous mouriez tous. Enfants, jeunes et vieillards – vous mourrez tous. Nous ne laisserons aucun de vous en vie, » dit-il.
Venant après que le premier ministre Benyamin Netanyahu a tenté d’attribuer la responsabilité de l’extermination de masse du peuple juif dans les chambres à gaz nazies à la direction nationale palestinienne, ces menaces mettent en évidence la criminalité et la sauvagerie de la répression d’Etat israélienne contre le peuple palestinien. Netanyahu se sert de la crise pour instaurer des mesures visant à réprimer et à terroriser les Palestinien en les privant de leurs droits démocratiques et en les chassant de leurs maisons.
On entend l’agent de la police des frontières dire, « Nous avons arrêté l’un d’entre vous. Il se trouve avec nous actuellement. Nous l’avons interpellé chez lui et nous le massacrerons et le tuerons sous vos yeux si vous continuez à lancer des pierres. »
Il parlait d’un jeune homme de 25 ans arrêté jeudi et libéré plus tard.
Le Centre de ressources Badil pour le droit des Palestiniens à la résidence et au statut de réfugié a condamné l’annonce faite par le policier, la qualifiant de « menace manifeste et grave de punir collectivement la population du camp d’Aida par le recours à une force meurtrière. » De telles exécutions extra-légales seraient une violation de la Convention de Genève.
Selon le ministère de la Santé de l’Autorité palestinienne, les forces israéliennes et les colons ont tué au moins 73 Palestiniens – dont des manifestants non armés, des passants, des enfants et des agresseurs présumés – dans les territoires occupés de Cisjordanie, de la bande de Gaza et de Jérusalem-Est (illégalement annexés par Israël après la guerre de 1967) et en Israël même depuis le 1er octobre, début des affrontements. Ce chiffre comprend quinze enfants et cinq Palestiniens probablement morts pour avoir respiré des gaz lacrymogènes, reçu trop tard des soins médicaux du fait des points de contrôle ou par négligence médicale des autorités pénitentiaires.
Selon les Nations unies, les forces israéliennes ont depuis le 20 octobre blessé plus de 1.200 Palestiniens, dont au moins vingt-cinq enfants, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. A titre de comparaison, neuf Israéliens sont morts depuis le 1er octobre suite à des attaques au couteau ou à des fusillades.
Les Forces de défense d’Israël (IDF) pratiquent la politique du tirer pour tuer afin de réprimer toute opposition à leur brutale occupation. Ces derniers jours, des soldats israéliens ont abattu dans le village de Beit Einun près d’Hébron un Palestinien qui avait, ont-ils affirmé, tenté de les attaquer, même si personne n’a été blessé. Vendredi, les forces israéliennes ont tué trois Palestiniens dont un bébé de huit mois, mort asphyxié après avoir respiré des gaz lacrymogènes.
Mardi dernier, Amnesty International a rapporté avoir la preuve d’au moins quatre autres incidents récents « où des Palestiniens ont été intentionnellement tués par les forces israéliennes alors qu’ils ne représentaient aucun danger de mort imminent, dans ce qui semble avoir été des exécutions extra-légales. »
Trois de ces meurtres eurent lieu à Hébron et un à Jérusalem-Est occupée.
Hébron, la plus grande ville de Cisjordanie, qui compte 200.000 Palestiniens, est devenue une zone de conflit particulièrement tendue. Les forces israéliennes et les colons y ont tué au moins vingt personnes lors de manifestations et d’attaques et en ont arrêté près de 240 autres, selon Addameer, le groupe de défense des droits des prisonniers palestiniens.
Pour décourager les gens à participer à des funérailles de masse, les autorités israéliennes ont refusé de restituer les corps d’assaillants présumés à leurs familles – dont douze sont originaires d’Hébron. Cette ville où vivent environ 850 colons religieux israéliens a subi de nombreuses provocations. En 1994, Baruch Goldstein, un médecin israélien d’origine américaine, avait massacré vingt-neuf fidèles musulmans au cours d’une fusillade à l’intérieur d’un sanctuaire appelé par les Juifs Tombeau des Patriarches et par les Musulmans Mosquée d’Abrahim.
En vertu du Protocole d’Hébron de 1997, quelque 20 pour cent de la ville – la vieille cité et son centre commercial – ont été placés sous contrôle militaire israélien, contraignant ainsi la majorité des habitants palestiniens d’Hébron à franchir des points de contrôle militaires.
Une série de mesures que Netanyahu envisagerait attend les Palestiniens, qui les priverait de leurs droits les plus fondamentaux. Il a ordonné la révision du statut de résident de Jérusalem-Est des Palestiniens vivant de l’autre côté du mur de séparation. Sans être citoyens israéliens, les Palestiniens de Jérusalem-Est ont, en tant que résidents, droit aux services sociaux et aux prestations sociales; ils ont aussi le droit de voyager partout en Israël. Sans droit de résidence, ils perdraient l’accès aux soins de santé et aux services sociaux et ne pourraient plus se rendre à un travail en Israël. Il s’agit d’une tentative délibérée de nettoyer la ville des Palestiniens.
Cela suit la réintroduction de la détention administrative – détention sans inculpation ou procès – pour les enfants et jeunes de moins de 18 ans, une pratique suspendue depuis 2011. Trois jeunes de Jérusalem-Est ont été arrêtés et doivent être détenus ainsi entre trois et six mois sur ordre du ministre de la Défense Moshe Yaalon, prétendument pour jet de pierre. Si Israël retient des centaines de Palestiniens adultes en détention administrative, il n’avait jamais auparavant recouru à la détention administrative pour les enfants de Jérusalem-Est.
Netanyahu a aussi lancé l’idée d’une « cour [spéciale] pour les affaires de sécurité » qui traiterait de la sécurité, de la détention administrative, de la révocation du statut de résident et de la citoyenneté aux « terroristes », de la démolition des maisons et des délits liés au terrorisme. De tels tribunaux créeraient un système juridique discriminatoire à l’égard des Palestiniens.
Israël a presque totalement encerclé le complexe de la mosquée al-Aqsa, ce qui fut à l’origine des manifestations et des protestations ayant commencé le 1er octobre.
En vertu d’un accord négocié par le secrétaire d’Etat américain John Kerry entre Israël et la Jordanie, qui est le véritable gardien du site, des caméras seront mises en place sur le site afin de garantir qu’il n’y aura pas de prière juive à la mosquée. Cette mesure servirait toutefois à consacrer le contrôle de fait du site par Israël.
Des archéologues israéliens disent que diverses « activités archéologiques » entourent presque le site et l’isole des quartiers palestiniens, imposant une « course d’obstacles » pour atteindre la mosquée.
La préoccupation augmente parmi les principales puissances quant à la façon dont Israël traite la mosquée al-Aqsa et à sa brutalité envers les Palestiniens, qui risquent de contrecarrer leurs projets d’extension de la guerre en Irak et en Syrie en alliance avec les monarchies sunnites réactionnaires du Golfe. La semaine dernière, l’UNESCO, l’agence culturelle de l’ONU a adopté une résolution qui « condamne fermement les agressions et mesures illégales israéliennes limitant la liberté de culte et d’accès des Musulmans au lieu sacré de la mosquée al-Aqsa » et qui « dénonce vivement les irruptions persistantes » sur le site de la mosquée « d’extrémistes de droite israéliens et de forces en uniforme. »
Washington a dû intervenir pour bloquer une proposition de la France que l’ONU déploie des observateurs de paix internationaux sur l’esplanade de la mosquée. La Nouvelle Zélande prévoit une résolution demandant à Israël de geler toute construction de nouvelles colonies et toutes nouvelles démolitions de maisons en Cisjordanie et exhortant les Palestiniens à ne pas citer Israël devant la Cour pénale internationale de La Haye dans l’espoir de relancer les pourparlers de paix.
(Article original paru le 3 novembre 2015)