L’Université Humboldt à Berlin a changé ces dernières semaines, elle est de plus en plus politisée. Les discussions sur les professeurs de droite tels que le politologue, Herfried Münkler, et l’historien de l’Europe de l’est, Jörg Baberowski, sont omniprésentes.
Depuis plusieurs semaines, le nom du groupe d’étudiants « Münkler-Watch », qui reproduit et critique les cours de Munkler sur son blogue, est sur toutes les lèvres. En particulier, la campagne de Münkler en faveur de la politique allemande de grande puissance a été remise en question par les étudiants.
Les Étudiants et jeunes internationalistes pour l’égalité sociale (EJIES) ont également critiqué la propagande de guerre de Münkler, et ont attiré l’attention sur la minimisation des crimes de guerre nazis par Baberowski. Des professeurs, la direction de l’université et les médias ont alors attaqué férocement les deux groupes.
Dans le hall central du bâtiment principal, il y a beaucoup d'étudiants en sciences sociales qui connaissent Münkler via leurs études et réunions à l'université. Ils discutent avec avidité la critique publiée par leurs camarades sur « Münkler-Watch ». Les avis sur les textes du site web sont divisés, mais la grande majorité des élèves défendent le droit de critiquer.
« Je pense que la déclaration faite par les professeurs dans la défense de Münkler est scandaleuse. Elle est extrêmement biaisée », a déclaré un étudiant en sciences sociales, qui est aussi actif dans un groupe d'étudiants à la faculté. « Ils créent un climat dans lequel personne n'ose exprimer de critiques. »
Beaucoup de collègues universitaires sont opposés à Münkler, mais ils craignent les conséquences d'une expression de solidarité avec les étudiants.
À 18 h 30 le 11 juin, le parlement étudiant débattra d'une résolution sur « Münkler-Watch » portée par l'EJIES. Ses sympathisants en ont distribué des milliers de copies ces derniers jours et ont appelé les étudiants à participer à la séance publique afin de soutenir la motion.
Le lundi 8 juin, le groupe représentant les étudiants en biologie a invité des représentants de l'EJIES à discuter de la résolution et échanger les points de vue sur les événements à l’Université. Parmi les personnes présentes, il y avait un soutien considérable à l’initiative de l'EJIES. Auparavant, les groupes représentant les étudiants en histoire, en études de genre et en sciences de l'éducation ont publié conjointement une déclaration défendant la liberté d’expression à l’université et s'opposant aux attaques contre les étudiants.
La défense du droit de critiquer des professeurs de façon anonyme a rencontré un soutien particulièrement fort chez les étudiants du campus. Comme l'a déclaré Félix, qui étudie la science horticole à Humboldt, « l’anonymat est important. Quand on a une opinion, il est juste de l’exprimer et, dans certains cas, de façon anonyme. » Comme beaucoup d’autres étudiants, il a pris des tracts pour les distribuer dans sa résidence universitaire et dans sa faculté.
Alexander a commencé à étudier la philosophie et la musique à Humboldt ce semestre. Il a suivi les travaux de l'EJIES pendant plusieurs semaines, dont les critiques du professeur Baberowski, et les soutient.
Pour lui, « Les élèves ont le droit d’exprimer des critiques anonymes. Qu’on soit d’accord avec les vues de “Münkler-Watch” ou non, une université qui se voit comme un lieu de débat académique libre et indépendant doit laisser un espace à la critique anonyme. »
Andreas, qui étudie la littérature et l’histoire allemande, a également défendu « Münkler-Watch » et l'EJIES : « De tels débats sur le contenu sont importants, et il est bon qu'ils puissent avoir lieu de façon anonyme, en particulier parce qu’il y a un tel déséquilibre de pouvoir entre les étudiants et les professeurs. »
Il a vivement critiqué les attaques lancées par la direction de l’université et certains professeurs contre les étudiants. « Cela n’a plus rien à voir avec la défense de sa propre opinion, c'est la suppression des opinions différentes », a-t-il dit.
Andreas pense que la raison de ces attaques contre les étudiants est le développement du militarisme, qui se fait sentir à l'université. « Il y a clairement des tendances militaristes ici à l'université, » a-t-il poursuivi, « particulièrement en ce qui concerne la Seconde Guerre mondiale et l'Holocauste, des tentatives sont faites de blanchir le rôle de l'Allemagne. C'est également en cours dans les médias qui assimilent le stalinisme et le fascisme de Hitler ».
Il considère par conséquent que les initiatives des étudiants qui critiquent ces points de vue sont importantes. « Mais pour cela il faut une direction de l'université qui soit prête à encourager et permettre la tenue de ces débats sur le contenu, » at-il dit. D'autres étudiants soutenant la résolution de l'EJIES ont exprimé des opinions similaires.