Une fois de plus, la machine militaire américaine a tiré des missiles de croisière et largué des bombes sur un pays sans défense du Moyen-Orient, cette fois-ci la Syrie. Comme dans le cas de l’opération « choc et effroi » menée contre l’Irak en 2003 et la guerre « humanitaire » en vue d’un changement de régime en Libye en 2011, Washington précipite la population américaine dans une guerre d’agression fondée sur des mensonges.
Ce qui distingue de manière plus frappante peut-être cette toute dernière éruption du militarisme américain est la façon tout à fait sommaire dont le président des Etats-Unis a annoncé que Washington avait attaqué un pays de plus.
Barack Obama s’est exprimé mardi pendant à peine trois minutes avant de monter à bord d’un hélicoptère sur la pelouse de la Maison Blanche. Ses remarques expéditives, à commencer par l’éloge envers « l’armée la meilleure que le monde ait jamais connue, » indiquent clairement que la classe dirigeante américaine ne se sent plus obligée de même expliquer, et encore moins de justifier, ses interventions militaires. L’opinion publique est tout simplement censée les accepter comme étant une réalité permanente de la vie.
En ce qui concerne le Congrès, il s’est empressé de quitter la ville pour prendre un congé préélectoral de cinq semaines, et pris ainsi le large avant que les bombes n'aient commencé à tomber. Il a, de fait, renoncé à son pouvoir constitutionnel concernant le lancement d’une guerre, tout oeuvrant à empêcher que ce sujet vital ne se manifeste dans les urnes.
Même en abandonnant tout semblant de contrôle démocratique et de soutien populaire, il devient de plus en plus clair que toutes les vraies décisions sont prises par la branche la plus puissante de l’Etat, à savoir le vaste appareil militaire et du renseignement. Il est significatif que la première annonce publique sur la guerre en Syrie n’ait pas émané de la Maison Blanche mais du Pentagone.
Obama fait simplement fonction de porte-parole pour cette machine meurtrière et ses promesses répétées de ne pas envoyer de troupes terrestres seront très bientôt écartées au fur et à mesure que les généraux mettront en œuvre leur stratégie.
On a l’impression que le lancement d’une guerre contre un pays de plus est presque devenu routinier, une caractéristique interminable et continue du paysage politique de l’Amérique. Ce militarisme débridé est un instrument non seulement pour la poursuite des intérêts mondiaux de l’impérialisme, mais aussi pour réguler l’instabilité sociale en projetant vers l’extérieur les immenses tensions qui s’accumulent dans ce pays capitaliste avancé et le plus socialement polarisé de tous.
Mardi, dans sa brève déclaration, Obama s’est dit « fier d’agir aux côtés » de « nos amis et partenaires, l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis, la Jordanie, le Bahreïn et le Qatar, » qui ont joué les seconds rôles dans le blitz américain mené contre la Syrie.
Dis-moi qui sont tes amis, je te dirai qui tu es. Washington fait la guerre contre le « terrorisme » « aux côtés » des parasites royaux et des maîtres souteneurs du Moyen-Orient qui, jusque récemment, étaient les principaux trésoriers-payeurs des « terroristes » qui sont maintenant ciblés.
Les seuls pays qu’Obama a été en mesure de rassembler derrière la guerre des Etats-Unis sont quatre monarchies qui ne sont rien de plus que des filiales des grands groupes pétroliers, y compris l’Arabie saoudite dont les décapitations routinières sont une inspiration pour l’EI (Etat islamique), et un cinquième, la Jordanie, qui opère comme un Etat-client d’Israël. Cette collaboration sordide, saluée par les médias comme étant un « coup de maître » de la part d'Obama, ne fait que révéler au grand jour le caractère foncièrement corrompu et illégal de la nouvelle guerre de Washington.
On n'en trouve guère, parmi les médias contrôlés par le patronat, qui ont pris la peine d'indiquer que cette toute dernière intervention a lieu un an précisément après que le gouvernement Obama a été contraint de reculer dans les frappes aériennes prévues initialement contre la Syrie et qui devaient être lancées sur la base d’un prétexte totalement différent : le mensonge, discrédité par la suite, selon lequel le régime du président syrien Bachar al Assad avait utilisé des armes chimiques contre son propre peuple.
Confronté à l’opposition populaire, à un vote au parlement britannique qui le privait d’une couverture internationale et au refus du Congrès américain de voter en faveur de la guerre, Obama avait été contraint d’accepter un accord négocié par Moscou impliquant le désarmement chimique de la Syrie et le renouvellement des pourparlers sur le programme nucléaire iranien. Depuis lors, la Maison Blanche et le Pentagone n’ont cessé de redéfinir leurs plans de guerre qu'ils justifient maintenant par une nouvelle série de mensonges au sujet de menaces terroristes, régurgités par les médias qui sont à la botte du patronat.
L’unique point de départ valable pour réaliser une évaluation sobre de cette nouvelle guerre américaine est la prémisse selon laquelle rien de ce qui en a été dit par la Maison Blanche, le Pentagone, le Département d’Etat ou les médias n’est vrai.
Ayant déclaré à maintes reprises ces dernières semaines que le principal objectif des frappes aériennes américaines, l’Etat islamique d'Irak et du Levant (EIIL), ne représente pas de menace imminente pour les Etats-Unis, le gouvernement a subitement annoncé la présence en Syrie d’une cellule terroriste jusqu’ici inconnue, le « groupe Khorasan », dont les complots seraient à un « stade avancé » et qui poserait un danger tout à fait imminent. Les présentateurs de télévision et des experts de la sécurité rémunérés ont réagi de concert en déplorant de manière orwellienne le présumé danger que pose Khorasan, comme si c’était de notoriété publique et indiscutable.
La réalité est que la guerre actuelle découle directement des conséquences catastrophiques des précédentes interventions impérialistes américaines menées dans la région. Parmi elles on compte la dévastation de la société irakienne et le meurtre de centaines de milliers d’habitants du pays durant la guerre et l’occupation qui ont duré plus de huit ans et la destruction similaire infligée à la Syrie durant les trois années de guerre civile sectaire menée pour obtenir un changement de régime et qui a été fomentée et maintenue par Washington et ses alliés.
L’EI est, en très grande partie, le résultat direct de l’intervention américaine en Syrie qui, tout comme en Libye précédemment, s’appuie fortement sur des milices islamistes sectaires pour former ses troupes terrestres dans la guerre en faveur d’un changement de régime. Le renseignement américain connaît les hauts gradés de l’EI et a travaillé avec eux. Leurs crimes et leurs atrocités portent la marque des sales guerres organisées par la CIA.
Quand les activités de cette milice ont croisé la rébellion de la population sunnite en Irak, conduisant à la désintégration des forces de sécurité irakiennes entraînées par les Etats-Unis et à la perte de contrôle d’une grande partie du pays, le programme de l’EI a contrecarré celui de Washington.
Toutefois, le principal objectif de l’intervention américaine demeure ce qu’il était il y a un an, le renversement du gouvernement Assad et la mise en place d’un régime fantoche contrôlé par les Etats-Unis, dans le but de renforcer l’hégémonie américaine sur le Moyen-Orient stratégiquement vital et riche en pétrole et de planifier davantage de guerres, encore plus catastrophiques, contre les principaux alliés de Damas : l’Iran et la Russie.
Ce même gouvernement qui a déclenché la campagne de bombardement contre la Syrie entreprend simultanément un programme à hauteur d’un millier de milliards de dollars pour mettre à niveau l’arsenal d’armes nucléaires de Washington dans la préparation d’une guerre avec la Russie et la Chine.
Ces développements font partie d’une résurgence du militarisme impérialiste à une échelle inédite depuis le début de la Première et de la Deuxième Guerre mondiale. L’expansion du conflit actuel a la capacité d’entraîner l’humanité dans une troisième guerre mondiale catastrophique.
Les événements qui sont en train de se produire au Moyen-Orient et dans le monde entier sont une puissante justification des résolutions adoptées par le Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI) – « Le socialisme et la lutte contre la guerre impérialiste » – et le Socialist Equality Party (SEP, Parti de l’Egalité socialiste) des Etats-Unis – « The Fight Against War and the Political Tasks of the Socialist Equality Party » (en anglais).
Nous demandons instamment à nos lecteurs d’étudier soigneusement ces documents et de prendre la décision de rejoindre et de construire le SEP et le CIQI qui sont les seuls à lutter pour la mobilisation internationale de la classe ouvrière contre le capitalisme, comme unique moyen de répondre à la menace grandissante de la guerre.
(Article original paru le 24 septembre 2014)