Le groupe Peugeot-Citroën (PSA) procède à de nouvelles attaques contre les emplois. Dans les trois dernières années, des milliers des salariés ont été licenciés du groupe, et l'usine d'Aulnay-sous-Bois a fermé.
La semaine dernière, 3.450 nouveaux départs ont été annoncés. En outre, selon Le Monde, « D’ici 2016, 11 200 salariés doivent quitter le constructeur, dont plus de 8 000 personnes dans le cadre d’un plan de sécurisation de l’emploi. »
PSA a aussitôt démenti les informations. Cependant, pendant les derniers trois ans, le groupe a toujours démenti les premières informations sur des attaques sociales, avant de les annoncer officiellement au Comité d'Entreprise du groupe plus tard.
C'est une des tactiques bien rodées de PSA. On laisse paraître officieusement les informations tout en les démentant, pour que les syndicats aient le temps de démobiliser les ouvriers. La CGT a procédé ainsi à Aulnay-sous-bois en 2013, avant de d'accepter la fermeture de l'usine.
Selon Les Echos, en une décennie, le groupe PSA a éliminé 45.000 de ses 127.000 effectifs par des licenciements, des fermetures d'usine et des cessions des filiales, tout avec l'aide des syndicats.
Le Monde décrit sans fard l'action des syndicats aujourd'hui : « Les syndicats du groupe, à l’exception de quelques élus de la CGT, n’arrivent pas à s’en émouvoir même si dans les faits les effectifs vont bien poursuivre leur baisse dans les années à venir. » En réalité, comme à Aulnay, les syndicats, la CGT en tête, vont tout faire pour imposer ces nouvelles attaques.
Pour Christian Lafaye, responsable de FO et Franck Don de la CFTC interrogés par l’AFP, le groupe agit dans la continuité de l’Accord de Compétitivité, intitulé « Dispositif d'adéquation des emplois et des compétences (DAEC) 2014 » signé en octobre 2013. Il prévoit en échange du maintien des usines françaises de PSA, « un ajustement des structures (...) fait dans la douceur et sans contrainte ». Le document pour 2015 s'inscrit « dans la continuité du DAEC 2014 qui a été signé par toutes les organisations syndicales », a ajouté Franck Don.
Les informations sur les licenciements proviennent d'un document de 244 pages détaillant l’impact des dispositions de l'Accord de Compétitivité pour l’année 2015. Ce document était diffusé aux syndicats en vue d'une présentation officielle par PSA lors d'un comité central d’entreprise extraordinaire lundi dernier.
PSA vise les ouvriers de plus de 50 ans, qui représentent 34 pourcent des effectifs et ont souvent les salaires les plus importants, et les ouvriers dont le métier sera bientôt abandonné (29 pourcent des effectifs).
Le document présenté par la la direction de PSA au comité d'entreprise contient toute une série de dispositions pour 2015 : 1.500 congés seniors, 1.400 mobilités en interne, 950 « mobilités externes sécurisées », l'arrivée de 2.000 jeunes en alternance, et l'embauche de 550 salariés en CDI pour les « métiers en tension ».
Pour un salarié à quelques années de sa retraite, un congé senior signifie accepter un travail à mi-temps, payé 70 pour cent du salaire normal, jusqu'à la retraite. La « mobilité » signifie en interne, la reclassification au sein de l'entreprise, et en externe, un transfert vers une entreprise externe avec le droit de retourner chez PSA pendant deux ans.
Cet objectif, ciblant particulièrement les usines de Poissy, Mulhouse et Rennes, paraît difficilement atteignable sans contrainte : en 2014, le dispositif a attiré seulement 50 salariés, sur un objectif initial de 250.
Pour les jeunes en alternance, il s'agit des Contrats de Durée Déterminé (CDD) variant de six mois à deux ou trois ans. Les jeunes seront embauchés en tant qu'apprentis, volontaires internationaux en entreprises, thésards CIFRE, etc. Moins d'un tiers de ces jeunes seront embauchés en CDI par la suite. Des 550 nouveaux salariés pour les « métiers en tension » (en sous-effectif), deux tiers seront des jeunes travaillant déjà en alternance dans le Groupe. Ainsi, les jeunes sont « disciplinés » dès le départ en les obligeant de travailler à bas prix en CDD, sachant que seulement un tiers d'entre eux vont pouvoir prétendre à un CDI par la suite.
La direction de PSA compte ainsi baisser le cout de travail de 15,1 pourcent du chiffre d'affaires en 2013 à 12,5 pourcent en 2016, afin d'économiser 1.100 euros par voiture fabriquée.
Il s'agit d'une réduction énorme de la masse salariale, et du nombre des effectifs une fois que les CDD se termineront et les ouvriers prendront leur retraite. Ceci implique une augmentation massive de la productivité, c'est-à-dire de l'intensité de l'exploitation des travailleurs.
On met 950 ouvriers à la porte. On réduit les salaires de 1.500 ouvriers de plus de 50 ans, souvent les mieux payés, de 30 pour cent. Déjà les effectifs sont réduits par 750 puisque les 1.500 seniors ne travaillent plus qu'à mi-temps. On les remplace temporairement avec 2.000 jeunes en CDD payés au lance-pierre. Parmi ces jeunes seulement un tiers (666) va pouvoir rester. On transfère 1.400 ouvriers pour les rendre plus profitable et on embauche 550 salariés sur des métiers où on est vraiment en sous effectif.
Et ce sont seulement les mesures officiellement annoncées par PSA aujourd'hui. A Aulnay, PSA avait annoncé les premiers licenciements en 2013 et, quelques mois plus tard, la fermeture de l'usine. De nouvelles attaques de ce type seront menées tous les ans dans le cadre de l'Accord de Compétitivité signé avec les syndicats.
En même temps, les cadences et la complexité du travail sont augmentés par le « compactage », une nouvelle méthode d'organisation adoptée par PSApour augmenter la compétitivité des usines. La revue patronale L'Usine Nouvelle explique la méthode : « Toutes les usines françaises ou presque, en dehors de PSA Sochaux, ne disposeront plus en 2016 que d’une ligne, sur laquelle pourront être réalisés jusqu’à cinq ou six véhicules différents. La flexibilité sera totale, la production plus importante d’un modèle compensera celle plus faible d’un autre ».
En effet, des fermetures des lignes de production à Poissy et d'autres usines ont déjà été annoncées dans les dernières deux années pour concentrer la production sur la seule ligne dans chaque usine.
L'Usine Nouvelle en conclut : « PSA et Renault espèrent saturer leurs sites dès 2016. Inovev (une société qui fait les analyses de compétivité pour l'industrie d'automobile) estime que, en 2014, les usines de Renault seront chargées à 56 %, celles de PSA à 69 % ... avec des coûts de production compétitifs, les sites français veulent décrocher des contrats face aux usines du même groupe ou à celles d’autres constructeurs ».