La Russie a mis en garde le régime pro-occidental de Kiev contre l’organisation d’opérations militaires à l’encontre des protestations anti-gouvernementales en Ukraine de l’Est, ce qui a provoqué à Berlin une nouvelle vague de propagande belliciste anti-russe.
Avant même la convocation par la Russie d’une session extraordinaire du Conseil de sécurité de l’ONU, le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a accusé Moscou de « fomenter des troubles en Ukraine, » en usant de menaces : « la Russie doit savoir que l’Occident ne se laissera pas prendre au chantage. »
Le président et vice-chancelier Sigmar Gabriel (Parti social-démocrate, SPD) est allé encore plus loin. Il a profité d’une célébration de la Première Guerre mondiale à l’église française de Berlin pour attiser la haine contre la Russie. Aux côtés du premier ministre français, Manuel Valls, il a accusé Moscou de remettre en question « les valeur politiques fondamentales. »
La Russie est « manifestement prête à laisser des chars franchir les frontières européennes, » a-t-il dit, ajoutant que Moscou « est revenu à l’esprit de la politique de pouvoir nationaliste » qui, il y a cent ans, avait conduit à la Première Guerre mondiale.
Quelle déformation absurde de la réalité ! La vérité est que « cent ans après le début de la Première Guerre mondiale et 75 ans après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, c’est l’Allemagne qui retourne à une politique étrangère agressive, en menaçant la Russie, une puissance nucléaire, d’une confrontation militaire et d’une Troisième guerre mondiale.
Berlin, en étroite collaboration avec les Etats-Unis, a organisé un coup d’Etat en Ukraine, mené par des forces fascistes, qui a porté au pouvoir un régime pro-occidental qui est en train de pousser l’Ukraine dans une guerre civile et de provoquer une confrontation avec la Russie. Et maintenant, au moyen de distorsions et de mensonges éhontés, les médias allemands cherchent à dépeindre la Russie comme étant l’agresseur.
Les médias accusent Moscou de faire précisément ce que l’Occident a fait à Kiev il y a quelques semaines à peine : instiguer des protestations antigouvernementales. Alors que les médias occidentaux glorifiaient le coup d’Etat fasciste contre le gouvernement élu de Ianoukovitch comme étant une « révolution démocratique », ils exigent actuellement, sans sourciller, la répression sanglante des protestations en Ukraine de l’Est et une attitude plus agressive contre la Russie.
Dans un éditorial, le journal Süddeutsche Zeitung raille la Russie qu'il qualifie de « fauteur de guerre » et le ministre russe des Affaires étrangères, Sergeï Lavrov d’« ultra cynique », en disant que Moscou est en train d’agir de manière musclée depuis l’Est en créant « des faits sur le terrain » et en semant le « chaos, la peur et la désinformation. »
Visiblement fâché de voir que les protestations n’ont pas été réprimées, le Süddeutsche pose la question : « Pourquoi le ministre [ukrainien] de l’Intérieur a-t-il laissé expirer l’ultimatum de 48 heures qu’il avait lancé mardi aux occupations de Donetsk et de Lugansk ? Où étaient passées l’armée et les milices ces derniers jours ? »
Dans son éditorial de lundi, le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung est allé plus loin, écrivant que les sanctions contre Moscou ne sont pas « suffisantes » et que l’Occident doit « soutenir l’Ukraine avec plus de détermination qu’auparavant. »
« Si l’OTAN et l’UE ne montrent pas maintenant qu’elles sont déterminées à résister à l’agression du Kremlin, » écrit le journal, « même si cela a un prix, » cela pourrait « coûter bien plus encore… Si le Kremlin s’attend à un recul, il pourrait être tenté d’attaquer les trois Etats baltes. »
Comment faut-il interpréter l’hystérie de guerre agressive des médias et de l’establishment politique allemand ? Elle fait partie d’une résurgence systématique du militarisme de la part des cercles dirigeants en Allemagne. Ces mêmes cercles dirigeants, les banques et les grandes entreprises qui ont déclenché deux guerres mondiales, cherchent à relancer leurs crimes haineux.
Le coup d'envoi avait été donné par le président allemand Joachim Gauck lors de son discours du 3 octobre dernier. Le jour de l’unité allemande, il avait déclaré de manière provocatrice que l’Allemagne n’était « pas une île » susceptible de se soustraire aux « conflits politiques, économiques et militaires. » Au début de l’année, lors de la conférence sur la sécurité à Munich, il avait annoncé, aux côtés du ministre des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier et de la ministre de la Défense, Ursula von der Leyen, la fin de « la politique de la retenue militaire. » A l’avenir, l’Allemagne « interviendrait de manière plus décidée et plus substantielle, » dans les régions de crise internationales.
Depuis lors, la grande coalition entre le SPD et les chrétiens-démocrates applique impitoyablement cette politique à Berlin dans un contexte de propagande belliciste de la part des médias. Comme si la campagne allemande sur le front de l’Est durant la Première Guerre mondiale et la guerre d’extermination de Hitler durant la Seconde Guerre mondiale n’avaient jamais eu lieu, l’impérialisme allemand est en train de renouer avec sa traditionnelle « poussée vers l’Est. »
Il devient de plus en plus évident que la crise ukrainienne a été délibérément provoquée par les puissances occidentales pour servir de prétexte au réarmement de l’Allemagne et de ses alliés et à un retour à une politique étrangère agressive. La ministre de la Défense soutient le renforcement militaire de l’OTAN contre la Russie, le déploiement de navires et d’avions près de la frontière russes et la tenue d’exercices militaires près de la frontière. Dans le même temps, les militaires, les politiciens et les influents journalistes allemands exigent la restauration du service militaire obligatoire et l’acquisition de nouveaux chars de combat et de drones furtifs.
Le retour du militarisme allemand est soutenu par tous les partis qui siègent au Bundestag (parlement). Les plus fervents défenseurs de cette politique sont les partis qui jadis affirmaient représenter les intérêts de la classe ouvrière ou être des pacifistes.
Le SPD a marqué le 100ème anniversaire de son soutien à la Première Guerre mondiale avec, au sein de la grande coalition, Frank-Walter Steinmeier comme ministre des Affaires étrangères faisant claquer le fouet en faveur de la nouvelle politique de grande puissance de Berlin.
Les Verts qui, depuis leur entrée au gouvernement en 1998, ne cessent de battre le tambour pour les opérations militaires allemandes à l’étranger, étaient des participants actifs lors du coup d’Etat mené par les fascistes à Kiev. Ils s’en prennent à présent au gouvernement allemand par la droite. Leur candidat tête de file aux élections européennes, Werner Schulz, traite tour à tour le président russe de « criminel », d’« agresseur » et de « fauteur de guerre » en réclamant des actions militaires.
La dégénérescence des Verts en fauteurs de guerre n’est surpassée que par le parti La Gauche [Die Linke – homologue allemand du Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon]. Les anciens staliniens et leurs partisans de la pseudo-gauche ont abandonné leurs prétentions pacifistes au moment où l’élite dirigeante est en train de relancer ses ambitions de grande puissance. Pour la première fois, la semaine passée, les députés de Die Linke ont voté en faveur d’une mission militaire à l’étranger de la Bundeswehr (armée allemande).
Le Partei für Soziale Gleichheit (Parti de l’Egalité socialiste, PSG) est l’unique parti à s’opposer au retour du militarisme allemand et à condamner la politique belliciste des politiciens et des médias et qui est rejetée par la grande majorité de la population. Le PSG, ainsi que le Socialist Equality Party (SEP) en Grande-Bretagne, participe aux élections européennes afin de développer la lutte contre la guerre sur la base du programme de la révolution socialiste.
Nous appelons les travailleurs et les jeunes à transformer les élections européennes en un plébiscite contre les fauteurs de guerre et contre le retour du militarisme allemand. Votez contre la guerre et construisez le Partei für Soziale Gleichheit et le Socialist Equality Party, les sections allemande et britannique du Comité international de la Quatrième Internationale, dans le but de mobiliser la classe ouvrière contre la guerre !
(Article original paru le 15 avril 2014)