Alors que les représentants de l’UE (Union européenne) et du FMI (Fonds monétaire international) se rendaient à Athènes pour discuter de nouvelles mesures d’austérité, des milliers de travailleurs ont manifesté contre les licenciements de masse et les coupes dans les dépenses sociales. Une grève de vingt-quatre heures le mercredi 6 novembre a paralysé une grande partie du pays.
Les deux principales fédérations syndicales, GSSE et ADEDY avaient appelé à ces manifestations. Le seul ADEDY a parlé d’une grève ayant mobilisé 65 pour cent de ses adhérents, c'est-à-dire près de 200.000 grévistes.
Les écoles les tribunaux, et les services publics étaient fermés. Les trains et les bus sont restés dans leurs dépôts, les employés des aéroports ont arrêté le travail pour trois heures et les hôpitaux n’ont assuré que les urgences. Les journalistes ont refusé de donner les nouvelles ordinaires et ont au lieu de cela ont informé seulement sur les grèves et les manifestations.
Malgré une pluie torrentielle, jusqu’à 15.000 travailleurs se sont rassemblés sur la Place Syntagma d’Athènes. Bien qu’ils aient été complètement trempés, ils restèrent devant le parlement et scandèrent des mots d’ordres tels que : « Plus de sacrifices » et « n’abandonnez pas ».
Juste avant qu’elle ne commence ADEDY et GSSE ont annulé, à cause de la forte pluie, la protestation prévue devant le parlement. PAME, la fédération syndicale associée au Parti communiste grec (KKE) a elle, tenu la manifestation séparée qu’elle avait prévue. A Thessalonique des milliers de travailleurs ont manifesté contre les mesures d’austérité.
La grève générale de vingt-quatre heures était la trente-cinquième de son genre depuis le début de la crise de la dette. Elle avait été annoncée il y a des semaines, était strictement limitée et on s’était mis d’accord à l’avance avec le gouvernement. L’annulation de la manifestation est typique des tentatives faites par les syndicats pour saboter les protestations. Par de telles grèves limitées ADEDY, GSSE et PAME cherchent à garder l’opposition croissante des travailleurs sous leur contrôle. Au cours des récentes semaines, ils ont trouvé de plus en plus difficile de limiter les mouvements de protestation.
Mardi 5 novembre, des manifestants ont fait le siège du ministère des Finances, ou le ministre des Finances Yannis Stournaras tenait des négociations avec les représentants de la Troïka (UE, FMI et BCE).
« Prenez vos mesures de renflouement et allez-vous en! » criait une foule en colère aux inspecteurs de la troïka lorsqu’ils ont quitté le bâtiment. Plus tôt dans la journée un homme avait été arrêté pour avoir jeté des pièces de monnaie sur le représentant du FMI, Paul Thomsen au moment où il entrait dans le ministère.
Pendant les deux derniers mois, le personnel administratif des principales universités grecques a été en grève pour protester contre des plans de licenciements de masse du gouvernement. Les étudiants de l’Université d’Athènes ont manifesté leur solidarité avec le personnel. Ils ont bloqué l’entrée du ministère de l’Education avec un mur de livres.
Les travailleurs s’opposent au licenciement de 25.000 employés du secteur public qui doivent être placés dans une soi-disant « réserve de mobilité ». Ceux qui sont concernés touchent un salaire réduit pendant huit mois, pendant qu’ils sont censés trouver un autre emploi; s’ils sont sans emploi après ce délai, ils sont simplement jetés à la rue.
L’élargissement de la taxe sur la propriété a déclenché la colère et l’indignation de vastes parties de la population. En Grèce, cela s’applique aussi à de nombreux travailleurs qui ont souvent de petites maisons ou appartements. De nombreuses familles se maintiennent à flot face à la pauvreté seulement grâce à cette petite possession. Maintenant ils sont forcés de payer la taxe, même s’ils ne touchent pas de revenu grâce à cette propriété.
La société grecque est au bord de l’effondrement. Les coupes dictées par l’UE ces dernières années ont eu pour résultat un taux de chômage de 27 pour cent.
Selon une récente étude de l’OCDE le revenu moyen en Grèce est tombé de 23 pour cent entre 2007 et 2011. Le nombre de ceux qui sont satisfait de leur vie est, avec 34 pour cent, le plus bas de tous les pays de l’OCDE (en 2007 ce taux était de 57 pour cent).
La troïka appelle à l’application immédiate des licenciements de masse et de la fermeture et de la privatisation d’entreprises d’Etat. Il s’agit en particulier de la société de défense et d’ingénierie EAS. Elle doit soit être fermée soit rétrécir de façon spectaculaire, sans quoi la troïka menace de suspendre la prochaine tranche d’aide financière de plus d’un milliard d’Euros dont la Grèce a besoin pour payer des dettes et le paiement d’intérêts dus depuis longtemps. Cet argent va directement sur les comptes des créanciers.
En plus des coupes dans les emplois et des privatisations, la troïka veut imposer les soi-disant réformes structurelles. En particulier la contribution faite par les entreprises au fonds de sécurité sociale dont bénéficient leurs salariés doit être réduite de 3,9 pour cent. Cela conduirait à un déficit qui pourrait atteindre 1,1 milliard d’euros, et déclencherait des coupes supplémentaires dans les prestations.
L’UE et le FMI veulent aussi que Athènes s’engage à d’autres économies dans le budget de 2014. La troïka s’attend à ce qu’il y ait un trou financier d’au moins deux milliards d’euros, qui serait bouché par des coupes dans les retraites et les salaires. Mais le gouvernement escompte n’avoir à trouver que 500 millions d’euros de dépenses supplémentaires.
Le premier ministre conservateur Antonis Samaras (Nouvelle Démocratie, ND) et son vice- premier ministre social-démocrate Evangelos Venizélos (PASOK) ont dit qu’ils n’accepteraient pas d’autres coupures dans les retraites et les salaires. Mais on a déjà entendu des mensonges similaires de la part du gouvernement avant que ne soient introduites les mesures d’austérité précédentes; ils servent seulement à provoquer de faux espoirs et à désorienter l’opposition de la classe ouvrière.
La dévastation sociale a déstabilisé la situation politique de la Grèce. Selon une étude de l’OCDE, de 2011 cette fois, seuls 13 pour cent de la population a dit avoir confiance dans le gouvernement ; en 2007 ce chiffre était de 38 pour cent. Le gouvernement applique de plus en plus des mesures dictatoriales contre les travailleurs qui protestent.
Etant donné l’intensification énorme des conflits sociaux, certains représentants de l’UE cherchent à calmer les choses sans pour autant abandonner quoi que ce soit des mesures d’austérité. Mardi 5 novembre, le Comité économique du Parlement européen a ainsi discuté la base de la légitimité de la troïka.
« Qui prend les décision dans la Troïka et sur quelle base? » a demandé le député conservateur autrichien Othmar Karas. Ce comité prévoit de produire un rapport sur le travail de la troïka d’ici à mai prochain.
Cette tentative de défendre l’UE et ses institutions est soutenue par les divers groupes de la pseudo gauche sur tout le continent. En Grèce, c’est en particulier le plus grand parti d’Opposition, la Coalition de la Gauche radicale (SYRIZA) qui essaie de protéger l’UE et le gouvernement contre la colère des travailleurs.
Alors que les travailleurs et les étudiants dans toute la Grèce luttaient contre les mesures d’austérité de l’UE, le président de SYRIZA, Alexis Tsipras, faisait le voyage des Etats-Unis pour démontrer sa loyauté au FMI.
Lors d’un forum tenu à l’université du Texas, Tsipras a soutenu l’approche du parlement européen. « Nous voyons de façon positive cet effort et nous contribueront dans cette direction. » dit il. Il a strictement rejeté toute idée de quitter l’union européenne et l’Euro. Un gouvernement SYRIZA éviterait cela dans tous les cas a dit le dirigeant de ce parti.
Durant les dernières semaines, SYRIZA a déjà montré clairement qu’il était aux cotés du gouvernement. Dans la prétendue lutte contre le parti fasciste Aube dorée, SYRIZA a soutenu le renforcement des pouvoirs de l’appareil d’Etat et a fait l’éloge de la police, de l’armée et du gouvernement haï, comme étant les garants de la démocratie. Ce parti se prépare à prendre les rênes du pouvoir lui-même et imposera les coupes contre les travailleurs en se servant des syndicats et des autres groupes de la pseudo gauche.
(Article original publié le 7 novembre 2013)