L’Union européenne évoque Boston pour justifier une importante opération antiterroriste

La menace croissante internationalement pour les droits démocratiques a été soulignée par le fait qu’à peine deux jours après les attentats à la bombe de Boston, ceux-ci étaient cités dans un communiqué de presse de la Commission de l’Union européenne (UE) pour justifier une vaste opération antiterroriste réalisée au niveau du continent.

Les 17 et 18 avril, des unités antiterroristes de nombreux Etats-membres de l’UE qui sont organisés dans le réseau ATLAS [Army Tactical Level Advanced Simulation] ont effectué ce qui a été décrit comme « la plus complexe préparation et simulation de la capacité de riposte à des crises, jamais pratiquée jusque-là au niveau européen. »

L’opération implique des attaques terroristes simulées et simultanées se déroulant dans neuf différents pays membres de l’UE – l’Autriche, la Belgique, l’Irlande, l’Italie, la Lettonie, la Slovaquie, l’Espagne, la Suède et la Roumanie.

Justifiant l’opération, un communiqué de presse de la Commission de l’UE dit, « Les attaques coordonnées de Mumbai en 2008, les attaques d’al Qaïda en 2012 contre l’usine algérienne de production de gaz ainsi que les récents attentats à la bombe lors du marathon à Boston, soulignent le besoin d’accroître la protection à la fois contre des attaques contre des infrastructures cruciales et autres zones publiques dans un contexte national et transfrontalier. »

L’exercice dénommé « Défi commun, » (Common Challenge) simule des attentats contre des cibles dont des centrales électriques, des écoles, des commerces, des bus et des trains.

Le coordinateur européen de la lutte contre le terrorisme, Gilles de Kerchove, a dit les 17 et 18 avril au sujet de l’opération, « Cette initiative est le plus important exercice de simulation anti-terroriste qui a lieu en Europe et qui est réalisé par des unités d’intervention spéciales issues de plusieurs Etats-membres. »

On a pu voir l'envergure de l’opération à travers l’exercice dont on a le plus parlé qui s'est déroulé à Kolarovo, en Slovaquie et qui impliquait des unités spéciales de police anti-terroristes de Hongrie, de Roumanie, de Slovénie, le commando Slovaque Lynx et le 5ème régiment des forces spéciales.

Pour cet exercice particulier le scénario s'inspirait de la crise des otages de l’école de Beslan en 2004. Selon le Military Photos, « Le siège a duré environ 3 heures et 335 élèves et enseignants ont été pris en otages. Plusieurs élèves ont été psychiquement traumatisés et ont dû être dispensés de l’exercice pour des raisons médicales. »

Le bref compte rendu ainsi qu’une vaste collection de photos peuvent être vus ici (can be seen here).

En Norvège, plus de 100 officiers de Norvège, de Suède, de Finlande et du Danemark se sont entraînés pour entrer sur l’un des ferries de Color Line à partir de navires et d’hélicoptères de la police, selon le journal Aftenposten. Deux hélicoptères de la police suédoise accompagnés de tireurs d’élite l’ont escorté durant l’opération, basés sur un éventuel détournement du ferry et de ses 210 passager et 40 membres d’équipage.

En Irlande, la police nationale Gardai a simulé un scénario de sauvetage sur la rivière Liffey et près d’une centrale électrique désaffectée à Dublin, incluant des éléments basés en mer, sur terre et dans l’air.

Selon l’Irish Independent, « Des membres lourdement armés de l’escadron spécial d’intervention du gardai, l’unité d’intervention d’urgence (Emergency Response Unit, ERU) se préparent à jouer un rôle clé pour empêcher une attaque terroriste transfrontalière en juin durant le sommet des dirigeants mondiaux du G8.

« L’ERU sera déployé sur des itinéraires de patrouille de routes frontalières vers l’Irlande du Nord, y compris un réseau de voies navigables qui pourraient être utilisées pour lancer des attaques contre des politiciens et d’éminents économistes. »

L’article explique, « Le scénario général, qui constitue le noyau de tous les exercices, traite les menaces que pose une organisation terroriste fictive, l’Armée mondiale de libération et de revanche. »

Les officiers de l’ERU « sont équipés de fusils d’assaut Heckler et de pistolets mitrailleurs MP7 ainsi que des pistolets semi-automatiques et ils ont également accès à des fusils de combat Benelli de calibre 12, à des Heckler et à des fusils d’assaut Koch 33. »

Le réseau ATLAS a été créé en 2001. Il est composé d’unités spéciales de police des 27 Etats membres de l’UE. La présidence d’ATLAS est assurée par des unités d’intervention de la police allemande (GSG9). L’Allemagne a joué le rôle de premier plan dans la formation d’ATLAS après le 11 septembre 2001, mais l’organisation comprend deux unités françaises, le GIGN pour les détournements d’avions et le RAID pour les raids à bord de trains et de bus, ainsi que l’escouade CO19 de la police métropolitaine armée de la Grande-Bretagne pour des raids dans le métro.

Les implications de ce type d’opérations entreprises dans le cadre d’ATLAS sont indiquées par la présence de l’unité CO19 britannique. La Grande-Bretagne a également lancé en 2001 l’« opération Kratos », appliquant la politique du tirer pour tuer de la police métropolitaine lorsqu’il s’agit de traiter avec de présumés commandos suicide.

Le 22 juillet 2005, après l’attentat à la bombe du 7 juillet à Londres, le Brésilien innocent, Jean Charles de Menezes, avait été tué par balle par des officiers de police en civil sans aucun avertissement préalable alors qu’il se trouvait assis dans le métro à la station Stockwell. Les officiers de police l'avaient plaqué au sol et lui avaient tiré sept balles dans la tête à bout portant.

Il existe un lien étroit entre la réaction de la police et des services de sécurité américains aux attentats à la bombe de Boston et une opération à l’échelle de ce qui a eu lieu partout en Europe deux jours plus tard.

Depuis plus d’une décennie maintenant, l’on assiste dans chaque pays à un assaut contre les droits démocratique et l’adoption d’une législation fournissant souvent le cadre à un régime d’Etat-policier. Ce en quoi cela consiste a été montré à Boston où une ville entière a été verrouillée. On a assisté à cela en Europe les 17 et 18 avril sous la forme d’une démonstration de force de la part des forces de l’Etat de neuf pays.

Le choix de l’Irlande, de l’Italie et de l’Espagne, trois pays de l’UE ciblés par des mesures d’austérité brutales et de pays appauvris d’Europe de l’Est tels la Lettonie, la Slovaquie et la Roumanie, révèlent les considérations plus générales qui motivent la classe dirigeante. Toutes les mesures légales adoptées au nom de la lutte contre le terrorisme qui renforcent les pouvoirs répressifs de l’Etat sont disponibles pour être utilisés contre la montée de la vague de mécontentement social et politique parmi les millions de travailleurs du fait de la destruction massive des emplois et des prestations sociales vitales actuellement en cours.

(Article original paru le 24 avril 2013)

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