Le World Socialist Web Site dénonce la guerre menée par la France contre le Mali comme un acte de piraterie impérialiste. Après les bombardements de masse des villes au Nord-Mali qui ont tué et blessé des centaines de civils, des colonnes de chars français sont entrées hier, 14 janvier, au Mali en provenance de la Côte d’Ivoire.
Le Mali est le quatrième pays à être attaqué par la France en l'espace de deux ans après la Libye, la Côte d’Ivoire et la Syrie. Ces pays sont tous, à l’exception de la Libye, d’anciennes colonies françaises. Les explications fournies par le président François Hollande et d’autres responsables français, selon lesquelles les objectifs de la France sont la défense de la « démocratie » au Mali à l’encontre d’al Qaïda et non pas, ce que Hollande a appelé les « intérêts fondamentaux » de la France, sont de cyniques mensonges.
L’impérialisme français entend rétablir une position dominante en Afrique occidentale en recourant à la force militaire pour la défense de ses intérêts.
La guerre au Mali découle directement de la guerre de 2011 en Libye. Les forces rebelles au Nord-Mali, contre lesquelles la France se bat, comprennent aussi des combattants alliés aux forces liées à al Qaïda et qui ont aidé l’OTAN à renverser et à assassiner le colonel Mouammar Kadhafi ainsi que des soldats appartenant à l’ethnie des Touaregs qui ont combattu dans l’armée libyenne et qui se sont réfugiés au Mali après la victoire de l’OTAN. Ces forces comprennent aussi des déserteurs de l’armée malienne qui se sont ralliés à la révolte contre le régime de Bamako issu du coup d’Etat impopulaire.
L’impérialisme français tire profit des avantages que lui a apporté la défaite de Kadhafi. Avec la destruction du régime de Kadhafi et les centaines de milliards de pétrodollars libyens confisqués par les banques occidentales, les organisations régionales africaines financées par Kadhafi se sont effondrées et les Etats-Unis et la France s'empressent de mettre en place des bases militaires aux quatre coins de l’Afrique. Les alliés de la France dans l’OTAN ont promis d’aider le Mali en espérant obtenir leur part du butin.
Paris est aussi en train d’exploiter la pourriture des régimes nationaux bourgeois d’Afrique occidentale qui sont la chair à canon de ses guerres. Le président ivoirien, Alassane Ouattara, porté au pouvoir à l’issue d’une guerre menée en 2011 par la France en Côte d’Ivoire, soutient Paris au Mali. Le président sénégalais, Macky Sall, qui est arrivé au pouvoir l’année dernière après des protestations contre le président Abdoulaye Wade, soutenues par les Etats-Unis et la France, enverra aussi des troupes au Mali, aux côtés du Nigeria, du Niger et du Ghana.
Dans cette soumission des bourgeoisies d’Afrique occidentale au régime néocolonial, le régime algérien joue un rôle clé. Craignant les forces liées à al Qaïda qu’il a combattues durant la guerre civile des années 1990, ou un soulèvement de la classe ouvrière semblable à ceux qui ont fait chuter les présidents tunisien et égyptien en 2011, le régime algérien cherche à trouver un arrangement avec son ancien maître colonial. Le mois dernier, durant la visite de Hollande, Alger a signé avec la France des contrats pour plusieurs milliards d’euros. A présent, il a grand ouvert son espace aérien à l’aviation française pour qu’elle bombarde le Mali.
Disposant d’une montagne d’argent accumulée de la vente de produits énergétiques, l’élite dirigeante algérienne propose un marché à Paris. Si l’impérialisme français sauvegarde ses privilèges, Paris recevra de nouveaux marchés en Algérie pour remplacer les marchés de consommation français qui sont en train de s’effondrer au fur et à mesure que Hollande intensifie sa politique d’austérité.
Le rôle réactionnaire joué par les régimes bourgeois africains prouve une fois de plus l’impossibilité de libérer les pays africains de l’impérialisme, hormis par une lutte pour la révolution socialiste menée à travers tout le continent et internationalement.
Le Parti socialiste de Hollande s’effondre dans les sondages en raison de sa politique d’austérité et de sa décision de poursuivre les guerres du précédent président, Nicolas Sarkozy largement détesté. Maintenant, il vient de lancer sa propre guerre impérialiste sanglante.
Les partis petits-bourgeois qui avaient appelé inconditionnellement à voter Hollande aux élections de l’année dernière, le Front de Gauche et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), portent la responsabilité politique pour la guerre au Mali. La brève et superficielle critique de la guerre, affichée sur le site internet du NPA, ne change rien à son soutien continu à Hollande. Ces forces, tout comme les nationalistes bourgeois du Tiers monde, ont tellement viré à droite au cours de ces dernières décennies qu'elles soutiennent à présent la guerre impérialiste.
Il est de plus en plus évident que la période de décolonisation n’a été qu’un intermède historique, lié aux répercussions politiques de la Révolution russe, et qui avait produit une puissante vague de luttes anti-impérialistes. La période post-soviétique a connu une vague de guerres impérialistes, en Irak, en Somalie, en Afghanistan, aux Balkans dans les années 1990 et 2000 jusqu'à l’explosion de guerres suite au renversement par la classe ouvrière du président égyptien Hosni Moubarak en 2011 lors du soi-disant « printemps arabe. »
Comme le Comité international de la Quatrième Internationale l’avait prévu en 1991 dans le contexte de l’effondrement de l’URSS, « Le partage de fait de l’Irak, actuellement en cours, marque le début d’une nouvelle division du monde par les impérialistes. Les colonies d’hier seront à nouveau assujetties. Les conquêtes et les annexions qui, selon les apologistes opportunistes de l’impérialisme, relèvent d’une époque révolue, sont une fois de plus à l’ordre du jour. »
Maintenant, à l’approche du 100e anniversaire de la Première Guerre mondiale, le monde assiste à une nouvelle éruption de l’impérialisme français et mondial. Cependant, l'ultime ambition de Paris, le retour à l'âge d'or du début du vingtième siècle où il régnait sur plus de 100 millions d’esclaves coloniaux, allant de l’Afrique occidentale à l’Asie orientale, en passant par le Moyen-Orient, est une illusion réactionnaire.
Le soutien accordé par Paris au régime impopulaire malien, dont l’armée est en train de se déliter sur le terrain contre les Islamistes, et son offensive plus générale pour rétablir son influence partout en Afrique du Nord et de l’Ouest, ne fera que l’enfoncer davantage dans ce bourbier.
L’impérialisme français ne peut enchaîner de nouveau les travailleurs et les masses opprimées d’Afrique, pas plus qu'il ne peut contraindre la classe ouvrière en Europe à une politique d’austérité sans fin pour payer la guerre. En déclenchant son agression contre le Mali, il a tracé la voie menant à la catastrophe. Pour les travailleurs politiquement conscients, le maître mot sera : Troupes françaises hors d’Afrique !
(Article original paru le 15 janvier 2013)