Air France annonce 5.000 suppressions d’emplois

Le 22 juin, Alexandre de Juniac, le PDG de la compagnie aérienne franco-néerlandaise Air France/KLM, a annoncé une suppression d’emplois de 5.122 postes, environ 10 pour cent de l’effectif, d’ici la fin de 2013. Ceci fait partie du plan d’austérité, Transform 2015, censé réduire les frais d’exploitation de 20 pour cent, 2 milliards d’euros d’ici 2014, près de la moitié devant être réalisée par une réduction drastique des coûts de main d’oeuvre.

Il est à craindre que City Jet, la filiale irlandaise de la compagnie, ne cesse définitivement ses activités.

En réaction à l’annonce des licenciements, les actions d’Air France ont grimpé le jour même de 7,65 pour cent.

Cette annonce fait partie d’une vague de licenciements et de fermetures dans toute la France, où le taux de chômage vient juste d’atteindre les 10 pour cent. Le plus grand aéroport de France, Roissy Charles de Gaulle, est une source majeure d’emplois pour les banlieues ouvrières du Nord de Paris. Il se trouve à proximité de l’usine Peugeot-Citroën d’Aulnay-sous-Bois qui d’ici 2014 doit fermer ses portes avec une perte de 3.500 emplois – une catastrophe sociale pour l’une des populations les plus pauvres de France.

Le Monde a rapporté que: « L’envolée des prix du carburant et la concurrence féroce des compagnies à bas prix ont placé le groupe Air France/KLM dans une situation extrêmement difficile, avec des pertes de plus de 800 millions d’euros en 2011 et une lourde dette (6,5 milliards). »

L’Etat français détient 15,8 pour cent du capital de l’entreprise. En 1999, Jean-Claude Gayssot (Parti communiste français) alors ministre du Transport du gouvernement de la Gauche plurielle (1997-2002) de Lionel Jospin (Parti socialiste), avait ouvert le capital d’Air France au privé.

Selon des estimations syndicales, 1.700 emplois seront perdus par le non remplacement de départs en retraite, 3.300 emplois devant être directement supprimés : 2.056 emplois au sol, 904 hôtesses et stewards et 450 pilotes. Ceci s’ajoute aux 800 emplois perdus par an ces dernières années. Un plan de départs volontaires en 2010 avait déjà supprimé 1.800 emplois.

Les réductions permanentes du personnel au cours de ces derniers 20 ans ont été réalisées sur la base du volontariat compte tenu d’une opposition symbolique de la part des syndicats. Mais, Transform 2015 nécessitera bien plus de « licenciements secs ».

Juniac a menacé les syndicats disant que s’ils n’arrivaient pas à conclure un accord sur l’application de Transform 2015, aucun emploi ou partie de l’entreprise ne seraient garantis. « Compte tenu de l’impact des nécessaires réductions d’activité et de fermetures de lignes, les départs non volontaires ne pourraient alors être évités, » a-t-il déclaré.

Le 22 juin, La Tribune a rapporté que quatre syndicats représentant le personnel au sol « qui avaient signé fin mars le protocole d’accord sur la méthodologie avec la direction penchent plutôt pour une signature. »

Les syndicats accepteront totalement les réductions de postes tout en feignant de résister en réclamant une garantie de ne procéder à aucun licenciement sec jusqu’en 2015 au lieu de 2013, comme proposé.

Le Figaro a souligné que de Juniac n’a pas « écarté le spectre d’un raté des négociations avec les syndicats qui aurait pour conséquence, selon lui, ‘un impact encore plus fort sur l'emploi’ ».

Les syndicats collaborent pleinement avec la direction et sa « méthodologie ». Les résultats des négociations seront annoncés aujourd’hui. Ils comporteront des concessions sur les conventions collectives permettant une augmentation de la productivité et une flexibilité plus grande de l’emploi ce qui signifie une forte hausse du taux d’exploitation. Les heures de vol des pilotes devraient augmenter de près de 50 pour cent passant de 560 à 750 par an.

Le gouvernement PS du président François Hollande nouvellement élu apporte son plein soutien au chantage d’Air France/KLM et aux accords élaborés avec les syndicats. Le Parisien rapporte que « le ministre du Travail, Michel Sapin, a affirmé jeudi [22 juin] que l’Etat ‘encourage’ le dialogue social à Air France pour que la compagnie puisse s’adapter et éviter que cette ‘grande société’ ne ‘capote’, sans être ‘dans des plans de licenciements secs, avec des gens mis à la rue’ ».

Le rôle le plus cynique est joué par la CGT (Confédération générale du Travail) qui est dominée par le Parti communiste (PCF) stalinien. Le quotidien du PCF, L’Humanité a consacré le 24 juin un long article à la position de la direction de la CGT et à sa représentation syndicale du personnel navigant technique, l’Ugict. Citant l’argument de Christian Bourdet, le délégué de l’Ugict à la commission économique du comité central d’entreprise d’Air France (CCE) comme quoi « la survie de l’entreprise n’est pas en jeu. » ce journal dit : « Alors que la direction veut imposer 20 pour cent de gains de productivité, l’Ugict estime qu’un gain de productivité inférieur à 3 pour cent serait nécessaire pour un retour à l’équilibre, au prix actuel du baril de pétrole. »

Bourdet accuse la direction de n’être intéressée qu’à gonfler les profits et le cours des actions : « Fondamentalement, c’est toute la logique financière dans laquelle est rentrée Air France qui nous amène à cette situation. » Bourdet énonce la nécessité d’une renationalisation d’Air France en ignorant le plan d’austérité du gouvernement et la crise de la dette européenne tout comme la plongée dans la récession alors que l’économie mondiale se ralentit et que le transport aérien se contracte de par le monde.

L’Humanité relate les propos de David Ricatte, le secrétaire national de la CGT d’Air France qui affirme : « La direction ne nous fera pas avaler son plan. » Mais il enchaîne aussitôt en disant que son syndicat est prêt à négocier des départs volontaires plutôt que de lutter pour la défense des emplois. Il se plaint, disant : « On reconnaît la répartition des sureffectifs, mais pas le périmètre du plan de départs volontaires, ni le montant des indications aux départ… les partenaires sociaux se retrouvent cantonnés à un rôle d’enregistrement des décisions patronales. »

L’emploi du terme « partenaires sociaux » de la part de Ricatte, terme employé par les bureaucrates de l’UE pour décrire les syndicats en alliance avec les capitalistes, révèle la collaboration de classe pratiquée sans la moindre gêne par la CGT et les staliniens.

Il va sans dire que la CGT ne luttera pas pour la défense des emplois. Son unique préoccupation est de défendre la viabilité du capitalisme français. Elle a joué un rôle clé dans l’élection du président pro-capitaliste et pro-austérité Hollande et n’a engagé aucune lutte de masse contre les licenciements dans le secteur des transports aériens, de l’automobile ou tout autre secteur.

Au contraire, le 31 janvier elle a lancé une campagne pour l’élection de Hollande à l’occasion d’un meeting à Paris où étaient présents tous les partis bourgeois de « gauche » et toute la pseudo-gauche (PS, PCF, Parti de Gauche, les Verts, le Nouveau Parti anticapitaliste, Lutte Ouvrière).

(Article original paru le 28 juin 2012)

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