Les dernières révélations sur le soutien apporté aux forces « rebelles » en Syrie par les agences américaines de renseignement démontrent clairement le rôle pro-impérialiste du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) et de Lutte ouvrière (LO). En présentant les forces armées par la CIA et hostiles au président syrien Bachar al-Assad comme des forces « révolutionnaires », le NPA et LO ont agi en tant qu’outils de l’impérialisme.
La semaine dernière, la presse a rapporté que le président américain Barack Obama avait signé un document secret autorisant l’aide aux rebelles syriens. Ce document permet aux services secrets américains d’agir clandestinement pour armer et ravitailler les forces anti-Assad et les guider sur le terrain. La presse a rapporté que la CIA et ses alliés, la monarchie saoudienne, l’armée turque et les puissances impérialistes européennes, faisaient aussi venir des forces islamistes étrangères liées à Al Qaïda qui lutteraient férocement contre le régime laïc d’Assad.
Pendant ce temps, le NPA saluait l’entrée de forces « rebelles » anti-Assad dans les villes de Damas et d’Alep, par l’intermédiaire de la déclaration du soi-disant Courant de la gauche révolutionnaire en Syrie (CGRS).
Le CGRS écrit: « L’élan révolutionnaire qui a touché ces derniers jours les grandes villes de Damas et d'Alep et leurs périphéries révèle une infime portion de l'énergie révolutionnaire des masses populaires syriennes. Et les actions liées à la confrontation révolutionnaire dans la banlieue de Damas et leur propagation dans toutes les directions apparaissent comme des prémices à la prise d'assaut du palais présidentiel ».
En publiant ce document, le NPA cherche à envelopper une opération de la CIA de l’auréole de la révolution. « L’élan révolutionnaire » était en fait un assaut livré à des villes de millions d’habitants par des milices sunnites, dirigées par des intégristes d’Al Qaïda et téléguidées par les services de renseignement américains (voir aussi : La guerre par procuration de la CIA en Syrie et la « gauche » pro-impérialiste).
Ceux-ci coordonnent leurs opérations d’Adana en Turquie, ville où se trouve la base aérienne américaine d’Incirlik—haut lieu de la planification militaire et politique des Etats-Unis au Moyen Orient. Ils sont en communication régulière avec les rebelles, leur communiquant les détails sur le déplacement des forces armées d’Assad. Washington a aussi aidé à distribuer des armes et de l’argent donné par ses alliés de droite au Moyen-Orient, en Turquie, en Arabie saoudite et au Qatar.
Loin d’être des forces « révolutionnaires », ce sont en fait les régimes les plus profondément hostiles aux luttes de masse qui se sont développées en Tunisie et en Egypte l’année dernière.
Les dirigeants du NPA sont bien sûr au courant de ces réalités politiques. Au mois de novembre, ils ont envoyé Gilbert Achcar représenter leur tendance auprès d’une réunion du Congrès national syrien (CNS), organisme dirigeant des « rebelles » anti-Assad. (Voir aussi : France: La « gauche » petite-bourgeoise complote une intervention militaire en Syrie)
LO a publié sur son site internet un article paru dans le trimestriel britanniques de Workers’ Fight, mouvement proche de LO, intitulé « Syrie - La population prise au piège entre les calculs des grandes puissances et la menace de guerre civile. » L’auteur écrit concernant Al Qaïda : « Les porte-parole de l’opposition ont attribué ces attentats aux forces de sécurité baasistes, les accusant de tenter ainsi de corroborer les allégations ridicules selon lesquelles Al Qaïda serait le cerveau du mouvement de protestation. »
LO tente ici de défendre l’image médiatique de la CIA et de ses alliés terroristes qui mènent les guérillas urbaines à Damas et à Alep. Les rapports entre les « rebelles » syriens et les forces terroristes comme Al Qaïda ont été abondamment documentés dans la presse des puissances impérialistes anti-Assad.
Ces reportages sont entièrement crédibles, étant donné que la guerre en Syrie est devenue une guerre confessionnelle contre un régime laïc dont les cadres dirigeants sont en grande partie d’origine chiite. Ceci attirera naturellement le soutien des forces d’Al Qaïda, résolument anti-laïques et violemment hostiles aux chiites.
Le document publié par LO avoue même partiellement cette réalité. Citant le programme économique néo-libéral des « rebelles » islamistes et les craintes populaires d’une épuration confessionnelle après la victoires des rebelles, il explique : « Il est donc plausible qu’une partie de la population pauvre syrienne reste, sinon loyale au régime, au moins passive vis-à-vis du mouvement de contestation, voire soupçonneuse à son égard, de crainte de devoir payer sa victoire éventuelle au prix fort ».
Ceci démontre que LO défend les « rebelles » anti-Assad tout en étant parfaitement au courant de leur caractère réactionnaire et du manque de soutien parmi la classe ouvrière. LO continue cependant de nier que ces forces agissent pour le compte de l’impérialisme.
L’auteur de l’article affiché par LO prétend même que les puissances impérialistes n’osent pas aider pleinement les forces anti-Assad à cause de « leurs craintes de perdre un serviteur somme toute loyal de leur ordre régional ».
Ce passage grotesque tente d’obscurcir le fait pourtant évident que Washington et ses alliés européens et du Moyen-Orient tentent ensemble de renverser Assad en armant des milices qui lui sont hostiles. En Syrie comme en Libye—où les Etats-Unis et leurs alliés, dont la France, ont détruit le régime existant et assassiné le Colonel Mouammar Kadhafi—les puissances impérialistes détruisent des régimes qui ont entretenu de longues relations avec eux.
Ayant pilonné les villes libyennes et fait des dizaines de milliers de morts en Libye, avec le soutien de la « gauche » petite-bourgeoise française, les forces de l’OTAN ont abattu Kadhafi et installé un régime plus docile à leurs intérêts.
Avec la plus parfaite mauvaise foi, les tendances petite-bourgeoises affectent une attitude « anti-impérialiste » tout en parant les opérations de la CIA des couleurs d’une révolution.
Ainsi dans un article du 13 juillet, le NPA écrit à propos des négociations : « Dans ce manège de tractations des puissances impérialistes, les intérêts du peuple syrien révolté et massacré sont les grands absents. Un fait majeur s’est fait jour ces derniers mois : la conscience révolutionnaire de masse … s’est débarrassée d’une illusion de salut par une intervention militaire extérieure ».
Ici le NPA tente d’avancer l’illusion qu’il défend un processus révolutionnaire contre l’impérialisme français ou américain en Syrie, alors que ce n’est pas le cas. Il participe à sa manière à la campagne de presse qui agite en faveur d'une intervention militaire extérieure.
Ce faux-semblant d'anti-impérialisme affecté par la « gauche » petite-bourgeoise est particulièrement nauséabond. Il est impossible d'être anti-impérialiste et de participer aux opérations de la CIA, qui a fait des millions de morts au cours du 20e siècle dans sa lutte meurtrière contre les mouvements anticoloniaux. C’est avec les forces les plus réactionnaires que le NPA et LO s’unissent à présent en chantant les louanges des opérations militaires de l’Otan en Syrie.