De nouvelles coupes sociales entrainent l’effondrement du système de santé en Grèce

Chaque détail nouvellement rendu public du cinquième plan d’austérité pour la Grèce montre que l’Union européenne est disposée à recourir aux plus brutales mesures pour garantir les profits des spéculateurs. L’une des victimes les plus durement touchées par le plan d’austérité dicté par l’UE et le FMI est le secteur grec de la santé. Au cœur de l’Europe, une grande partie de la population est privée de toute forme de soins de santé.

Mercredi, 24 octobre, un certain nombre d’articles de presse ont rapporté que le gouvernement grec s’était mis d’accord avec des représentants du FMI et de l’UE sur un nouveau plan d’austérité. La décision finale sera prise dimanche. Selon ces rapports, le plan prévoit des réductions supplémentaires des salaires et des retraites ainsi que des licenciements de masse mais aussi davantage de coupes dans le système de santé. Des économies de l’ordre de 2 milliards d’euros sur le système de santé sont d’ores et déjà décidées. Une partie de cette somme doit être réalisée par le licenciement de 10 pour cent des médecins et autre personnel dans les hôpitaux publics.

Cette décision pourrait entraîner l’effondrement final des hôpitaux du pays. Il existe déjà des manifestations quotidiennes des médecins, des infirmières et des patients partout dans le pays contre les conditions catastrophiques existant dans le secteur de la santé. En juin, le Conseil de l’ordre des médecins grec avait attiré l’attention des Nations unies sur la gravité de la situation.

Selon l’organisation Médecins sans Frontières, le financement des hôpitaux publics a chuté de 40 pour cent depuis 2008 alors que les demandes de traitement ont sensiblement augmenté. De graves pénuries sont survenues parce que les fournisseurs du service de santé ne peuvent pas être payés à temps dans de telles circonstances.

Dans certains cas, des opérations vitales ne peuvent être pratiquées parce que les fournisseurs refusent de livrer les médicaments et/ou le matériel nécessaire. Le quotidien grec Ta Nea a rapporté le cas d’une clinique à Thessalonique qui n’est plus en mesure de pratiquer la chirurgie cardiaque par manque d’implants endovasculaires (« stents »). A l’hôpital central de la ville grecque de Larisa, le papier hygiénique a manqué pendant un certain temps. D’autres cabinets médicaux et des hôpitaux ont signalé une pénurie d’alcool pharmaceutique pour nettoyer les plaies.

Les médecins et les pharmaciens sont aussi gravement affectés. L’assurance-maladie Eopyy, la plus grande société d’assurance, leur doit 230 millions d’euros. En conséquence, les patients doivent payer par avance à la pharmacie et aussi chez certains médecins en soumettant plus tard la facture à la caisse d’assurance. De tels paiements d’avance s’avèrent souvent impossibles à effectuer pour les personnes âgées, les pauvres et les malades chroniques, ce qui signifie qu’ils se passent de médicaments vitaux et de traitement.

L’association des médecins conventionnés a publié des chiffres montrant que l’actuel budget de l’Eopyy présente un découvert de 1,5 milliards d’euros. Ceci est dû à la baisse des contributions faites à l’organisation en raison de la récession et de l’augmentation rapide du chômage ainsi que de l’insolvabilité partielle du gouvernement grec qui s’est vu refuser un crédit de 31,5 milliards d’euros que l’Union européenne lui avait initialement promis pour juin. Une récente étude réalisée dans la région de Patras a montré qu’environ 70 pour cent des Grecs n’avaient pas les moyens de se payer les médicaments prescrits par leurs docteurs.

Un nombre croissant d’enfants contractent des maladies infectieuses telles la diphtérie et la méningite parce que les parents ne peuvent pas payer les vaccins nécessaires. Le nombre de nouveaux cas d’infection par le VIH a augmenté de 50 pour cent rien qu’en 2011.

Selon une récente étude du Centre national de Recherche sociale grec (EKKE), la pauvreté croissante qui touche actuellement plus d’un quart de ceux qui ont encore du travail, va entraîner des maladies encore plus graves cet hiver. De nombreux ménages sont déjà privés d’électricité et devront passer les mois d’hiver sans chauffage parce qu’ils sont dans l’incapacité de payer leurs factures. C’est dans ce contexte que le taux de suicide a grimpé de 40 pour cent ces trois dernières années. 

Ceux qui ont été licenciés en raison des attaques sociales sont tout particulièrement durement touchés. Leur droit aux prestations sociales et à l’assurance maladie ne dure au maximum qu’un an, après quoi ils sont laissés sans ressources. L’on estime qu’entre 25 à 30 pour cent de la population n’a pas un accès adéquat aux soins de santé. La moitié des 1,2 millions de chômeurs du pays ne dispose pas d’une assurance maladie.

Le New York Times a fait état le 24 octobre d’un groupe de médecins qui tentent d’offrir des soins médicaux en dehors des circuits officiels. Ils ont tout spécialement aidé les patients malades du cancer qui ne peuvent se payer des traitements onéreux. Le Times a cité le Dr Kostas Syrigos qui a déclaré que si un cas de cancer était diagnostiqué parmi les personnes non assurées, « le système les ignore tout simplement. Ils ne peuvent ni accéder à la chimiothérapie, ni à la chirurgie ni même à de simples médicaments.

Les médecins soignent les chômeurs pendant leur temps libre et dépendent de dons de médicaments prodigués par des sociétés et des individus. Eu égard à la situation économique catastrophique, toutefois, de tels dons sont en train de diminuer alors que le nombre de ceux qui cherchent de l’aide augmente. « En ce moment, être chômeur en Grèce équivaut à un être mort, » a dit le Dr Syrigos.

Le journal a aussi relaté le cas d’Elena qui n’a pas d’assurance maladie et qui n’a donc pas pu obtenir un traitement pour un cancer du sein diagnostiqué il y a un an. Lorsqu’elle est arrivée chez le Dr Syrigos, son cancer avait atteint la taille d’une orange et avait percé la peau. Elena avait drainé la plaie avec des serviettes en papier.

« Lorsque nous l’avons vue nous sommes tous restés muets, » a dit le Dr Syrigos, « tout le monde a pleuré. De telles choses sont décrites dans les manuels médicaux, mais vous ne les voyez jamais parce que jusque-là, quelqu’un qui devenait malade dans ce pays pouvait toujours obtenir de l’aide. »

Dans un pays développé, des millions de personnes sont maintenant laissées sans soins à mourir sur le trottoir. Rien ne pourrait illustrer plus clairement le caractère brutal de l’UE en tant qu’instrument de l’élite financière européenne. Elle confirme que les relations de propriété capitalistes sont incompatibles avec une organisation équitable et humaine de la société.

(Article original paru le 27 octobre 2012)

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