La « Grande conférence sociale » réunie par le gouvernement du Parti socialiste (PS) du président François Hollande s'est tenue les 9 et 10 juin à Paris. Elle a réuni 300 représentants de l'Etat, des syndicats et des associations d'employeurs afin qu'ils élaborent des projets visant à réduire la dette française et à augmenter la profitabilité et la compétitivité des entreprises françaises.
Tandis que la France et l'Europe s'enfoncent toujours plus profondément dans la dépression économique, ces forces sont en train de s'unir pour se mettre d'accord sur des attaques d'envergure contre la classe ouvrière.
Dans son discours d'ouverture du congrès, Hollande a insisté sur le fait qu'il envisage de rendre « obligatoire » l'approbation de la bureaucratie syndicale pour les coupes, faisant remarquer: «Il conviendrait de prévoir aujourd'hui les obligations de concertation préalables à la décision publique. Il n'y aura pas de loi dans le domaine de la vie économique et sociale qui pourra être votée par le Parlement sans qu'il y ait une phase de dialogue et de concertation, » dans le but d'établir « un compromis positif » entre les syndicats et les patrons.
Le discours de clôture premier ministre Jean-Marc Ayrault a détaillé les résultats de ce rassemblement anti-ouvrier.
Les augmentations du salaire minimum légal (SMIC) ne seront plus calculées sur l'augmentation des prix mais sur la croissance économique du pays. Dans une situation de croissance économique stagnante et d'augmentation des prix, ceci impliquera au fil des années un profond déclin du niveau de vie des travailleurs. On a calculé que si cette méthode avait été utilisée ces 20 dernières années, alors même que toutes ces années n'étaient pas des années de grave crise économique, le salaire minimum mensuel serait inférieur de 200 euros.
Le coût du travail sera fortement réduit par le transfert du financement de la sécurité sociale qui ne reposera plus sur les employeurs mais sur les travailleurs, au moyen de la contribution sociale généralisée (CSG.) Cette proposition revient à confisquer des dizaines de milliards d'euros à la classe ouvrière, dans une situation où les charges qui pèsent sur le travail représentent 22,6 pour cent du PIB en France, contre une moyenne européenne de 17,5 pour cent.
Selon le journal Le Monde, « Le 'facilitateur' de la table ronde sur le redressement productif, l'ex-PDG d'EADS et tout nouveau commissaire général à l'investissement, Louis Gallois, a plaidé ce week-end aux rencontres économiques d'Aix-en-Provence, pour un 'choc d'offre' massif de l'ordre de 30 à 50milliards d'euros, via un transfert de cotisations vers la CSG. »
Cet impôt, qui cherche à faire baisser le coût du travail pour accroître la profitabilité et la compétitivité des entreprises et attirer des investissements, est cyniquement justifié comme étant un moyen de réduire le chômage. Mais c'est sur les travailleurs à bas salaires et les retraités qu'il retombera le plus durement.
Le Monde a félicité les syndicats d'avoir accepté les coupes et la réduction du coût du travail en France: «C'est la première fois en France que les partenaires sociaux, à l'issue d'un sommet social, reconnaissent qu'il y a un problème de coût du travail. Une vraie révolution ! La droite devrait applaudir des deux mains. »
Dans son discours d'ouverture de la conférence, Hollande a cyniquement essayé de présenter les coupes comme étant une mesure visant à sauver les emplois: « Tout doit être discuté pour parvenir au plus haut niveau d'emploi dans notre pays. »
Dans le même temps, Hollande ne fait rien pour arrêter la vague de fermetures d'usines; le taux de chômage vient d'atteindre 10 pour cent et 22,5 pour cent pour les travailleurs entre 15 et 24 ans. Quelque 84 fermetures d'usine impliquant 60 000 travailleurs sont imminentes, notamment PSA, Valeo, Honeywell, Wonderbra, Air France et plusieurs banques.
Il est significatif que ces mesures proposées par Ayrault impliquent d'aggraver les attaques contre les salaires et les conditions de vie des travailleurs. Ayrault a promis que des mesures seraient prises pour améliorer le dispositif du chômage partiel. Il a proposé que les employeurs gardent les travailleurs dans l'entreprise et que le gouvernement apporte une aide pour compenser la perte des salaires, un système qui éviterait de payer des indemnités de licenciements.
Des personnalités du patronat français ont insisté pour dire qu'ils souhaiteraient modeler le système du chômage partiel en France selon les mesures « Kurzarbeit » mises en place en Allemagne qui permettent à l'entreprise de baisser plus rapidement le salaire des travailleurs en réponse aux ralentissements économiques.
Les dirigeants syndicaux français ont soutenu avec enthousiasme les coupes du gouvernement PS. Bernard Thibault, dirigeant de la CGT (Confédération générale du travail, dominée par les staliniens s'est réjoui de la « méthode sociale » du PS, tandis que François Chérèque de la CFDT (Confédération française démocratique du travail) alignée sur le PS a fait l'éloge de la consultation disant que c'était « une bonne chose. »
Jean-Claude Mailly de FO (Force ouvrière) a dit après la conférence: « Il y a un gros travail qui nous attend mais le dialogue social est apaisé donc on est plutôt satisfait ce soir. »
L'alignement du gouvernement PS et de la bureaucratie syndicale pour soutenir les coupes sociales sont une révélation dévastatrice du caractère anti-ouvrier des partis de pseudo-gauche petits-bourgeois qui sont les complices politiques de ces mesures.
LO (Lutte ouvrière), le NPA (Nouveau Parti anticapitaliste) et le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon ont soutenu Hollande au second tour de l'élection présidentielle. Ils cherchent systématiquement à maintenir l'influence des syndicats, notamment de la CGT, sur les luttes de la classe ouvrière.
(Article original paru le 12 juillet 2012)