Les commandements militaires des Etats-Unis et de
la Grande-Bretagne ont cherché à obtenir des financements plus importants et
ont intensifié les déploiements d’armes et de personnel dans le golfe
Persique en préparation d'une guerre prévue contre l’Iran
Selon le Wall Street Journal, le Pentagone,
agissant à la demande du Commandement central qui supervise les opérations
militaires américaines dans la région, a demandé une réaffectation de
quelque 100 millions de dollars des dépenses militaires pour faire monter
d’un cran les préparatifs de guerre.
Le Journal présente ses préparatifs comme
des mesures défensives visant à contrer une menace iranienne de fermer le
détroit d’Ormuz, la voie navigable par laquelle transitent quelque 20 pour
cent des exportations de pétrole du monde. La menace de l’Iran s’est faite
en réponse à des sanctions commerciales et des embargos imposés par les
Etats-Unis et l’Europe de l’Ouest et qui correspondent à un blocus, un acte
de guerre, ainsi que des menaces ouvertes proférées par Israël de bombarder
le pays.
« L’armée américaine a avisé le Congrès de projets
d’acheminer de nouveaux détecteurs de mines et d’équipements de déminage et
d’élargir les capacités de surveillance dans le détroit autour de celui-ci,
selon des responsables de la défense informés des requêtes », rapporte le
Journal. « L’armée veut aussi rapidement changer les systèmes d’armement
sur les navires de façon à pouvoir les utiliser contre les vedettes
d’attaque rapide iraniennes ainsi que des missiles de croisière lancés à
partir de la côte », ont dit des responsables de la défense.
En vertu des plans du Pentagone, des navires de
combat américains seraient équipés d’armes antichars, de mitrailleuses à tir
rapide et d’armes légères utilisées contre les embarcations rapides de la
marine iranienne. Ils seraient soutenus par un nombre encore plus grand de
drones.
Le Journal a ajouté que « des équipes
d’opérations spéciales américaines stationnées dans les Emirats arabes unis
participeraient à toute action militaire dans le détroit au cas où l’Iran
tenterait de le fermer ».
Les Etats-Unis ont déjà doublé le nombre de
groupes aéronavals qu’ils ont stationnés dans la région du golfe Persique,
en déployant à la fois le porte-avion USS Abraham Lincoln et le porte-avion
USS Carl Vinson. Ils ont aussi un nombre important d’avions de combat qui
opèrent à partir de la péninsule arabique et des dizaines de milliers de
troupes garées à proximité des frontières de l’Iran en Afghanistan et au
Koweït.
Le Journal déclare que les nouveaux
préparatifs de guerre montrent « dans quelle mesure les planificateurs de
guerre sont en train de prendre des mesures concrètes pour préparer un
éventuel conflit avec l’Iran, alors même que des dirigeants au plus haut
niveau à la Maison-Blanche et des dirigeants de la défense tentent de
minimiser la question de la guerre en soulignant d’autres options. »
L’article du Journal indique que le
Pentagone souhaite que l’augmentation de la capacité militaire soit en place
dans le Golfe d’ici l’automne lorsque les stratèges du Pentagone prévoient
qu’Israël lancera une frappe militaire non provoquée contre l’Iran.
Des discussions sur l’Iran au plus haut niveau
entre Washington et l’Etat d’Israël sont prévues au cours des prochains
jours. Le ministre de la Défense Ehoud Barak a quitté lundi Israël pour
avoir des entretiens de deux jours avec des responsables américains et le
premier ministre Benjamin Netanyahou doit s’entretenir avec Obama le 5 mars.
Le journal a remarqué que la récente décision de
financer une guerre prévue avec l’Iran fait suite à une demande de fonds du
Pentagone de 82 millions de dollars remontant à janvier « pour améliorer sa
plus grosse bombe anti-bunker traditionnelle, la Massive Ordnance Penetrator
pesant environ 15 tonnes. La bombe, disent les responsables, a été conçue
pour détruire des abris souterrains tels ceux utilisés par l’Iran pour
protéger ses travaux les plus confidentiels sur le développement
nucléaire. »
Il semble qu’un vif débat se poursuive autour de
la question de fournir à Israël ces armes de 15 tonnes qui sont
considérablement plus puissantes que les bombes anti-bunker de 2,5 tonnes
GBU-28 (Guided Bomb Unit 28) que le gouvernement Obama a fait parvenir à
l’Etat sioniste l’année dernière.
David Sanger, le principal correspondant à
Washington du New York Times, a ainsi résumé dimanche la rengaine
grandissante au sein de sections de l’establishment dirigeant
américain : « Armez les rebelles syriens ! Et, tant que nous y sommes,
donnez aux Israéliens les outils dont ils ont besoin – des bombes à charge
pénétrante, des avions de ravitaillement – pour qu’ils réussissent du
premier coup s’ils décidaient de frapper les installations nucléaires
iraniennes. »
Tout en reconnaissant que les objectifs de
Washington en Syrie avaient tout à voir avec un affaiblissement de l’Iran
dans le cadre des préparatifs pour un « changement de régime » là aussi,
Sanger a poursuivi : « l’argument souvent entendu à l’intérieur et à
l’extérieur de la Maison-Blanche ces jours-ci est que, si le gouvernement
Assad craquait, la capacité de l’Iran d’acheminer des armes au Hezbollah et
au Hamas serait sérieusement compromise – et son influence diminuera en
conséquence. De la même façon, si les efforts de l’Iran de se rapprocher
d’un potentiel nucléaire pouvaient être retardés par quelques bombes de type
GBU-31 bunker-busters bien ciblées, les espoirs du pays de défier Israël et
l’Arabie saoudite d’être la plus grande puissance de la région seront
différés. »
En d’autres termes, derrière tous ces
avertissements médiatisés sur l’acquisition imminente d’armes nucléaires de
l’Iran, la réalité est que l’impérialisme américain et ses alliés sont
engagés dans une campagne d’agression économique, politique et militaire
contre l’Iran et dont le but est d’empêcher que le pays n’émerge comme une
puissance régionale capable de défier l’hégémonie de Washington sur des
régions riches en énergie du golfe Persique et d’Asie centrale.
La question du nucléaire a été utilisée comme un
prétexte pour planifier une nouvelle guerre dans la région tout comme les
allégations concernant des « armes de destruction massive » furent employées
avant l’invasion américaine de l’Irak en 2003.
Tout comme dans le cas de l’Irak il y a dix ans,
le régime des inspections de l’Agence internationale de l’énergie atomique
(AIEA) sert d'instrument dans la préparation d’une agression impérialiste.
Comme en Irak, l’AIEA, manipulée par les agences de renseignement des
Etats-Unis, d’Israël et de l’Europe occidentale, exige que l’Iran fasse
l’impossible : prouver ce qui n'existe pas, qu’elle n’est pas engagée dans
le développement d’armes nucléaires. Et, comme dans ses opérations contre
Bagdad, l’AIEA est en train de provoquer Téhéran en exigeant qu’elle se
soumette à des dictats auxquels ne sont pas soumis les signataires du Traité
sur la non-prolifération des armes nucléaires.
Et donc, l’AIEA a publié vendredi dernier un
rapport soulignant qu’une petite quantité d’uranium métal avait disparu d’un
site de recherche nucléaire – bien moins qu’il n’en faudrait pour construire
une bombe – et que l’Iran a accentué son enrichissement d’uranium, non pas à
un degré nécessaire à la fabrication d’armes, mais pour obtenir du
combustible pour centrale nucléaire, ce qui est parfaitement légal au regard
du traité.
L’agence a également déclaré qu’une équipe qu’elle
avait envoyée en Iran n’a pas été autorisée à visiter le complexe militaire
de Parchin, situé à quelque 30 kilomètres au sud-est de Téhéran. Les
Etats-Unis ont à plusieurs reprises incité l’AIEA à exiger des inspections
du site qui n’est pas un site nucléaire et qui n’est pas soumis au contrôle
de l’agence. Entre 2004 et 2006, l’Iran avait permis à des inspecteurs de se
rendre dans des installations secrètes après que Washington a allégué qu’un
abri servait à tester des détonateurs pour bombes nucléaires. Les
inspecteurs n’avaient rien découvert de la sorte.
Les responsables iraniens, qui ont souligné que le
programme nucléaire du pays était à seules fins pacifiques, ont dit que
l’équipe de l’AIEA envoyée à Téhéran était là pour négocier un « cadre » de
collaboration durable entre l’agence et Téhéran et qu’elle n’était pas
composée d’inspecteurs nucléaires et n’avait aucun droit de solliciter
l’entrée dans l’installation de Parchin.
Israël tout comme les Etats-Unis s’est servi du
rapport comme prétexte pour accroître la pression sur l’Iran. Netanyahou a
publié un communiqué disant qu’il « apporte une nouvelle preuve que les
évaluations d’Israël étaient correctes, l’Iran poursuit sans restriction son
programme nucléaire ». Israël elle-même a refusé de signer le traité sur la
non-prolifération des armes nucléaires ou d’accepter un quelconque contrôle
par l’AIEA de ses installations nucléaires qui ont produit environ 400 armes
nucléaires.
« Les actions de l’Iran montrent pourquoi ce pays
n’a pas réussi à convaincre la communauté internationale comme quoi son
programme nucléaire était pacifique, » a dit le porte-parole de la
Maison-Blanche, Tommy Vietor. A moins que l’Iran cède à la pression exercée
par les Etats-Unis et l’Union européenne, « son isolement face à la
communauté internationale ne fera que croître », a-t-il ajouté.
Entre-temps, sous le titre chauvin « Le plan de
bataille britannique pour la guerre contre l’Iran », le journal Sunday
Sun de Rupert Murdoch a cité des « chefs de la défense » britanniques
anonymes disant « ce n’est pas une affaire de SI, mais de QUAND la guerre
éclatera – dans un délai probable allant de 18 à 24 mois ».
Dans le cadre de la préparation d’une attaque
contre l’Iran, le journal fait état que la Grande-Bretagne « enverra un
bataillon d’infanterie aux Emirats arabes unis, notre allié fort dans la
région ».
Le Sun a ajouté: « D’après le plan de
guerre, un second sous-marin armé de missiles de croisière Tomahawk serait
déployé. La RAF [force aérienne royale] enverrait des avions de combat
Typhoon et Tornado pour renforcer les hélicoptères et les avions de
transport d’équipage déjà stationnés au Qatar, en Oman, au Bahreïn et aux
Emirats arabes unis. »
Le journal cite un haut responsable de Whitehall
disant: « Les planificateurs du MoD [ministère de la Défense britannique] se
sont activés intensément au début de l’année. Le conflit semble être
inévitable si le régime poursuit ses ambitions nucléaires. »
(Article original paru le 28 février 2012)