Le parlement grec a adopté le 1er mars des
réductions massives dans le service de santé public.
La réduction d’un milliard d’euros des dépenses de
santé était la dernière loi intérieure requise en vertu de la liste de
« mesures préalables » imposées par l’Union européenne, le Fonds monétaire
international et la Banque centrale européenne pour permettre à la Grèce
d’obtenir le second prêt de 130 milliards d’euros.
Ces mesures comprennent l’allongement des horaires
d’ouverture des pharmacies, la réduction des dépenses de médicaments par les
fonds de pension publics et une législation qui rend obligatoire la
prescription de médicaments génériques.
A l’intérieur de l’hôpital de la Croix Rouge à
Athènes
Les coupes ont entraîné de vastes protestations de
la part du personnel hospitalier. La veille du vote, les travailleurs des
hôpitaux publics avaient organisé une grève de 24 heures. On a vu dans tout
Athènes, avant le vote, une affiche collée devant les pharmacies et sur
laquelle le ministre de la Santé, Andreas Loverdos, était présenté comme un
fossoyeur.
Les avancées sociales obtenues au cours de
plusieurs décennies ont été anéanties du jour au lendemain. Commentant les
réductions, le journal Athens News a déclaré, « La priorité du
gouvernement, qui dépense quelque 25 milliards d’euros par an pour la santé,
grosso modo 10 pour cent de son PIB, est de contrôler un système public de
santé gonflé. »
C
es dernières réductions
viennent s’ajouter aux souffrances qui affligent d’ores et déjà des millions
de gens suite aux attaques déjà perpétrées par le précédent gouvernement
PASOK en 2009.
En octobre dernier, le
World Socialist Web Site signalait
[article en anglais uniquement] une étude publiée par la revue médicale
The Lancet, intitulée « Santé publique : la crise financière, une
tragédie grecque. »
En raison des réductions budgétaires, 40 pour cent
de la population grecque sont obligés de se passer de services médicaux. Un
phénomène sans précédent dans l’Union européenne qui a fait que des
organisations non gouvernementales telles Médecins du Monde procurent des
services médicaux courants à la population.
Le président de la section grecque de Médecins du
Monde, Nikitis Kanakis, a décrit la situation comme étant « une crise
humanitaire qui continue de s’aggraver. »
Une équipe de reporters du World Socialist Web
Site a parlé cette semaine aux travailleurs hospitaliers. Au service de
chirurgie de l’hôpital de la Croix Rouge à Athènes, dans le quartier d’Ambelokipi,
le personnel a expliqué que la crise économique avait eu pour conséquence
une pénurie de matériel. Les travailleurs de la santé craignent que des
projets soient en train d’être élaborés qui résulteraient dans la
privatisation de l’hôpital alors même que la majorité des gens n'ont pas les
moyens d'avoir accès à des soins médicaux privés. Un hôpital attenant a déjà
été privatisé et ses employés sont maintenant rémunérés différemment et ont
des contrats différents de ceux du personnel de la Croix Rouge d’Athènes.
Maria travaille à l’hôpital depuis 22 ans et
supervise le service de chirurgie. Elle a dit, « Il y a eu pas mal de
baisses de salaires. Avec la prime que je reçois et avec 22 ans de service,
mes revenus se situent maintenant à 1.200 euros par mois. En raison des
réductions, c’est 500 euros de moins que ce que je percevais avant. Ici, la
plupart des travailleurs ne gagnent qu’entre 500 et 700 euros par mois »
Une grand nombre d’infirmières employées à
l’hôpital sont issues de centres de formation professionnelle et n’ont pas
de diplôme universitaire. Maria a expliqué que la plupart de ces dernières
ne gagnaient maintenant pas plus de 640 euros, soit entre 300 et 400 euros
de moins que ce qu’elles gagnaient avant.
Les infirmières travaillent 40 heures ou plus par
semaine. Si les infirmières travaillent de nuit, la rémunération
supplémentaire n’est que de 10 euros par équipe de nuit. « Une infirmière a
travaillé huit nuits en décembre et n’a gagné que 90 euros de plus, » a dit
Maria.
Le manque de personnel a conduit à une situation
où seules deux infirmières travaillent de nuit et sont responsables d'une
quarantaine de patients à l’hôpital. Maria nous a dit qu’elle s’attendait à
de nouvelles suppressions de postes à l’avenir.
Demny a expliqué, « Lorsque j’ai débuté comme
infirmière il y a deux ans, je gagnais 980 euros. Maintenant, en raison des
réductions de salaire, je ne perçois plus que 560 euros et j’ai une petite
fille à charge. »
Un phénomène croissant en Grèce est le fait que
des enfants sont obligés de se faire aider matériellement par leurs parents
alors que ces derniers éprouvent eux-mêmes des difficultés à joindre les
deux bouts. Demny a expliqué qu’elle se sentait humiliée parce qu’elle
n’était plus en mesure de pourvoir à ses besoins et qu’elle avait dû envoyer
sa fille vivre chez ses parents. « A une époque j’envoyais de l’argent à mes
parents pour les aider et maintenant c’est eux qui m’envoient de l’argent, »
a-t-elle dit.
Demny a dû réduire toutes ses dépenses ordinaires
vu que le loyer de son appartement coûte à lui seul plus de 300 euros par
mois. « Il ne me reste même pas 40 ou 50 euros à la fin du mois et je ne
pense que cela va s’améliorer. Je pense que ça va s’empirer, » a-t-elle dit.
Malgré cette situation, Demny ne veut pas quitter
son emploi parce que le chômage est tellement élevé et qu’elle bénéficie
encore du statut de fonctionnaire.
A la question de savoir si elle avait un message à
faire passer aux lecteurs du World Socialist Web Site Maria a dit,
« Je souhaite que la situation en Grèce n’arrive pas aux autres travailleurs
en Europe. »
On voit les effets terribles de la calamité
sociale qui s’est abattue sur la Grèce dans l'état grave, entre la vie et la
mort, des patients qui viennent pour se faire soigner à l’hôpital a dit
Vissaria, doctoresse qui travaille depuis un an à la Croix Rouge. « Nous
nous trouvons maintenant dans une situation en Grèce où les gens viennent
aux urgences des hôpitaux lorsqu’ils sont à deux doigts de la mort. »
« Ce que je veux dire, c’est qu’ils ne vont pas
voir un médecin privé à cause des frais. Maintenant, ils ne vont voir un
médecin que quand ils sont sérieusement malades. Lorsqu’ils ont quelque
chose qu’ils jugent bénin, ils ne vont pas voir un médecin privé. En Grèce
si vous allez chez un médecin privé vous devez débourser 40 euros par
visite. Et donc, quand elles viennent ici certaines personnes sont dans un
état très, très grave.
« Il y a des gens qui viennent ici qui ont perdu
leur emploi, des gens qui n’ont pas mangé depuis longtemps, des gens qui
sont seuls et malades et qui ne peuvent recevoir d’aide de nulle part. Nous
avons des personnes âgées qui ont des enfants mais les enfants n’ont
maintenant plus l’argent pour soutenir leurs parents et leurs procurer des
soins de santé.
« Nous avons beaucoup de problèmes ici. Nous avons
de moins en moins de matériel médical. Nos salaires sont beaucoup plus bas
qu’avant. Mon salaire a été réduit de 300 euros par mois. Nous avons dû tout
restreindre. Nous arrivons à payer nos factures mais il n’y a plus d’argent
pour rien d’autre. »