La lutte des travailleurs contre l’attaque massive lancée par le
gouvernement du gouverneur Scott Walter au Wisconsin entre à présent dans sa
troisième semaine. L’opposition aux exigences du gouverneur en faveur
d’énormes coupes dans les dépenses sociales et l’abrogation
unilatérale des droits des travailleurs demeure écrasante. Malgré le froid
mordant, plus de 100.000 travailleurs ont manifesté le samedi 26 février à
Madison, la capitale de l’Etat. Les manifestations de ce jour étaient de
loin les plus vastes tenues jusque là. Il y a un sentiment grandissant pour une
grève impliquant tous les travailleurs du secteur privé et public à travers
l’Etat.
La signification et les implications de ce conflit s’étendent
bien au-delà du Wisconsin. Les actions du gouvernement Walker qui sentent
définitivement la dictature sont le fer de lance d’un assaut impitoyable
contre la classe ouvrière. On est en train d’intensifier, trois ans après
le début de la pire crise économique depuis la Grande dépression des années
1930 – déclenchée par les spéculations financières criminelles de
l’oligarchie capitaliste qui dirige les Etats-Unis –
l’attaque des niveaux de vie et des droits démocratiques de la population
laborieuse. Les intérêts des entreprises et des banques qui avaient été les
bénéficiaires du sauvetage en 2008-2009, à hauteur de plusieurs milliers de
milliards de dollars, exigent que la faillite d’Etats et du pays en
général qui en a été la conséquence soit payée par la classe ouvrière.
C’est cela l’essence politique et sociale des exigences du gel
des salaires et des coupes actuelles, de la réduction d’acquis vitaux
durement gagnés, de la suppression d’innombrables milliers
d’emplois et de l’élimination de services socialement cruciaux. Les
coupes budgétaires qu’on prépare, exige et effectue menacent de repousser
la classe ouvrière non seulement des décennies, mais encore des générations en
arrière.
Dans ce contexte historique, Waker n’est que l’un des
représentants politiques les plus implacables de l’oligarchie patronale
et financière qui considère on ne peut plus sérieusement un retour aux années
1920, à la période précédant le grand soulèvement de la classe ouvrière des
années 1930 ayant mis en mouvement la transformation sociale des Etats-Unis.
Pour Walker, il ne suffit pas de réduire les acquis des enseignants et
d’autres employés du secteur public et de supprimer les soins de santé et
les programmes sociaux. Il exige aussi la fin de toute forme de convention
collective même dans la forme inefficace et infâme dans laquelle elle est
pratiquée par les syndicats existants. Pour Walker – et les sections
irresponsables de la classe capitaliste au nom desquelles il parle –
l’objectif central n’est pas seulement les syndicats existants. Son
but véritable est d’éliminer toute forme et possibilité de résistance
organisée de la classe ouvrière aux dictats de l’oligarchie financière-corporative
et de l’Etat capitaliste.
La réaction des organisations syndicales (AFSCME, NEA et AFL-CIO) au
Wisconsin et sur le plan national à cette attaque est lâche, mensongère et politiquement
banqueroutière. Dès le début, elles ont agi comme s’il n’existait
aucun lien entre l’assaut de Walker contre les intérêts des syndicats
– telle sa demande d’éliminer la convention collective et de mettre
fin au système de recouvrement à la source des cotisations – et
l’attaque contre les salaires, les prestations et les emplois des
travailleurs du service public. Elles ont maintes fois insisté pour dire qu’elles
étaient d’accord avec ces attaques tant que le gouverneur ne dérangeait
pas les prérogatives juridiques, établies de longue date, des syndicats.
Derrière cette réaction amorphe des syndicats à l’attaque de Walker il
y a un calcul politique bien défini. Les dirigeants syndicaux savent
parfaitement qu’une résistance aux exigences de coupes budgétaires
massives du gouvernement Walker créerait un précédent qui se mettrait en
travers des accords en train d’être élaborés avec des gouverneurs démocrates
dans un grand nombre d’autres Etats, dont certains sont bien plus importants.
Lors d’une interview accordée à l’émission « Meet the Press »
de la chaîne de télévision NBC, le président de l’AFL-CIO, Richard
Trumka, a souligné que les syndicats étaient disposés à assumer la
responsabilité de la crise économique. « Et ceux d’entre les
gouverneurs, » a-t-il ajouté « qui veulent collaborer avec leurs
employés peuvent vraiment chercher des solutions aux problèmes. Et nous pouvons
les résoudre. »
Quel est alors l’argument fondamental de l’AFL-CIO? Il n’y
a aucun besoin, dit-elle, d’attaquer les prérogatives juridiques et les
cotisations comme base financière des syndicats. L’AFL-CIO a la volonté
de collaborer avec les gouvernements des divers Etats, tant démocrates que
républicains, pour atteindre leurs objectifs financiers et budgétaires, et elle
est pleinement disposée à le faire.
Mais que devient la classe ouvrière dans tout cela ? La réponse
est : elle est privée d’emplois, privée de rémunérations et de
salaires adéquats, privée de prestations et de services sociaux essentiels, privée
d’écoles et d’hôpitaux adéquats, privée de droits démocratiques
fondamentaux et privée d’avenir.
Dans cette situation critique, la classe ouvrière n’a pas d’autre
choix que de poursuivre et d’étendre sa lutte. Mais, elle doit
reconnaître contre qui et quoi elle lutte et comprendre ce pourquoi elle lutte.
Les travailleurs ne sont pas seulement confrontés à divers gouverneurs
réactionnaires. La classe ouvrière est bien plutôt forcée de s’engager
dans une grande lutte de classe contre le système capitaliste. Ce conflit a de
considérables implications politiques et finalement révolutionnaires.
Les exigences du gouverneur Walker et des gouvernements d’Etats à
travers le pays, tant démocrates que républicains et, il faut le souligner, du
gouvernement Obama lui-même, témoignent de la faillite du système capitaliste
de profit. L’assujettissement du niveau de vie des travailleurs et des
besoins sociaux essentiels d’une société moderne et immensément complexe
à l’insatiable appétit pour le profit et l’accumulation de richesse
personnelle des capitalistes n’est plus supportable.
Les travailleurs qui réfléchissent aux conditions existant aux Etats-Unis et
dans le monde doivent arriver à la conclusion que rien moins qu’un
changement fondamental de l’organisation économique et politique de la
société est nécessaire – c’est-à-dire un passage du capitalisme au
socialisme.
Le développement de la lutte des travailleurs au Wisconsin, l’extension
de celle-ci dans tout le pays et dans le monde, dépend de manière cruciale de
la lutte pour un programme et une perspective socialistes. Le SEP (Socialist
Equality Party), le World Socialist Web Site et l’ISSE (International Students for Social
Equality), parrainent en avril une série de conferencespartout
dans le pays pour discuter des formes organisationnelles et du programme
politique requis pour cette nouvelle période de lutte de la classe ouvrière.
Nous invitons instamment tous nos lecteurs et tous ceux qui veulent mener une
lutte sérieuse contre la politique de la classe dirigeante de prévoir dès
aujourd’huide prendre part à ces conférences.