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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Un instrument de l'impérialisme: le Nouveau parti anticapitaliste français soutient la guerre contre la Libye

Par Alex Lantier
28 mars 2011

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Le Nouveau Parti anticapitaliste et ses co-penseurs du Secrétariat unifié de la Quatrième Internationale pabliste (SUQI) ont déclaré leur soutien à l'agression militaire non provoquée contre la Libye par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France. Ils ont impudemment aligné leur politique sur celle des grandes puissances, en affirmant explicitement que la nature impérialiste de l'assaut contre la Libye était hors de propos.

L'article du 21 mars (« Bombs over Libya », Des bombes sur la Libye) de Bertil Videt, membre de l'Institut de formation et de recherche d'Amsterdam, publié sur le site Internet du SUQI, International Viewpoint, adopte pleinement la logique de guerre de l'impérialisme français - en d'autres termes, que l'intervention visant à soutenir le Conseil national de Benghazi contre le régime du colonel Mouammar Kadhafi est motivée par des préoccupations « humanitaires ».

L'article commence ainsi: « L'action militaire contre la Libye est-elle nécessaire et utile pour stopper le massacre du régime de Kadhafi contre son adversaire ou est-elle une agression impérialiste poussée par des intérêts stratégiques propres et qui ne feront qu'aggraver les choses pour le peuple libyen ? La gauche internationale est partagée sur cette question. Et la question est vraiment complexe et on ne peut y répondre par des slogans tout prêts sur le fait d'être toujours opposé aux agressions impérialistes ou en faveur d'un soutien inconditionnel aux rebelles. »

La question posée par Videt est d'une mauvaise foi flagrante. Le SUQI est parfaitement conscient que cette guerre est un acte d'agression impérialiste et il la soutient. Videt lui-même reconnaît furtivement que «Bien sûr nous savons tous que la France, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis ne sont pas poussés par une soudaine gentillesse - mais par des intérêts stratégiques dans cette région riche en pétrole. »

Il remarque même « le deux poids et deux mesures de l'Occident » qui affirme être en train de bombarder la Libye pour sauver des vies : « Comment pouvons nous croire [que] des dirigeants qui ont défendu Moubarak jusqu'au dernier moment et qui refusent même encore de condamner le recours de la monarchie du Bahreïn à la force létale contre des manifestants pacifiques [sont] véritablement touchés par la situation des droits humains en Libye ? »

Après avoir soulevé ces arguments, Videt les rejette tout simplement en bloc : « Aucun de ces points ne sont, en soi, des arguments pour s'opposer à la zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye. Le rejet de l'intervention militaire de l'Occident en Libye requiert une meilleure analyse des risques et des scénarios possibles au sol. Et il nous faut effectivement répondre à quelques objections plutôt problématiques - à savoir le fait que les dirigeants des forces d'opposition ont réclamé une zone d'exclusion aérienne et que nous devons fournir de meilleures alternatives que l'affichage de blogs de solidarité et d'anti-impérialisme. »

Avec une telle déclaration, le SUQI proclame son hostilité ouverte au marxisme qui insiste sur le fait  que l'attitude d'un parti de la classe ouvrière à l'égard de la guerre doit se fonder sur le caractère social et de classe des régimes qui la mènent. Les marxistes sont opposés par principe à une guerre menée par des grandes puissances impérialistes telles les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France contre un ancien pays colonial opprimé comme la Libye. Videt, par contre, est beaucoup trop pressé pour se préoccuper de principes politiques.

« L'alternative » qu'il propose, et qui est tout à fait conforme avec la politique des puissances impérialistes, est d'armer les forces soutenues par l'Occident en Libye : « Nous pouvons et nous devons plaider pour l'envoi de système de défense antiaérienne et autres armements aux rebelles - pour qu'ils puissent mieux faire face aux forces de Kadhafi qui ont été armées par l'Occident pendant des décennies. Heureusement, l'actuel gouvernement intérimaire en Egypte (dont la frontière est proche de Benghazi) expédie des armes de l'autre côté de la frontière. »

Le porte-parole du NPA, Olivier Besancenot, a fait des propositions identiques en suggérant que la France procure des fusils à l'opposition libyenne : « Notre solidarité pleine et entière va au peuple libyen auquel il faudrait donner les moyens de se défendre, les armes dont il a besoin pour chasser le dictateur, conquérir la liberté et la démocratie. »

Les déclarations du SUQI visent à renforcer, en France et au-delà, la ligne du gouvernement et des médias: On ne peut s'opposer au principe de l'intervention parce que celle-ci se fait dans le but sacré de défendre les forces « révolutionnaires » anti-Kadhafi. Cette position a été exprimée le plus crûment dans une interview (« What's happening in Libya ? », Que ce passe-t-il en Libye ?) de Gilbert Achcar de l'Ecole des études orientales et africaines de l'université de Londres, et publiée par le NPA et le SUQI.

Il a dit, « Si Kadhafi était autorisé à poursuivre son offensive militaire et s'il prenait Benghazi, il y aurait un énorme massacre. Nous sommes dans un cas où une population est vraiment en danger et où il n'y a pas d'autre alternative pour la protéger. L'attaque des forces de Kadhafi est une question d'heures ou de jours. On ne peut, au nom de principes anti-impérialistes, s'opposer à une action qui va empêcher le massacre de civils. »

Les termes même employés par le SUQI apposent un caractère petit-bourgeois, pro-impérialiste à sa perspective. Ce qui se passe en Libye n'est pas une « situation de droits de l'homme » et l'objectif principal des puissances occidentales n'est pas d'imposer une « zone d'exclusion aérienne » pour maintenir la paix à Benghazi.

Tandis que les forces occidentales détruisent de vastes sections des forces aériennes et de l'armé de la Libye, et font pleuvoir des bombes et des missiles de croisière sur Tripoli et d'autres villes libyennes, elles sont en train de monter une intervention massive dans la guerre civile en Libye. Leur but est d'utiliser la clique droitière qui dirige Benghazi, et que le SUQI présente continuellement comme « le peuple libyen » et sur la nature de laquelle il reste quasiment silencieux, pour s'emparer de la Libye. Ceci produira un régime pro-occidental complaisant dans une région stratégique riche en pétrole qui est ébranlée par des luttes révolutionnaires contre des dictateurs soutenus par l'Occident.

En avançant de faux arguments « humanitaires » pour justifier la guerre libyenne, le NPA et ses condisciples du SUQI se révèlent être des partis bourgeois pro-impérialistes.

De tels motifs « humanitaires » pour la guerre ont été invoqués tout au long du 20ème siècle, souvent sans aucune preuve, pour légitimer des invasions impérialistes. Un exemple récent a été le bombardement du Kosovo par l'OTAN en 1999, justifié par des affirmations grossièrement exagérées publiées dans la presse selon lesquelles le président yougoslave Slobodan Milosevic massacrait des centaines de milliers d'Albanais kosovars. Bien que le bilan des morts civils dû aux opérations yougoslaves au Kosovo soit à présent estimé être de l'ordre de plusieurs centaines, l'OTAN l'avait utilisé comme prétexte pour bombarder la Serbie et le Kosovo tout en soutenant l'organisation criminelle de l'Armée de libération du Kosovo (UCK) - qui se trouve pratiquer aujourd'hui activement un trafic illégal d'organes.

Avant tout, si les principes politiques doivent être ignorés et si seul le critère de « sauver des vies » est retenu pour évaluer le lancement des guerres par les puissances occidentales, alors il n'existe pratiquement aucun pays au Moyen-Orient, en Afrique ou en Asie dont le SUQI ne peut soutenir l'invasion. Dans des régions où chaque pays est confronté à des conflits ethniques et sectaires complexes, les puissances occidentales peuvent toujours sanctifier une invasion au motif de sauver la vie des forces qu'elles soutiennent.

Dans le cas de la Libye, le SUQI a commencé à jouer son rôle dès le début du lancement de la campagne de propagande pour la guerre, dans les pays impérialistes, et qui a démarré début en mars.

Le 3 mars - le lendemain de l'appel du Conseil national pour une intervention militaire de l'Occident en Libye - il a publié une déclaration, « Soutien à la révolution libyenne ! Kadhafi dégage, » en faisant l'éloge de la « lutte à mort entre le peuple et la dictature » qui avait lieu en Libye.

Cette agressivité dans le soutien à la guerre était d'autant plus significative que l'impérialisme français jouait un rôle prépondérant dans l'entrée en guerre. Mais à lire les commentaires du NPA ou du SUQI, on serait loin de se douter que la force dont ils prétendent qu'elle aiderait une « révolution » en Libye est le gouvernement droitier fortement impopulaire du président français, Nicolas Sarkozy.

Il est significatif de noter que de telles positions ont mis le SUQI en conflit avec des figures politiques qu'il présente depuis décennies comme des modèles: les régimes nationalistes bourgeois d'Amérique latine de Hugo Chavez au Venezuela, de Daniel Ortéga au Nicaragua et de Fidel Castro à Cuba. Forts d'une longue expérience de coups d'Etat soutenus par les Etats-Unis - le coup d'Etat militaire de 2002 contre Chavez au Venezuela, l'insurrection contre-révolutionnaire des Contras dans les années 1980 au Nicaragua et l'invasion de la Baie des Cochons à Cuba - les régimes de l'Amérique latine ont mis en garde contre le risque d'une intervention occidentale.

De ce fait, la déclaration du SUQI a également dénoncé les nationalistes d'Amérique latine. Elle dit : « Nous sommes en total désaccord avec les prises de positions de Hugo Chavez, Daniel Ortéga et Fidel Castro. Fidel Castro a dénoncé le risque d'une intervention de l'impérialisme nord-américain au lieu de soutenir la lutte du peuple libyen. Quant à Hugo Chavez il a réitéré son appui au dictateur Kadhafi. »

Le SUQI a tenté d'envelopper sa position pro-impérialiste dans un jargon pseudo-gauche : « Ces prises de positions sont inacceptables pour les forces révolutionnaires, progressistes et anti-impérialistes du monde entier. On ne s'oppose pas à l'impérialisme en soutenant des dictateurs qui massacrent leurs peuples en révolution. Cela ne peut que le renforcer. La tâche fondamentale du mouvement révolutionnaire, à l'échelle internationale, est de défendre ces révolutions et de s'opposer à l'impérialisme en soutenant ces révolutions, pas les dictateurs. »

Ce passage est un exemple classique du verbiage trompeur du SUQI. Les déclarations des nationalistes d'Amérique latine étaient inacceptables au SUQI non pas parce qu'il se prononçait en faveur de « forces anti-impérialistes, » mais parce qu'il s'apprêtait à soutenir une guerre réactionnaire de l'impérialisme occidental.

Pour contrer les avertissements lancés par les nationalistes d'Amérique latine d'un risque de guerre, le SUQI a même publié une déclaration dénonçant spécialement la « faillite du chavisme » rédigée par son parti belge, le LCR-SAP (Ligue communiste révolutionnaire-Socialistische arbeiderspartij, [Parti ouvrier socialiste])

Il condamne Chavez et Castro pour impliquer que « l'urgence n'est pas à dénoncer le carnage de Kadhafi contre son peuple et de choisir le camp du soulèvement populaire [mais] de manifester contre l'intervention future et hypothétique de l'OTAN. Au nom de la menace d'un crime à peine esquissé, il faudrait donc ' faire silence ' sur un crime actuel bien réel. »

Comme les événements le montrent, il n'y avait rien d'« à peine esquissé » ou d'« hypothétique » concernant le risque que les puissances de l'OTAN puissent attaquer la Libye. Néanmoins, le SUQI a  nié, de façon hystérique, que l'intervention impérialiste était une possibilité.

Rejetant de tels avertissements comme étant « des thèses conspirationnistes délirantes », la LCR-SAP écrit : « il n'y a rien de 'singulier' ou de 'particulier' dans la révolution en Libye, nul complot étranger ourdi par la CIA ou par Ben Laden ; elle s'intègre au contraire pleinement dans le processus de la révolution arabe qui déferle dans toute la région. »

Même à ce moment-là, de tels commentaires étaient clairement faux. Durant la semaine qui a précédé la publication du document de la LCR-SAP, la presse regorgeait d'articles disant que les forces spéciales britanniques, italiennes et françaises opéraient en Libye sous couvert de vols « humanitaires » à destination de la Libye. Mais avec le déclenchement de la campagne de bombardement de masse par les puissances occidentales, le rôle de propagandiste de guerre impérialiste du SUQI est démasqué.

Alors que le gouvernement français faisait pression juste avant la guerre pour obtenir une résolution de l'ONU contre la Libye, le NPA collaborait avec ses partenaires habituels de la « gauche » bourgeoise française, menée par le Parti socialiste (PS), à tenter d'avancer un argument humanitaire pour une attaque contre la Libye.

Le NPA a cosigné des déclarations sur la Libye avec le Collectif de solidarité avec le peuple libyen - un groupe constitué principalement de petits partis satellites du PS.

Comme il fallait s'y attendre, compte tenu de l'hypocrisie de la « gauche » droitière française, « solidarité avec le peuple libyen » signifie soutenir une guerre menée contre lui. Le 17 mars, jour du vote de la résolution 1973 au Conseil de sécurité de l'ONU, elle a publié un communiqué pour demander la « reconnaissance du Conseil national » comme « seul représentant légitime du peuple libyen. »

Plusieurs satellites du PS constituant le Collectif, tels Europe-Ecologie et le Parti de Gauche (PG) de Jean-Luc Mélenchon, issu d'une récente scission d'avec le PS, ont publié des déclarations officielles soutenant la guerre contre la Libye. Europe-Ecologie, partenaire de longue date du PS au gouvernement, affirme que « le droit international en sort renforcé. »

Quant à Mélenchon, il a dit au quotidien Libération qu'il était « en faveur de l'opération militaire en Libye, » en expliquant : « J'approuve l'idée qu'on brise le tyran pour l'empêcher de briser la révolution. »

En colportant l'argument que l'intervention occidentale en Libye vise à sauver des vies, ces partis ne font que recycler les arguments qui ont été émis tout à fait ouvertement par des stratèges influents de l'impérialisme français. Ainsi, l'ancien ministre des Affaires étrangères, Hubert Védrine du PS, qui avait supervisé la participation de la France à l'invasion en Afghanistan en 2001, a qualifié d'« historique » la résolution 1973 de l'ONU - que les puissances occidentales ont adoptée hâtivement pour justifier leur attaque contre la Libye.

Védrine l'a louée parce qu'elle permet aux grandes puissances d'envahir des pays sous le couvert de protéger des civils. Il a dit au Nouvel Observateur que la résolution 1973 de l'ONU était « la mise en ouvre d'un principe adopté par l'ONU il y a quelques années sous la direction de Kofi Annan, c'est la responsabilité de protéger : un concept sur lequel les membres de l'ONU s'étaient mis d'accord afin de mettre fin au débat sensible sur le droit d'ingérence. »

Pour dire les choses plus franchement, des diplomates impérialistes, comme Védrine ont décidé qu'il est préférable de ne pas s'arroger le droit d'attaquer et de conquérir des pays à volonté. Au lieu de cela, ils préfèrent habiller ce principe du manteau de «protéger » des civils dans les pays qu'ils attaquent. Cette formulation a non seulement l'avantage d'obscurcir ce qui se passe, mais permet à la classe dirigeante de mobiliser le soutien actif de toute une couche sociale de la petite bourgeoisie « humanitaire » représenté par le SUQI et les partis avec lesquels il collabore en France et internationalement.

Ces forces soutiennent les guerres et ce bien qu'ils soient tout à fait conscients de leurs mobiles droitiers et du caractère droitier des alliés de l'impérialisme au sein de la Libye. Ceci est le plus clairement illustré par le contenu de l'interview d'Achcar publié par le SUQI.

Achcar a fait remarquer que l'opposition est «  très hétérogène. Toutes ces forces disparates sont unies par un rejet de la dictature, un désir de démocratie et de respect des droits de l'Homme. Au-delà, il y a de nombreux projets différents. En Libye plus particulièrement, il s'agit d'un mélange de militants pour les droits de l'Homme, d'intellectuels, de courants tribaux et de forces islamiques - un éventail assez large donc. Le mouvement libyen comprend aussi des secteurs du gouvernement et des forces armées qui ont rompu avec le pouvoir et rejoint l'opposition. »

Cette description de la composition sociale du Conseil national anéantit les affirmations cyniques d'Achcar, Videt et Cie de lutter pour la révolution en Libye. En fait, on trouve parmi les dirigeants du Conseil national rebelle, l'ancien ministre de la Justice, Mustafa Abdel Jalil et le général Abdel Fattah Younes al Obaidi, le commandant de l'unité libyenne Thunderbolt qui s'était entraînée avec les forces spéciales britanniques SAS. De tels individus, tout comme les divers chefs tribaux et les Islamistes siégeant au Conseil national, sont loin d'éprouver un « désir » de démocratie.

Le Conseil national ne représente pas une continuation des luttes révolutionnaires de la classe ouvrière d'Egypte et  deTunisie. Dans la mesure où elles étaient d'authentiques protestations populaires dans les tous premiers jours de la crise libyenne - avec l'apparition de quantité de reportages sur des manifestations de jeunes et des grèves dans le secteur pétrolier - les forces du Conseil national les ont dirigées dans une tout autre direction.

Elles ont cherché à ne pas développer un mouvement de masse politique contre le régime, mais une lutte militaire au sein du régime contre les forces loyales à Kadhafi avec l'aide de l'impérialisme occidental. Elles ont publié maintes déclarations réclamant des frappes aériennes et une intervention en Libye dont le but serait de les installer au pouvoir.

Si le le Conseil national accédait au pouvoir, il constituerait une base de la réaction pro-impérialiste contre les luttes révolutionnaires de la classe ouvrière se développant dans la région - en particulier chez les voisins de la Libye, l'Egypte et la Tunisie. Ceci s'exprime le plus clairement par sa collaboration avec l'armée égyptienne soutenue par les Etats-Unis, et qui préside une dictature qui tente de mettre un terme aux grèves et aux protestations massives qui ont entraîné la démission du président égyptien Hosni Moubarak le 11 février.

Le Conseil national est partie prenante, comme le NPA le sait parfaitement, d'une mainmise des entreprises occidentales sur le pétrole. Achcar a indiqué que « La réponse occidentale a bien sûr un petit goût de pétrole, » en ajoutant : « Seule la France est apparue comme très en faveur d'une action ferme, ce qui pourrait bien avoir à voir avec le fait que la France - contrairement à l'Allemagne (qui s'est abstenue sur le vote) [de la résolution 1973 au Conseil de sécurité de l'ONU], la Grande-Bretagne et, surtout l'Italie - n'a pas beaucoup d'intérêt dans le pétrole libyen et espère certainement avoir une plus grosse part du gâteau avec un régime post-Kadhafi. »

Toutefois, cet article montre clairement que les affirmations du NPA selon lesquelles les puissances occidentales attaquent la Libye pour sauver des vies sont une tromperie cynique et consciente. Il sait que l'objectif des puissances occidentales est le changement de régime ou, comme le montre Achcar, une Libye « post-Kadhafi. » Ceci permettra à la France et à d'autres puissances de piller le secteur pétrolier de la Libye qui avait été en grande partie nationalisé par Kadhafi entre 1971 et 1974 et d'installer un Etat client droitier à Tripoli.

Achcar - et en cela il s'exprime au nom de tous les « humanitaires » et « révolutionnaires » du NPA et aussi du SUQI - a néanmoins approuvé la guerre occidentale contre la Libye, la main basse sur le pétrole et tout le reste.

Le soutien du NPA et du SUQI pour l'intervention impérialiste en Libye marque un tournant fondamental dans l'évolution de ces partis, révélant plus clairement le caractère des forces pablistes qui ont fait scission en 1953 d'avec la Quatrième Internationale. Débutant comme une révision du trotskysme - une adaptation politique au stalinisme et au nationalisme du tiers monde, affirmant que suite à des pressions exercées sur elles ces forces pourraient être convaincues d'adopter une politique révolutionnaire - ces partis pablistes se sont développés dans le milieu social petit bourgeois des mouvements radicaux des années 1960 et 1970.

A l'époque en France, la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) - précurseur de l'actuel NPA qui a été créé en 2009 - avait en grande partie pour base des étudiants radicaux « trotsko-guévaristes. » Des membres de cette génération forment encore la direction hiérarchique du NPA (des figures comme Alain Krivine et François Sabado) tout comme d'anciens membres qui sont ses contacts dans les partis dirigeants, tels Henri Weber du PS.

L'évolution politique de ces tendances et des individus qui les dirigent reflète la trajectoire de toute une couche d'anciens radicaux de gauche de la classe moyenne - comme, dans le mouvement des Verts, Daniel Cohn-Bendit et l'ancien ministre allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer - qui,  d'étudiants radicaux mécontents sont devenus de riches carriéristes de la politique .

Pour trouver un précurseur historique aux personnalités se trouvant actuellement à la direction du NPA, il faudrait remonter à des figures comme Pierre Laval. Il avait débuté comme social-démocrate et s'était même demandé un temps si une adhésion au Parti communiste ne pourrait profiter à sa carrière politique, puis il avait rejoint la droite pour devenir le premier ministre du régime collaborationniste pro-nazi de Vichy durant la Deuxième guerre mondiale .

Les dirigeants de la LCR, et maintenant du NPA, ont adopté une approche pareillement cynique et carriériste à la vie et aux idées politiques, les adaptant aux besoins changeants de la classe dirigeante - même lorsque, comme c'est le cas à présent, cela implique le soutien à des guerres d'agression.

Ceci jette une lumière encore plus crue sur le changement de nom politique de la LCR en NPA effectué en 2009 sur la base d'un rejet explicite de l'association complètement fausse avec le trotskysme et que la LCR avait conservée en raison des origines « trotsko-guévaristes » de jadis de ses cadres dirigeants. Préparé durant des décennies, ce changement de nom a annoncé  l'intégration complète du mouvement dans la politique bourgeoise, sur l'orbite du PS, et de l'impérialisme français.

Le Comité international de la Quatrième Internationale avait écrit à l'époque : « L'objectif réel de la LCR en se liquidant, est en fait de liquider l'héritage politique de Trotsky, c'est-à-dire l'insistance sur l'indépendance politique complète de la classe ouvrière, l'internationalisme révolutionnaire, et une opposition indiscutable à la collaboration avec l'Etat bourgeois, les bureaucraties stalinienne et social-démocrate ainsi que toutes les variantes du nationalisme bourgeois et du radicalisme petit-bourgeois.

« Le choix par la LCR de l'anticapitalisme comme guide idéologique constitue, dans le contexte politique européen et, à plus forte raison, français, un pas en arrière colossal et vers la droite, vers le plus petit dénominateur commun. Politiquement vague, ce terme englobe toutes sortes de mécontentements sociaux, indépendamment de leur base sociale ou de leur orientation. Il peut être adopté par de larges sections de la petite bourgeoisie, de droite comme de gauche - il recouvre tout ce qui se trouve entre l'anarchisme proposé par Pierre-Joseph Proudhon au milieu du dix-neuvième siècle et le violent mouvement protestataire populiste de droite de Pierre Poujade au milieu du vingtième siècle. »

Dans ses écrits et ses déclarations, le NPA navigue sous un faux pavillon. Dans le but de faciliter ses négociations nationales avec les syndicats et autres partis bourgeois en France - avec lesquels il élabore divers accords électoraux et soutient la trahison par les syndicats des luttes des travailleurs - il dément explicitement qu'il est un parti trotskyste. Néanmoins, pour traiter de questions internationales, il se présente comme « Quatrième Internationale » sur ses sites Internet, tels International Viewpoint et Europe Solidaire Sans Frontières.

Le but de cette opération est de prendre à tort l'apparence d'un parti trotskyste afin d'acquérir une crédibilité de « gauche » à l'étranger. Son soutien conscient pour la guerre impérialiste montre toutefois que ce parti n'a plus aucun lien avec une politique socialiste et ouvrière d'aucune sorte. Le NPA, tout comme le groupe plus large des soi-disant partis de « gauche » en France dans lequel il opère et ses co-penseurs du SUQI, ont rejoint le camp de la réaction sociale.

 

(Article original paru le 25 mars 2011)

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