Des responsables du syndicat des Travailleurs unis de
l'automobile(en anglais, United Auto Workers, UAW) ont clairement indiqué qu'ils
acceptaient que les nouvelles conventions collectives avec les constructeurs automobiles
américaines étendent le nombre des travailleurs qui ont des salaires de misère.
Les négociations avec Ford, General Motors et Chrysler auront lieu cet été.
Cela ne fait que mettre en relief le caractère
complètement frauduleux des négociations qui prennent place et des conventions
collectives qui en résulteront. Tout ce cirque sert de couverture à la
collusion entre deux entités du monde des affaires - les sociétés de
l'automobile et l'agence de placement dirigée par les chefs syndicaux de les
UAW - au détriment des travailleurs. UAW Inc. organise l'embauche de nouveaux
membres et augmente ses revenus de cotisations en établissant que 14 dollars de
l'heure est la nouvelle référence pour toute l'industrie.
Les UAW a accepté pour la première fois le système de
salaire « à deux vitesses » en 2007, prétendant que les salaires de
14 dollars de l'heure - la moitié du salaire traditionnel des travailleurs -
étaient une mesure temporaire qui serait réservée pour un groupe restreint de
travailleurs nouvellement embauchés qui ne seraient pas sur la chaîne de
production. En 2009, les UAW a étendu ce bas salaire à toutes les nouvelles
embauches dans le cadre de son accord avec l'administration Obama lors de la
restructuration de GM et de Chrysler. Les UAW a ensuite signé un accord
similaire avec Ford afin de garder cette compagnie « compétitive ».
L'accroissement des salaires de misère pour les
travailleurs de l'automobile était une composante critique du programme
économique de l'administration Obama. Agissant au nom de l'élite financière,
l'administration voyait l'attaque sur les travailleurs de l'automobile comme le
déclenchement d'une vague de coupes de salaires et de l'augmentation de
l'exploitation de toute la classe ouvrière américaine. Obama n'a rien fait pour
s'occuper de la plus grande crise des emplois depuis la Grande Dépression,
permettant à la grande entreprise d'utiliser le chômage de masse pour pousser
les salaires vers le bas et couper dans les avantages sociaux à un rythme sans
précédent.
L'assaut sur les travailleurs de l'automobile n'a
cependant pas pris fin avec les conventions collectives de 2009. L'été dernier,
les UAW a commencé à étendre les bas salaires aux travailleurs actuels. Le
syndicat a tenté d'imposer une coupe salariale de 50 pour cent pour les
travailleurs à Indianapolis. Ensuite, derrière le dos des travailleurs de GM de
l'usine d'assemblage de Lake Orion en banlieue de Detroit, les UAW a accepté de
couper les salaires de moitié pour 40 pour cent des 1550 travailleurs de
l'usine.
Les plus bas salaires, dit les UAW, font partie d'un
« accord innovateur sur le travail » autorisé par les conditions du
sauvetage de GM afin de permettre à la société de produire, de façon rentable,
des petites voitures aux États-Unis plutôt qu'en Corée du Sud ou au Mexique.
Cette semaine, suite aux négociations collectives de les
UAW à Detroit, le vice-président de les UAW, Joe Ashton, qui est à la tête des
négociations des conventions collectives avec GM, s'est rendu à Lake Orion. Il
lui a été demandé si les syndicats étaient prêts à appliquer les salaires
réduits à d'autres usines. « Nous sommes ouverts à tout lorsque c'est le
temps de négocier pour garder des emplois », a répondu Ashton. « Nous
pouvons parler de salaires et d'avantages sociaux, mais s'il n'y a pas
d'emplois, les salaires ne veulent pas dire grand-chose.
Cette offre visant à étendre l'application du salaire
de 14 dollars l'heure serait liée aux efforts de les UAW pour convaincre GM à
rouvrir les usines de Janesville au Wisconsin et de Spring Hill au Tennessee,
et de maintenir la production à l'usine de Shreveport en Louisiane, qui doit
fermer ses portes en 2012. D'après la proposition de les UAW, le gros de la main-d'oeuvre,
sinon sa totalité, serait payé au salaire réduit.
Les UAW justifie depuis longtemps ses concessions en
salaires et en avantages sociaux comme un moyen pour « défendre les
emplois ». La prémisse implicite de cette position, qui n'est pas énoncée
ouvertement, est que la tâche du syndicat est d'assurer les bénéfices du
patronat, en aidant à appauvrir les travailleurs et en intensifiant leur
travail.
Le bilan de cette politique de capitulation et de
trahison est le déclin désastreux des emplois. Le nombre d'emplois à taux
horaire chez les trois grands constructeurs automobiles ont dégringolé de 1,5
million en 1979 à 372 000 en 1999, pour passer à 114 000 aujourd'hui.
Des villes entières, telles que Détroit, Flint et Cleveland, sont maintenant
dévastées.
Les constructeurs automobiles américains n'ont pas
l'intention d'augmenter significativement l'emploi. La restructuration de
l'industrie par les cadres de Wall Street faisant partie du groupe de travail
d'Obama sur l'automobile a changé le modèle d'affaires des compagnies de l'auto
afin d'assurer de gros retours sur les investissements même dans des conditions
d'une baisse de la demande et d'une réduction des parts du marché. La condition
préalable à la mise en ouvre de ce modèle a été une attaque brutale sur les
emplois et les conditions de vie des travailleurs de l'auto. Ce processus, supervisé
par les UAW, a généré des profits et des bonus record, comme les 56 millions de
dollars empochés l'an dernier par le PDG de Ford, Alan Mulally.
Le modèle d'affaires des UAW est de se vendre en tant
que fournisseur d'une main-d'ouvre à bon marché et hautement exploitée pour les
patrons de l'industrie. Avec un nombre de membres à son plus bas depuis sa
fondation en 1935, le syndicat a pour stratégie de croissance de convaincre les
géants de l'auto qu'ils peuvent faire plus d'argent en réimplantant sa
production aux États-Unis plutôt qu'en la maintenant en Asie, en Amérique
latine ou en Europe de l'Est, où les salaires sont misérables.
Les UAW ont aussi entrepris de convaincre Toyota, Honda
et d'autres constructeurs asiatiques et allemands qui possèdent des usines non
syndiquées aux États-Unis qu'il est dans leurs intérêts de faire entrer les UAW
dans leurs usines, car le syndicat peut garantir de bas salaires et une
productivité accrue, et il va tout faire pour étouffer la résistance des
travailleurs.
Essayant de plaire directement aux dirigeants de ces
sociétés, le président des UAW Bob King a récemment déclaré : « Nous
participons au succès des trois grands en affirmant que la direction et les
membres des UAW offrent la meilleure qualité, la meilleure productivité et la
meilleure assiduité au travail. Nous sommes vraiment dévoués au succès des
entreprises où nous représentons les travailleurs. »
En préparation pour les négociations de
contrats avec les trois grands, les UAW considèrent aussi des propositions pour
remplacer les augmentations de salaire de base avec un plan de paie à la
performance, qui lierait la rémunération à la productivité, aux améliorations
de la qualité et aux bénéfices. Cela viendrait saper l'obligation légale des
patrons de payer un salaire fixe et renverrait les travailleurs aux conditions
de l'esclavage industriel, contre lequel les travailleurs se sont battus il y a
70 ans.
Les United Auto Workers, comme l'appareil syndical officiel
dans son ensemble, a une relation antagoniste avec les travailleurs qu'elle
prétend représenter. Les médias et les groupes de pseudo-gauche qui défendent
les syndicats officiels continuent de parler de « négociations » et
de « syndicats » comme s'il y avait un conflit fondamental entre les
UAW et les patrons, et que les UAW étaient du côté des travailleurs. Ni
l'un ni l'autre n'est vrai.
Le terme « négociation » ne veut rien dire
lorsqu'on considère que les UAW détiennent une part importante de la propriété
des entreprises, s'identifie ouvertement avec leurs intérêts et impose des
clauses d'interdiction de grève et d'arbitrage exécutoire, qui criminalisent
toute résistance collective des travailleurs.
Il y a une énorme opposition qui se développe contre les UAW,
comme l'ont démontré les rébellions par les travailleurs de la base depuis
l'année dernière à Indianapolis et à Fremont, en Californie. De plus, il y a un
nouvel esprit de résistance dans la classe ouvrière dans son ensemble, qui est
mis en évidence par la bataille durant un mois au Wisconsin contre les attaques
incessantes des grandes entreprises sur l'emploi, le niveau de vie et les
droits en milieu de travail.
Les efforts des dirigeants syndicaux, qui sont en
partenariat étroit avec le Parti démocrate, ne seront pas en mesure d'empêcher
l'émergence de l'opposition de la classe ouvrière. Les travailleurs de
l'automobile, tout comme leurs frères et sours de classe dans tout le pays et à
l'étranger riposteront.
La situation des travailleurs de l'automobile est,
cependant, l'expression concentrée d'une crise de direction que confronte la
classe ouvrière dans son ensemble. Le succès de ces luttes dépend de la formation
de nouvelles organisations, des comités de travailleurs indépendants des
syndicats et contrôlés démocratiquement par les travailleurs eux-mêmes.
Mais surtout, les travailleurs ont besoin d'une nouvelle
perspective politique. Le rôle des UAW est inextricablement lié à son alliance
politique avec le Parti démocrate et le système capitaliste. Les UAW, comme
l'appareil syndical dans son ensemble, défendent entièrement le droit des sociétés
de gérer l'économie de manière à maximiser les profits des cadres et de Wall
Street. De là découlent les demandes des UAW que les
travailleurs de l'automobile acceptent leur propre appauvrissement.
La lutte pour défendre les emplois et les salaires des
travailleurs de l'automobile doit être liée à la lutte de la classe ouvrière
dans son ensemble afin de prendre le pouvoir politique et de transformer
l'économie sur la base des besoins sociaux et non le profit privé. Telle est la lutte pour le socialisme.