Selon l'agence des Nations unies pour les
réfugiés, UNHCR, 1.500 réfugiés libyens sont morts depuis le début en mars de
la guerre contre la Libye en tentant de traverser la Méditerranée pour rejoindre
l'Europe. Le 4 août, le journal Süddeutsche Zeitung a fait état d'un
bilan de 1.820 morts depuis le début de l'année.
Les victimes sont des personnes originaires
de Libye et d'autres pays africains qui tentent de fuir la misère économique,
la persécution politique ou d'échapper à la guerre, risquant par là leur vie.
Entassés dans de petites embarcations de fortune par des trafiquants peu
scrupuleux, ils se noient ou meurent de soif en mer.
La distance qui sépare l'île italienne de
Lampedusa, but de la plupart des bateaux de réfugiés, de la Tunisie, point le
plus proche de la côte africaine, est d'à peine 130 kilomètres. Jusqu'à la côte
libyenne, la distance est environ le double.
Dans cette région de la mer qui est
relativement petite croisent actuellement les plus importantes flottes du
monde. Une vingtaine de navires de guerre de dix pays de l'OTAN, dont plusieurs
porte-avions et porte-hélicoptères, soutiennent l'assaut contre la Libye. Ils
sont équipés de radars et d'autres technologies sophistiquées et sont capables
de détecter le moindre mouvement en mer. La région est aussi surveillée en
permanence par des avions de guet aérien AWASCS de l'OTAN qui peuvent détecter
les plus petits navires.
De plus, il y a les bateaux et les avions de
la police des frontières italiennes et de l'agence européenne aux frontières
extérieures Frontex, qui patrouillent dans les eaux entre Lampedusa et la côte
de l'Afrique du Nord afin de détecter et de renvoyer les bateaux de réfugiés.
Des réfugiés vulnérables auraient donc pu
être facilement détectés et secourus. On aurait tout à fait pu éviter ce grand
nombre de morts. Il s'agit là de personnes victimes de non assistance à
personne en danger qui est un délit pénal. En raison de la guerre contre la
Libye, l'OTAN les a contraints à fuir et lorsqu'il s'est avéré que leur chemin
de fuite était un piège mortel, l'OTAN les a abandonné à leur sort.
L'OTAN n'a pas simplement
« ignoré » les réfugiés. Elle a aussi refusé d'apporter son aide aux
réfugiés naufragés une fois qu'elle en a été avertie.
La semaine dernière, un tel cas a émergé et
la culpabilité de l'OTAN est apparue avec une telle évidence que même le
gouvernement italien qui effectue sa propre persécution des réfugiés, s'est
senti obligé de protester et d'exiger une enquête.
Le 4 août, les gardes-côte italiens ont
récupéré dans les eaux au Sud de l'île de Lampedusa un navire naufragé en bois
de 20 mètres de long et qui comptait près de 300 réfugiés à son bord. L'épave
avait dérivé en mer pendant une semaine avec un moteur en panne. Les conditions
sur le bateau étaient abominables. Selon des survivants, 100 personnes sont
mortes de soif et d'épuisement, et ont été jetées par-dessus bord. Les réfugiés
eux-mêmes étaient fortement déshydratés, nombre d'entre eux étaient dans un
état critique et ont été transportés par avion dans des hôpitaux en Italie.
Il se trouve que le bateau endommagé avait
déjà été détecté par un remorqueur chypriote qui avait envoyé un signal de
détresse mais qui avait ensuite poursuivi sa route. Les gardes-côte italiens
avaient alors alerté l'OTAN. L'OTAN a refusé d'aider les réfugiés bien que l'un
de ses navires se trouvait à à peine 27 nouds marins (50 km) du bateau
naufragé.
Le ministre italien des Affaires étrangères,
Franco Frattini, a accusé l'OTAN de non assistance à personne en danger et a
demandé une enquête sur cet incident. Dans le même temps, il a proposé
d'étendre le mandat de l'OTAN de manière a rendre l'OTAN responsable du
sauvetage de réfugiés de guerre civils. Ceci n'est toutefois que de la poudre
aux yeux. En vertu du droit international actuel chaque navire civil ou de
guerre doit en toutes circonstances prêter assistance à quiconque se trouve en
péril en mer.
Ce n'est pas la première fois que l'OTAN a
été accusée de négligence. Fin mars, des navires de l'OTAN auraient ignoré des
appels de détresse d'un bateau de réfugiés endommagé en provenance de Libye. Un
hélicoptère militaire avait repéré l'embarcation mais ne leur avait largué que
des bouteilles d'eau et des paquets de biscuits. Les réfugiés avaient attendu
en vain d'être secourus. Selon le journal britannique The Guardian, un
porte-avions qui se trouvait dans les parages n'avait pas non plus réagi.
Finalement, 61 personnes étaient mortes de soif.
L'opération de l'OTAN contre la Libye porte
le nom d'« Unified Protector » (protecteur unifié.) Elle est
officiellement justifiée comme étant une mission visant à « protéger les
civils » des attaques du gouvernement libyen. S'il y avait besoin d'une
preuve supplémentaire, le sort des réfugiés en Méditerranée assène le coup de
grâce à ce prétexte cynique pour une guerre impérialiste. La vie des réfugiés
et des civils est la dernières des priorités de l'OTAN.
Les gouvernements européens n'ont, eux non
plus, aucun intérêt à aider les réfugiés. Il serait facile de doter les navires
de moyens pour retrouver et sauver les réfugiés en Méditerranée et une telle
opération ne coûterait qu'une infime fraction des coûts quotidiens
qu'occasionne la guerre en Libye. Ceci n'est, toutefois, politiquement pas
souhaitable car les pays de l'UE craignent une augmentation du nombre de
réfugiés. Toute la politique européenne relative aux réfugiés vise à être
dissuasive