Les
grèves et les manifestations de masse contre les coupes dans les retraites sont
l'expression la plus récente et la plus développée d'une nouvelle étape dans la
lutte de classes: l'entrée de la classe ouvrière internationale en conflit
massif avec les attaques impitoyables contre les emplois et le niveau de vie
perpétrées par les capitalistes.
Ces
événements portent un coup puissant à toutes les déclarations selon lesquelles
la classe ouvrière est une force dépassée et la lutte de classe une relique du
passé. Une fois de plus, l'énorme puissance sociale de la classe ouvrière
commence à trouver une expression. La division fondamentale de la société
moderne, entre bourgeoisie et classe ouvrière, s'affirme dans le contexte de
l'effondrement du capitalisme mondial.
Aux
dires de tous, les grèves contre la législation qui allongerait l'âge de départ
à la retraite s'étendent. Dès le début de la semaine, les stations-service à
travers le pays commençaient à manquer de carburant du fait de la grève des
travailleurs des raffineries. Les chauffeurs routiers ont rejoint la
mobilisation, organisant des opérations escargot sur les principales autoroutes
du pays. Des centaines de lycées étaient fermés du fait des blocus lycéens. Des
manifestations de masse se déroulent ce mardi, faisant suite à des journées
d'action similaires durant la semaine passée qui ont fait descendre plus de
trois millions de personnes dans les rues.
L'extension
de la grève est la réponse de la classe ouvrière aux mesures répressives du
gouvernement Sarkozy, parmi lesquelles le recours au CRS pour briser les
blocages des raffineries organisés par les travailleurs. Les efforts des
travailleurs pour étendre la lutte et exercer leur puissance sociale les met en
conflit de plus en plus ouvert avec les syndicats qui cherchent à réduire les
actions de masse.
Les
grèves recueillent le soutien écrasant de la population française. Des sondages
montrent que 70 pour cent soutiennent les grévistes. Parmi les jeunes de 18 à
24 ans, ce soutien s'élève à 84 pour cent. La cote de popularité de Sarkozy par
contre est au plus bas.
Les
événements qui se déroulent en France sont des événements qui concernent le
monde entier. Ils font partie de cette atmosphère de résistance que l'on trouve
dans tous les pays. En Europe, on trouve une opposition de plus en plus
déterminée aux mesures d'austérité introduites dans tout le continent suite à
la crise de la dette du printemps dernier. Ceci inclut des grèves générales
d'une journée en Grèce et en Espagne. En Italie pendant le week-end des
centaines de milliers de personnes ont défilé à Rome pour protester contre les
mesures d'austérité.
La
ré-émergence de la classe ouvrière dans la lutte ne se limite pas à l'Europe.
La Chine a été secouée par les grèves des travailleurs de l'automobile; les
travailleurs du textile ont fait des actions de masse au Cambodge et au
Bangladesh; et les travailleurs de Foxconn en Inde ont fait grève malgré la répression
policière. Aux Etats-Unis, la rébellion gronde parmi les travailleurs de
l'automobile contre les réductions brutales de salaire préparées conjointement
par les entreprises automobile, le gouvernement et le syndicat United Auto
Workers.
La
classe dirigeante ne cède pas. La réponse du gouvernement Sarkozy face aux
grèves qui s'étendent est de se braquer et de répéter que les les coupes dans
les retraites se feront. Derrière Sarkozy, il y a les banques françaises et
européennes qui ont mis en garde que si les coupes n'étaient pas appliquées
cela remettrait en question la notation en AAA de la France concernant sa
dette. Sur la scène mondiale, l'élite financière et patronale est déterminée à
imposer le coût total de la crise du système capitaliste à la classe ouvrière.
Ces
événements montrent qu'il n'y aura pas de restabilisation pacifique de
l'économie mondiale suite à la panique financière de septembre 2008.
L'effondrement du capitalisme mondial a ouvert la voie à une nouvelle ère de
soulèvement social et de révolution.
Le
conflit ouvert entre la classe ouvrière et l'Etat, qui représente les banques
et les entreprises, pose dans chaque pays la question du pouvoir. Dans
l'intérêt de qui la société sera-t-elle gouvernée?
Le règne
de longue date de la classe capitaliste, sur la base de la propriété privée des
moyens de production, signifie l'appauvrissement toujours plus grand de la
population, la destruction des droits démocratiques et des conflagrations
militaires toujours plus importantes et sanglantes.
L'alternative
est que la classe ouvrière prenne le pouvoir politique et réorganise l'économie
mondiale sur la base des besoins sociaux, mettant fin à la dictature des
banques et des grandes entreprises sur tous les aspects de la vie politique et
économique.
Cette
question du pouvoir politique ne concerne pas une période future lointaine.
Elle se pose de façon organique et nécessaire à partir de cette nouvelle étape
de la lutte de classes. Les revendications des travailleurs français et celles
de leurs frères et soeurs de classe dans le monde ne peuvent être satisfaites
autrement.
L'obstacle
majeur à la résolution de cette crise dans l'intérêt des travailleurs français
n'est pas le gouvernement Sarkozy qui est affaibli et isolé. C'est plutôt la
direction syndicale et ses alliés des partis socialiste et communiste et les
autres organisations petites-bourgeoises soi-disant de « gauche » qui
oeuvrent pour maintenir cette opposition dans le cadre du système capitaliste
et de ses représentants politiques. En bloquant la voie à une lutte politique
pour le pouvoir, ils travaillent à démobiliser la lutte et à démoraliser les
travailleurs.
Que ce
soit le Nouveau parti anticapitaliste en France, qui déclare dans sa plus
récente déclaration que suite aux grèves, « le gouvernement sera forcé de
capituler », le Parti la Gauche en Allemagne, SYRIZA en Grèce ou
l'International Socialist Organization aux Etats-Unis, l'objectif de toutes ces
tendances est le même: empêcher les travailleurs de comprendre la situation à
laquelle ils sont confrontés, de mobiliser leur force et de lutter pour le
pouvoir politique.
Pour que
la lutte en France soit victorieuse, cette lutte devra se libérer de l'emprise
étouffante des syndicats et prendre une voie indépendante. Il est nécessaire
que les travailleurs créent des organisations de lutte, des comités d'action,
pour lutter pour l'unité la plus large de toutes les sections de la classe
ouvrière et la participation active des étudiants, des jeunes, des professions
libéraleset des couches opprimées des classes moyennes dans une
offensive politique et de grèves contre le gouvernement et la classe
dirigeante. Les comités d'action feront campagne pour le développement d'une
grève générale visant à renverser le gouvernement de Sarkozy et à le remplacer
par un gouvernement de travailleurs sur la base d'un programme socialiste.
La
question clé est la construction d'une nouvelle direction dans la classe
ouvrière pour armer le mouvement d'un programme révolutionnaire clairement
établi. Ce que Léon Trotsky écrivait il y a 72 ans dans le programme fondateur
de la Quatrième Internationale s'applique pleinement aujourd'hui: La crise de
l'humanité se réduit à la crise de la direction révolutionnaire. La résolution
de la crise requiert la construction du Comité international de la Quatrième
Internationale dans tous les pays.