S'inclinant
face à l'intense pression exercée par les banques
internationales et l'Union européenne (UE), le gouvernement grec
dirigé par le premier ministre George Papandreou du parti
social-démocrate PASOK a accepté un deuxième paquet fiscal
d'augmentation des impôts et de coupes budgétaires d'un
montant total de 4,6 milliards d'euros (6,5 milliards de dollars ;
4,4 milliards de livres sterling). Pour justifier les dernières
mesures d'austérité de son gouvernement, Papandreou a comparé
la crise économique de la Grèce à une « situation de
guerre. »
« Ces décisions
sont nécessaires à la survie du pays et de l'économie »,
a dit Papandreou aux journalistes, « pour que la Grèce puisse
sortir du tourbillon des spéculateurs et de la diffamation et
pouvoir reprendre son souffle et continuer à se battre. »
Papandreou est venu au
pouvoir en octobre dernier en appelant à la colère de la
population contre la politique d'austérité droitière de son
prédécesseur, Kostas Karamanlis. Aujourd'hui, à peine six mois
plus tard, Papandreou a présenté les grandes lignes des attaques
les plus vastes contre le niveau de vie de la classe ouvrière.
Les mesures introduites
mercredi par le gouvernement comprennent une augmentation de la TVA
(taxe à la valeur ajoutée) de 19 à 21 pour cent, une réduction
de 10 pour cent du salaire des fonctionnaires du public, une
augmentation de la taxe sur le carburant, du prix des cigarettes et
de l'alcool, un gel des retraites et une réduction des primes de
vacances versées aux fonctionnaires.
Ces mesures auront des
conséquences tout particulièrement dévastatrices pour les
travailleurs à bas salaires, les chômeurs, les familles et les
retraités.
En commentant le nouveau
plan d'austérité grec, Jose Manuel Barroso, président de la
Commission européenne, a déclaré que le plan a confirmé que le
gouvernement grec était déterminé à « prendre toutes les
mesures nécessaires » pour réduire son déficit.
Après des semaines de
baisse constante de sa valeur, l'euro a à nouveau rebondi face au
dollar suite à l'annonce des nouvelles mesures. Les grandes
institutions financières ont aussi donné une approbation réservée
au plan d'austérité. L'agence de notation Standard &
Poor's a publié un communiqué disant que les marchés avaient eu
une vision trop pessimiste de la situation d'endettement
d'Athènes.
D'un
autre côté, le cours des valeurs a enregistré des baisses légères
à la bourse grecque, les investisseurs craignant les conséquences
des coupes budgétaires sur les entreprises.
La nouvelle tournée de
coupes budgétaires du gouvernement Papandreou fait suite à une
campagne orchestrée par l'UE, les banques et les gouvernements
européens menés par l'Allemagne pour presser Athènes de
rapidement accepter des mesures d'austérité supplémentaires.
Lundi, le commissaire
européen aux Affaires économiques et monétaires, Olli Rehn,
déclarait après des entretiens à Athènes que la Grèce était
confrontée « à un moment crucial de l'avenir de son pays.
Aucun membre de la zone euro ne peut vivre de façon permanente
au-dessus de ses moyens. » Dans un entretien en tête à tête,
Rehn a critiqué le gouvernement de ne pas avoir pris l'initiative
plus vite de convaincre les marchés financiers de la bonne volonté
de la Grèce de réduire son déficit et de rembourser ses dettes.
Les commentaires de Rehn
ont immédiatement été salués à Berlin. « La balle est
dans le camp de la Grèce à présent, » a dit un porte-parole
du gouvernement allemand.
La chancelière allemande,
Angela Merkel, a organisé mardi soir une réunion ministérielle
dans le but d'obtenir un accord pour un éventuel plan de
sauvetage d'urgence de la Grèce. Tout en niant officiellement que
le gouvernement allemand viendrait à l'aide de la Grèce, les
ministres et les banquiers européens sont engagés en coulisse dans
d'intenses négociations concernant précisément un tel plan
d'urgence.
Les politiciens de l'UE
tout comme les politiciens allemands s'inquiètent de savoir si les
mesures introduites par le gouvernement Papandreou suffiront à
éviter tout risque de faillite. Ils redoutent que toute défaillance
du gouvernement grec de rembourser ses dettes à temps puisse à son
tour entraîner la faillite d'une série d'autres Etats
européens à risque. Un tel développement menacerait non seulement
la monnaie unique européenne, l'euro, mais aussi l'UE
elle-même.
Par ailleurs, l'UE et
l'Allemagne hésitent à annoncer publiquement tout plan de
sauvetage parce qu'ils craignent que ceci ne relâche la pression
sur la Grèce d'appliquer de façon conséquente les coupes
drastiques exigées par les banques. De plus, suite aux plans de
renflouement massifs accordés aux banques européennes, tout plan
de sauvetage pour le paiement de la dette grecque encourue des
suites de la crise financière serait profondément impopulaire,
aussi bien auprès de l'électorat européen que de l'électorat
allemand. Par conséquent, le gouvernement allemand tient les
pourparlers qu'il mène pour l'organisation d'un tel plan de
sauvetage à l'écart des feux de rampe.
Selon un analyste
financier influent, les réductions budgétaires mises en avant par
le gouvernement grec « ont donné un élan aux marchés parce
qu'elles laissent supposer que la Grèce a sérieusement
l'intention de réduire son déficit. Elles permettent aussi aux
autres pays de la zone euro d'offrir une aide financière tout en
étant en mesure de dire à leurs contribuables qu'Athènes a pris
les mesures que l'UE lui avait demandées. »
Dans le même temps, il
existe de profondes divisions quant à la nature du plan de
sauvetage - notamment s'il doit être mis sur pied uniquement
par l'UE et les pays européens ou bien sur la base des ressources
du Fonds monétaire international (FMI) dominé par les Etats-Unis -
ce qui permettrait en fait à Washington de jouer un rôle dans les
affaires de l'euro.
Aucune
décision finale n'a été prise sur le plan mardi, mais un plan
de sauvetage purement européen semblerait être le scénario le
plus vraisemblable, selon le Financial
Times.
Mercredi, Merkel a
expressément salué les réductions annoncées par Papandreou qui
se rendra à Berlin vendredi afin d'entamer d'autres entretiens
avec le gouvernement allemand.
Alors que les marchés et
l'UE ont réagi favorablement à la dernière série de réductions
annoncées à Athènes, les experts financiers sont d'avis
qu'elles ne peuvent être que le début, dans un avenir proche, de
coupes budgétaires bien plus sévères encore.
Papandreou ne pourrait pas
se lancer dans de telles coupes drastiques sans le soutien politique
des syndicats grecs. Après la grève générale de mercredi
dernier, les dirigeants des deux principales fédérations
syndicales grecques ont clairement fait savoir qu'elles étaient
prêtes à « partager la douleur. » Les syndicats font
en sorte que les travailleurs puissent décharger leur colère dans
des débrayages de courte durée tout en canalisant dans des voies
nationalistes leur opposition à la politique de Papandreou.
Dans une interview
accordée la semaine passée au WSWS, Stathis Anestis, le
porte-parole de l'organisation syndicale des Travailleurs grecs
(GSEE), a souligné que « les fédérations et les syndicats
affiliés ont soutenu l'élection de ce gouvernement ». Il a
ajouté, « Nous ne tenons pas spécialement à faire grève. »
Dans une interview
accordée mercredi à CNN, Vasileios Xenakis, le secrétaire
international d'ADEDY (syndicat de la fonction publique), a
qualifié les récentes coupes budgétaires de « peu
équilibrées » et a mis en garde contre des problèmes
sociaux si les syndicats n'étaient pas associés au processus de
négociation.
Autrement dit, Yenakis et
les syndicats grecs ne rejettent pas ces coupes budgétaires. Au
contraire, ils offrent leurs services pour leur mise en vigueur dans
le but de semer la confusion dans l'opposition sociale.