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Europe La Grèce soumise au diktat de l’Union européenne Par Peter Schwarz Imprimez cet article | Ecrivez à l'auteur Pour la première fois depuis l’introduction de l’euro comme monnaie commune un pays a été soumis au diktat de l’Union européenne. La Commission européenne envisage de contrôler rigoureusement le programme d’austérité brutal par lequel le gouvernement grec projette de réduire d’ici deux ans son déficit budgétaire de 13 à 3 pour cent du produit intérieur brut. C'est un plan soumis à la Commission européenne par le gouvernement grec en janvier qui sert de base à cette quasi dictature de la bureaucratie communautaire. Ce plan prévoit une réduction générale de 10 pour cent des dépenses publiques, des réductions de salaire et des suppressions d’emplois dans les services publics, un allongement de deux ans de l’âge de départ légal à la retraite, des coupes dans le système de santé et une hausse des impôts, y compris une taxe sur les carburants. L’Union européenne a passé trois semaines à examiner le plan et a l’intention de vérifier son application dans des intervalles de un à trois mois. Au cas où le gouvernement grec s’écarterait du plan, Bruxelles menace d’imposer des mesures d’austérité encore plus radicales. Le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, Joaquin Almunia, a dit la semaine passée, « Nous soutenons et nous surveillerons de près la Grèce avec tous les moyens à notre disposition. » Il a ajouté que les « réformes » du système de santé, de la retraite et du marché de l’emploi devaient être appliquées « dans l'urgence ». « Tout écart entraînerait des exigences immédiates d’économies supplémentaires. » En pratique, cela signifie que les membres élus du parlement et du gouvernement grecs ne sont plus à mêmes de fixer eux-mêmes le montant des dépenses publiques qui affectent la vie de millions de citoyens. La souveraineté exercée par la Grèce sur sa politique budgétaire est à présent dans les mains des bureaucrates de Bruxelles, non élus et manquant de toute légitimité démocratique. Le journal Süddeutsche Zeitung a remarqué que « le parlement grec n’est plus en mesure de déterminer les dépenses publiques sans que les Européens jettent un regard sur ce qu’il fait. Les députés doivent faire passer en dodelinant de la tête les propositions du gouvernement pour réduire les salaires dans les services publics, pour faire des économies sur le droit à la retraite, pour la réforme du système fiscal et de la sécurité sociale ainsi que pour réduire d’environ 10 pour cent les dépenses publiques en général. Ils ont les contrôleurs de Bruxelles sur le dos. » Ces derniers « vérifient chaque chiffre, chaque vote. » Cette situation a une signification qui va bien au-delà de la Grèce. Ce pays méditerranéen sert de test pour l’ensemble de l’Union européenne ; il n’est que la partie visible de l’iceberg. L’Espagne, le Portugal, l’Italie et la Belgique affichent tous des niveaux d’endettement identiques et l’Autriche est toujours menacée de plonger dans l’abîme du fait de la crise bancaire qui perdure. Même les prétendus pays « forts » de la zone euro, tels l’Allemagne et la France affichent des déficits records. Ces dettes résultent des centaines de milliards que les gouvernements européens ont injectés dans les banques pour éponger les pertes spéculatives de ces dernières et leur permettre de refaire des profits. A présent, ces trous béants laissés dans les budgets doivent être comblés aux dépens de la classe ouvrière, la Commission européenne jouant le rôle de recouvreur de créances pour les banques. La Grèce représente une perspective particulièrement lucrative pour les prédateurs financiers. Elle doit payer 3,5 points de pourcentage de plus d’intérêt sur sa dette que l’Allemagne et cela bien qu’elle dispose de la même monnaie. Les banques qui empruntent de l’argent à la Banque centrale européenne à des taux avoisinant zéro sont en mesure de faire d’énormes profits en prêtant à la Grèce à des taux exorbitants qu’ils justifient par le risque d'une faillite de l’Etat grec. Le pays se voit maintenant catapulté dans le tourbillon de la spéculation internationale qui intensifie à son tour sa crise budgétaire. Selon le Financial Times, les fonds spéculatifs et les spéculateurs ont investi lundi dernier quelque 8 milliards de dollars pour parier sur la baisse de l’euro, la plus importante somme jamais investie dans l’attente d’une dégringolade de la monnaie. De nombreux médias ont fait le parallèle avec la spéculation menée en 1992 par George Soros contre la livre britannique et qui avait contraint le Banque d’Angleterre à dévaluer la livre sterling, permettant à Soros d’empocher un profit de plusieurs milliards. La crise en Grèce est en train d’attirer les représentants les plus parasitiques du capital financier et dont les méthodes ressemblent à ceux de la mafia, la Commission européenne servant de département d'étude aux parrains de la finance. De tels objectifs ne sont pas réalisables par la voie démocratique. Si le gouvernement du PASOK dirigé par George Papandreou est tout à fait prêt à coopérer avec l’Union européenne et manifeste sa volonté d’appliquer les coupes économiques radicales, la population grecque elle, a été privée par les chefs suprêmes de l’UE de toute possibilité d’influencer la politique par des moyens démocratiques. Il y a 36 ans que la dictature militaire grecque s’est effondrée après sept ans de règne sanglant. Un retour à une situation identique n’est pas exclu. La logique de la politique communautaire va dans ce sens. A présent, l’UE et les intérêts financiers qui se cachent derrière elle comptent sur le PASOK social-démocrate qui doit sa victoire électorale d’octobre dernier à l’opposition de masse contre le gouvernement Karamanlis de droite. Pour sa part, le PASOK compte sur les syndicats qui cherchent à contrôler l’opposition populaire grandissante en organisant des actions disparates et limitées dans le seul but de désamorcer la situation. Les syndicats à leur tour comptent sur les partis opportunistes soi-disant de gauche, le Parti communiste stalinien et l’alliance SYRIZA, pour leur procurer une couverture politique, étayer leurs efforts pour canaliser la colère populaire dans une direction nationaliste et empêcher le développement d’une perspective socialiste au sein de la classe ouvrière. Ces organisations sont toutefois de plus en plus discréditées et pourraient bien perdre le contrôle de la classe ouvrière. La probabilité d’une confrontation ouverte augmente. Les travailleurs doivent se préparer à une telle éventualité en tirant les conclusions politiques nécessaires. Le simple fait que toutes les décisions importantes concernant la politique grecque soient prises à Bruxelles montre qu’il n’y a pas de solution nationale à la crise. Les forces – qu'elles, soient situées à gauche ou à droite sur le spectre politique -- qui cherchent à duper les travailleurs en parlant d’une solution nationale les mènent dans une impasse. La mondialisation de la production et des marchés financiers a depuis longtemps coupé l’herbe sous les pieds de tous les programmes nationaux. Les travailleurs grecs doivent se tourner vers la classe ouvrière européenne et internationale dans une lutte pour un programme socialiste basé sur l’expropriation des principales institutions financières et des grands groupes qui sont à placer sous contrôle social et démocratique. Pour ce qui est des travailleurs en Allemagne, en France, en Italie, en Espagne et dans les autres pays de l’UE, ils doivent défendre la cause des travailleurs grecs. Si la Commission européenne réussit à appliquer son programme de coupes drastiques en Grèce, ils seront les prochains à être visés. Il y a cinq ans, les électeurs français et néerlandais avaient rejeté le projet d’une constitution européenne. Le comité de rédaction du World Socialist Web Site s’était opposé à la constitution en écrivant : « Ceux qui votent ‘oui’, ne voteront pas ‘pour l’Europe’, comme le prétendent les partisans de la Constitution. Ils légitimeront l’Etat bourgeois, la propriété privée capitaliste, le militarisme et la politique étrangère impérialiste. Ils légitimeront une Europe dans laquelle les intérêts vitaux de la population seront subordonnés aux profits des grands trusts et des grandes banques. » Depuis lors, la constitution européenne a été imposée par la petite porte sous la forme du Traité de Lisbonne et les avertissements lancés par le WSWS ont été entièrement confirmés. Ce que nous écrivions à l’époque est tout à fait valable aujourd’hui : « La seule alternative à l’Union européenne et à sa Constitution permettant à la classe ouvrière de faire valoir ses intérêts sont les Etats-Unis socialistes d’Europe. » (Article original paru le 11 février 2010) Voir aussi : France : Votez 'non' au référendum sur la Constitution européenne Pour les Etats-Unis socialistes d'Europe!Grèce : un avertissement pour les travailleurs européens
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