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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Italie : la politique d'immigration xénophobe provoque des centaines de morts en Méditerranée

Par Marianne Arens
2 septembre 2009

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73 Africains de plus se sont noyés dans la mer Méditerranée alors qu'ils cherchaient à rejoindre l'Italie au départ de la Libye. Selon l'organisation d'aide aux réfugiés des Nations unies, 525 réfugiés venus par bateaux sont morts en mer en 2008 et plusieurs centaines se sont déjà noyés cette année.

Seuls cinq réfugiés d'Erythrée, deux jeunes hommes, deux garçons et une jeune femme, ont survécu à leur récent périple dans une petite embarcation. Leur voyage a duré 20 jours, a dit l'un des survivants. Un porte-parole de la marine maltaise a dit à CNRmedia.com qu'un hélicoptère Frontex allemand avait détecté sept corps dans les eaux libyennes qui provenaient certainement du bateau.

Jeudi dernier les cinq Erythréens épuisés et affaiblis ont débarqué sur l'île italienne de Lampedusa. « Nous sommes les uniques survivants, » ont-ils dit. Les autres réfugiés étaient morts en route et leurs corps jetés à la mer. Plusieurs bateaux avaient croisé leur route, mais aucun n'avait cherché à leur venir en aide. Un bateau de patrouille était allé jusqu'à leur donner du carburant et des gilets de sauvetage mais « après ils sont repartis et nous ont abandonnés malgré notre état. »

Un porte-parole de l’UNHCR a rapporté qu'un bateau de pêche avait aussi donné aux réfugiés du pain et de l'eau mais les avait abandonnés à leur sort.

Une telle indifférence de la part de bateaux dans la Méditerranée est une nouveauté. Cela contredit complètement l'obligation maritime de porter secours en cas d'urgence. Cette indifférence est encouragée par la politique du gouvernement italien de Silvio Berlusconi qui interdit aux réfugiés de débarquer en Italie. Ce gouvernement mène depuis des mois une vile campagne contre les réfugiés africains et est tout à fait prêt à en assumer les conséquences fatales.

Suivant l'accord conclu entre l'Italie et la Libye, la côte libyenne et le Détroit de Sicile sont systématiquement patrouillés par des bateaux. Lorsque des réfugiés sont interceptés ils sont renvoyés directement en Afrique. On ne leur permet même pas de poser le pied sur le sol italien pour y faire une demande d'asile.

Ce dernier désastre sur la Méditerranée a provoqué un échange politique vif. Le journal catholique Avvenire a critiqué la politique d'immigration du gouvernement. Il accuse l'occident de « fermer les yeux » sur le problème et a comparé le destin tragique de ces boat people dans la Méditerranée à la Shoah.

Umberto Bossi, dirigeant du parti raciste de la Ligue du Nord qui fait partie de la coalition au gouvernement, a réagi en demandant au Vatican de donner le bon exemple en ouvrant ses portes aux immigrés.

Le ministre des Affaires étrangères Franco Frattini (Forza Italia) est intervenu et a cherché à faire porter la responsabilité sur l'Union européenne (UE) en déclarant que cette dernière ne faisait rien pour stopper l'immigration vers l'Italie. Frattini a demandé que d'autres pays européens soient prêts à accepter des réfugiés.

En mai, Silvio Berlusconi avait cyniquement cherché à justifier la politique italienne de déportation en reconnaissant que les conditions de vie dans les centres de déportation italiens ressemblaient beaucoup à celles des « camps de concentration. » Et que de ce fait il était « plus humain » d'empêcher d'emblée que les réfugiés ne débarquent sur le sol italien. »

Des émeutes s'étaient produites lorsque de nouvelles réglementations de sécurité avaient été mise en place dans les centres d'identification et de déportation au début du mois d'août. Plusieurs détenus étaient montés sur le toit du centre de déportation à Turin. D'autres s'étaient armés de barres de métal et avaient cherché à briser les barreaux des fenêtres. La rébellion avait finalement été maîtrisée par une importante intervention policière. Des protestations et émeutes semblables se sont aussi produites dans d'autres prisons de déportation.

En droite ligne avec ces nouvelles lois, les réfugiés sans permis de séjour peuvent être emprisonnés jusque six mois. L'immigration clandestine peut être passible d'une amende pouvant s'élever jusque 10 000 euros et les immigrés doivent payer 200 euros pour une demande de permis de séjour. De plus la nouvelle loi requiert que les enseignants, les fonctionnaires et le personnel de santé dénoncent les immigrés clandestins. Ces lois menacent aussi de peines de prison tout propriétaire leur accordant un logement. Ces lois légalisent aussi la mise en place de milices civiles pour compléter l'utilisation systématique de soldats pour patrouiller les centres villes.

Ces nouvelles régulations apportent le soutien à des éléments fascisants et minent non seulement les droits démocratiques fondamentaux des réfugiés mais aussi ceux de toute la classe ouvrière. Dans le même temps, la campagne gouvernementale dirigée contre les travailleurs immigrés est de plus en plus utilisée pour fournir un bouc émissaire face l'échec économique du pays et détourner de l'élite dirigeante la responsabilité de la crise.

La situation économique en Italie s'est détériorée de façon notoire en 2009. Selon la fédération du commerce Confcommercio, le PNB du pays a décliné de près de 5 pour cent (-4,8 pour cent) et la consommation de 1,9 pour cent. L'industrie automobile a vendu 15 pour cent de voitures en moins qu'il y a un an. Il résulte de cela que le gouvernement est tout à fait conscient de la menace de conflits sociaux dans les grandes entreprises telles Fiat et de possibles émeutes dans les villes.

Le gouvernement Berlusconi a été en mesure de se maintenir au pouvoir et de mettre en place sa politique droitière car il n'y a en face de lui aucune opposition politique sérieuse. Les soi-disant partis d'opposition représentent des points de vue qui ne diffèrent que de façon insignifiante de la trajectoire du gouvernement. De plus un certain nombre de ministres, qui sont responsables de la politique xénophobe inhumaine du gouvernement, ont commencé leur carrière dans le camp de la gauche parlementaire ou comme radicaux petits-bourgeois.

Le ministre de l'Intérieur Roberto Maroni qui est aujourd'hui membre de la Ligue du Nord raciste, a commencé en politique comme membre du groupe de soi-disant Marxistes-léninistes de Varese. Puis il est parti un temps dans l'organisation Democrazia proletaria, une union de plusieurs tendances gauchistes petites bourgeoises que les membres ont plus tard quitté pour rejoindre principalement Refondation communiste ou les Verts.

Tout comme Berlusconi et Bossi, Maroni a plus ou moins gagné sa vie pendant un temps comme musicien. Il a rencontré Bossi à la fin des années 1980 et en 1990 il a rejoint Lega Lombarda, qui est devenue plus tard la Ligue du nord. Aujourd'hui Maroni entérine l'introduction de milices civiles privées et est déterminé à faire déporter un demi-million d'immigrés cette année.

En tant qu'architecte de « l'Accord Italie-Libye pour la lutte contre l'immigration clandestine », Maroni est l'un des principaux responsables de cette dernière tragédie de réfugiés. Maroni a négocié l'accord actuel en mai à Tripoli. Selon le journal libyen Akhbar Libya le contrat « engage la Libye à combattre la migration clandestine tandis que Rome promet en retour de payer à la Libye cinq milliards de dollars sur les 25 années à venir en compensation de la période coloniale. » De plus, le gouvernement italien a fait don de trois bateaux pour patrouiller les côtes libyennes.

D'autres membres du gouvernement Berlusconi sont issus du Parti socialiste qui s'est effondré sous le poids des scandales de corruption dans les années 1990. Plus tard, une section du parti avait formé le Nouveau parti socialiste (Nuovo PSI), qui a depuis fusionné avec « Maison des libertés » de Berlusconi. Le dirigeant du PSI Bettino Craxi a joué un rôle déterminant dans l'avancement de la carrière de Berlusconi en lui donnant carte blanche dans le centre socialiste de Milan pour y développer ses intérêts dans le bâtiment et les médias. En 1994, Craxi a été contraint de quitter le pays pour échapper à une peine de prison pour corruption. Il est mort en homme riche en Tunisie en 2000. Aujourd'hui sa, fille Stefania Craxi est secrétaire d'Etat au ministère des Affaires étrangères.

D'autres transfuges du Parti socialiste sont Franco Frattini et Giulio Tremonti. L'actuel ministre des Affaires étrangères, Frattini était précédemment rédacteur en chef du journal de gauche Il Manifesto jusqu'à ce qu'il rejoigne le parti de Berlusconi au milieu des années 1990. Il est un fervent défenseur des guerres au Moyen-Orient et de la « guerre contre le terrorisme. » Récemment Frattini s'est élevé aux Nations unies contre une conférence qui condamnait le caractère criminel des attaques israéliennes contre les Palestiniens.

Le ministre de l'Economie et des Finances Tremonti est bien connu pour sa politique économique droitière. Il propage ouvertement des points de vue nationalistes et protectionnistes et entretient de bonnes relations de travail avec les postfascistes conduits par Gianfranco Fini. Il a attiré l'attention par sa remarque: « Il y a des moments où il faut mettre de côté les livres d'économie et ouvrir la bible. »

Un transfuge du Parti socialiste particulièrement précieux pour Berlusconi est Rénato Brunetta, le ministre de l'Administration publique et de l'innovation, qui a fait un doctorat sur le code du travail. Il porte la responsabilité d'avoir rendu le marché du travail flexible et d'avoir introduit des contrats précaires, c'est à dire de courte durée et des emplois peu rémunérés. Il est bien connu pour sa campagne féroce contre les « fanulloni », c'est à dire les « bons à rien » qui travaillent dans l'administration publique.

Maurizio Sacconi, ministre de la Santé et lui aussi ancien membre du PSI, a défendu la campagne menée par l'Eglise contre l'euthanasie dans le cas récent d’Eluana Englaro.

Une autre partie du gouvernement de Berlusconi provient du Parti radical de Marco Panella et Emma Bonino. Dans les années 1960 et 1970, les Radicaux étaient considérés comme faisant partie du spectre politique de la gauche et comprenaient des intellectuels tels l'écrivain Elio Vittorino, l'acteur Arnoldo Foà et même pour un temps le réalisateur Pier Paolo Pasolini. Ils soutenaient tous les Radicaux du fait de leur défense du droit à l'avortement et au divorce et qu'ils demandaient la séparation de l'Eglise et de l'Etat.

Un ancien membre du Parti communiste italien (PCI) occupe lui aussi un poste clé dans le gouvernement Berlusconi. Sandro Bondi est ministre de la Culture et coordinateur de la Maison des Libertés. Bondi avait rejoint la fédération des jeunesses communistes Federazione Giovanile Comunista Italiana lorsqu'il était jeune. Fervent catholique, il avait fait une thèse en philosophie sur un prêtre de l'Augustinus et opposant de Savonarola. (Ce dernier fut brûlé sur le bûcher pour hérésie au Moyen Age.)

Bondi avait rejoint le PCI et était devenu maire d'une ville de Toscane. Dans les années 1990, il était devenu un fanatique défenseur de Berlusconi. En 2001, il avait mené la campagne électorale de Berlusconi et était l'auteur d'une brochure publicitaire bien ficelée distribuée dans toutes les boîtes aux lettres. En tant que ministre de la Culture, Bondi s'est récemment opposé aux demandes d'artistes en grève qui protestaient contre les coupes de 100 millions d'euros dans le budget de la culture. Afin de dissimuler le déficit de l'Etat, Bondi a aussi nommé directeur des musées italiens un ancien dirigeant de la chaîne de restauration rapide McDonald, avec pour tâche de commercialiser l'héritage culturel italien.


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