Alors que l'attention du monde est
concentrée sur la crise économique mondiale, les Etats-Unis ont continué de
mener leur guerre néo-coloniale en Irak et ont redoublé de violence dans leurs
opérations militaires en Afghanistan et dans les régions frontalières du
Pakistan.
Tôt jeudi matin, un drone américain a tiré
quatre missiles sur une école religieuse, ou madrasa, dans une région tribale
du Nord-Waziristan au Pakistan, tuant 11 personnes, selon Agence France-Presse.
C'était la plus récente d'une série de frappes américaines lancées sur le
Pakistan depuis début septembre, dont au moins une opération commando par des
troupes au sol des Forces spéciales. La décision américaine d'étendre au
Pakistan sa guerre d'occupation en Afghanistan a été soulignée le mois dernier
par la révélation que le président Bush a signé en juillet un ordre secret
autorisant l'utilisation de troupes au sol américaines au Pakistan.
En Afghanistan même, les Etats-Unis et
leurs alliés de l'OTAN ont intensifié leurs attaques sur des cibles militaires
et civiles afin d'endiguer une guerre de résistance contre l'occupation
étrangère qui gagne en force. Une frappe aérienne lancée par des forces de la
coalition dans la province de Khost, dans l'est de l'Afghanistan, a tué neuf
soldats afghans, dans un cas apparent de « tir ami ». Le nombre de
victimes civiles des frappes aériennes américaines s'est fortement accru au cours
des derniers mois. Une attaque lancée en août dernier sur un site abritant
supposément des talibans a tué plus de 90 civils, des femmes et des enfants en
majorité.
L'organisme Human Rights Watch rapporte
que les frappes aériennes des Etats-Unis et de l'OTAN ont tué quelque 500
civils afghans au cours des cinq dernières années, ce qui sous-estime sans
doute sérieusement le vrai total. Comme le New York Times l'a rapporté
jeudi, « La dernière frappe aérienne a pris place alors que les combats en
Afghanistan ont atteint leur plus forte intensité depuis fin 2001 »,
c'est-à-dire depuis les premiers mois de l'invasion américaine.
La mauvaise posture militaire et politique
des Etats-Unis en Afghanistan est devenue un point focal de l'élection
présidentielle américaine, et c'est le démocrate Barack Obama, en tête dans les
sondages, qui s'est montré le plus enthousiaste à promettre une escalade
majeure de l'intervention américaine. Dans un discours prononcé en Virginie
mercredi, Obama a dit qu'il enverra des troupes américaines en renfort,
peut-être 15 000 soldats ou plus, dès qu'il devient l'occupant de la
Maison-Blanche. « Il est temps d'entendre l'appel de ceux qui réclament…
plus de soldats », a-t-il déclaré. « C'est pourquoi j'enverrais au
moins deux ou trois brigades additionnelles en Afghanistan. »
Obama a fait passer pour des
« envolées rhétoriques » des déclarations faites à une collecte de
fonds à Seattle par son colistier, le sénateur Joseph Biden, selon qui six mois
après l'inauguration d'Obama, le nouveau président répondrait à toute crise
majeure de politique étrangère en prenant des décisions « incroyablement
dures » et impopulaires. Biden a cité cinq centres possibles de conflit :
le Moyen-Orient, l'Afghanistan, le Pakistan, la Corée du Nord, et la Russie.
Les remarques à glacer le sang de Biden
n'étaient pas des « envolées rhétoriques », ce qui est corroboré par
un long article publié jeudi dans le New York Times par le correspondant
du journal à la Maison-Blanche, David E. Sanger. Analysant les positions prises
en politique étrangère par Obama et son opposant républicain, le sénateur John
McCain, Sanger souligne des questions clés sur lesquelles Obama a une position
encore plus agressive que celle de McCain.
Sur l'Iran, par exemple, le camp McCain a
suggéré qu'il serait prêt à accepter un accord qui permettrait à l'Iran de
produire de l'uranium sur son territoire, alors que le camp Obama a fait savoir
au journal qu'une Maison-Blanche dirigée par Obama « ne permettrait pas à
l'Iran de produire de l'uranium sur le sol iranien, ce qui rejoint la ligne
dure énoncée par le gouvernement Bush ».
Sanger note qu'Obama a déclaré que
« nous n'écarterons jamais l'option militaire » et qu'il ne donnerait
pas aux Nations Unies un « droit de veto » sur une décision
d'attaquer les installations nucléaires iraniennes. Sanger continue en disant
que des responsables du renseignement américains soutiennent que le
« seuil » d'une possible frappe militaire – le point à partir duquel
l'Iran produit assez de matériel nucléraire pour fabriquer une arme –
« peut être atteint assez tôt durant le prochain mandat
présidentiel ».
Obama a également suggéré que les
Etats-Unis devraient imposer un embargo sur les importations iraniennes de
gazoline et de produits pétroliers raffinés. Notant que le gouvernement Bush
n'est pas allé jusqu'à proposer une telle mesure, il écrit : « Un
embargo pourrait toutefois constituer un acte de guerre... »
Sur la question du Pakistan, Sanger
écrit : « c'est M. Obama qui s'est montré beaucoup plus disposé que
M. McCain à menacer d'envoyer des troupes américaines. »
Obama, tout autant que McCain, parle en
tant que représentant d'une classe dirigeante américaine, laquelle va dicter la
politique étrangère et militaire des Etats-Unis selon ce qu'elle perçoit comme
étant ses intérêts économiques et stratégiques dans le monde.
La crise économique, de caractère global
quoique centrée autour du déclin de la position économique de l'impérialisme
américain dans le monde, va inévitablement pousser cette politique dans une
direction encore plus agressive et belliqueuse, peu importe quel parti
capitaliste occupe la Maison-Blanche. La crise économique représente dans les
affaires mondiales une source croissante de tension et de conflit entre nations
impérialistes et capitalistes rivales.
Plus encore qu'au cours de la dernière
décennie, les Etats-Unis chercheront, dans un contexte de turbulence financière
et de récession économique, à compenser leur déclin économique par des moyens
militaires. Il faut tirer les leçons de l'histoire. La dernière grande crise
économique – la Dépression des années 30 – a entraîné une série de conflits
militaires qui ont abouti dans l'holocauste de la Deuxième Guerre mondiale.
L'élection américaine 2008, qui se déroule
dans le contexte d'une profonde récession et d'une escalade de la violence
militaire, souligne les immenses dangers que posent les illusions politiques en
Obama et le parti démocrate. Une fois de plus, le puissant sentiment
anti-guerre du peuple américain a été étouffé en étant canalisé derrière l'aile
démocrate de l'impérialisme américain.
Si Obama gagne l'élection, ce qui semble de
plus en plus probable, la lutte contre le militarisme et la guerre sera menée
contre son gouvernement.
(Article original anglais paru le 24
octobre 2008)