La déclaration suivante
sera distribuée en France aux travailleurs et aux étudiants participant aux
grèves et aux manifestations contre l’attaque des acquis sociaux par le
gouvernement gaulliste dirigé par Nicolas Sarkozy. Nous demandons à nos
lecteurs de télécharger le tract sous format pdf pour
le distribuer aux manifestants.
La question
essentielle à laquelle font face les travailleurs et les étudiants qui feront grève
et qui manifesteront les 13 et 14 novembre et pendant le reste du mois contre les
attaques du président Sarkozy sur les retraites et les droits sociaux
fondamentaux est celle de la perspective politique. La puissante vague de
grèves qui a débuté le mois dernier a ouvert une brèche dans l’adulation pour
Sarkozy entretenue par les médias et a révélé la véritable attitude de la
classe ouvrière vis-à-vis de son programme politique.
Les travailleurs
des transports (cheminots et agents des transports urbains), du gaz et de
l’électricité seront rejoints par les enseignants, les hospitaliers, les
travailleurs des collectivités territoriales, des postes et télécommunications,
du secteur privé ainsi que les étudiants qui se battent contre la
« réforme » de l’université conduisant à la privatisation des
universités. Tous luttent contre la détérioration du niveau de vie, les
atteintes à la sécurité de l’emploi et les attaques grandissantes sur les
droits sociaux et démocratiques.
Une hostilité déterminée
envers les projets de Sarkozy ne suffira cependant pas à garantir les
retraites, les emplois et le niveau de vie des travailleurs, ni l’accès
des jeunes à des écoles de qualité et aux études universitaires.
Il
est nécessaire de faire cette mise en garde : de nombreuses indications donnent
à penser que Sarkozy est déterminé à infliger une défaite décisive à la classe
ouvrière. Lors de sa visite à Washington, Sarkozy a déclaré : « Je
tiendrai. La France a trop reculé par le passé, elle ne peut plus reculer. »
Eric
Le Boucher du Monde a comparé la position de Sarkozy à l’offensive
anti-ouvrière de l’ancien premier ministre britannique, Margaret Thatcher
et écrit que les milieux économiques « savent que le président n’a
pas le choix. S’il cède, il est chiraquisé. »
Sarkozy
va compter sur la lâcheté et la traîtrise des dirigeants syndicaux et des
partis de la « gauche » officielle pour isoler et miner la lutte. Il
ne faut absolument pas faire confiance à ces organisations en faillite.
Les emplois, les
retraites et l’éducation ne peuvent être défendus que par un mouvement de
vaste envergure de grèves et de mobilisation politique de toute la classe
ouvrière dans le but de renverser ce gouvernement gaulliste et de le remplacer
par un gouvernement ouvrier véritablement démocratique. Cela signifie
qu’il est nécessaire d’entreprendre la lutte pour construire un
nouveau parti de masse de la classe ouvrière, basé sur un programme socialiste
internationaliste.
Durant la décennie
précédente, plusieurs vagues de grèves massives ont éclaté en France, contre
les attaques sur les retraites en 1995 et 2003 et, en 2006, contre la
« réforme » du code du travail facilitant le licenciement des
nouveaux embauchés. Quel qu’ait été le succès partiel de ces mouvements,
amenuisant les effets les plus nocifs de ces attaques, le résultat a été à
chaque fois des atteintes plus profondes aux conditions sociales des
travailleurs, et a conduit à l’installation d’un nouveau
gouvernement ayant des projets plus draconiens encore d’attaque des
prestations sociales et du niveau de vie.
Avec Sarkozy, la
classe ouvrière est confrontée à un ennemi résolu qui cherche à faire table
rase de tous les acquis sociaux que les travailleurs ont conquis depuis la fin
de la Deuxième Guerre mondiale. Il conçoit la suppression des régimes spéciaux
de retraite des cheminots comme le prélude nécessaire à des réductions massives
des retraites pour la population toute entière.
Dans son discours sur
le « Contrat social » du 18 septembre, Sarkozy avait dit :
« Si un métallo ou un
enseignant voit sa durée de cotisation passer de 37 ans et demi à 40 ans et
demain à 41 ans, comment lui expliquer que celle d'un agent d’une grande
entreprise publique devrait rester bloquée à 37 ans et demi, voire moins ? »
D’autres
mesures réactionnaires — la refonte du Code du travail pour faciliter le
recrutement et le licenciement, la franchise médicale, les suppressions de postes
dans la fonction publique — sont en préparation.
Les directions
syndicales reprennent le rôle qu’elles avaient joué en 1995, 2003 et
2006, c'est-à-dire qu’elles essaient de forcer les grévistes à des actions
très espacées afin de les épuiser et de les démoraliser. Ayant organisé une
grève le 18 octobre, un bon mois après le discours de politique sociale provocateur
de Sarkozy, les principales fédérations syndicales, CGT en tête (Confédération
générale du travail, dominée par le Parti communiste stalinien) avaient
boycotté les assemblées générales massives de grévistes qui appelaient à la
reconduction de la grève. Le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibaut
était allé jusqu’à déclarer que Sarkozy avait « une légitimité que
personne ne conteste. » Lors d’une réunion le 31 octobre, les
dirigeants syndicaux avaient repoussé tout autre mouvement de grève
jusqu’au 13 novembre.
Ce que les
permanents syndicaux craignent le plus, c’est une lutte politique de la
classe ouvrière qui court-circuiterait leurs tentatives de négocier avec
Sarkozy des accords pourris sur les attaques des acquis sociaux. Ils cherchent
à diviser les travailleurs et à empêcher que les différentes grèves contre le
gouvernement de Sarkozy — les cheminots et les électriciens contre la
suppression des régimes spéciaux, les travailleurs d’Air France sur les
salaires, ceux d’Airbus contre les suppressions de postes et les
conditions de travail, les travailleurs du secteur public en grève contre les
suppressions de postes, les étudiants contre la loi d’autonomie des
universités, etc — ne fusionnent en un mouvement unifié contre sa
politique.
Comme l’a
dit François Chérèque, le dirigeant de la CFDT (Confédération française et démocratique
du travail, alignée au Parti socialiste), « S’il y a un mélange des
mouvements entre les régimes spéciaux, les fonctionnaires et je ne sais qui
encore, on se réserve le droit de se retirer [du mouvement de grève]. »
En fait, toute
lutte sérieuse contre le programme social de Sarkozy doit rassembler toutes les
grèves et protestations en cours en un mouvement unifié qui remette directement
en question le régime de Sarkozy. Sa « légitimité » tant vantée est
une imposture, car elle se base sur une élection gagnée par défaut contre une
candidate du Parti socialiste (PS), Ségolène Royal, qui proposait une politique
de droite qu’il était quasiment impossible de distinguer de celle de
Sarkozy. Comme l’ont montré à chaque fois les grèves de 1995, 2003 et 2006,
il existe une opposition populaire massive à une telle politique qui défend principalement
les intérêts des super riches.
Une telle lutte
nécessite un parti politique de la classe ouvrière, qui soit indépendant, pour
coordonner et mener la lutte contre la politique antisociale de la classe
dirigeante. C’est la tâche à laquelle se consacrent le World Socialist
Web Site et le Comité international de la Quatrième Internationale. Nous défendons :
1)L’indépendance politique de la classe ouvrière
Un nouveau parti
doit rejeter entièrement l’influence politique de l’establishment
de gauche — les Partis socialiste et communiste et les syndicats –
et de tous ceux qui essaient de s’allier politiquement à eux. La
politique droitière de ces partis, notamment la série de privatisations mises
en oeuvre par le dernier gouvernement socialiste (PS) dirigé par Lionel Jospin
en coalition avec le Parti communiste (PC) et les Verts (la Gauche plurielle),
a joué un rôle primordial dans le retour au pouvoir de la droite en 2002 avec
son cortège d’attaques sociales bien plus draconiennes encore. Comme cela
a été démontré plus récemment par la campagne présidentielle du PS en 2007, le
PS est, dans la pratique,en accord total avec la plateforme de
Sarkozy.
Une rupture
politique et organisationnelle d’avec ces organisations politiques et
syndicales, comprenantune dénonciation politique intransigeante de leur
collaboration avec la politique de Sarkozy, est le préalable indispensable à
une lutte victorieuse contre les attaques de Sarkozy.
2) Une
réorganisation socialiste de la société et de l’économie
La destruction par
Sarkozy des droits à la retraite et d’autres droits sociaux, alors même
qu’il accorde d’énormes concessions financières aux patrons des
grandes entreprises, est l’expression de la logique destructrice de
l’accumulation de moins en moins contrôlable de richesse privée entre les
mains des grands investisseurs et des PDG. Tandis que les Bettencourt, Dassault
et autres Pinault amassent des fortunes de plusieurs milliards d’euros et
que Sarkozy fait des cadeaux fiscaux pour les tranches d’imposition les
plus élevées, on dit aux travailleurs que leurs modestes retraites sont trop
chères pour les coffres de l’Etat.
Plutôt que de
permettre au gouvernement d’imposer l’austérité sur les lieux de
travail, les travailleurs doivent subordonner les composantes stratégiques
de l’économie au contrôle social. En plaçant les plus grandes entreprises
— banques, entreprises énergétiques, principaux producteurs, compagnies
de télécommunication et de transport — sous propriété publique et sous contrôle
démocratique, les travailleurs rendraient possible le développement rationnel
et planifié de l’activité économique.
3)
Internationalisme
Les bourgeoisies
nationales d’Europe et du monde entier se concurrencent en matière
d’investissements et de capital, dans leur recherche des taux de profit
les plus élevés et de la réduction la plus impitoyable du niveau de vie de la
classe ouvrière. La classe ouvrière, par contre, est une classe véritablement
internationale : ses intérêts sont affectés négativement à chaque défaite
qu’elle subit, à quelque endroit du monde que ce soit, tandis que la
bourgeoisie de chaque pays sacrifie les salaires et le niveau de vie de la
classe ouvrière, dans le but de rester compétitive avec les entreprises qui
emploient la main-d'œuvre la moins chère.
Au moment où les
cheminots français organisent des grèves pour défendre leurs retraites, les
conducteurs de train allemands mènent une grève âpre contre les bas salaires et
la privatisation, passant outre à l’opposition des syndicats allemands
les plus puissants. Les travailleurs postaux en Grande-Bretagne organisent des
grèves sauvages contre des projets de privatisation. On voit émerger les
conditions propices à un mouvement réellement pan-européen contre les
privatisations et l’austérité sociale.
Sous le
gouvernement Sarkozy, qui cherche à faire des immigrés les boucs émissaires des
tensions sociales en France, l’internationalisme implique la défense
déterminée du niveau de vie et des droits de toutes les parties de la classe
ouvrière, y compris des personnes nées à l’étranger, et
l’opposition intransigeante à toute forme de chauvinisme, de racisme et d’idées
rétrogrades.
4)
Opposition au militarisme et à la guerre
Ce n’est pas
par hasard que Sarkozy s’est rangé derrière la politique étrangère de
l’administration Bush et de ses projets d’une guerre plus étendue au
Moyen-Orient au moment même où il monte une attaque féroce sur le niveau de vie
des ouvriers français. Ces deux processussont le signe de calculs de
plus en plus désespérés de la part de l’élite dirigeante française qui
cherche à accaparer une part plus grande des profits disponibles de par le monde.
Les travailleurs
doivent s’opposer aux projets criminels de guerre des diverses factions
nationales de la bourgeoisie. Une telle guerre risque de se transformer en un
conflit mondial entre les puissances les plus importantes pour le pétrole et la
supériorité stratégique au Moyen-Orient et dans les régions limitrophes et en
fait dans le monde entier. Le militarisme sert de prétexte pour réduire les
dépenses sociales et le niveau de vie afin de compenser la hausse du budget
alloué aux armes, alors même que ce militarisme produit des guerres qui
s’accompagnent de pertes humaines terribles et d’une régression
culturelle et morale abominable.
Il n’y a pas de réponse simple ou de
raccourci possible dans la lutte contre les attaques sociales de Sarkozy. Il
faut construire une direction politique qui coordonne les grèves, les
manifestations et les actions politiques de la classe ouvrière contre les
machinations de toute l’élite dirigeante et de tous ses alliés et représentants
politiques, et apporter un programme socialiste révolutionnaire qui corresponde
aux besoins des travailleurs. Nous appelons les travailleurs et les étudiants
en France à lire le World Socialist Web Site et à rejoindre le Comité
international de la Quatrième Internationale dans la lutte pour construire un
tel parti.