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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Allemagne : le Parti vert dénonce les Marches de la paix

Par Ulrich Rippert
20 avril 2007

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Des organisations allemandes en faveur de la paix ont récemment organisé leurs traditionnelles « Marches pascales » contre la guerre et le militarisme. Cette année, les manifestations dénonçaient la guerre en Irak et l’expansion de la mission militaire allemande en Afghanistan. Des dirigeants du Parti vert, dont le groupe parlementaire a voté pour le déploiement de la Luftwaffe (l’armée de l’air) au sud de l’Afghanistan, ont attaqué les organisateurs de ces marches.

La dirigeante du Parti vert, Claudia Roth, a accusé les organisateurs des manifestations anti-guerre de ne voir le monde qu’« en noir et blanc ». Selon Roth, leurs déclarations disent « remarquablement peu de choses » sur la façon de résoudre de telles crises internationales. Trop souvent, a-t-elle dit, les vues de ceux qui participent à ces marches se limitaient au « rejet étroit de l’option militaire », alors que les Nations unies n’étaient pas même mentionnées dans les appels à la manifestation. C’est là, selon elle, un « échec des politiques pacifistes ». Les appels au soutien de ces manifestations donnaient l’impression selon elle que gouvernement américain, Union européenne et establishment politique allemand ne formaient qu’« un seul axe du mal », a dit Roth.

Franziska Eichstädt-Bohlig, la dirigeante du groupe parlementaire du Parti vert au conseil municipal de Berlin a décrit les marches pascales comme « une forme non contemporaine de la contestation anti-guerre ». Les marches pacifistes ont dégénéré en « un rituel » qui se limitait à s’opposer à la guerre sans offrir « de réponses différenciées et positives » à des situations complexes et contradictoires. Les conflits mondiaux ne se résoudront pas avec le « seul désarmement ». Le monde était plus complexe qu’un simple « pour ou contre la guerre », a dit Eichstädt-Bohlig.

Reinhard Bütikofer, qui codirige le Parti vert avec Claudia Roth, a expressément défendu les missions militaires internationales de l’Allemagne. Le monde serait « beaucoup plus incertain » sans le déploiement des troupes allemandes en Afghanistan et au Liban, a-t-il dit aux médias.

Bütikofer a expliqué sa position sur le rôle pacifique des Forces armées allemandes dans une conférence de presse : « Sans la construction civile nécessaire de l’Afghanistan et aussi la protection militaire de l’importante impulsion démocratique, rien ne peut réussir. »

Ce n’est là que pure propagande guerrière. En réalité, les troupes de l’OTAN défendent autant la « démocratie » en Afghanistan que les troupes américaines qui occupent l’Irak. Ils protègent le régime fantoche de Hamid Karzaï, qui est arrivé au pouvoir grâce à l’armée américaine et qui est soumis aux puissances impérialistes. L’influence de Karzaï ne va pas au-delà de Kaboul et la résistance populaire à son régime ne cesse de croître.

Afin de soutenir Karzaï, les Forces armées allemandes collaborent au nord du pays avec les seigneurs de guerre et les barons de la drogue locaux. Le trafic d’armes et de drogue est toléré et, en retour, les seigneurs de guerre acceptent de laisser tranquille le faible gouvernement central. L’an dernier en Afghanistan, il s’est produit plus d’opium que jamais auparavant.

Dans le sud, la répression de la résistance prend des formes de plus en plus violentes. Des milliers de civils sont les victimes de ce qui est appelé euphémiquement « la guerre contre les talibans ». Pendant ce temps, les troupes d’occupations sont profondément détestées par la population.

Comme dans le cas de la guerre contre l’Irak, les grandes puissances poursuivent, avec l’occupation de l’Afghanistan, des objectifs impérialistes. Dans leur lutte pour le contrôle de sources d’énergie et d’intérêts géostratégiques, l’Afghanistan occupe une position extrêmement importante de par ses frontières avec l’Iran, le Pakistan et les anciennes républiques soviétiques du Turkménistan, de l’Ouzbékistan et du Tadjikistan.  

L’attaque ouverte des Verts sur les pacifistes (le réseau Coopératives de la Paix) qui avaient organisé les marches pascales marque une nouvelle étape dans le tournant de ce parti vers la droite.

Depuis qu’ils ont intégré le gouvernement allemand en 1998 et que le chef des Verts à cette époque, Joschka Fischer, a pris la responsabilité de la politique étrangère, les Verts ont abandonné leurs anciennes perspectives pacifistes et sont devenus d’ardents défenseurs des déploiements militaires internationaux. Mais ils avaient toujours tenté de retenir les pacifistes dans leurs rangs, en leur faisant, tout au moins, diverses concessions verbales. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Maintenant, les Verts attaquent le mouvement pacifiste comme on n’aurait pu s’y attendre dans le passé que de la part des démocrates chrétiens. Essentiellement, deux raisons expliquent ceci.

Premièrement, le temps durant lequel la politique étrangère allemande pouvait se déguiser avec des clichés pacifistes est révolu. La politique étrangère agressive de Washington et la débâcle américaine en Irak ont forcé l’Allemagne à défendre elle aussi ses intérêts internationaux de façon de plus en plus agressive et avec de plus en plus de moyens militaires.

L’ancien ministre des Affaires étrangère du Parti vert, Joschka Fisher, l’a clairement exprimé lors d’un discours à l’Université Humboldt de Berlin à la mi-mars. Il a commencé son discours avec la question suivante : « Sommes-nous, en tant qu’Européens, prêts à résoudre les problèmes résultant de l’affaiblissement que les États-Unis se sont eux-mêmes infligé avec leur politique unilatéraliste et qui les a menés au désastre de la guerre en Irak ? » Il a clôturé son discours par un appel à « une nouvelle responsabilité en matière de politique étrangère et de sécurité » pour l’Europe, sous la direction de l’Allemagne.    

Fisher a expressément endossé un engagement militaire plus important. Sur le déploiement de l’Allemagne au Liban, il a dit que la situation actuelle, dans laquelle la marine allemande, limitée à la côte libanaise, doit surveiller « l’armada extraordinairement dangereuse du Hezbollah » et où les autres alliés « tirent les marrons du feu » au Liban même, n’était plus acceptable.

Deuxièmement, depuis que les Verts n’ont pas pu obtenir une majorité en coalition avec le Parti social-démocrate (SPD), ils aspirent à former une coalition avec les chrétiens-démocrates. Une coalition de l’Union démocrate chrétienne (CDU) et l’Union sociale chrétienne (CSU), des libéraux démocrates et des Verts pourrait obtenir une majorité au Bundestag (le parlement fédéral) et pourrait remplacer la grande coalition de la CDU/CSU et du SPD qui connaît de plus en plus de difficulté. Le discours de Fisher à l’université Humboldt a tout d’une candidature renouvelée pour le poste de ministre des Affaires étrangères. Il ne contient rien que la chancelière de la CDU, Angela Merkel, ne saurait accepter.

Le chef du Parti vert, Bütikofer, a constamment insisté au cours de ces derniers mois pour que son parti développe une collaboration plus étroite et à différents niveau avec la CDU/CSU

Et depuis un certain temps, dans la municipalité de Berlin, qui est présentement dirigée par une coalition du SPD et du Parti de la gauche, le président de la CDU, Friedbert Pflüger, tente d’établir une bonne collaboration avec les Verts. Il ne cache pas le fait qu’il considère qu’une coalition entre les deux partis est souhaitable. Les Verts de Berlin s’en flattent et soulignent pour leur part que la base d’une entente politique avec la CDU s’est élargie. Une coalition entre le Parti chrétien démocrate et les Verts dans la capitale allemande créerait un précédent au niveau politique fédéral. 

(Article original paru le 18 avril)

Joschka Fischer réclame une politique européenne de grande puissance sous la direction de l’Allemagne [27 mars 2007]


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