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La «gauche» française face au référendum sur la constitution européenne

Par Richard Dufour
3 avril 2005

«Le scénario qui est en train de s'écrire», s'est exclamé le porte-parole du Parti socialiste (PS) Julien Dray en réaction au premier de nombreux sondages plaçant le non en tête dans les intentions de vote, «c'est le scénario du 21 avril».

La référence à l'élimination du candidat socialiste au premier tour de l'élection présidentielle du printemps 2002, au profit du néo-fasciste Le Pen, a depuis donné le ton à la campagne du PS en faveur du oui lors du référendum sur la constitution européenne qui aura lieu le 29 mai.

«Prenons garde à ne pas nous réveiller avec la gueule de bois comme après un certain scrutin», a averti le dirigeant socialiste Jack Lang. Son chef François Hollande a lancé sur le même registre: «Le 21 avril, c'était l'idée que le vote ne changerait rien».

La seule leçon tirée par le PS de son fiasco électoral de 2002 est qu'il pourrait servir à effrayer politiquement les couches populaires qui se détournent d'une gauche officielle ayant prouvé, de l'élection de Mitterand en 1981 au gouvernement de la gauche plurielle de Jospin, son allégeance pleine et entière à l'ordre capitaliste au détriment des intérêts ouvriers.

Que les socialistes en soient réduits à recourir à l'intimidation atteste du sentiment de panique qui s'empare d'eux devant leur échec évident jusqu'ici à «vendre» la constitution européenne à une population française dont la méfiance envers les projets constitutionnels du grand capital européen s'accroît à deux mois à peine de l'échéance référendaire.

Alliance au sommet pour le oui

Il y a trois ans, c'est le Front national (FN) d'extrême-droite qui avait servi d'alibi pour justifier l'appel du PS à voter pour l'ultra-conservateur Chirac au deuxième tour de l'élection présidentielle et légitimer un gouvernement qui allait mener par la suite un assaut brutal sur les retraites, l'éducation et l'emploi.

Aujourd'hui c'est «une certaine forme de démagogie et de populisme» qui serait portée par les opposants au traité constitutionnel, selon le socialiste Jack Lang, visiblement pressé de réduire une telle opposition à de la xénophobie anti-européenne. «Le non», affirme de son côté le député PS de Seine-Saint-Denis, Bruno Le Roux, «est porteur d'un repli nationaliste ou souverainiste». Tant l'argumentaire que le but visé par la gauche officielle, en 2002 comme aujourd'hui, sont les mêmes: agiter l'épouvantail de la droite extrémiste pour justifier un ralliement «républicain» autour des intérêts fondamentaux de l'élite dirigeante française et européenne.

Le rapprochement opéré entre le PS et la droite gouvernementale pour faire la promotion du oui en vue du scrutin du 29 mai offre un spectacle remarquable.

Affirmant avoir bloqué dans l'électorat de droite l'hémorragie du oui en apaisant les craintes qu'il favoriserait l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, Nicolas Sarkozy, dirigeant de l'UMP (Union pour un mouvement populaire, coalition de droite au pouvoir), a appelé le PS à jouer son rôle parmi les «électeurs de gauche» en faisant «comprendre que la constitution européenne protège de l'Europe des marchés». Mais, a-t-il ajouté sur un ton ironique, «on ne va pas me demander de faire la campagne du PS». Ce qui n'a pas toutefois empêché le chef de l'UMP de poser aux côtés de son homologue du PS, François Hollande, en couverture du Paris-Match, le magazine parisien des gens riches et célèbres.

Tandis que le 5 mai 2002, date du second tour de l'élection présidentielle, le PS appela à voter Chirac «pour faire barrage à Le Pen» et au fascisme, maintenant il en est à exiger de lui davantage d'efforts pour aider le PS à imposer l'aggravation de l'assaut sur la position sociale des travailleurs qu'implique le oui à la constitution européenne.

Le PS a réagi aux sondages défavorables au oui en multipliant les appels à droite. Le président Chirac, en sa qualité de «signataire du texte», doit «le défendre devant les Français», a dit Hollande sur la chaîne d'informations LCI. La direction socialiste a qualifié de «bonne chose» l'annonce du Premier ministre Raffarin qu'il s'investirait personnellement dans la campagne pour le oui. Comme l'a fait remarquer le quotidien Le Monde, Chirac «a besoin des électeurs socialistes, aujourd'hui, de la même manière qu'il leur a dû sa réélection, en 2002, face à Jean-Marie Le Pen».

Les références à l'élection de 2002 ont toutes évité de passer soigneusement en revue les conditions socio-économiques et le fort sentiment d'aliénation populaire envers l'establishment politique, qui expliquent le parallèle avec la situation référendaire actuelle.

Lionel Jospin a payé au premier tour des présidentielles de 2002 le prix des mesures anti-ouvrières mises en oeuvre par son gouvernement de la gauche plurielle: le nombre record de privatisations, le vote européen à Barcelone pour le prolongement de l'âge de la retraite. Le rejet de cette même politique, poursuivie et intensifiée par le gouvernement Chirac-Raffarin, alimente aujourd'hui non seulement les vastes mouvements sociaux de protestation mais aussi l'opposition à la constitution européenne. Celle-ci est justement perçue dans la conscience populaire comme une assise légale pour les privatisations, délocalisations et coupes drastiques dans les programmes sociaux qui constituent aujourd'hui le contenu essentiel des politiques menées par tous les gouvernements de l'Union européenne, sous la pression constante des marchés financiers internationaux.

Une différence sépare à première vue la présente campagne référendaire du ralliement quasi-universel de la classe politique - mis à part les partisans du néo-fasciste Le Pen qui reçut 18 pourcent du vote - derrière le conservateur Jacques Chirac le 5 mai 2002.

C'est qu'il existe un courant important qui appelle à voter non le 29 mai prochain. Soit du point de vue du chauvinisme national, tel que préconisé par le FN ou la droite dite «souverainiste» de Philippe de Villiers (Mouvement pour la France) et Charles Pasqua (Rassemblement pour la France). Soit du point de vue d'une opposition au «néo-libéralisme» inscrit dans la constitution européenne, tel que revendiqué par une minorité au sein du PS, les staliniens du Parti communiste français (PCF), les collectifs alter-mondialistes tels que Attac, et les organisations dites de l'extrême-gauche que sont la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), Lutte ouvrière (LO) et le Parti des travailleurs (PT).

Un non de gauche ?

Des porte-paroles du second groupe se sont objecté au parallèle avec 2002, mais personne de façon aussi explicite que la LCR. «Hollande ne cesse d'évoquer 'les risques d'un 21 avril' que serait pour lui une victoire du 'non'», pouvait-on lire récemment dans son hebdomadaire, Rouge. «En réalité, il ne s'agirait de rien d'autre que d'un retournement de la situation du 5 mai 2002, le rejet, dans un même mouvement, de la droite et du social-libéralisme.»

Une analyse des positions défendues par les tenants du «non au néo-libéralisme» démontre toutefois que le «retournement» évoqué par la LCR n'est qu'apparent.

En 2002 ces éléments ont soit appelé à voter Chirac, comme la LCR et les altermondialistes, ou se sont accomodés comme LO à la vague «républicaine» avec un appel abstentionniste à un vote blanc. Tant la LCR que LO ont rejeté une campagne active de boycottage par l'extrême-gauche, qui avait reçu au premier tour un vote combiné totalisant plus de 10 pourcent des voix. Une telle action avait été préconisée par le World Socialist Web Site comme la seule voie ouverte aux travailleurs français pour exprimer leur indépendance politique et se préparer aux attaques qui allaient découler de la victoire de la droite aux urnes.

Dans la campagne référendaire actuelle, le «non de gauche» revendiqué par ces mêmes éléments est similairement destiné à bloquer une politique indépendante de la classe ouvrière.

La colère populaire est focalisée sur les articles de la constitution qui favorisent la mobilité du capital européen et sa capacité d'exploiter la main-d'oeuvre à bon marché des pays appauvris de l'Est. Ces dispositions sont présentées comme un excès «néo-libéral», et non la traduction en termes légaux de la tendance irrépressible des forces productives à briser le carcan obsolète du système d'État-nation.

Cette tendance, qui prend des formes socialement destructrices sous un système capitaliste basé sur la propriété privée et le profit individuel, recèle toutefois un grand potentiel de progrès social. Sa réalisation dépend de la capacité de la classe ouvrière européenne et internationale à intervenir comme une force politique indépendante et à mettre l'intégration sans précédent de l'économie mondiale, et la puissance de production associée à celle-ci, au service de la société en son ensemble.

C'est le seul point de vue viable qui puisse animer une opposition progressiste à l'Europe capitaliste plus intégrée politiquement et militairement que la constitution cherche à établir. Il est résumé dans la perspective des États unis socialistes d'Europe, comme partie intégrante de l'unité de la classe ouvrière internationale dans la lutte pour le socialisme.

Une telle perspective est rejetée par les tenants du non «de gauche», qui séparent le «néo-libéralisme» du capitalisme et passent sous silence les causes objectives de l'effondrement de l'ancienne politique nationale-réformiste keynésienne, afin de maintenir l'illusion qu'il est possible de préserver les acquis sociaux et d'élever le niveau de vie du monde du travail sans remettre en cause le système de profit lui-même.

Ces éléments jettent les hauts cris sur les «excès» néo-libéraux de l'Union européenne, mais ne soufflent pas mot sur l'essentiel, à savoir qu'elle représente un effort des sections dominantes du grand capital européen, menées par la France et l'Allemagne, pour s'unir politiquement afin d'intensifier l'assaut sur la classe ouvrière à l'échelle du continent et faire contre-poids à l'hégémonie américaine dans la lutte féroce pour le contrôle des marchés et des ressources critiques de la planète.

Les tenants du non «de gauche» dénoncent la constitution pour avoir inscrit la politique de défense européenne dans le cadre de l'OTAN, «alliance contrôlée par Washington» pour reprendre les mots de la LCR. Mais ils restent muets face aux tentatives de constituer une force européenne d'intervention qui soit indépendante des États-Unis.

Sous le couvert de préserver le «modèle social européen» des calamités du modèle «anglo-saxon» et de l'«hyperpuissance» américaine, la campagne officielle pour un non «de gauche» s'adapte aux visées de l'impérialisme européen, lequel n'a historiquement rien à envier à l'impérialisme américain en brutalité ou en gloutonnerie.

Cela se traduit politiquement par une tentative de ramener l'opposition populaire à la constitution européenne dans le giron du PS.

Subordination politique au PS

C'est l'objectif avoué d'un courant minoritaire au sein du Parti socialiste qui a rompu le consensus au sein de l'élite politique française en appelant pour un non le 29 mai, au risque de s'attirer les foudres de l'establishment du parti, y compris des menaces d'exclusion. Mais il est fort instructif que ces menaces n'ont pas été mises en exécution. Au-delà des conflits de clique liés au positionnement pour les élections nationales de 2007, un fait fondamental demeure: le PS ne pourrait continuer à remplir sa fonction consistant à contenir l'opposition venue d'en bas s'il ne tolérait certains gestes par ses «éclaireurs de gauche» destinés à flatter et à conforter une telle opposition afin de mieux la neutraliser.

Les déclarations des principaux représentants du non au sein du PS sont très claires à ce sujet. «Nous n'avons pas oublié le 21 avril 2002 : quand les socialistes ne rassemblent pas d'abord à gauche, ils perdent», expliquait l'ex-premier ministre et haut dirigeant socialiste Laurent Fabius en novembre dernier, lorsqu'il faisait activement campagne au sein de son parti pour le non au traité constitutionnel.

Henri Emmanuelli, ancien dirigeant du PS et lui aussi un tenant du non, a déploré le manque de tact de la direction actuelle du parti dans sa décision de brandir les menaces de sanction ou d'exclusion contre ceux qui violeraient la «démocratie» du parti (un référendum interne au PS en décembre dernier s'est soldé par un vote majoritaire pour le oui à la constitution européenne). Invoquant nostalgiquement François Mitterand, il a dit : «Lui connaissait la gauche, avec la proportionnelle, il a su créer un grand parti. Avec la logique majoritaire, on le met en danger.»

Une analyse intitulée «La guerre des gauches», parue dans l'édition du 24-30 mars 2005 du Nouvel Observateur, revue hebdomadaire proche du PS, abonde dans le même sens. «La gauche de gouvernement peut être victime d'un effet de balancier», avertit l'auteur. «La méfiance envers le PS revient cycliquement». Puis il arrive à cette observation cruciale: «C'est officiellement pour conjurer la rupture avec les gauches radicales que Fabius est sorti des rangs.»

Il y a un autre élément dans la position de Fabius qui mérite d'être noté: c'est la crainte que «notre ambition d'une Europe puissante et solidaire» n'en vienne à «dériver de plus en plus vers un grand marché ouvert à tous les vents et politiquement dilué». C'est ce qu'il a écrit dans une chronique pour Le Figaro le mois dernier, où il plaide la cause d'une «organisation politique qui lui permette [à l'Europe] de peser sur les affaires du monde». Autrement dit, l'ex-premier ministre socialiste rechigne à soutenir un projet constitutionnel qu'il juge «dilué» et pas assez «ambitieux» dans la promotion des intérêts du grand capital européen. Le fait qu'un Fabius, ou ses supporteurs, puissent ensuite figurer dans le camp du non «de gauche» en dit long sur l'effort de récupération politique en cours, cautionné par des forces comme la LCR.

Attac et les altermondialistes

Un fait noté dans l'analyse du Nouvel Observateur, c'est que «les altermondialistes ont conforté leurs positions chez les minoritaires socialistes». Attac, association-phare du mouvement altermondialiste et dont la branche française a toujours été sous l'influence voire le contrôle politique du PS, ne laisse aucun doute à ce sujet. Pour la première fois, l'association va faire officiellement campagne à l'occasion d'un scrutin national, et défendra le non à la constitution européenne.

«Ce texte programme l'abandon de toute ambition sociale», explique le président d'Attac-France, Jacques Nikonoff. Depuis des années, «l'Europe vit une profonde crise économique, sociale et environnementale», souligne-t-il.

Puis il formule explicitement la perspective politique qui anime toute la campagne pour un non «de gauche» le 29 mai. «Cette crise est le résultat direct des choix politiques faits par les gouvernements des pays de l'Union et par la Commission européenne, qui donnent à la concurrence et au marché priorité sur toute autre considération comme la coopération, la solidarité, la justice sociale».

En niant toute base objective à la crise du capitalisme européen et mondial, et en présentant les manifestations de celle-ci à l'échelle «économique, sociale et environnementale» comme la conséquence de mauvais «choix politiques», Nikonoff se pose ouvertement en défenseur du système de profit. Il ne cherche pas d'ailleurs à cacher que son organisation «roule» pour le PS, pour dire les choses crûment.

«Une victoire du non stimulera à coup sûr les luttes sociales et syndicales. (...) Cette victoire conduira de surcroît à une clarification de la position du Parti socialiste et des Verts sur la question centrale de notre époque : la question libérale. Cette clarification pouvant arriver à maturité au moment des élections présidentielles et législative de 2007, celles-ci pourraient alors se présenter non plus sous la simple forme d'une alternance, mais bien d'une alternative.»

En parlant d'une éventuelle victoire du PS en 2007 comme d'une «alternative», Nikonoff ne s'embarrasse pas bien sûr de «détails» comme l'expérience du dernier gouvernement socialiste de Lionel Jospin qui a contribué à mettre en place les attaques contre la classe ouvrière. Ou le «projet pour 2007» du PS, récemment rendu public, et où l'on peut lire: «Les socialistes ne proposent pas une rupture avec l'économie de marché ou une sortie de la mondialisation; la pratique l'a démontré, le discours doit désormais l'assumer».

L'«extrême-gauche»

Attac est l'une des forces politiques courtisées par la LCR dans son projet de bâtir un grand parti «anti-capitaliste» rassembleur, et avec qui elle mène une campagne conjointe pour le non à la constitution «néo-libérale».

Le courant minoritaire du PS est un autre champ politique labouré par la Ligue. Christian Picquet, un membre dirigeant de la LCR, a récemment participé à un meeting conjoint avec le PCF à Paris dans le cadre de la campagne pour le non et pris place aux côtés du sénateur socialiste Jean-Luc Mélenchon, le plus vocal des tenants socialistes du non depuis le début de la campagne référendaire. L'intervention de Picquet se résumait à ces mots: «Le 29 mai, il faudra dire à Chirac: 'Vingt ans, ça suffit!'». Le non «de gauche» promis sur un ton radical par la LCR, et qui constitue l'essentiel de son activité politique depuis des semaines, se ramène en fin de compte à un vote de protestation contre Chirac.

La principale «prise» politique convoitée par la LCR, c'est toutefois le résidu moribond du stalinisme français constitué aujourd'hui par le PCF. Le dirigeant de longue date de la LCR, Alain Krivine, a exprimé le regret que «jusqu'à présent, la secrétaire nationale [du PCF] réserve sa participation aux seuls meetings du PCF, même s'ils sont ouverts à d'autres forces, dont la LCR».

Krivine déplore particulièrement la présence d'éléments au sein de la direction du PCF «qui refusent toute alliance 'minorisante' avec la LCR et s'efforcent de tout faire pour sauvegarder demain l'alliance avec le PS, utilisant cette formule selon laquelle le 'oui' n'est pas 'que de droite'».

Voilà qui ne saurait être plus clair : la LCR court après le PCF, lequel ne pense qu'à «sauvegarder demain l'alliance avec le PS». Par un chemin peut-être plus tortueux que celui emprunté par Attac par exemple, la LCR aboutit en fin de compte au même endroit : l'orbite politique du PS.

Quant à Lutte Ouvrière, sa position sur le référendum du 29 mai est dominée par la même passivité politique mise en évidence au second tour de l'élection présidentielle de 2002. L'action politique des travailleurs, en ce qui concerne LO, est un acte réactionnaire. Dans un éditorial paru le 18 mars dans le journal dont l'organisation tire son nom, Arlette Laguiller écrit ce qui suit:

«Pendant et après les manifestations du 10 mars, on a entendu dire qu'il fallait transformer leur succès en un succès du vote "non" au référendum. Tous ceux qui disent cela trahissent les intérêts des travailleurs. Il ne faut pas que le mécontentement qui monte soit détourné vers les urnes. (....) C'est dans les entreprises, dans la rue, que nous sommes forts.»

Le troisième groupe qui, après la LCR et LO, se réclame du trotskysme en France, le Parti des travailleurs, a pris une position politiquement répugnante sur le référendum du 29 mai.

S'exprimant à la une de son journal Informations Ouvrières du 10 mars, son secrétaire national Daniel Gluckstein, écrit: «Le Parti des travailleurs milite pour que tous ceux qui sont engagés aujourd'hui dans l'action pour les revendications saisissent que l'origine des attaques dont ils sont l'objet, c'est l'Union européenne, que ces revendications, pour être satisfaites, exigent qu'un coup d'arrêt soit porté aux directives européennes».

Depuis le numéro du 23 décembre 2004, Informations Ouvrières ne cesse de claironner : «Pour la victoire du Non à la constitution européenne ! Pour l'Europe des peuples libres et des nations souveraines. Non à la régionalisation, non à l'intercommunalité forcée, non aux privatisations, Défense des services publics, Défense des 36000 communes, Défense de la République une, indivisible et laïque. Libérons-nous du carcan de l'Union européenne ! Union libre et fraternelle des peuples de l'Europe !»

Par ce discours aux forts relents nationalistes, le PT fait un pas certain dans la direction des opposants de droite, et d'extrême-droite, à la constitution européenne. Il facilite les efforts de l'élite dirigeante française et européenne visant à discréditer toute opposition à son projet constitutionnel d'une Europe capitaliste «forte» comme étant exclusivement motivée par un point de vue nationaliste borné.

C'est clairement le cas pour le PT. Mais le même nationalisme rétrograde figure également, sous une forme plus voilée, au coeur de la position mise de l'avant par la LCR, Attac et cie. Ces forces sèment l'illusion que l'État national peut toujours, avec suffisamment de volonté politique, contrôler le capital financier global et lui arracher des concessions supposées garantir le maintien d'une «Europe sociale» sans toucher à ses fondations capitalistes.

L'opposition des travailleurs français et européens à l'Union européenne doit se baser sur une toute autre orientation politique, une orientation internationaliste : celle des États unis socialistes d'Europe, dans une lutte commune avec la classe ouvrière américaine et mondiale contre le capitalisme global et pour le socialisme.