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Le CV politique de Benoît XVI: théocratie et réaction sociale

Par Joseph Kay
Article original paru 22 Mai 2005

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Le choix du cardinal Joseph Ratzinger comme nouveau pape est une claire indication que le Vatican va chercher à user de son influence pour promouvoir les forces politiques les plus réactionnaires parmi les élites dirigeantes du monde entier, particulièrement en Europe.

Le long passé de Ratzinger comme homme de poigne imposant la doctrine de l'église et principal conseiller de Jean-Paul II indique clairement que devenu Pape Benoît XVI, il interviendra de façon agressive dans la politique, utilisant les questions comme l'avortement ou l'homosexualité pour favoriser le développement d'une base sociale pour des partis et une politique de droite.

Le nouveau pape entretient des liens étroits avec les factions ultra conservatrices au sein de l'Eglise catholique, telle l'Opus Dei, qui sont ouvertement hostiles au principe démocratique fondamental de séparation de l'église et de l'état et qui tentent de placer l'Eglise au-dessus de l'autorité civile. Les partis de droite adoptent de plus en plus de telles tendances théocratiques dans leur arsenal idéologique pour attaquer tous les acquis sociaux et démocratiques gagnés au cours du vingtième siècle.

Un des exemples les plus flagrants d'intervention de Ratzinger dans la politique d'un pays fut son rôle dans les élections présidentielles américaines de 2004. Un certain nombre d'évêques catholiques américains déclarèrent publiquement lors de la campagne présidentielle qu'ils refuseraient la communion au candidat démocrate, John Kerry, catholique, du fait de son soutien au droit à l'avortement.

En juin 2004, Ratzinger publia un recueil de conseils à l'intention des évêques américains qui, en fait, donnait l'approbation du Vatican aux représentants de l'Eglise utilisant la question de l'avortement pour dissuader les gens de voter pour le candidat démocrate. Dans son courrier à l'évêque de Washington DC, Ratzinger écrivit : « Un catholique serait coupable de coopération formelle avec le mal, et de ce fait indigne de se présenter pour recevoir la communion, s'il votait délibérément pour un candidat précisément du fait de la position permissive de ce candidat sur les questions de l'avortement et/ou de l'euthanasie. »

Faisant clairement référence à Kerry, Ratzinger déclara qu'un "homme politique catholique faisant assidûment campagne et votant pour des lois permissives sur l'avortement et l'euthanasie » devrait se voir refuser la communion.

Puisque le Vatican s'était officiellement opposé à la peine de mort et avait dénoncé l'invasion américaine de l'Irak, Ratzinger fut obligé d'avoir recours à la casuistique pour justifier la raison pour laquelle il dut placer la désapprobation de l'église sur Kerry plutôt que sur Bush, qui avait non seulement conduit l'attaque en Irak sans avoir été provoqué mais qui en tant que gouverneur du Texas avait approuvé plus de 140 exécutions. « Toutes les questions n'ont pas le même poids moral que l'avortement et l'euthanasie », écrivit-il. « Il peut y avoir une légitime diversité d'opinion parmi les catholiques sur la question de la guerre ou de l'application de la peine de mort, mais il ne peut y en avoir en matière d'avortement et d'euthanasie ».

Ce ne fut pas une pure coïncidence si la déclaration de Ratzinger fut publiée juste quelques mois avant les élections. Une semaine avant la déclaration de Ratzinger, Bush s'était rendu en visite au Vatican. D'après le National catholic reporter, Bush se plaignit auprès du Cardinal Angelo Sodano, secrétaire d'état au Vatican, que «les évêques américains ne sont pas tous avec moi ». Il demanda à l'Eglise de faire pression sur les évêques aux Etats-Unis pour qu'ils prennent une position plus manifeste sur des questions culturelles telles que l'avortement et le mariage homosexuel.

Les remarques de Ratzinger exprimèrent clairement la position de l'Eglise : quiconque voterait pour Kerry serait déclaré entretenir « une coopération formelle avec le mal ». Son intervention contribua à faire augmenter le soutien des catholiques pour Bush de 46 pour cent en 2000 à 52 pour cent en 2004.

Une autre déclaration de Ratzinger, datée d'août 2004, avait pour intention de lancer l'Eglise catholique sur l'arène de la politique en Europe, arguant que la Turquie ne devrait pas être acceptée au sein de l'Union européenne. Ratzinger dit dans un entretien au quotidien français Le Figaro qu'« au cours de l'histoire, la Turquie a toujours représenté un continent différent, en contraste permanent avec l'Europe. Ce serait une erreur que de rendre identiques ces deux continents. Cela signifierait une perte de richesse, la disparition de la culture au profit de l'économie ».

Il fit ouvertement reposer son opposition à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne sur le fait que la Turquie est un pays musulman. « L'Europe possède une culture qui lui confère une identité commune. Les racines qui ont forméce continent sont celles du christianisme ».

Cette perspective, qui en appelle au chauvinisme religieux et au racisme anti-musulman, est devenue la caractéristique des courants politiques de droite et fascistes de bien des pays européens.

La trajectoire de la politique de l'Eglise sous le règne du pape Benoît XVI est aussi annoncée par les factions au sein de l'église catholique qui ont soutenu le plus fermement son élévation au rang de pape. On trouve parmi elles l'Opus Dei ainsi que Communion et Libération.

On dit que Ratzinger a rapidement gagné le soutien énergique de trois membres proéminents de l'Opus Dei. Citant les aides de deux cardinaux non américains, le Washington Post écrivit le 21 avril que Ratzinger était soutenu par Julian Herranz d'Espagne, chef du département de l'interprétation des textes législatifs au Vatican, Dario Castrillon Hoyos de Colombie, chef du département chargé du clergé et Alfonso Lopez Trujillo de Colombie, président du conseil pontifical pour la Famille.

Des membres de l'Opus Dei avaient été soutenus avec force par Jean Paul II qui avait aussi canonisé Josemaria Escriva, fondateur de l'Opus Dei. Escriva, puissant partisan du gouvernement fasciste de Franco en Espagne, dit un jour d'Hitler qu'il était « le sauveur de l'Eglise espagnole » pour son rôle dans la guerre civile espagnole.

Trujillo, en tant que président du Conseil Pontifical pour la Famille, a joué un rôle important dans la promotion d'une ligne réactionnaire sur l'avortement, la contraception, l'homosexualité, et autres questions culturelles. Dans une déclaration du 14 juin 2003, intitulée « la Famille et la Vie en Europe », il prôna une plus grande intervention de l'Eglise dans la politique européenne arguant que « bien des propositions malhonnêtes et immorales mises en place dans différents pays européens auraient pu être stoppées à temps si les évêques étaient intervenus »

Il demanda que l'on mette en place un "observatoire" qui « servirait à contrôler mouvements apostoliques, hommes politiques et législateurs afin de les informer et de les former ».

L'Opus Dei entretient des liens étroits avec le Parti populaire espagnol dont les racines remontent au régime de Franco et des membres de cette organisation occupaient des positions gouvernementales élevées dans le gouvernement du Parti populaire de José Maria Aznar qui fut évincé en mars 2004.

Cette faction d'extrême droite de l'Eglise catholique gagne du terrain au sein de l'establishment politique américain, notamment de par l'influence du sénateur républicain, Rick Santorum. Santorum démentit être membre de l'Opus Dei, néanmoins, il fut un visiteur de marque au congrès célébrant le centième anniversaire de la naissance de Escriva, qui se tint à Rome en janvier 2002. Il y dénonça le discours du président John F. Kennedy en 1960, dans lequel Kennedy déclarait qu'il défendait la séparation de l'église et de l'état et qu'il ne permettrait pas à l'Eglise d'influencer ses décisions politiques.

L'autre faction catholique qui soutint Ratzinger était Communion et Libération, qui exerce une influence particulière dans le milieu des affaires et de l'élite politique italiens. Dans un article daté du 21 avril, le Los Angeles Times fit remarquer qu'un « signe révélateur » de la montée de Ratzinger « s'était produit aux funérailles de Monsignor Luigi Giussani, fondateur de Communion et Libération ». A la messe qui se déroula en février, le premier ministre italien, Silvio Berlusconi était présent parmi d'autres. « Représentant le pape malade, Ratzinger célébra la messe de funérailles à la place du cardinal Dionigi Tettamanzi, archevêque de Milan, contrairement aux attentes de certains. L'homélie de Ratzinger suscita des applaudissements enthousiastes. Les fidèles répondirent aux remarques de Tettamanzi, le candidat rival au poste de pape, par le silence.

Tettamanzi avait été soutenu par des factions plus libérales de la hiérarchie catholique. L'accueil enthousiaste reçu par Ratzinger était le signe qu'il jouissait du ferme soutien de l'aile droite de l'élite dirigeante italienne.

Très récemment, on entendit parler de Communion et Libération car un de ses membres, Rocco Buttiglione, fut choisi par l'Italie pour diriger le Bureau de la justice et des affaires internes dans l'Union européenne. Le parlement européen lui refusa le poste car il avait déclaré que l'homosexualité était « un péché ». Dans la politique italienne, Buttiglione est au premier plan d'un mouvement pour l'abrogation des droits à l'avortement.

Les médias américains ont quasiment gardé le silence sur l'intervention réactionnaire du cardinal Ratzinger dans les élections de 2004. Il en a été de même du parti démocrate. John Kerry, cible directe de l'intervention de Ratzinger a dit de son élévation au rang de pape que c'était « un grand moment d'espoir, de renaissance et de possibilités pour l'Eglise catholique ». Il dit que son épouse et lui-même priaient pour que « le pontificat du pape Benoît XVI touche le monde comme l'avait fait le pape Jean-Paul II ».

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