Les étudiants de l’Université de Columbia défient la répression et poursuivent leur mouvement de protestation pro-palestinien alors que les actions de solidarité s’étendent à d’autres campus

Les étudiants et professeurs de l’Université de Columbia continuent de défier la répression policière des manifestations pro-palestiniennes. Ils ont occupé ce dimanche la ‘Pelouse Sud’ de l’Université pour la cinquième journée consécutive. Au lieu de faire taire l’opposition au génocide, l’attaque brutale des droits démocratiques par l’université, orchestrées et soutenues par le gouvernement Biden et les deux grands partis du patronat, ont ravivé les manifestations sur les campus du pays.

Des policiers en tenue anti-émeute montent la garde alors que des manifestants scandent des slogans à l’extérieur du campus de l’Université de Columbia, le jeudi 18 avril 2024, à New York [AP Photo/Mary Altaffer]

La classe ouvrière de New York et de tout le pays soutient de plus en plus les étudiants et les travailleurs arrêtés, expulsés ou licenciés pour avoir manifesté pacifiquement contre la guerre d’extermination américano-israélienne à Gaza.

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Au milieu d’une mobilisation massive de policiers anti-émeutes et d’équipes de surveillance de la ville de New York, le maire démocrate, Eric Adams, un ancien policier, a attaqué les manifestants pro-palestiniens dimanche en publiant une déclaration qui lançait ce sinistre avertissement:

Nous ne serons pas une ville de non-droit, et les agitateurs professionnels qui cherchent à profiter du conflit actuel au Moyen-Orient pour semer le chaos et la division n’y parviendront pas.

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Le président Joe Biden a ajouté sa voix à l’attaque bipartite de plus en plus virulente contre le droit de manifester contre la guerre et les massacres, fondée sur le mensonge que les campus sont devenus des centres d'antisémitisme. Joe Biden, principal fournisseur d’armes et complice du Premier ministre israélien Netanyahou, a publié cette déclaration dimanche:

Même ces derniers jours, nous avons été témoins de harcèlement et d’appels à la violence contre les Juifs. Cet antisémitisme flagrant est répréhensible et dangereux – et il n’a absolument pas sa place sur les campus universitaires, ni nulle part dans notre pays.

Dans leurs déclarations, les responsables démocrates ont faussement laissé entendre que les manifestants pro-palestiniens incitaient à la violence. Entre temps, les démocrates se sont alliés aux républicains fascistes à la Chambre pour adopter une série de lois bipartites prévoyant 95 milliards de dollars pour continuer à financer la guerre menée par les États-Unis et l’OTAN contre la Russie en Ukraine, augmenter la fourniture d’armes pour le génocide d’Israël à Gaza et intensifier les préparatifs de guerre contre la Chine.

Les déclarations de Biden et d’Adams montrent clairement que l’attaque menée contre les étudiants de Columbia n’est pas juste une question d’excès de la part de l’administration de l’Université, mais qu’elle fait partie d’une attaque politique coordonnée visant à criminaliser et à réprimer l’opposition à la politique de l’impérialisme américain.

L’arrestation, la semaine dernière, de plus de 100 étudiants de Columbia et du Barnard College, qui organisaient un campement pacifique pour protester contre le génocide de Gaza, représentait une escalade majeure dans l’assaut contre les droits démocratiques, non seulement à New York mais dans tout le pays et à l’international.

La présidente de l’université Nemat «Minouche» Shafik a d’abord suspendu les étudiants, puis a fait appel à la police de New York pour les expulser en raison d’une prétendue «intrusion». Des étudiants ont déclaré avoir été retenus par la police et attachés avec du serre-câble pendant plus de sept heures.

Les étudiants de Barnard qui ont été arrêtés ont été expulsés des logements du campus, après avoir reçu un préavis de seulement 15 minutes pour retirer leurs affaires. Ils ont également perdu l’accès aux réfectoires de l’université. Les étudiants de Columbia n’ont pour l’instant pas été expulsés et peuvent toujours manger dans les réfectoires, mais ils sont lock-outés de tous les autres bâtiments du campus.

La police a imposé un confinement à l’Université de Columbia. Des centaines de policiers, dont beaucoup équipés de casques anti-émeutes et de matraques, ont encerclé le campus. Les portes du campus restent bouclées. Seuls les étudiants et professeurs présentant une pièce d’identité sont autorisés à entrer. Les professeurs ont déclaré avoir perdu leur carte d’accès aux bâtiments de Columbia et avoir besoin d’escortes de sécurité pour entrer dans les bâtiments.

Selon un post Twitter/X de WKCR, la radio étudiante de l’Université de Columbia, un agent de sécurité a tenté d’interrompre la diffusion en direct des manifestations, ne cédant qu’après l’intervention d’un membre de la faculté de Columbia.

Au-delà de Columbia, l’assaut contre la parole pro-palestinienne sur les campus universitaires américains comprend des suspensions d’étudiants à l’Université Vanderbilt de Nashville (Tennessee) et au Pomona College en Californie du Sud, ainsi que l’interdiction effective de toutes les manifestations à l’Université du Michigan sous prétexte d’empêcher les «perturbations».

Ansa Tabassum, major de promotion de l’Université de Californie du Sud, n’a pas été autorisée à prononcer son discours de remise des diplômes en raison de ses prises de position pro-palestiniennes. Un certain nombre de professeurs d’universités de la ville de New York ont été licenciés pour s’être exprimés publiquement en faveur d’étudiants pro-palestiniens.

Les agissements de l’administration de Columbia ont été dénoncées par des universitaires, des étudiants et des jeunes dans tout le pays. Au lieu d’étouffer les manifestations, elles semblent avoir enhardi la contestation. Selon des informations diffusées sur les réseaux sociaux, des tentes sont réapparues dimanche soir à Columbia pour remplacer celles qui avaient été démolies par la police de New York.

Plusieurs manifestations de solidarité avec les étudiants victimisés ont eu lieu sur le campus et dans les environs. Un «campement de solidarité avec Gaza», semblable à celui qui a été démantelé par la police de New York, a été érigé à la New School, à quelques kilomètres de Columbia.

Vendredi, des centaines d’étudiants de l’Université de Yale, dans le Connecticut, ont organisé une manifestation de solidarité devant le Schwarzman Center, le principal bâtiment de la vie étudiante. Des étudiants de l’Ohio et de Caroline du Nord ont également installé des campements de solidarité. Des débrayages de solidarité sont prévus cette semaine, notamment lundi à l’Université de New York.

Le corps enseignant s’est lui aussi mobilisé pour soutenir les droits démocratiques des manifestants de Columbia. Vendredi, les sections de Columbia et de Barnard de l’Association américaine des professeurs d’université ont publié une déclaration dénonçant les actions de Shafik et exigeant que soient immédiatement levées les suspensions d’étudiants.

Dimanche matin, Tao Leigh Goffe, professeure à la City University of New York (CUNY) et artiste en résidence à Columbia, a annoncé qu’elle quittait son poste à Columbia. Plus de 100 ‘Public Interest Honourees’, titre décerné par la faculté de droit de Columbia aux étudiants effectuant un travail bénévole et participant à des programmes de bourses liés à des questions sociales spécifiques, ont publié une déclaration dénonçant les attaques de l’université et retirant leur consentement à l’utilisation de leur image dans le matériel promotionnel de l’université.

La répression à Columbia a eu lieu immédiatement après l’audition style McCarthy de Shafik par la Commission éducation et main-d’œuvre de la Chambre des députés. L’objectif de cette audition était, comme l’écrit l’IYSSE dans sa déclaration sur l'événement, «rien moins qu'une purge du corps enseignant et étudiant des universités, afin de subordonner complètement l'enseignement supérieur à la machine de guerre».

Comme l’a expliqué Joseph Kishore, candidat à la présidence du Parti de l’égalité socialiste (SEP), dans une déclaration:

La défense des droits démocratiques et l’opposition à la guerre doivent être basées sur la classe ouvrière qui produit toutes les richesses de la société et a donc le pouvoir de contrer les conspirations réactionnaires des oligarques capitalistes. Le SEP appelle les travailleurs à se mobiliser et à exiger la fin de la persécution des étudiants. Les jeunes ne peuvent pas mener cette bataille seuls! Ils ont besoin du soutien de la classe ouvrière dans son ensemble.

Samedi, les membres de l’IYSSE ont transmis ce message directement à la classe ouvrière, en distribuant la déclaration de Kishore dans un centre de transport public, un centre de distribution d’Amazon, un site d’UPS et un hôpital.

(Article paru en anglais le 22 avril 2024)

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