Perspectives

Biden condamne l’attaque de l’Iran contre Israël: Une étude de cas sur l’hypocrisie de l’impérialisme

Les puissances impérialistes ont réagi aux frappes iraniennes contre Israël samedi par une vague de condamnations.

«Je condamne ces attaques avec la plus grande fermeté», a déclaré le président américain Joe Biden, réaffirmant «l’engagement sans faille des États-Unis en faveur de la sécurité d’Israël».

Le système de défense aérienne israélien Iron Dome intercepte des missiles tirés depuis l’Iran, dans le centre d’Israël, dimanche 14 avril 2024. [AP Photo/Tomer Neuberg]

Le groupe des puissances impérialistes du G7 a déclaré dans un communiqué: «Nous condamnons sans équivoque et dans les termes les plus forts l’attaque directe et sans précédent de l’Iran contre Israël». Ajoutant ensuite: «L’Iran a fait un pas de plus vers la déstabilisation de la région et risque de provoquer une escalade régionale incontrôlable.»

Ces déclarations des bellicistes impérialistes, répétées par toutes les grandes puissances de l’OTAN, sont le comble de l’hypocrisie. La force qui «provoque une escalade régionale incontrôlable» au Moyen-Orient est Israël et ses bailleurs de fonds impérialistes.

Il faut rappeler les événements. La frappe de l’Iran était une réponse à l’attaque israélienne du 1er avril contre une ambassade iranienne en Syrie, qui a tué sept officiers militaires iraniens de haut rang, dont deux généraux.

En réponse à l’attaque israélienne, manifestement illégale et meurtrière, sur ce qui était en fait le sol iranien, les puissances impérialistes l’ont effectivement approuvée. L’ambassadeur américain à l’ONU, Robert Wood, a déclaré que «des dirigeants et des éléments terroristes étaient prétendument présents dans cette installation». Les États-Unis, la France et le Royaume-Uni ont opposé leur veto à une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU condamnant l’attaque israélienne.

Aujourd'hui, les impérialistes s’empressent de condamner la réponse de l’Iran à l’action d’Israël. C’est d’autant plus frappant que l’action de l’Iran était largement symbolique. Le gouvernement iranien a annoncé l’attaque de samedi aux pays de la région 72 heures à l’avance afin d’en limiter l’impact. Comme l’a rapporté Reuters dimanche, «l’Iran a donné un large préavis quelques jours avant l’attaque de drones et de missiles de samedi contre Israël, ce qui a permis d’éviter des pertes massives et une escalade ».

Les puissances impérialistes affirment qu’elles et leurs mandataires peuvent tuer autant de personnes qu’elles le souhaitent, procéder à des assassinats ciblés et agir en violation totale de tout ce qui ressemble au droit international. Mais toute réponse, même minimale, est dénoncée comme un crime. C’est la loi fondamentale du colonialisme et de l’impérialisme.

Alors que Biden «condamne» les actions de l’Iran, il ne tient pas le même langage à l’égard de l’assaut d’Israël contre Gaza, qui est financé, armé et soutenu politiquement par les États-Unis et d’autres puissances impérialistes.

Israël mène activement un génocide contre la population de Gaza, ayant déjà tué au moins 40.000 personnes. Il déplace, affame et bombarde systématiquement une population entière de 2,2 millions de personnes et assassine méthodiquement et délibérément des médecins et des travailleurs humanitaires.

Le génocide de Gaza est en train de se transformer en une guerre régionale, qui peut très rapidement entraîner l’ensemble de la planète.

Dans la mesure où le gouvernement Biden déclare – généralement de manière moins directe que par des déclarations officielles – qu’il préférerait qu’Israël ne réponde pas par des frappes militaires immédiates, cela est déterminé par des considérations tactiques.

Certaines de ces considérations ont été exposées dans une tribune publiée dans le New York Times par Bret Stephens sous le titre «Pour Israël, la vengeance devrait être un plat qui se mange froid».

«Dans le cadre de la légitime défense, écrit Stephens, Israël a tous les droits moraux et légaux de répondre de la même façon, voire même plus. Il ne suffit pas qu’Israël démontre sa capacité de défense, comme il l’a fait ce week-end. Il doit également rétablir sa capacité de dissuasion. En d’autres termes, il doit montrer aux dirigeants iraniens que le prix à payer pour officialiser leur guerre contre Israël sera insupportablement élevé et ne devrait donc pas être répété.»

Stephens conseille toutefois de ne pas se lancer dans un assaut généralisé contre l’Iran. «Israël a une guerre inachevée contre le Hamas à Gaza, et une attaque israélienne directe contre l’Iran pourrait déclencher une deuxième guerre à grande échelle contre le Hezbollah au Liban, si ce n’est contre l’Iran lui-même. La plupart des Israéliens comprennent que cette guerre devra être menée tôt ou tard – peut-être avant la fin de l’été – et qu’elle sera probablement beaucoup plus difficile pour eux que la guerre de Gaza ne l’a été jusqu’à présent. [C’est nous qui soulignons]

En d’autres termes, il faut d’abord terminer le génocide à Gaza, avant de passer à la tâche «beaucoup plus difficile» de la guerre contre l’Iran.

Une partie de l’establishment politique américain plaide ouvertement en faveur d’une guerre totale, affirmant que le gouvernement Biden ne va pas assez loin dans son soutien à une guerre israélienne contre l’Iran. Le Wall Street Journal a écrit dans un éditorial: «L’attaque devrait au moins inciter Biden et ses collègues démocrates à mettre fin à leur guerre froide avec Israël à propos de Gaza et à reconnaître qu’il s’agit en réalité d’une guerre contre l’Iran.»

L’éditorial poursuit: «Les dirigeants des deux partis devraient également commencer à dire la vérité aux Américains sur le nouveau monde de menaces globales. La Russie, la Chine, l’Iran et la Corée du Nord sont tous en marche et travaillent ensemble.»

Le cabinet israélien délibère depuis un jour sur les mesures à prendre, et il y a manifestement des divisions au sein du régime lui-même. En outre, si Israël est le chien d’attaque de l’impérialisme au Moyen-Orient, les États-Unis ne contrôlent pas totalement ce qu’ils vont faire. Quoi qu’il en soit, le gouvernement Biden a réaffirmé que si Israël passe à l’action, il bénéficiera du soutien total du gouvernement américain.

Lors de l’émission Meet the Press, le porte-parole de la Maison-Blanche, John Kirby, a déclaré: «C’est aux Israéliens de décider s’ils vont réagir et comment ils vont le faire.»

À la question «Si Israël décide de procéder à des frappes de représailles, les États-Unis soutiendront-ils Israël?». Kirby a répondu que «le soutien des États-Unis à l’autodéfense d’Israël restera inébranlable. Il ne changera pas.»

Les États-Unis ont réagi aux événements du 7 octobre en lançant une grande offensive militaire dans tout le Moyen-Orient, avec l’Iran pour cible principale. En l’espace de quelques jours, les États-Unis ont envoyé une armada de navires de guerre et des centaines d’avions dans la région, qu’ils ont utilisés pour lancer des dizaines de frappes aériennes illégales au cours des six derniers mois.

L’offensive américaine au Moyen-Orient est un élément crucial d’une guerre mondiale en cours, dont la Russie et la Chine sont les principales cibles. L’assujettissement de l’Iran, qui se trouve au cœur de l’Eurasie, est une composante essentielle de la campagne de domination militaire mondiale des États-Unis.

Quels que soient les développements immédiats des prochains jours, la guerre régionale au Moyen-Orient, qui s’inscrit dans le cadre d’une guerre mondiale en expansion, échappe dangereusement à tout contrôle. Le monde n’a jamais été aussi proche d’un conflit nucléaire depuis la Seconde Guerre mondiale. Rien ne peut arrêter cette guerre mondiale en expansion si ce n’est le développement d’un mouvement anti-guerre de masse orienté vers la classe ouvrière et ancré dans celle-ci.

(Article paru en anglais le 15 avril 2024)

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