Les investissements massifs dans l’automobile au Brésil et en Argentine démontrent que le capitalisme reconnaît en Lula de « la marée rose » et le fasciste Milei de loyaux serviteurs

Les annonces d'investissements de milliards de dollars par les grandes entreprises automobiles au cours des derniers mois au Brésil ont montré que le gouvernement de la « marée rose » du président Luiz Inácio Lula da Silva du Parti des travailleurs (PT) et son appareil syndical sont reconnus comme des défenseurs fiables des intérêts de la classe dirigeante régionale et du capital international.

Le PDG de Stellantis Carlos Tavares avec le président Luiz Inácio Lula da Silva à Brasilia [Photo: Ricardo Stuckert/PR]

Le 6 mars à Brasilia, le PDG de Stellantis, Carlos Tavares, a célébré aux côtés de Lula l'annonce officielle de l'investissement de 6 milliards de dollars de l'entreprise dans le pays.

Emanuele Capellano, chef des opérations de Stellantis pour l'Amérique latine, a également profité de l'occasion pour annoncer le premier investissement significatif de l'entreprise en Argentine sous le gouvernement de « thérapie de choc » du président fasciste Javier Milei.

Capellano a déclaré : « Aujourd'hui, nous célébrons un jour important pour Stellantis au Brésil, mais cela ne veut pas dire que nous n'avons pas de projets pour l'Argentine, où nous sommes leaders du marché et disposons de deux usines importantes. »

Les annonces de Stellantis ont été faites trois mois après que le président argentin a annoncé, après les avoir exigées, de vastes réductions des subventions aux prestations sociales, de la suppression de centaines de réglementations des entreprises, de la limitation du droit de grève des travailleurs et la fin du contrôle des prix, face à une hausse continue des prix des biens de consommation de base.

Durant les élections, Milei a dénoncé à plusieurs reprises toute opposition à sa personne en la qualifiant d’opinion de « communistes ». Au gouvernement, Milei a déclaré fin janvier que le président colombien de la « marée rose », Gustavo Petro, était un « communiste meurtrier ». Le président argentin a répondu aux manifestations massives depuis son élection en redoublant ses menaces de répression violente et en déployant les policiers anti-émeutes.

Bien que certaines mesures aient été retardées par le législatif, Milei disposera des mois et des années à venir pour approfondir l’assaut généralisé contre tous les acquis sociaux de la classe ouvrière argentine.

Malgré les différences entre les types politiques représentés par Lula et Milei, tous deux sont déterminés à défendre l’ordre social capitaliste en Amérique latine.

Au cours de l'année dernière, encore plus fortement que lors de ses deux précédents mandats présidentiels, Lula s'est engagé à procéder à des coupes massives dans les domaines sociaux, alors même que des milliers d'emplois étaient supprimés et que le niveau de vie de la classe ouvrière diminuait avec l'aide de l’appareil syndical de plus en plus intégré au gouvernement. Dans l’industrie automobile, la réduction de la main-d’œuvre totale a été encore plus importante.

De telles mesures sont considérées par le capital international et la bourgeoisie brésilienne comme promettant des profits massifs. Cela se reflète dans la hausse de l'indice de confiance des entreprises (ICE) de l'Institut brésilien d'économie de la Fondation Getúlio Vargas, basé sur 49 segments de l'économie brésilienne. Même si l'ICE a reculé de 0,7 point en février, il avait accumulé une hausse de 4,5 points au cours des neuf mois précédents.

Les investissements des constructeurs automobiles au Brésil et en Argentine sont accompagnés de l'achat de participations dans des projets miniers de lithium, de cuivre et d'autres minéraux clés. Au Brésil, la société allemande Volkswagen est en concurrence avec la société chinoise BYD pour l'achat de la société minière Sigma Lithium dans la vallée de Jequitinhonha, dans l'État du Minas Gerais. Le site possède un gisement estimé à plusieurs dizaines de millions de tonnes de minerai de lithium. En Argentine, Stellantis a conclu en octobre un accord de 90 millions de dollars avec Argentina Lithium & Energy Group (ALE), permettant au constructeur automobile d’acheter jusqu'à 15.000 tonnes de lithium par an au cours des sept prochaines années.

Ces accords commerciaux et investissements font partie des conflits de plus en plus féroces pour les marchés, les matières premières et les avantages géopolitiques entre les puissances impérialistes elles-mêmes et ciblant immédiatement leurs concurrents économiques et tout particulièrement la Chine.

Sur fond du développement rapide d’une nouvelle guerre impérialiste mondiale, les appels de personnalités telles que Lula et d’autres représentants de la « marée rose » en faveur d’un nouvel « ordre multipolaire » sont de plus en plus révélés comme étant vides de sens. L’idée selon laquelle l’impérialisme des États-Unis et de l’OTAN pourrait céder aux pressions pour qu’il accepte pacifiquement le défi posé à ses intérêts régionaux en Amérique latine, ou même que la poursuite des investissements de la Chine pourrait garantir un développement capitaliste durable dans la région, est totalement en contradiction avec la réalité.

Dans le contexte d'une crise du capitalisme mondial qui s’aggrave, les intérêts de classe de la bourgeoisie latino-américaine ne peuvent être poursuivis qu'au moyen de mesures brutales d'État policier et, en dernier ressort, en répondant aux besoins industriels et économiques de l'impérialisme pour mener une troisième guerre mondiale.

En fait, toutes les actions entreprises par Lula depuis sa propre élection n’ont pas été contre, mais dans le sens de la préparation d’un État policier au Brésil. Lula a répondu aux preuves confirmant la participation des généraux aux côtés de l'ancien président Jair Bolsonaro à la planification, à la préparation et à l'exécution de la tentative de coup d'État du 8 janvier avec l'expansion des investissements dans les forces armées.

Plus récemment, il a notoirement annulé un événement prévu pour marquer le 60e anniversaire du coup d’État militaire du 31 mars 1964 soutenu par la CIA au Brésil afin d’apaiser les forces armées. Cette relation harmonieuse cultivée par le PT ne peut progresser qu’en attaquant les travailleurs et les jeunes.

Toute mobilisation de la classe ouvrière latino-américaine qui menace les profits des entreprises se heurtera à une violence brutale de la part des factions fascistes ou des factions dites « de gauche » de la bourgeoisie. Le fait que les sociétés transnationales considèrent les politiques de Milei et Lula comme de simples méthodes alternatives pour garantir leurs propres intérêts montre qu’il n’y a pas de véritable solution pour la classe ouvrière latino-américaine au sein du système politique capitaliste établi.

(Article paru en anglais le 22 mars 2024)

Loading