A Prague, Macron réitère son appel à l'envoi de troupes européennes en Ukraine

Le président de la République tchèque Petr Pavel, à gauche, accueille son homologue français Emmanuel Macron au château de Prague, en République tchèque, le mardi 5 mars 2024. [AP Photo/Petr David Josek]

Hier, Emmanuel Macron s'est rendu dans la capitale tchèque pour des discussions sur l'énergie nucléaire et sur l'escalade de la guerre de l'OTAN contre la Russie en Ukraine.

Les sondages montrent une opposition énorme en Europe, de 68 pour cent des Français et 80 pour cent des Allemands, à son appel à envoyer des troupes européennes en Ukraine. De plus, l'armée allemande a révélé des projets d'envoyer des missiles Taurus à longue portée en Ukraine pour frapper la Russie. Néanmoins, Macron a défendu ces propositions téméraires, qui ouvrent la voie à une escalade vers la Troisième Guerre mondiale entre l'OTAN et la Russie, avec recours à l'arme nucléaire.

Lors d'une conférence de presse avec le président tchèque Petr Pavel, il a dit: «Mes propos étaient clairs, assumés et précis. ... Ça fait deux ans maintenant que nous répétons à longueur de conférence de presse, la guerre revient sur le sol européen. Nous avons révélé l’étendue des matériels déjà livrés, les montants déjà livrés. Est-ce notre guerre ou n’est-ce pas notre guerre?»

En fait, une écrasante majorité des Français ne pense pas que c'est leur guerre. Mais Macron a rejeté avec mépris l'opinion publique, appelant à intensifier le partenariat de la France avec les États-Unis et la République tchèque pour envoyer de l'artillerie en l'Ukraine. Il a dit: «Nous abordons à coup sûr un moment de notre Europe où il conviendra de ne pas être lâches»

Macron a avoué que sa politique risquait une guerre nucléaire, mais a cyniquement rejeté la faute sur le président russe Vladimir Poutine. Il a dit: «Qui menace, quoi que nous fassions, quoi que nous disions, avec l’arme nucléaire? Le président Poutine. Tournez-vous tous pour lui demander quelles sont ses limites stratégiques. Mais si chaque jour nous expliquons quelles sont nos limites, face à quelqu’un qui n’en a aucune et a lancé cette guerre, je peux déjà vous dire que l’esprit de défaite est là qui rôde.»

Pourquoi cet esprit «rôde»-t-il autour des dirigeants européens? Le régime fantoche ukrainien qu'ils ont armé contre la Russie subit une débâcle, des centaines de milliers d'Ukrainiens sont morts et l'armée ukrainienne en retraite après avoir perdu Avdiivka. De plus, comme ils le savent tous, leurs plans d'escalade militaire sont profondément impopulaires.

Mais néanmoins, ils complotent pour intensifier les attaques contre la Russie, pariant que le Kremlin pourrait finalement être intimidé et reculer. L'aveu de Macron qu'il ne connaît pas les limites stratégiques de Poutine pour le recours aux armes nucléaires – comme son appel à ne pas divulguer d’éventuelles limites stratégiques européennes – souligne l'imprudence stupéfiante de cette politique.

Quand Macron rend l'agression russe entièrement responsable de la guerre, il raconte un mensonge contredit de manière flagrante par ses propos sur l'envoi de troupes en Ukraine. Il a cité les nombreuses escalades menées par l'OTAN en livrant des armes à Kiev, dont aucune n'a abouti à une action militaire russe ouverte contre l'OTAN. Il a conclu que la Russie ne décidera pas du déroulé de l'escalade militaire, en clair, que ce sont les puissances de l'OTAN, et non la Russie, qui mènent la guerre.

Macron a dit: «Car à chaque étape depuis deux ans, on disait, Si vous livrez des tanks, il y aura des représailles. Si vous livrez des avions, il y aura des représailles. Si vous envoyez des obus de moyenne portée, il y aura des représailles. Nous l’avons tous fait, après avoir tous dit qu’on ne le ferait pas. … Le pas d’escalade n’est pas défini par la partie russe, c’est défini par un consensus de tous.»

Cela revient à prétendre que Poutine, qui a averti qu'une nouvelle escalade de l'OTAN risquait de déclencher une guerre nucléaire mettant fin à la civilisation, est dans le bluff. Alors qu'il prétend que la guerre est le pure produit de l'agression russe, Macron affirme sans preuve que la Russie ne prendra pas de mesures drastiques et qu'un consensus au sein de l'OTAN pourra toujours contrôler l'ampleur de l'escalade militaire qu’il propose. Mais il n'y a aucune justification à cet argument complaisant.

Les médias sont complices des manœuvres des dirigeants de l'OTAN pour cacher le danger d'une guerre totale. Aucun des journalistes présents à la conférence de Macron avec Pavel n’a demandé ce qu'ils feraient si le Kremlin réagissait aux frappes de missiles Taurus allemands ou SCALP français en bombardant Berlin ou Paris. Personne n'a non plus demandé combien de millions de vies françaises Macron accepte de risquer dans l'escalade qu'il déclenche.

Mais on sait qu'un missile balistique intercontinental russe RS-28, avec 15 ogives nucléaires d'une puissance explosive totale de 50 millions de tonnes de TNT, peut anéantir un territoire de la taille de la France, le plus grand pays de l'UE en superficie.

Alors que Macron assurait à son auditoire qu'un «consensus» existe entre les puissances de l'OTAN, les divisions croissantes entre les puissances impérialistes étaient visibles à Prague, notamment entre la France et l'Allemagne.

Macron a passé une grande partie de son temps à Prague à promouvoir l'offre d’EDF de construire des centrales nucléaires en République tchèque. Prague est au centre des projets français d'exportation des centrales nucléaires à travers l'Europe de l'Est, région dominée économiquement par le capital allemand, notamment en Pologne, en Slovénie, en Bulgarie et en Roumanie. Lors de la visite de Macron, les responsables tchèques ont signé un accord avec la société française Orano sur l’approvisionnement en uranium.

Macron a souligné les tensions importantes entre Paris et Berlin en saluant la République tchèque pour son rôle dans l’Alliance nucléaire européenne. Cette alliance, regroupant 12 pays, s'est opposée avec succès aux efforts de Berlin pour bloquer la désignation de l'énergie nucléaire comme source d'énergie à faible émission de carbone. Macron a dit: «Ce n'est pas seulement une question d'énergie, ce n'est pas seulement une question de business. C'est une question de stratégie, d'autonomie. ... Nous devons faire face au changement climatique et décarboner notre économie.»

Il a ajouté: «La stratégie française se fonde sur plus d'efficacité, plus de renouvelable, plus de nucléaire. Aujourd’hui, cette stratégie est la stratégie européenne».

Mais le problème du changement climatique ne peut pas être résolu dans le cadre réactionnaire du système capitaliste de l'État-nation. Les États les plus puissants ne coopèrent pas pour résoudre la crise climatique, mais se font la guerre.

Une profonde opposition existe parmi les travailleurs et les jeunes à l'escalade militaire que les chefs d'État de l'OTAN mettent en mouvement. L'opposition de la grande majorité des Allemands et des Français en est un signe. Il convient également de rappeler les sondages de 2015 qui ont révélé que seulement 29 pour cent des jeunes Français accepteraient de se battre pour leur pays, mais 62 pour cent voulaient participer à un soulèvement de masse.

Il faut alerter les travailleurs et les jeunes d’Europe et du monde et les mobiliser contre le danger d’une escalade militaire catastrophique. Comme l’a écrit le WSWS dans sa déclaration d’hier, «Les USA et l'OTAN risquent une guerre nucléaire en se préparant à attaquer la Russie»:

Le World Socialist Web Site dénonce la conspiration de l'impérialisme otanien pour entraîner l'humanité dans une catastrophe nucléaire. Il faut ôter le pouvoir à ces fauteurs de guerre. Leurs actes menacent de détruire la civilisation humaine.

Il faut organiser des manifestations de masse dans tous les pays pour exiger le retrait total des forces de l'OTAN d'Ukraine et la fin immédiate du conflit. Il faut lier ceci au développement d'un mouvement anti-impérialiste dans la classe ouvrière internationale, contrant la barbarie capitaliste avec le programme de la révolution socialiste mondiale.

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