Alors que près d‘un sixième de la population vit déjà sous le seuil de pauvreté, le gouvernement Macron radie massivement les chômeurs des listes de l'assurance-chômage. Son but est de développer en France un secteur massif de bas salaires.
L‘agence d‘enregistrement des chômeurs, Pôle Emploi, a publié la semaine dernière les résultats d‘un nouveau système de contrôle des chômeurs, mis en place et généralisé il y a un an et demi, sous le gouvernement Hollande.
L‘agence a déclaré avoir radié 14 pour cent des personnes qu‘elle avait contrôlées (270.000 à raison de 12.000 par mois) soit 37.800 personnes. La presse a généralement dû avouer que contrairement à la propagande patronale et gouvernementale, les contrôles n‘avaient pas révélé des hordes de « parasites » ne voulant pas travailler. Une écrasante majorité cherchait activement un emploi.
Ces contrôles et radiations font partie d‘un arsenal répressif de plus en plus draconien déployé contre les chômeurs et dont un des buts est de forcer les travailleurs dans des emplois de moins en moins bien payés et qualifiés.
Il y a actuellement en France, selon les chiffres de Pôle Emploi, 6,5 millions de chômeurs toutes catégories. Cela représente 10 pourcent de la population du pays et environ 20 pour cent de sa population active. Des estimations officieuses parlent de près de 5 millions de personnes en plus, qui n‘entrent plus dans les statistiques officielles.
Dans le cadre de son « refonte majeure » de l’assurance-chômage, le gouvernement Macron avait annoncé début septembre, quelques jours avant que le président dénonce « les fainéants », qu‘il allait renforcer le dispositif mis en place Hollande en quintuplant le nombre des contrôleurs. Le but était de rendre les contrôles « drastiques ». Le 17 octobre, Pierre Gattaz, le président du syndicat patronal Medef, fustigeait dans la même veine les « profiteurs » et exigeait que les chômeurs soient soumis à un contrôle journalier pour « que le système soit incitatif à la reprise d'emploi ».
Le système actuel de contrôle et de radiation est déjà draconien. La radiation entraîne la perte pendant six mois ou un an des indemnités, le seul revenu du chômeur. S‘il n‘a pas d‘autre soutien, il se voit très vite dans l'incapacité de payer loyer, eau et électricité et de se nourrir convenablement. Il n‘a droit à la couverture médicale qu‘un an au maximum. Il perd ainsi graduellement toute chance de trouver un emploi décent, voire un emploi tout court.
Il peut être radié pour une raison ou une autre, s’il ne répond pas aux convocations ou refuse une « offre raisonnable d‘emploi », c‘est-à-dire un travail à des conditions bien inférieures à son dernier emploi, ou à ses qualifications, ou loin de son domicile et de sa famille. Il est en fait pressé d‘accepter n‘importe quoi et de rester à la disposition de l‘agence en permanence. Une « fausse déclaration » pour éviter une radiation est déjà punie d‘une radiation d‘un an et d‘une amende de 3.750 euros, somme énorme pour un chômeur.
Les pressions sur les chômeurs sont d‘autant plus grandes que Pôle Emploi fonctionne avec des opérateurs privés chargés d‘organiser stages, formations et autres mesures censées favoriser un « retour à l‘emploi » et qui font automatiquement « du chiffre ».
Les nouvelles mesures de contrôle des chômeurs ont surtout pour but d‘aider à « flexibiliser » les salariés et à ancrer dans l‘économie une masse de travailleurs qui doivent travailler à des conditions n‘ayant plus aucun rapport avec ce qui est jugé acceptable par la majorité des salariés jusqu'ici. Il s‘agit de les faire rivaliser avec les salaires et les conditions d‘exploitation des travailleurs en Europe de l‘Est, en Afrique du Nord ou en Asie du Sud-est.
La classe dirigeante entreprend l‘extension massive du marché du travail à bas salaire alors que le niveau de pauvreté atteint déjà des proportions catastrophiques. Le 9 novembre, l‘organisation caritative Secours Catholique, qui s‘est occupée en 2017 de près d‘un million et demi de pauvres, a publié son rapport annuel où elle analyse la pauvreté et reprend les chiffres de l‘Insee, selon laquelle à 9 millions de personnes, soit 14 pour cent de la population, ceux qui vivent sous le seuil de pauvreté (un peu plus de 1000 euros mensuels).
Les gens accueillis par le Secours Catholique avaient un revenu mensuel moyen de 548 euros, qui n‘avait augmenté que de 3 euros en 6 ans; 19 pour cent n‘avaient aucune ressource, 42 pour cent ne pouvaient payer leur loyer, 41 pour cent l'électricité ou le gaz, 22 pour cent étaient à découvert avec leur banque, 17 pour cent ne pouvaient pas payer leur eau, 56 pour cent avaient du mal à se nourrir. Le rapport souligne « une précarisation croissante des familles ». 53 pour cent étaient étrangers sans statut légal stable, n‘ayant donc pas le droit de travailler ni de toucher des aides sociales.
La publication récente des « Paradise papers », qui lève un peu le voile sur le détournement massif de ressources financières par les super-riches, souligne aussi le mépris froid de l'aristocratie financière et de ses serviteurs politiques Les documents montrent comment les lobbys spécialisés dans les affaires « offshore » s‘activent auprès des gouvernements pour empêcher que d‘éventuelles lois destinées à boucher des échappatoires fiscaux ne voient le jour.
Parmi les grands groupes français qui sont apparus dans les Paradise papers, il y a le géant pétrolier Total, le producteur d‘avions Dassault, le géant des matières premières Louis-Dreyfus, le PDG des produits de luxe LVMH Bernard Arnault, et le trust de l‘énergie Engie.
Alors que les super-riches massent hors de portée du fisc des centaines de milliards d‘euros, le gouvernement Macron a l‘audace, après avoir supprimé L’Impôt sur la fortune (ISF), de vouloir augmenter les radiations de chômeurs, les privant de leurs indemnités parce qu‘ils refusent la misère et la destitution sociale qu‘on leur prépare.
Le sénateur LR Gérard Longuet résumait le mépris des élites financières et de leurs représentants vis-à-vis des chômeurs et des pauvres, lorsqu‘il a dit le 6 novembre sur la chaîne Public Sénat: « Si ces centaines de milliards d’euros ne viennent pas dans les caisses de l’État, tant mieux, parce que l’État les gaspille assez largement et dépense de l’argent inutilement. »