La campagne du Comité international de la Quatrième Internationale pour défendre les travailleurs de Maruti Suzuki en Inde victimes d'un coup monté gagne l'appui des travailleurs de l'auto en Amérique du Nord.
Le 18 mars, le tribunal de district de Gurgaon, dans l'État d'Haryana au nord de l'Inde, a condamné à la prison à vie 13 travailleurs de Maruti Suzuki sous de fausses accusations de meurtre et a condamné 18 autres travailleurs à de lourdes peines de prison sous des chefs d'accusation moindres.
La poursuite dirigée contre les travailleurs de Maruti Suzuki a été fabriquée par le constructeur automobile multinational, en collaboration avec des représentants de l'État pour faire un exemple de ces travailleurs. Leur seul crime a été de lutter contre les conditions brutales qui existent chez le plus grand constructeur automobile de l'Inde. Le CIQI, qui a lancé une pétition en ligne, exhorte les travailleurs et les jeunes de par le monde de lutter pour leur libération.
Des reporters du World Socialist Web Site ont parlé à des travailleurs de la région de Detroit ainsi qu'à des travailleurs de l'Ontario, au Canada, sur l'importance de la campagne en défense des intérêts de la classe ouvrière dans son ensemble.
Une équipe du Socialist Equality Party (SEP) s'est entretenue vendredi avec des travailleurs de l'usine d'assemblage de camions de Warren de Fiat Chrysler au nord de Detroit. Elle a distribué des exemplaires de la plus récente WSWS Autoworker Newsletter avec une déclaration sur l'affaire Maruti Suzuki.
Une jeune travailleuse a dit au WSWS qu'elle était «horrifiée» par les faits du coup monté de Maruti Suzuki qu'elle venait tout juste d'apprendre. «Ils ne veulent pas qu'on soit au courant de tout cela. Il semble que le syndicat s'est rangé du côté de la direction.»
Un autre jeune travailleur s'est arrêté pour parler au WSWS. Il a affirmé: «Nous voulons tous la même chose, et nous sommes forts unis. Ils nous disent toujours qu'ils vont envoyer nos emplois à l'étranger, c'est pourquoi je pense que l'unité internationale est importante. Personne ne devrait être forcé de travailler dans un milieu non sécuritaire.»
Le travailleur a dit qu'il appréciait la WSWS Autoworker Newsletter parce qu'elle gardait les travailleurs informés sur cette affaire et d'autres questions importantes. «C'est clair qu'elle nous informe de ce qui se passe. Ici, ils ne nous disent rien», dit-il, pointant vers l'usine, «sauf ce qu'ils veulent que nous sachions».
Plusieurs travailleurs ont noté le silence total des médias et du syndicat des United Auto Workers (UAW, Travailleurs unis de l'auto) sur l'affaire Maruti Suzuki. «Ils veulent nous garder dans l'ignorance là-dessus», a dit un travailleur. «Ils ne veulent pas que nous lisions pour apprendre la vérité.»
Jenny, une ancienne travailleuse temporaire à l'usine d'emboutissage d'Indianapolis de General Motor, s'est aussi portée à la défense des travailleurs de Maruti Suzuki. En 2010, les travailleurs de son usine ont lutté contre les baisses de salaire que leur imposait la société, avec la complicité de l'UAW. Les travailleurs ont gagné un appui partout dans le monde pour leur lutte.
«L'arrestation de ces travailleurs et les peines de prison à vie sont une campagne de peur pour les faire taire. Les travailleurs de Maruti Suzuki luttent pour ce qui leur revient.»
«Au début, le gouvernement indien voulait tuer les travailleurs, parce qu'ils avaient osé se tenir debout pour ce qui était juste. C'est effrayant. Ce pour quoi ils luttent fait paraître ce que nous avons connu à Indianapolis comme quelque chose de mineur. Nous avons tenu tête à GM et à l'UAW qui voulaient que nous acceptions une baisse de salaire de 50%. Ils ont fermé l'usine et nous avons dû nous diriger vers un autre État pour trouver du travail.
«Ça ne fait pas de différence – Américain ou Indien – il faut mettre ça de côté. Nous luttons tous pour des conditions de vie décentes, pour arrêter de nous sacrifier pour les compagnies et pour obtenir ce qu'il faut pour vivre. Les plus grosses compagnies utilisent la peur pour écraser les gens.
«On nous dit que les travailleurs des autres pays nous prennent nos emplois. Non. Ils ne font qu'essayer de vivre. Ils ont des bébés à nourrir et des factures à payer. La question n'est pas ce qui est “Fait en Inde” ou “Fait aux États-Unis”. Les compagnies et les syndicats nous disent de nous la fermer et d'être contents d'avoir un emploi. C'est ce que l'UAW nous a dit à Indianapolis. Non, nous ne sommes pas satisfaits. Nous voulons une vie décente, nous aussi.
«Ça va prendre une action mondiale de la classe ouvrière. Tout le monde dans chaque pays devrait sortir en grève pour une journée à travers le monde et tout s'effondrerait. Ils se rendraient compte que c'est grâce aux travailleurs qu'ils sont riches.»
Tiffany, une jeune travailleuse de Fiat Chrysler à Detroit, a dit: «J'ai signé la pétition et lu sur cette affaire. J'étais stupéfaite. Il y avait tellement de gens prêts à prendre position, à sortir en grève et à se tenir debout.
«C'est incroyable que 13 travailleurs aient été condamnés à la prison à vie. Ils se servent des travailleurs comme des boucs émissaires. Il n'y a aucune preuve qu'ils ont tué qui que ce soit. Ce n'est pas surprenant que le gouvernement américain appuie le gouvernement indien, car ils veulent faire la même chose avec nous ici.
«Les travailleurs en prison ont espoir et n'abandonnent pas. Ça en dit long sur leur caractère. Ils ont été condamnés à la prison à vie pour s'être tenus debout. Si le gouvernement indien pense que personne n'est au courant de cette affaire, il va essayer de s'en tirer sans conséquence. Nous devons partager leur histoire. Je ne savais rien de tout cela avant de lire le World Socialist Web Site. Il faut faire connaître cette affaire aux autres travailleurs.
«Les travailleurs américains de l'auto devraient leur prêter main-forte. Ça pourrait bien être nous dans cette situation. Ils sont là-bas et nous sommes ici, mais ça ne fait aucune différence. Leur lutte est notre lutte. Ils se sont tous tenus debout, ils n'ont pas flanché et ils ont lutté pour leurs principes.
«Les travailleurs américains peuvent apprendre beaucoup d'eux. Nous prenons position pour un temps, comme quand nous avons rejeté le contrat en 2015, mais quand on nous menace et qu'on nous enlève des choses, nous capitulons. Ce n'est pas ce que font les travailleurs en Inde. C'est le genre de conviction qu'il nous faut. Nous devons nous tenir debout comme eux. Il faut lutter jusqu'au bout. Les gouvernements et les syndicats comptent sur le fait qu'ils peuvent nous avoir à l'usure, mais ils ne réussissent pas avec les travailleurs en Inde.
«J'ai lu qu'un travailleur temporaire fait 214 $ par mois, la moitié de ce que fait un travailleur à temps complet. C'est horrible. Ce sont des sociétés qui font des milliards et elles ne nous donnent pas ce que l'on mérite – et nous serions censés de ne pas défendre nos droits?»
Sue, une travailleuse de l'usine d'assemblage de General Motors a Ingersoll, en Ontario, a aussi défendu les travailleurs de Maruti Suzuki. L'usine d'Ingersoll a été ouverte en 1989 en tant qu'entreprise commune de Suzuki et GM. Située au sud-ouest de Toronto, elle avait initialement le nom de Canadian Automotive Manufacturing, Inc. (CAMI). GM a entièrement pris la direction de l'usine en 2009 lorsque Suzuki s'est retirée, et a ensuite agrandi l'usine en 2016 après avoir reçu un demi-milliard du gouvernement en baisses d'impôt et autres avantages.
«Il me fait plaisir de parler contre l'entreprise. Suzuki partageait avant la propriété de cette usine avec GM. Nous avons lu un article sur les travailleurs de Maruti Suzuki et avons envoyé le lien à certains de nos amis dans l'industrie qui l'avaient vu annoncé dans les médias sociaux. Nous prévoyons l'imprimer et le distribuer à travers l'usine.
«Tout juste cette semaine, GM a renvoyé injustement quelques-uns des travailleurs temporaires à temps partiel. Notre direction a rendu la standardisation du travail impossible, mais elle punit ou renvoie des travailleurs à cause de ses propres erreurs.
«C'est une triste réalité où les travailleurs de l'auto sont accusés d'être paresseux et cupides par la société, leur propre syndicat et les médias. L'éthique et la morale des travailleurs occupent toute leur attention, tandis qu'ils ignorent les opérations ouvertement malhonnêtes et immorales de ces mêmes sociétés dans d'autres pays où ils exploitent des travailleurs.»
Bruce, un travailleur de l'auto à la retraite de l'usine Delta Township de General Motors près de Lansing, au Michigan, a dit: «Nous devrions être outrés par ce qui arrive en Inde. Nous avons les mêmes intérêts que ces travailleurs.
«Les tribunaux suivent la ligne corporative avec bien peu de preuves. Je ne peux pas croire qu'ils voulaient obtenir la peine de mort. Ils veulent utiliser cette affaire comme modèle à imposer partout à travers le monde.
«Il y a de la discrimination là-dedans. Le juge a même avoué que la preuve était problématique. Ça me rappelle un peu la situation à Flint en 1937 quand ils ont fait venir la Garde nationale. Ils avaient installé des mitrailleuses au sommet de la colline et des hommes de main essayaient d'intimider les travailleurs.
«Vous n'entendrez rien de cette affaire dans les médias américains, sauf sur le World Socialist Web Site. Le travailleur américain se fait dire depuis toujours que nous n'avons pas de classes, qu'il y a la mobilité sociale. Il faut se rendre compte que nous avons les mêmes intérêts que les travailleurs au Japon, en Corée et partout ailleurs.»
(Article paru en anglais le 25 mars 2017)