Plus de six ans après son adoption et presque quatre ans après son entrée en fonction, l'Affordable Care Act (ACA) est de plus en plus reconnu comme étant un désastre. Même ses défenseurs remettent ouvertement la viabilité du projet en question. Le fameux «accomplissement» du gouvernement Obama en politique intérieure n'est rien de moins qu'une combine élaborée par et pour les sociétés d’assurances et le patronat américain afin de réduire les coûts et augmenter les profits.
Comme le World Socialist Web Site l’expliquait déjà en 2009, la «réforme» du secteur de la santé communément appelée Obamacare érige un système qui permet aux compagnies d’assurances, aux entreprises et au gouvernement de réduire radicalement les prestations de santé offertes aux familles et personnes à faibles revenus.
Ceci a toujours été le but de la loi. La réduction des prestations et l’augmentation des coûts pour les familles travailleuses ne représentent pas les conséquences malheureuses d’un effort maladroit mais bien intentionné pour offrir à la population «un système presque universel de soins de santé de qualités», tel que le prétendait Obama lors de la création de la loi. Comme l'a admis récemment le New York Times, défenseur de longue date d'Obamacare, faisant référence au programme gouvernemental de santé minimal pour les pauvres, «[L]a vérité est qu’un plan typique Obamacare ressemble plutôt à Medicaid avec des franchises élevées.»
Selon le «mandat» de l'ACA, quiconque se trouve sans assurance maladie procurée par l’employeur, et sans Medicare ou Medicaid, est obligé de contracter une assurance au privé, sous peine d’une pénalité d’impôt considérable. Aujourd'hui, un nombre important de personnes peinent, si même elles y arrivent, à payer les primes exorbitantes exigées par les compagnies d’assurance privées pour leurs mauvais régimes, pendant que ceux qui en sont capables sont forcés de dépenser d’immenses sommes d’argent sans remboursement pour fournir des soins de santé limités à leurs familles.
Les régimes les moins coûteux sont accompagnés de franchises dépassant 5.000 $. Les réseaux rapetissent, ce qui force les membres à choisir parmi un éventail de plus en plus limité de médecins et d’hôpitaux. Des formulaires pour requête de médicaments barrent l’accès à des médicaments vitaux. Les assureurs demandent et reçoivent des augmentations de primes importantes pour leurs politiques d’assurances tout à fait inadéquates.
Le départ récent de la troisième société d’assurance maladie la plus importante, Aetna, d’une majorité des réseaux Obamacare à travers le pays là où elle offrait auparavant des régimes d’assurance a exacerbé cette tendance. Peu après le retrait des assureurs UnitedHealth et Humana du marché Obamacare, les conditions ont été créées pour que 17 % de ceux qui remplissent les conditions pour un plan ACA n’aient que le choix d’une seule compagnie d’assurances. Ce sera le cas dans cinq États au complet.
Dans un éditorial récent du Times, l’économiste Paul Krugman s'est plaint du fait que les compagnies d’assurances «perdent de l'argent parce que des Américains auparavant sans assurances s’avèrent être plus malades et ont besoin de soins de santé plus chers que prévu». Il a affirmé qu'il fallait «plus d'efforts pour s'assurer que les Américains en santé contractent une assurance, comme le requiert la loi, plutôt qu'attendre d'être malade» – en d’autres mots, augmenter les pénalités d’impôt déjà importantes pour ceux qui ne contractent pas d’assurance.
La «magie» du marché Obamacare a démontré le degré auquel l'ACA est subordonné aux intérêts de profit des sociétés d’assurances valant des milliards de dollars – au détriment de la vie et du bien-être de la vaste majorité de la population. Ce sont elles qui prennent les décisions. Il n’y a pas de véritable réglementation pour baliser leurs régimes, c’est pourquoi elles augmentent les primes. Si elles ne réussissent pas à générer des profits qu'elles jugent adéquats sur le marché ACA, elles se retirent tout simplement.
Bien que loi oblige des personnes telles que des travailleurs, étudiants, etc., à transférer de l’argent aux compagnies d’assurance, les patrons et les banquiers sont libres de faire ce qu’ils veulent.
La candidate présidentielle démocrate Hillary Clinton défend Obamacare inconditionnellement et promet de «bâtir sur son succès pour rendre possibles des soins de santé abordables pour plus de personnes». Ses remarques cyniques selon lesquelles elle «ne tolérerait pas des augmentations de primes injustifiées» et qu’elle «limiterait les coûts non remboursables pour les familles» sont tout aussi crédibles que ses mensonges concernant ses courriels.
L’édifice de la réforme Obama en entier est basé sur un système de santé à profit en Amérique, qui n’inclut pas seulement les compagnies d’assurance, mais aussi les hôpitaux géants, les chaînes de soins de santé et les compagnies pharmaceutiques. Dans la mesure où Trump et les républicains s'opposent à l'ACA, ils proposent de se débarrasser de la tromperie Obamacare pour appuyer plus ouvertement le libre marché et l’industrie de la santé.
En fin de compte, il s’agit de différences tactiques entre les deux partis de la grande entreprise. Peu importe quel candidat occupera la Maison-Blanche en janvier, il ou elle va intensifier l'attaque contre les soins de la santé pour les Américains ordinaires. Cet assaut sur la qualité de vie des travailleurs continuera en tant que partie intégrale de l’offensive de la classe dirigeante contre tous les droits sociaux de base, incluant le droit au travail bien rémunéré, l’éducation et le logement.
Comme l’écrivait le WSWS en juillet 2009, plus de six mois avant l’entrée en loi de l'ACA, l’initiative d’Obama «de réformer le système de santé, loin de représenter une réforme visant à procurer une assurance universelle et un accès amélioré aux soins de qualité, marque une attaque sans précédent sur la santé pour la population ouvrière. Elle vise à annuler les gains sociaux associés à la création de Medicare en 1965.
«Il s’agit d’une contre-révolution en santé, dirigée par les intérêts de profit des compagnies pharmaceutiques géantes, des conglomérats d’assurance et des chaînes d’hôpitaux, ainsi que ceux des entreprises, qui seront encouragées à mettre fin aux soins de santé pour leurs employés et à les forcer à souscrire à des régimes d’assurance offrant moins de couverture et exigeant des coûts non remboursables plus importants.»
Sept ans plus tard, nous pouvons faire le bilan et prouver la justesse de ces déclarations.
S’appuyant sur Obamacare, un nombre croissant d’employeurs augmente les quotes-parts et les franchises. Certains transfèrent leurs employés vers des marchés individuels basés sur le modèle de l'ACA, pendant que d’autres, incluant certains qui emploient des travailleurs du secteur public, les livrent au marché Obamacare.
Une étude de 2014 prédisait que l'ACA ferait économiser 3500 milliards $ aux entreprises jusqu’en 2025, largement en mettant fin aux assurances payées par les employeurs et en transférant les coûts d’assurance aux employés.
En janvier 2015, le département de la Santé et des services sociaux d’Obama a annoncé que des paiements aux hôpitaux et médecins pour un pourcentage considérable des soins de santé couverts par Medicare, le programme gouvernemental pour les personnes âgées, serait transformé du modèle traditionnel «tarif selon le service» vers des méthodes qui récompensent les fournisseurs de soins s’ils coupent les dépenses et rationnent les soins.
La moitié des paiements directs vers des fournisseurs Medicare doivent être transférés vers ce modèle d'ici 2018. Les sacrifices demandés aux prestataires de Medicare – supposément au nom de la «qualité» et de la «valeur» – se traduiront par des traitements et des procédures en moins, et entraîneront des souffrances incalculables et des morts prématurées pour les personnes âgées.
De plus, l'ACA établit essentiellement un système de coupons, où des prestations gouvernementales minimes sont fournies aux personnes pour acheter une assurance maladie au privé. Il sert ainsi de modèle pour la privatisation future des programmes gouvernementaux essentiels, Medicare et Medicaid, arrachés à la classe dirigeante à travers les luttes ouvrières acerbes du siècle passé.
Comme nous le prédisions correctement en 2009, «La contre-révolution de la santé Obama et le reste de sa politique intérieure forment un tout. Elle accompagne le sauvetage au coût de milliers de milliards de dollars des banques, l’imposition de mises à pied de masse, la réduction des salaires et des avantages sociaux dans l’industrie de l’automobile, ainsi que l’attaque intensifiée contre l’éducation publique et les enseignants... Tout ce qui existe encore des réformes sociales des années 1930 et 1960 et des gains des générations passées des travailleurs résultant de leur lutte amère doit être effacé.»
Les affirmations de la pseudo-gauche selon lesquelles Obamacare contenait un grain progressiste ont été exposées comme des apologies pour ces politiques réactionnaires. Toute réforme progressiste et démocratique du système de la santé doit avoir pour point de départ la fin des entreprises de santé privées et de la médication pour le profit, et la socialisation de la santé, administrée démocratiquement par un gouvernement ouvrier, afin d’offrir des soins de santé de haute qualité gratuits pour tous.
(Article paru d'abord en anglais le 22 août 2016)